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Le pape et les artistes au milieu du XIVe siècle. Réflexions sur les notions d’acteur et d’institution

Etienne Anheim

Résumé
L’article étudie les liens entre acteur(s) et institution(s) en se basant sur l’exemple du mécénat du pape Clément VI (1342-1352). Il s’attache à montrer comment l’acteur modèle l’institution dont il est partie prenante et, inversement, comment l’institution peut modeler les formes de l’action individuelle. Ces éclairages aboutissent à une réflexion sur ces deux notions opposées, auxquelles les historiens se heurtent. Les difficultés méthodologiques ressenties découlent peut-être d’un manque d’attention donnée aux systèmes de règles – variables selon les institutions et susceptibles d’adaptation par les individus – qui se trouvent entre l’acteur et l’institution.

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Acquérir, partager et contrôler l’information sous le règne de Philippe III d’Espagne. Le cas de l’historiographe royal Antonio de Herrera (1549-1626).

Fabien Montcher

Résumé
Cet article analyse les pratiques de l’historiographie officielle entre la fin du XVIe siècle et les débuts du XVIIe siècle au sein de la monarchie hispanique. Antonio de Herrera y Tordesillas fut historiographe du roi. Il fut le seul cronista de sa génération à occuper ce poste durant trois règnes successifs. Sa longévité en tant que démiurge de l’histoire officielle s’explique en grande partie par l’utilisation qu’il fit de l’information politique. Ses usages de l’information tentèrent de réformer une historiographie officielle qui, d’une part, avait atteint son apogée, d’autre part, avait pris conscience de la nécessité de se reformer dans un nouveau contexte politique où la connaissance du temps présent devenait déterminante pour contrôler l’actualité politique.

Mamma li Turchi ! Politique et religion face à la menace turque (Frioul, Italie, XVe-XVIe siècles).

Andrea Martignoni

Résumé
Entre la fin du XIVe siècle et la première moitié du XVe siècle, Venise se lance dans une progressive et méthodique conquête des territoires continentaux donnant naissance à ce qu’on appelle la Terre Ferme, autrement dit le Stato di terra vénitien. La Patria del Friuli n’échappe pas à ces annexions. Gouvernée depuis des siècles, par le patriarche d’Aquilée, prince ecclésiastique et puissant seigneur féodal, tombe aux mains des Vénitiens en 1420 avec la reddition de la capitale Udine. Au même moment et pendant tout le XVe siècle et le début du XVIe siècle, le Frioul est sous le coup de la menace turque et subit même toute une série d’incursions meurtrières. Plutôt que de retracer de manière exhaustive l’histoire événementielle de cette présence ottomane au Frioul, l’article se propose de mettre en lumière les politiques adoptées par les autorités communales pour contrer ces menaces. Dans ces stratégies, la recherche de protecteurs spirituels tient une place de première importance tout comme le rituel processionnel à travers lequel demander la miséricorde divine, faire pénitence ou célébrer les victoires emportées contre les infidèles. Face à l’ennemi, un intercesseur spécial a été sollicité et honoré publiquement. Il s’agit de saint Joseph qui, de Venise au Frioul, apparaît donc comme le protecteur et le sauveur idéal des communautés pliées sous le joug des incursions ottomanes.

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« Marioles », « babouins » et « fyoles » : Eustache Deschamps veut débarrasser l’Église des idoles.

Laura Kendrick

Résumé
Le temps d’une ballade au refrain de « Telz simulacres n’aourons, » Eustache Deschamps, le poète de cour le plus prolifique du XIVe siècle, joue le purificateur du temple et ridiculise les statuettes religieuses, qu’il nomme « marioles », « babouins » et « fyoles ». Si sa crainte de l’idolâtrie et sa connaissance des critiques iconoclastes peuvent être attribuées à ses contacts avec certains des chamber knights à tendance Lollard de Richard II d’Angleterre, la réforme que Deschamps propose est néanmoins modérée : il conseille de ne garder que deux statues dans les églises, celle de la Vierge et celle du Crucifix. Des universitaires Parisiens influents à la cour de France, comme Pierre d’Ailly, feront écho à cette solution de modération.

Abstract
For the duration of a ballad to the refrain of « We will not worship such shams, » Eustache Deschamps, the most prolific court poet of the 14th century, played the purifier of the temple and ridiculed religious statuettes, which he called “mini-Marys”, “monkey business,” and “vials.” If the poet’s fear of idolatry and awareness of iconoclast criticism may be traced to his contacts with certain of Richard II of England’s chamber knights of Lollard persuasion, the reform Deschamps proposed was nevertheless moderate : he advised keeping only two statues in churches, that of the Virgin and that of Christ on the Cross. Parisian university men influential at the court of France, such as Pierre d’Ailly, would echo this moderate solution.

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