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Moines et pouvoir seigneurial : la justification de la domination des monastères dans le Pays de Vaud à la veille de la Réforme (vers 1450-1550)

Ian Novotny

 


Doctorant en histoire médiévale à l’Université de Lausanne (UNIL), Ian Novotny est l’auteur d’un mémoire publié en 2023 dans la collection des Cahiers lausannois d’histoire médiévale (CLHM), intitulé Des chapons à l’eau bénite : vie quotidienne et alimentation des moines de Payerne à la fin du Moyen Age (XIVe-XVIe siècles). Sa thèse de doctorat, actuellement en cours, porte sur la vie interne et la fonction sociale des grands monastères du Pays de Vaud (Suisse occidentale) à la fin du Moyen Age et à la veille de la Réforme protestante (milieu du XVe-début du XVIe siècle). Le présent article s’inscrit dans le cadre de cette recherche.


Introduction

Grands seigneurs fonciers, les monastères furent confrontés, aux derniers siècles du Moyen Âge, aux défis induits par les mutations sociales et économiques qui traversaient l’Europe occidentale. Dès le XIIIe siècle, les revenus des établissements monastiques s’affaiblirent parallèlement à l’augmentation des coûts d’exploitation des domaines ruraux et à la monétarisation croissante des échanges, liée en particulier à l’essor de l’économie urbaine. La peste, la crise démographique et les guerres qui dévastèrent l’Occident aux XIVe et XVe siècles portèrent un coup supplémentaire à l’assise matérielle des communautés monastiques. À l’instar des autres seigneurs ecclésiastiques, les monastères réagirent notamment en essayant de renforcer les liens de dépendance avec les populations rurales soumises à leur seigneurie[1].

Ce phénomène fut particulièrement marqué à la fin de la période médiévale dans le Pays de Vaud, région intégrée au duché de Savoie en tant qu’apanage des cadets de la famille, et située dans l’actuelle Suisse romande. En effet, les grands monastères vaudois de tradition bénédictine (les bénédictins, les clunisiens, les cisterciens et les chartreux) ainsi qu’augustinienne (les prémontrés) n’avaient pas pris part au « mouvement d’affranchissement » entrepris par les seigneurs laïcs durant la première moitié du XIVe siècle[2]. L’effort mené par certains établissements pour fixer les paysans à la terre eut pour conséquence la préservation, jusqu’au début du XVIe siècle, de poches de servitude. Celles-ci se caractérisaient par la présence d’hommes soumis à la taille à merci, un prélèvement seigneurial qui s’effectuait théoriquement de manière arbitraire[3]. Surtout, dans la plupart des seigneuries monastiques du Pays de Vaud, les paysans étaient soumis à un régime particulièrement dur de mainmorte, une prérogative qui permettait au seigneur de récupérer tout ou une partie des biens meubles et immeubles de l’un de ses dépendants décédé sans laisser de descendance directe. Pourtant, la reconnaissance de la condition de mainmortables – étendue également aux affranchis durant les XIVe-XVe siècles[4] –, voire de celle de taillables, ne fut pas toujours obtenue aisément par les monastères vaudois et ceux-ci durent parfois faire face à une opposition ouverte de la part des paysans.

Les préambules des registres de reconnaissances des biens monastiques

Dans ce contexte d’affermissement des rapports seigneuriaux, abbé et prieurs confièrent à des notaires la levée et la mise par écrit des reconnaissances de leurs biens tenus par chaque dépendant, ainsi que les redevances que ce dernier devait à son seigneur[5]. Le renouvellement de ces levées de reconnaissances avait lieu environ tous les 30 ans et aboutissait à la composition d’un d’un liber recognitionum, un registre spécifique appelé également « terrier » dans le domaine de la diplomatique[6]. La possession d’une copie écrite de l’ensemble des reconnaissances devait garantir aux monastères la perception de leurs revenus fonciers et leur permettait de réaffirmer leur domination sur la terre et sur les hommes. Pour chaque nouveau registre, les notaires – ou commissaires – étaient également chargés par les seigneurs de rédiger un préambule, appelé aussi prologue[7], qui devait justifier l’établissement et la fixation par écrit des reconnaissances au moyen de « considérations juridiques, religieuses, morales ou simplement de convenance[8] ».

Largement négligée par l’historiographie récente sur l’évolution des seigneuries ecclésiastiques[9] et le rôle de l’écrit dans l’administration seigneuriale[10], l’analyse des prologues des terriers nous paraît toutefois fondamentale pour l’étude des relations entre les monastères et les habitants des régions rurales aux derniers siècles de la période médiévale. Cet article, dont le contenu s’insère dans une plus large recherche en cours sur la fonction sociale et religieuse des établissements vaudois à la fin du Moyen Âge[11], se propose donc d’étudier le discours des préambules des registres de reconnaissances établis pour les biens des monastères du Pays de Vaud entre le milieu des XVe et XVIe siècles, lorsque le dernier couvent vaudois fut supprimé à la suite de la conquête bernoise de 1536[12]. Il s’agira d’identifier les procédés rhétoriques employés par les commissaires et de montrer de quelle manière ils permettent de justifier la composition des registres de reconnaissances. Une attention particulière sera portée à l’emploi de citations bibliques ou d’œuvres théologiques et philosophiques. Enfin , l’article mettra en évidence les liens entre, d’un côté, la composition de ces préambules justificatifs, et de l’autre, la contestation de la domination seigneuriale des monastères par les communautés rurales.

Présentation du corpus documentaire

Pour la période qui s’étend du début du XVe siècle au milieu du XVIe siècle, la plus grande partie des terriers conservés aux Archives cantonales vaudoises (ACV)[13] relatifs aux monastères du Pays de Vaud ne sont pas accompagnés de préambules – ceux-ci ayant de toute évidence été perdus après la suppression des monastères en 1536-1555 – ou débutent par des paragraphes introductifs peu développés, présentant essentiellement le contenu du registre, l’ensemble des localités visitées par le commissaire, ainsi que le commanditaire de la levée des reconnaissances et le notaire chargé de cette tâche.

Toutefois, un certain nombre de terriers (14 parmi les plus de 260 consultés, tous rédigés entre la fin des années 1440 et le début des années 1550) sont introduits par des préambules qui présentent aussi, en plus des éléments mentionnés ci-dessus, un discours justificatif rhétorique développé en plusieurs lignes[14]. Ce sont précisément ces parties (représentant une proportion variable par rapport au reste du préambule) qui seront au centre de l’analyse.

Rédigés en latin (à l’exception notable d’un seul), ces textes proviennent des terriers établis pour sept monastères appartenant à quatre ordres différents, à savoir les bénédictins, les clunisiens, les cisterciens et les prémontrés (cf. annexe 10).  Bien que présentant une certaine hétérogénéité, les préambules ont pu être classés au sein de quatre ensembles (A, B, C et D) constitués à partir de deux critères principaux : la similarité – et parfois même l’identité – lexicale, ainsi que le recours à des citations directes ou indirectes provenant du texte biblique ou d’autorités intellectuelles médiévales. Les annexes 1 à 10 présentent l’édition des dix prologues (les plus représentatifs de chaque ensemble de textes) sur lesquels s’appuiera l’analyse des procédés rhétoriques employés par les notaires afin de justifier la levée des reconnaissances.

Ensemble A 

Ce premier ensemble rassemble deux préambules rédigés à presque un siècle de distance. Le plus ancien de ces documents est extrait du terrier Ff 448 établi entre 1456 et 1459 par le chapelain et notaire d’Yverdon, Jean Viveys, pour les fiefs vaudois de l’abbaye cistercienne de Montheron (cf. annexe 1)[15]. Ces reconnaissances furent levées pendant le priorat de Jean Besson (1454-1486), qui procéda durant les mêmes années à l’affranchissement de taillables situés dans des localités proches de celles visitées par Jean Viveys pour la réalisation de ce registre[16]. Le deuxième texte est tiré du seul recueil du corpus rédigé en français, le Fc 155, composé en 1551 par deux notaires de Gruyère, Claude David et Jacques de Myensiez, pour les biens du petit prieuré clunisien de Rougemont (cf. annexe 2)[17] . Rédigé sous le priorat de Pierre de Gruyère (1538-1555), dernier supérieur de Rougemont et oncle de Michel, dernier comte de Gruyère, ce terrier s’inscrit dans une série d’au moins trois levées de reconnaissances effectuées pour Rougemont entre 1460 – peu après que les paysans du couvent furent affranchis de la mainmorte – et 1553 – deux ans avant la faillite du comté de Gruyère et son partage entre Berne et Fribourg[18].

Ensemble B 

L’ensemble B n’est constitué que d’un seul texte, classé à part en raison de sa spécificité (cf. annexe 3)[19]. Il s’agit du prologue inséré au début de la grosse (la copie définitive du registre) Fi 16 datant de 1460. Rédigé sous la direction du notaire de Cossonay, Jean Challet, ce registre rassemble les reconnaissances des biens liés au prieuré de Bassins, une dépendance de Payerne dont l’abbé était alors le commendataire Jean-Louis de Savoie (1451-1482). La condition des habitants des lieux visités n’était pas homogène : tandis que la majorité était composée de libres, ceux de Bassins étaient soumis à un régime de taille à merci[20].

 

Préambule du registre de reconnaissances du prieuré de Bassins ACV Fi 16, 1460, f. 1r-1v. (cf. annexe 3 pour l’édition du texte).

Ensemble C

Le troisième groupe de textes rassemble quant à lui six préambules. Parmi ceux-là, deux sont tirés de terriers rédigés pour l’abbaye cistercienne de Bonmont : l’un, datable au 28 décembre 1447[21], se trouve dans le registre Fi 243, rédigé sous l’abbatiat de Jean de Bourg (1447 ?-1473), et est relatif aux fiefs situés dans le Pays de Vaud occidental, dans le Genevois et dans l’Ain[22]; l’autre, daté du 28 juillet 1485, provient du recueil Fi 244, qui concerne les biens de l’abbaye localisés à Chéserex et à Gingins, et a été établi durant l’abbatiat d’Aymon de Divonne (1483-1536). Un troisième préambule, daté du 23 mai 1509, se trouve dans le registre fragmentaire Fg 364, rédigé pour le monastère bénédictin de Cossonay sous le priorat de Pierre Dullit (1481-1514), et est relatif aux fiefs situés au centre du Pays de Vaud[23]. Deux autres textes sont tirés de terriers payernois relatifs aux biens de la dépendance déjà mentionnée de Bassins, à savoir les registres Fi 199 – rédigé sous l’abbatiat de Jean-Amédée Bonivard (1507-1514) et dont le préambule date du 13 mars 1508[24] – et Fi 41 – établi sous Jean de La Forest (1514-1536) et introduit par un prologue daté du 10 février 1532[25]. Le dernier texte, daté du 1er décembre 1521, provient d’un autre terrier payernois (le Fk 517) qui concerne les revenus de l’église d’une autre dépendance : le prieuré de Baulmes.

Ensemble D

Parmi les cinq textes qui ont été regroupés dans le dernier ensemble, deux proviennent des archives de l’important prieuré clunisien de Romainmôtier. Le premier se trouve au début du registre Fj 137 (cf. annexe 5), qui rassemble principalement des reconnaissances levées dans la terre du monastère entre 1497 et 1499[26] (les années auxquelles nous pouvons faire remonter le prologue), suivies d’une copie du plaid général de 1266 datant de 1499, ainsi que de documents d’époque bernoise datant des années 1530-1540. Le deuxième texte est tiré du recueil Fj 6 (cf. annexe 6), établi en 1499 et relatif aux fiefs franc-comtois (remontant parfois au XIIIe siècle) de l’église et du prieuré de Romainmôtier[27].Commandités par l’abbé Michel de Savoie (1491-1521), ces deux registres furent réalisés respectivement sous la direction de Jean Mayor et d’Aymonet Pollens. Bien connu par l’historiographie vaudoise, ce dernier fut particulièrement actif dans la recherche et la copie de documents qui permettaient de légitimer les « prétentions juridiques » de l’établissement clunisien[28] .

De leur côté, les registres de l’abbaye prémontrée du Lac de Joux ont fourni trois textes rédigés après l’union du monastère jurassien avec Romainmôtier en 1514, sous l’abbatiat du commendataire Claude d’Estavayer (1519-1532). Deux de ces préambules – signés eux aussi par Mayor et Pollens – sont datés du 28 décembre 1520 et sont placés en têtes des deux grosses Fj 8 et Fj 9 relatives aux fiefs ruraux de l’abbaye situés dans le Pays de Vaud occidental (cf. annexes 7 et 8)[29]. Enfin, le dernier prologue, sans doute le plus original du corpus, est l’œuvre du seul Jean Mayor – se présentant ici en tant que clerc (clericum) – et se rattache au registre Fj 64, qui rassemble des documents divers (cf. annexe 9). Il s’agit avant tout de copies d’actes confirmant les droits temporels de l’abbaye : des copies d’accords avec l’abbaye de Saint-Claude et des confirmations de droits épiscopales, pontificales et impériales remontant au XIIe siècle, ainsi que des copies d’accords obtenus avec les taillables du Lieu à la suite du conflit avec l’abbaye, qui se termina à la fin du XVe siècle[30].Le reste du registre contient des reconnaissances de fiefs vaudois (dont ceux du Lieu) datant de 1526[31] – année à laquelle nous pouvons dater la rédaction du préambule –, suivies d’autres actes qui ne sont pas annoncés dans le prologue et qui ont probablement été ajoutés plus tardivement dans le registre[32].

L’écrit comme garant de l’ordre social

Les discours des prologues analysés présentent une caractéristique commune : l’exaltation de la capacité de l’écrit à fixer et à garantir la transmission de la mémoire des choses humaines, à savoir l’ordre juridique sur lequel était fondé l’ordre social (et donc la dépendance des paysans par rapport à leurs seigneurs). Néanmoins, les procédés rhétoriques mis en œuvre par les commissaires pour justifier la levée des reconnaissances varient selon les terriers et révèlent une certaine créativité de la part des notaires.

Ensemble A. La fiabilité de l’écrit pour assurer la mémoire des décisions passées

Les prologues tirés des terriers Ff 448 de 1456-1459 (cf. annexe 1) et Fc 155 de 1551(cf. annexe 2) débutent par une mise en garde contre les dangers qui guettent la mémoire des hommes, qu’il s’agisse de la « fourberie » et de la « prolixité » du siècle (mondi dolus aut temporum prolixitas[33] ) ou de la négligence due aux occupations mondaines, à savoir les negoces, empeschemens et affayres aulxquels l’homme est implicqué journellement[34]. Le recours à l’écrit, placé sous l’autorité des anciens dans le préambule de Rougemont, est présenté comme la seule manière d’assurer non seulement la transmission de la mémoire du passé aux générations suivantes (au posteres qui doisvent après venir et absens[35]) mais également leur adhésion aux décisions prises par les générations précédentes (memoria in posteros dirigantur et facilior de eisdem quociens reddatur probacio[36]). Particulièrement notable est l’insistance du préambule de 1551 sur le caractère d’authenticité et de fiabilité (des instruments auctentiques et fideles lettres… permanentes et durantes a tousjours[37]) que doivent posséder les documents écrits afin de remplir la fonction souhaitée.

Or, comme l’indique l’étude menée par François Menant sur les chartes de franchises siennoises du XIIIe siècle et celle de Joseph Morsel sur les chartes des territoires d’Empire aux XIIe-XIIIe siècles[38], la présentation de l’écrit comme l’instrument permettant de contrer les défaillances de la mémoire des hommes était plutôt fréquente dans les prologues des actes officiels médiévaux. Toutefois, l’intérêt des deux textes de l’ensemble A nous paraît résider paradoxalement dans leur caractère redondant. Ainsi, l’emploi répété d’éléments conventionnels suggère une véritable inquiétude de la part des commanditaires des registres quant à la bonne garde du contenu des actes rassemblés par les commissaires.

Ensemble B. L’ordre divin menacé par le vice de l’oubli

Une tonalité bien plus dramatique ressort de la lecture du préambule inséré au début du terrier payernois Fi 16 datant de 1460 (cf. annexe 3). Le prologue commence par rappeler les origines de la « fragilité humaine » (ab exordio fragilitatis humane)[39]. Les défaillances de la mémoire sont ainsi rassemblées sous le « vice de l’oubli » (oblivionis vicio) qui habite la nature déchue des êtres humains, héritée de celle d’Adam et Ève après la chute (prothoparentis nostri contaminata condicio), entraînant les pécheurs à la transgression, et donc à la punition de l’Enfer (divine dampnacionis eterne). Avec une grande emphase rhétorique et multipliant les formules, le préambule se poursuit avec l’évocation de l’instabilité et des conflits qui dérivent de l’état déchu des humains (repulularent recisa, suscitarent sopita, sepulta resurgerent). Ce sombre tableau continue avec une allusion à la menace que constituent ces tensions pour la transmission de la mémoire aux générations suivantes (modernis lucida obcura redderentur futuris). Le préambule rappelle enfin le choix de l’écriture pris dans le passé par des personnes « avisées » (prudentium) afin d’assurer la « préservation stable » (stabili preservacione) des « discours des parties » (sermones parcium) c’est-à-dire vraisemblablement du seigneur et des tenanciers mentionnés dans le registre.

À la différence des textes de l’ensemble A, le prologue du terrier payernois ne se contente pas d’insister sur l’utilité de l’écrit pour contrer la faiblesse de la mémoire humaine et de garantir sa transmission au fil des générations. Le début du préambule établit en effet un lien entre le « vice de l’oubli » et le risque de la damnation éternelle. Or, la peine de l’Enfer encourue par la postérité des « premiers parents » de l’humanité ne peut s’expliquer qu’en la faisant correspondre à une transgression de la volonté divine. Faisant obstacle aux défaillances de la mémoire, l’écrit est par conséquent élevé au rang d’instrument permettant de garantir le respect du dessein de Dieu et de l’ordre social dans lequel celui-ci se manifeste.

Ensemble C. La mission providentielle des spécialistes de l’écrit

Les six textes du troisième ensemble s’inscrivent dans une tonalité semblable à celle du préambule précédent. Nous avons choisi de nous concentrer sur un extrait du prologue contenu dans le terrier de Bonmont Fi 244, rédigé par les notaires Nicod Brassier et Gabriel Barilliet (cf. annexe 4). Le discours du préambule s’articule autour de deux axes. Premièrement, après l’habituel rappel de l’incapacité de la mémoire à garantir la perpétuité du souvenir des actes passés entre humains (res enim geste inter terrigenos), le texte met en exergue l’intervention providentielle de l’écrit, instrument confié à des spécialistes (personas auctenticas et publicas) par Dieu lui-même (stellifero orbis tocius Conditore). Deuxièmement, le préambule évoque la menace qui pèse sur l’ordre du monde, et cela en raison des dangers qui guettent « les possessions et les droits temporels » (substancias temporales acque dominia) des « dirigeants des peuples » (populorum rectores). Cas unique dans l’ensemble du corpus, parmi ces derniers sont aussi mentionnés les seigneurs ecclésiastiques : évêques, abbés et prieurs (episcopi, abbates, priores).

À la différence des sources précédentes, ce texte met explicitement en avant le rôle joué par une élite de spécialistes dans la conservation de la mémoire des actes juridiques. Au vu du contexte documentaire, il est aisé de les reconnaître dans les figures des notaires chargés de composer le registre. Leur monopole de l’écrit se trouve par ailleurs reconduit à une origine divine. Menacé dans ses fondements, l’ordre du monde, qui s’incarne dans la stabilité des possessions seigneuriales, est soutenu par l’action de ces spécialistes. Ainsi, par l’évocation d’une préoccupation divine pour l’ordre temporel, le préambule en vient à justifier l’existence de deux élites : celle des notaires et celles des seigneurs.

Plusieurs éléments suggèrent l’insertion de ce type de préambules dans le contexte régional de la fin du Moyen Âge. Les archives d’une autre grande abbaye romande, celle des chanoines augustins de Saint-Maurice d’Agaune, conservent en effet un document présentant un texte identique à ceux rassemblés dans l’ensemble C. Il s’agit du prologue du terrier rédigé en 1508 par le notaire Jean Défago pour les biens de la sacristie du monastère valaisan[40]. L’hypothèse d’une typologie régionale de ce type de préambules est suggérée aussi par la mention du même commissaire et secrétaire ducal de la cour de Savoie, Gabriel Barilliet, de Gingins, dans la moitié des textes de ce troisième ensemble[41], auquel nous pourrions associer le notaire Jacques Gibert, lui aussi originaire de Gingins[42].

Ensemble D. Le don divin de l’intellect et le « remède des lettres »

Quant au dernier ensemble, celui-ci regroupe certainement les cinq textes les plus créatifs du corpus. Leur originalité se situe certainement dans l’emploi fréquent – et libre – de citations tirées des Ancien et Nouveau Testaments, et dans les renvois explicites à deux auteurs fondamentaux pour la culture médiévale, à savoir le philosophe grec du IVe siècle Aristote, et surtout le père de l’encyclopédisme médiéval, Isidore de Séville, évêque et père de l’Église des VIe-VIIe siècles.

Les références à l’Ancien Testament : Salomon et l’Ecclésiaste

Dans quatre de ces préambules intervient la double référence au roi Salomon et au livre biblique que l’on considérait, au Moyen Âge, être l’une de ses œuvres : l’Ecclésiaste (ce dernier est encore cité dans un cinquième prologue). Figure ambiguë de l’Ancien Testament mais récompensée par Dieu avec le don de la sagesse, Salomon fut l’un des modèles du roi sage pour de nombreux princes chrétiens médiévaux[43].Les notaires Jean Mayor et Aymonet Pollens le mentionnent le plus souvent au début des préambules : ils le présentent comme bénéficiant de « l’esprit de prophétie » (spiritu prophecie fultus, cf. annexe 5), « savant et premier parmi les sages » (doctus prudentiumque precipuus Salomon et sapiens sapientium rerum, cf. annexes 7 et 8) et « roi de la paix » (rex pacis, cf. annexe 7). Ces qualificatifs viennent appuyer l’autorité de la citation de l’Ecclésiaste sur la succession des générations humaines opposées à la stabilité du monde :  generatio preterit geneatio advenit, terra autem in eternum stat (cf. annexes 5 à 8)[44].Un autre proverbe, plus célèbre, évoquant la corruptibilité ou « vanité » du siècle[45] est aussi indirectement cité dans les préambules des registres Fj 137 (de vanitate seculi, cf. annexe 5) et Fj 64 (ea que celi ambitu continentur vanitati subiacent et corrupcioni, cf. annexe 9).

Les références au Nouveau Testament : les épîtres de Paul et de Jacques

Pour ce qui est des références néotestamentaires, celles-ci apparaissent seulement dans les préambules des terriers du Lac de Joux Fj 8 et Fj 64. Dans le premier, le chapitre 15 de l’épître de Paul aux Romains est explicitement cité et immédiatement suivi d’une citation modifiée du verset 15,4 dans lequel est évoquée la nécessité de préserver dans la « pensée des hommes » tout ce qui avait été écrit pour leur édification : Romanorum 15 astruat quecumque scripta ad nostrarum fore doctrinam scripta hoc etiam mentis hominum abesse non debet (cf. annexe 7). Ce passage de l’épître a été habilement exploité par Jean Mayor et Aymonet Pollens pour le mettre au service de leur discours. Alors que, dans sa lettre, Paul mettait en avant l’utilité du recours aux Saintes Écritures pour nourrir l’espérance des chrétiens, dans le contexte du préambule son affirmation ne nous paraît prendre sens que si renvoyée plus généralement aux écrits laissés par les hommes durant les siècles et dont la préservation devait être garantie[46].

C’est toutefois dans le prologue du registre Fj 64 rédigé pour l’abbaye du Lac de Joux en 1526 qu’apparaît l’emploi de citations bibliques le plus audacieux (cf. annexe 9). Après avoir rappelé avec l’Ecclésiaste la « vanité » et la « corruption » des choses du monde, le texte oppose à ces dernières la perfection de Dieu, « premier semeur des choses » (rerum sator primus), ainsi que la puissance créatrice et ordonnatrice de sa Parole, par laquelle il aurait disposé les facultés propres à chaque créature « selon proportion » :  Qui eus encium virtutis Sue Verbo cuncta creavit ex nichillo, vires rebus imposuit et naturas secundum proporcionem disposuit.

C’est ensuite que le rédacteur attribue à Paul l’affirmation que le Verbe créateur aurait attribué aux êtres humains une « âme rationnelle » afin que ceux-ci soient « les prémices de toutes ses créatures » : Insuper hominum genus anima dotavit rationali, ut essemus prout ait Paulus inicium aliquod totius Sue creature. Or, si dans le verset originel – tiré en réalité de l’épître de Jacques (1, 18) – le titre de « prémices » est de manière plus vraisemblable attribué aux fidèles qui adhèrent à l’Évangile et annoncent ainsi la « nouvelle création » inaugurée par la résurrection de Jésus, au sein du préambule celui-ci est associé à la possession et donc, implicitement, à l’usage des facultés rationnelles par les hommes[47].Le préambule poursuit ultérieurement son discours sur l’intelligence humaine par une citation libre du verset 1, 20 de l’épître aux Romains par lequel l’apôtre des Gentils soutenait la possibilité, pour les païens, de connaître Dieu et ses « perfections invisibles » par l’observation et l’étude de la création, attribuant cette capacité de pénétration des « œuvres » divines aux facultés de l’intellect[48] : Quamvis enim immensitatis fontem summum nequeamus actingere invisibiliter, tamen eiusdem a creatura mundi per ea que facta sunt intellecta a nobis conspiciuntur (cf. annexe 9).

Cette conception – qui fait de l’âme rationnelle des hommes l’attribut premier de leur nature, qui les rapproche de la divinité – a caractérisé l’anthropologie développée par les principaux penseurs chrétiens antiques et médiévaux[49]. Toutefois, malgré son aspect traditionnel du point de vue de la culture médiévale, et en particulier universitaire, cette célébration de l’esprit humain étonne lorsqu’elle est replacée dans son contexte documentaire : un registre de reconnaissances de biens fonciers.

Suivi d’une louange au Créateur, cet éloge de la rationalité aboutit à l’évocation du « remède des lettres » et de l’instrument des copistes, le « stylet », permettant la transmission de la mémoire des actions passées aux générations présentes : Et priorum gesta oculis prensencium opponantur ; licterarum videlicet stilum adhibuit medelam (cf. annexe 9).

Le recours à deux grandes autorités de la culture médiévale : Aristote et Isidore de Séville

L’autorité de la Bible n’est pas la seule sur laquelle se sont appuyés les commissaires Mayor et Pollens pour développer leur discours au sein des préambules. Dans le terrier Fj 6 rédigé pour les biens de Romainmôtier (cf. annexe 6), Aymonet Pollens mentionne explicitement Aristote et le deuxième livre de son De generatione et corruptione, un traité de physique dans lequel le philosophe avait en particulier discuté la transformation des éléments constitutifs des étants corruptibles (animaux, plantes, minéraux etc.). Toutefois, le notaire se contente de résumer son propos en reprenant le titre de son traité : generatio et corruptio perpetuantur. Peu commenté par les auteurs scolastiques, ce traité gagna de l’importance aux XVIe-XVIIe siècle et fut même repris dans une perspective politique par le philosophe et juriste français Jean Bodin (1530-1596)[50]. Ainsi, malgré l’emploi parcimonieux qu’en fait Aymonet Pollens, la mention de ce traité révèle l’insertion – peut-être seulement marginale – du notariat vaudois dans les tendances culturelles de son temps.

Néanmoins, beaucoup plus important a été l’emploi par le clerc Jean Mayor des Étymologies d’Isidore de Séville, une œuvre encore largement présente dans la culture intellectuelle du bas Moyen Âge[51]. Mayor cite à deux reprises le chapitre 3, 1 du livre I (dédié à la grammaire) de l’œuvre d’Isidore[52] –, une première fois dans le préambule du terrier de Romainmôtier Fj 137, et une deuxième (légèrement modifiée) dans le prologue du registre du Lac de Joux Fj 64 (cf. annexes 5 et 9). La citation vient souligner encore une fois la faculté qu’ont les « lettres » de transmettre le discours des « absents » : « lictere sunt indices vocum et signa verborum, quibus tanta vis est, ut dicta nobis absencium sine voce loquantur ».

Placée à la fin de la partie rhétorique du préambule du Fj 64 (cf. annexe 9, f. 1r), la deuxième citation d’Isidore fait référence au chapitre 1, 31 du livre XV des Étymologies, consacré à l’architecture et à la topographie[53]. Cette citation indirecte évoque l’invention et l’emploi du papier (cartarum exortus viminum) pour la réalisation de documents écrits dans la ville égyptienne de Memphis. En rappelant l’origine et l’utilisation de l’écrit par l’ancienne et savante civilisation des Égyptiens, le préambule en parachève donc la célébration.

Ainsi, à l’instar des autres préambules analysés, les prologues de l’ensemble D convergent vers un seul objectif : faire l’éloge de l’écrit et de sa capacité à contrer les défaillances de la mémoire humaine. En déployant les références à l’Ecclésiaste, les auteurs ont souligné l’impermanence et l’instabilité auxquelles sont soumises les choses humaines, c’est-à-dire l’ordre juridique et social. De plus, ce constat a été appuyé sur la mention de figures d’autorité bibliques et philosophiques, tel que Salomon, roi sage par excellence, ainsi qu’Aristote. Nourri vraisemblablement d’une culture plus typiquement cléricale que celle d’Aymonet Pollens – révélée par son usage de la Bible et des Étymologies –, Jean Mayor s’est permis de développer davantage son apologie de l’écrit en le liant à l’usage de l’intellect, don fait aux hommes par le Créateur. De cette manière, le commissaire légitimait non seulement le « remède de l’écriture », mais en venait aussi à justifier sa fonction et celle de sa catégorie sociale, celle des notaires.

La contestation paysanne de la domination seigneuriale des monastères

Relativement tardive, la composition de ces préambules nous impose de nous interroger sur la nature des relations entre les moines et leurs paysans. Plusieurs exemples indiquent en effet que le travail des commissaires se fit dans un contexte de tensions, voire de conflits ouverts avec les tenanciers. Les heurts avaient surtout pour objet la contestation de la condition de mainmortables que les religieux essayaient d’imposer au plus grand nombre d’individus possibles parmi les habitants de leurs terres. Ayant lieu en particulier au XVe siècle, cet effort de généralisation de la mainmorte concernait aussi d’autres régions des Alpes occidentales et se concrétisait par la rédaction de nouveaux terriers dans lesquels était inscrite la nouvelle condition des tenanciers[54].Ainsi à Rougemont, en 1457, le conflit arbitré par le comte François de Gruyère vit l’affrontement du prieur clunisien et de ses hommes, ces derniers refusant de se reconnaître comme mainmortables. Comme l’explique bien Nicolas Carrier, la raison de l’opposition était claire : le prieur, souhaitant que ses paysans déclarent tenir ses biens sub conditione manus mortue et serve conditionis, assimilait mainmorte et servitude, ce qui plaçait les habitants de Rougemont dans une situation jugée honteuse par rapport à celles de habitants libres du village voisin d’Oex[55] .

Bien que n’ayant pas abouti à un conflit ouvert, une situation similaire était celle des habitants de la terre de Romainmôtier. En effet, bien qu’à la différence des habitants de Rougemont, les hommes de Romainmôtier étaient théoriquement considérés comme « libres », ils étaient dans la pratique soumis à une forte dépendance de leur seigneur, ne pouvant ni quitter la seigneurie, ni « jurer bourg, cité, ville ou château » sans l’accord du prieur[56] .Or, comme l’indique Danielle Anex-Cabanis, il s’agissait là d’obligations typiques du servage en place au XIIIe et XIVe siècles[57].Cet assujettissement imposé à des libres par un régime de mainmorte stricte était de toute évidence guidé par le souci du prieuré de maintenir la mainmise sur sa terre. Une telle condition diminuait fortement les capacités juridiques des tenanciers – puisqu’elle les empêchait de laisser un héritage – et nuisait ainsi grandement à leur possibilité de trouver une conjointe[58]. Devenu ainsi équivalent à la condition des taillables – tenus pour socialement inférieurs[59] –, l’état de mainmortables ne pouvait qu’être vécu comme vexatoire et ignominieux par les habitants de Romainmôtier, comme en témoignent aussi bien Aymonet Pollens dans son mémoire sur la condition des hommes du prieuré[60], que les poursuites pour injures menées par ces derniers bien après la conquête bernoise, entre 1562 et 1582[61].

Sans aller jusqu’à la révolte, la lutte des tenanciers contre la tutelle monastique, comme l’a bien montré Vincent Corriol, pouvait prendre des formes « passives » qui se concrétisaient par des actes de désobéissance, voire de chantage[62] . À Baulmes, au début du XVe siècle, la plupart des habitants étaient libres, malgré l’existence de quelques taillables. Pourtant, au début du XVIe siècle, les hommes de prieuré dépendant de Payerne ne consentirent plus à l’obligation de se faire inhumer dans le cimetière de l’église paroissiale – l’une des dernières contraintes imposée par leur condition de dépendants – et « menacèrent de quitter la localité »[63], jouant peut-être aussi sur la concurrence entre seigneuries. Ils obtinrent gain de cause en 1516, la même année de l’affranchissement des derniers taillables de Baulmes[64]. Vraisemblablement soucieux d’assurer la stabilité de ses possessions, l’abbé payernois Jean de La Forest fit lever, cinq ans après, de nouvelles reconnaissances, rassemblées dans le terrier Fk 517 et introduites par un préambule évoquant les menaces qui guettaient les biens temporels des seigneurs et l’ordre du monde tout entier (cf. ensemble C).

Ailleurs, la contestation prit des formes plus violentes, comme l’illustre l’exemple de l’abbaye du Lac de Joux. Décidé à maintenir les habitants du Lieu sous un régime de taillabilité, en 1488 l’abbé Jean de Tornafol fut attaqué physiquement par ses dépendants[65] . Or, si ces derniers sortirent perdants du bras de fer avec le supérieur prémontré, soutenu par le conseil de Savoie, la rédaction d’un nouveau terrier en 1526 pour les reconnaissances des biens du Lieu indique peut-être que la mainmise de l’abbaye sur ses terres et sur ses hommes continuait à être menacée. De plus, le préambule du terrier Fj 9 de 1520 relatif aux fiefs vaudois de l’établissement déclarait explicitement que les droits et les biens de l’abbé s’étaient « effondrés » – proprium est ruinata (cf. annexe 8).

C’est par conséquent dans un contexte de remise en cause ouverte ou passive par les paysans de la tutelle monastique que les abbés et les prieurs du Pays de Vaud firent rédiger des terriers accompagnés d’un préambule justifiant la fixation par l’écrit des reconnaissances des biens des monastères et donc leur domination sur leurs dépendants et sur leurs terres.

Conclusion

L’examen des préambules commandités par les supérieurs des grands monastères vaudois entre le milieu des XVe et XVIe siècles a révélé un discours visant à légitimer les instruments de la domination seigneuriale et la fonction remplie spécifiquement par les commissaires. Cette légitimation se fondait le plus souvent sur l’exaltation de la permanence de l’écrit. Plusieurs notaires ont joint cette justification à la nécessité de garantir la stabilité d’un ordre social d’origine divine. D’autres, enfin, ont fondé leur défense des actes écrits sur l’autorité du texte biblique, d’Aristote ou d’Isidore de Séville. Si la fonction des préambules a pu être mise en évidence, la part respective des rôles joués par les commissaires et par les supérieurs des établissements dans le choix du contenu justificatif reste incertaine. Nous pouvons néanmoins supposer qu’une certaine liberté était accordée par les abbés et les prieurs aux notaires chargés de composer les registres de reconnaissances.

L’analyse a également mis en lumière les liens entre l’élaboration des préambules et les relations conflictuelles entre moines et paysans. Confrontés à la contestation d’un régime assimilable au servage, les supérieurs des établissement monastiques réagirent en réaffirmant leurs droits sur leurs possessions et leurs tenanciers. De surcroît, dès le premier quart du XVIe siècle, de nouvelles menaces virent inquiéter la pérennité du pouvoir temporel des monastères vaudois. En effet, en 1525, la guerre des Paysans allemands, influencée par des courants radicaux de la Réforme opposés aux privilèges des élites laïques et ecclésiastiques, s’étendit jusqu’aux régions alémaniques. Des couvents furent même pris d’assaut et l’autorité du prince-abbé de Saint-Gall fut contestée[66].

Quel que fut l’écho de ces bouleversements chez les religieux vaudois, ces derniers durent aussi faire face dès la fin des années 1520 à la prédication des réformateurs Farel et Viret et, même si les ministres calvinistes – à l’instar de Luther – ne contestaient pas le pouvoir des seigneurs, la nouvelle confession ne pouvait admettre l’existence d’une élite à la fois spirituelle et temporelle de chrétiens, incarnée par les moines et les frères mendiants. Ce fut Berne qui se chargea de concrétiser cette doctrine, en décrétant par le second édit de Réformation du 24 décembre 1536 la suppression du clergé catholique et de la vie régulière dans le Pays de Vaud[67].


Annexes

Annexe 1 : ACV, Ff 448, Extrait du préambule des reconnaissances des fiefs vaudois de Montheron, 1456-1459, f. 1r

In nomine Domini amen. Rerum mater experiencia prudenter edocuit actus et actiones hominum, scripturam conmicti custodie, ne exsufflare possit mondi dolus aut temporum prolixitas. Ymo itaque humana fragilitate actenta illas innovare decrevit et ea que per modernorum presenciam peraguntur licterarum testimonio conmendari, ut confectarum paginarum sermo et memoria in posteros dirigantur et facilior de eisdem quociens reddatur probacio […].

Annexe 2 : ACV, Fc 155, Extrait du préambule des reconnaissances des biens du territoire de Rougemont, 1551, f. 0r-0va

Proesme. A tous ceulx qui cis presentes verront, liront et ourront lyre. La grace et paix de Dieu le Père, par son seul filz Jesu Crist nostre seigneur, avecq la communication du Sainct Espryt soit donnée, amen. Et pource que la memoyre des hommes est labile, aussi[68] scavoir tout sans riens point oblier est chose plus divine que humayne, a rayson des negoces, empeschemens et affayres aulxquels l’homme est implicqué journellement. Pour laquelle chose les anciens, par meure deliberacion et providence, ont decreté, estably et ordonné que les actes et contractz faictz entre les humains soyent redigés et mys par escript affin que le bon tesmognage des instrumens auctenticques et fideles lettres ont aye tousjours memoyre de telz actes et contractz, et ce que la fragilité de humayne memoyre ne peult longuement retenir et en aurir souvenance, sinon par escriptures autenticques, permanentes et durantes / a tousjours, mais non seulement aux modernes et presens, mais aux posteres qui doisvent après venir et absens […].

Annexe 3 : ACV, Fi 16, Préambule d’une grosse relative aux biens du territoire de Bassins, 1460, f. 1r-1v

Ihesus Maria. In nomine Domini, amen. Ab exordio fragilitatis humane, prothoparentis nostri contaminata condicio, jam oblivionis vicio circundata, in periculum tocius posteritatis sequute formam, Pro dolor! induit transgressoris in penam, incidens divine dampnacionis eterne. Cum igitur memorie virtutis insidians effrenus lapsavit per mondum et varia jam forent propter hoc scandala subsequuta repulularent recisa, suscitarent sopita, sepulta resurgerent et modernis lucida obscura redderentur futuris, adversus oblivionis dispendium de scripture suffragio prudentum cautela providit ut gestorum / ordine non corrupto sermones parcium dirigentur in posteros, et infuso ymagina virtutis effectu quo gesta fuere velud presencia futuris lucida stabili preservacione paterent. Ea propter ad eternam rei geste memoria sequitur extenta recognicionum feudorum, homagiorum, censuum, reddituum, usagiorum et aliorum serviciorum spectantum et pertinencium illustri ac reverendissimo in Christo patre et domino domino Johanni Ludovico de Sabaudia, apostolice Sedis prothonotario, commendatorioque et administratori abbatie et monasterii Paterniaci, Cluniancensis ordinis et membrorum eiusdem ad causam prioratus sui Bassini, Gebennensis dyocesis et membrorum eiusdem, per me Johannem Challeti de Cossonay, notarium auctoritate imperiali publicum, curiarumque illustrissimi principio domini nostri Sabaudie ducis, Ballmatus unandi et castellaniarum eiusdem juratum ab eodem reverendissimo in Christo patre commendatorio specialiter deputatum. Incepta et finita vigere commissionis de ipsis extenta michi factis diebus et annis inferius descriptis.

Annexe 4 : ACV, Fi 244, Préambule des reconnaissances des biens de Bonmont situés à Chéserex et à Gingins, 28.7.1485, f. 1r

[…] Quoniam memoria humani generis labilis est et oblivionis naufragio est subjecta, res enim geste inter terrigenos per discursus lapsa temporum possent ex labilitate predicta deperiri nec possent ad vetustatem debitam devenire, nisi per personas auctenticas et publicas opitulante stellifero orbis tocius Conditore tenaciter scripturarum custodire debite fuerint commendate. Ex qua causa, multa scandalla, lites, iurgia, rumores pariter et querele possent nasci et oriri venturis temporibus in seculo, domini namque magnates, nobiles, episcopi, abbates, priores et alii populorum rectores possent eorum substancias temporales acque dominia periclitanter perdere, ex quibus sequeretur tocius mondi latitudinem perturbari. Igitur prefati dominus abbas et religiosi, predicta sua extentas recogniciones et patrimonium dicti sui monasterii, debite ad rei geste memoriam in futurum habendam voluerint in formam publicam redigi per nos jam dictos commissarios […].

Annexe 5 : ACV, Fj 137, Préambule des reconnaissances et du Plaid
général de la Terre de Romainmôtier, 1497-1499, f. 0va-0vb

Quia sicut adeo spiritu prophecie fultus Salomon precipuus in suis proverbys de vanitate seculi[69], differens infert pro in hoc seculo[70] nulla repetitur constancia. Sed ut oculenter apparet, ea que aperitis cum omni industria et probitate aguntur successu die cunvergunt in oblivionem et confusionem, cum eciam ille adeo doctus superius nominatus Salomon, rex pacis, Ecclesiaste primo de corrupcione dictans : « generacio preterit generacio advenit, terra autem in eternum stat »[71]. Qua de causa prudentum cum cautela decrevit ea licterarum elementis eternari. Quam ut ayt Ysidorus libro primo capitulo tercio : « littere autem sunt indices rerum, signa verborum, quibus tanta vis est, ut nobis dicta absencium sine voce loquuntur[72]. » Expedit ergo diucius reminisci perpetuus et mors et oblivionis infectio quibus humana natura subjacet huius objecti elise reddantur et que per nos nunc aguntur posteriorum oculis infuturum reminiscantur et[73] appareant. Hac de causa nobiles burgenses et incole huius opidi et ville Romanimonasterii, in hoc volumine jura eorum informaciones documenta et recognitiones, tam ville quam confratriarum suarum Sancti Spiritus, Nicolai et eligi stipulari et signari jusserunt per providum virum Johannem Maioris notarium de Romanimonasterii et certos alios ut infra, a die quod de presente volumine fiat de eorum rebus et bonis unum corpus.

Annexe 6 : ACV, Fj 6, Extrait du préambule des reconnaissances
des biens de l’église de Romainmôtier situés en Franche-Comté,
1499, f. 3r

Sicut successu temporis homines oriuntur et inde ad terram corpora unde orta sunt recadunt, quo fit ut, nisi cauthela adhibita fuisset, ipsorum gesta etiam haberentur caute provisum est a maioribus nostris, quorum doctrina fulti sumus ut quod placeret servari vel diutus reminisci litterarum elementis eternaretur, nequeunt homines semper vivere. Sed ut ait ille peritorum supremus et egregius concionator Ecclesiastes : « generatio preterit generatio advenit, terra autem in eternum stat.»[74] Quod postea sentiens phillozophus Aristoteles secundo De generatione ait quod generatio et corruptio perpetuantur[75]. Hac occasione motus reverendus dominus Michael de Sabaudia, Sedis postolice prothonotarius et commendatarius perpetuus prioratus Romanimonasterii, pro se et conventu, eiusdem recognitiones jurium et bonorum que ipsa ecclesia Romanimonasterii habet in villis de Bannans, Sancta Columba, Vaul et Chantagrue voluit renovari per notarios subscriptos.

Annexe 7 : ACV, Fj 8, Extrait du préambule d’une grosse concernant des fiefs vaudois du Lac de Joux, 28.12.1520, f. 0vc

Cum ille nec tantum beatus sed ut pote ad celum raptus de Dei arcanis imbutus, Romanorum 15 astruat quecumque scripta ad nostrarum fore doctrinam scripta hoc etiam mentis hominum abesse non debet[76] , quod ille adeo doctus prudentiumque precipuus Salomon, rex pacis, interpretatus Ecclesiaste intercetera de corruptione dictans, erupit quod : « generatio preterit generatio advenit, terra autem ineternum stat[77] . » Prudentium enim cauthela decrevit ea que per nos aguntur posterorum oculis infuturum inservatur, licterarum elementis eternari quorum ad communem utillitatem expedit reminisci, quathenus et mors et oblivionis infectio quibus humana fragillitas subjacet huius objecti medio elise reddantur. Hac ratione motus, reverendus in Christo prior dominus Glaudius de Staviaco, Bellicensis episcopus. abbatiarum Altecombe et Lacus Juriensis commendatarius et dominus perpetuus, cui proprium est ruinata, restaurare tam in edifficiis quam titulis beneficiorum suorum, prout satis gesta sua multum apparent voluit, jura et predia census et reddictus dicte sue abbatie Lacus Juriensis restaurare, hanc presentem extentam villagiorum in hoc volumine descriptorum et etiam aliorum ad dictam abbatiam Lacus Juriensis pertinentis in certis aliis libris descriptorum jussit per juratos subscriptos stipulari […].

Annexe 8 : ACV, Fj 9, Extrait du préambule d’une grosse concernant des fiefs vaudois du Lac de Joux, 28.12.1520, f. 0r-0v

Non abdere cautum est ab antiquis ea licterarum elementis annotari que ad communem utillitatem neccessaria veniunt. Eum ille precipuus sapiens sapientium rerum Salomon cum Ecclesiastes jam diu est, eruperit quod : « generatio preterit generatio advenit, terra autem ineternum stat. »[78] Unde seniorium cautela advenit quod ea que presencialiter aguntur licteris commendari, ut ad posteros transseat cognitio preteritorum et que mos et oblivio adnullare conantur licterarum pratica adjuventur. Ac ratione motus, reverendus in Christo pater dominus et dominus Glaudius de Staviaco, Bellicensis episcopus, abbaciarum Altecombe et Lacus Juriensis commendatarius et dominus perpetuus, cui proprium est ruinata, restaurare tam edifficiis quam titulis bonorum benefictiorum suorum prout satis gesta sua multum apparent, volens jura predia census et reddictus dicte sue abbacie Lacus Juriensis renovari et restaurare, extentam presentem villagiorum in hoc parvo lumine descriptorum et eciam aliorum ad dictam abbaciam Lacus Juriensis pertinentis in certis aliis libris descriptorum jussit, per juratum subscriptum cuius commissionis tenor talis est.

Annexe 9 : ACV, Fj 64, Préambule d’un recueil composite (reconnaissances des habitants du Lieu de 1526, copies d’actes du XIIe siècle etc.), 1526, f. 1r-1v

Non ignoranter prudens ille et inter alios peritissimus Salomon Ecclesiastes primo ait quod ea que celi ambitu continentur vanitati  subiacent et corrupcioni[79] . Non enim comperitur quid quem perfectum nisi ille rerum sator primus. Qui eus encium virtutis Sue Verbo cuncta creavit ex nichillo, vires rebus imposuit et naturas secundum proporcionem disposuit. Insuper hominum genus anima dotavit rationali, ut essemus prout ait Paulus[80] inicium aliquod totius Sue creature. Quamvis enim immensitatis fontem summum nequeamus actingere invisibiliter, tamen eiusdem a creatura mundi per ea que facta sunt intellecta a nobis conspiciuntur[81] . Laus ergo Cristi Deo qui hominis firmavit nativitatez et deffective eius nature salubrem qua incorporata foveatur. Et priorum gesta oculis presencium opponantur ; licterarum videlicet stilum adhibuit medelam. Sane ut ait Ysidorus : « lictere sunt indices vocum[82] et signa verborum, quibus tanta vis est, ut dicta nobis absencium sine voce loquantur. »[83] Harum igitur suffragio usus in Memphi civitate Egipti, secundum eundem Ysidorum, cartarum exortus viminum[84] utilitati, inde succurrit nam quod ratum homines esse volunt cartis et in manibus statutus commendant. Et quia aliquando transferuntur et sepe translate dantur oblivioni, caute ydeo in uno volumine texi, ceperunt ut si forte ex universitate aliquid frustrari contingat corpus tamen integrum semper remaneat. Ea ideo motus racione, reverendus in Christo pater, dominus Glaudius de Staviaco, Dei et appostolice Sedis gracia Bellicensis episcopus et dominus abbaciarum Altecombe, Lacus Juriensis ac prioratus Romanimonasterii commendatarius, et dominus perpetuus Lausannensis dyocesis, in presenti volumine voluit et stipulando rogavit notari per me Johannem Maioris clericum de Romanomonasterio, auctoritatibus appostolica et imperiali notarium publicum et curiarum officialatus Lausanne et Ballmatus unandi juratum, recogniciones hominum de Loco et rerum suarum acque censuum et onerum annualium per ipsos debitorum dicte abbacie. Et quia nuper inter ipsum abbatem et dictos homines de Loco, occasione dictorum onerum orta fuit differendos et postea extitit medio tractatu sopita, ideo tractatus ipse ymo ad edifficacionem huiusmodi negocii jura antica dicte abbatie in quibus de dote de immunitate dicte abbatie tractatur in presenti volumine preponuntur. Et est sciendum quod recogniciones, quae sunt abbreviate per etc., debent extendi secundum tenorem et per clausulas prime recognicionis. Prout actestor ego ipse Johannes Maioris teste signo meo hic apposito. Idem Johannes Maioris[85]   commissarius. 

Annexe 10 : Principaux établissements religieux romands au bas Moyen Âge

Carte tirée de : Ernst TREMP, « Les réseaux monastiques » in Jean-Daniel MOREROD, Jean-Pierre FELBER, Agostino PARAVICINI BAGLIANI et Véronique PASCHE (dir.), Les pays romands au Moyen Âge, Lausanne, Payot, 1997, p. 157.


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[1] Vincent Corriol, « Le temporel ecclésiastique et sa gestion à l’heure de la monétarisation de l’économie » in Marie-Madeleine de Cevins, Jean-Michel Matz, Structures et dynamiques religieuses dans les sociétés de l’Occident latin (1179-1449), Rennes, PUR, 2010, p. 464-465.

[2] Danielle Anex-Cabanis, Le servage au Pays de Vaud (XIIIe-XVIe siècle), Lausanne, Bibliothèque historique vaudoise, 1973 (Bibliothèque historique vaudoise, 47), p. 313-315.

[3] Jean-François Poudret avec la collab. de Marie-Ange Valazza Tricarico, Coutumes et coutumiers : histoire comparative des droits des pays romands du XIIIe à la fin du XVIe siècle. Partie II : Les personnes, Berne, Staempfli, 1998, p. 420, 559.

[4] Nicolas Carrier, Les usages de la servitude : seigneurs et paysans dans le royaume de Bourgogne (IVe-XVe siècle), Paris, PUPS, 2012, p. 322.

[5] Maria Milagros Cárcel Ortí (éd.), Vocabulaire international de la diplomatique, Valencia, Universitat de València, 1994, p. 113.

[6] Ibid., p. 114.

[7] D’après Michel Parisse, « on peut aussi appeler ‘‘prologues’’ ces textes liminaires, qu’il convient de distinguer nettement de ce qui suit aussitôt et qui est souvent une présentation des circonstances d’établissement de l’acte […] ». Cf. Michel Parisse, « Préambules de chartes » in Jacqueline Hamesse (éd.), Les prologues médiévaux : actes du Colloque international organisé par l’Academia Belgica et l’École française de Rome avec le concours de la F.I.D.E.M. (Rome, 26-28 mars 1998), Turnhout, Brepols, 2000 (Textes et études du Moyen Âge, 15), p. 141.

[8] Maria Milagros Cárcel Ortí (éd.), Vocabulaire international de la diplomatique, op. cit., p. 56-57.

[9] Cf. notamment Didier Méhu, Paix et communautés autour de l’abbaye de Cluny (Xe-XVe siècle), Lyon, PUL, 2001 ; Vincent Corriol, Les serfs de Saint-Claude : étude sur la condition servile au Moyen Âge, Rennes, PUR, 2010.

[10] Cf. Monique Bourin, Pascual Martínez Sopena (éd.), Pour une anthropologie du prélèvement seigneurial dans les campagnes médiévales (XIe-XIVe siècles) : les mots, les temps et les lieux, Colloque tenu à Jaca du 5 au 9 juin 2002, Paris, Publications de la Sorbonne, 2007 ; Harmony Dewez, Lucie Tryoen (dir.), Administrer par l’écrit au Moyen Âge (XIIe-XVe siècle), Paris, Éditions de la Sorbonne, 2019 (LAMOP, 6).

[11] Ma thèse de doctorat en cours, réalisée à l’Université de Lausanne (UNIL) sous la direction du Prof. Bernard Andenmatten, s’intitule Vie conventuelle et fonction sociale des monastères vaudois à la fin du Moyen Âge (XVe-XVIe siècles).

[12] Il s’agit du prieuré clunisien de Rougemont, supprimé en 1555.

[13] Chavannes-près-Renens (Canton de Vaud, Suisse), ACV, section F, Terriers, fonds : Fb, Généralités sur les terriers pour le Pays de Vaud ; Fc, Gouvernement d’Aigle et Gessenay ; Fd, Hôpital de Villeneuve ; Fe-Fee, Baillage de Vevey et Chillon ; Fg, Bailliage de Morges ; Ff, Bailliage de Lausanne ; Fh, Bailliage d’Aubonne ; Fi, Bailliage de Nyon et Bonmont ; Fj, Bailliage de Romainmôtier ; Fk, Bailliage d’Yverdon ; Fm, Gouvernement de Payerne ; Fn, Bailliage de Moudon ; Fo, Bailliage d’Oron ; Fp, Bailliage d’Echallens ; Fq, Bailliage de Grandson ; Fr, Canton de Fribourg ; Ft, Cantons de Berne et Neuchâtel ; Fu, Cantons de Genève, départements de l’Ain et de la Haute-Savoie.

[14] L’indication des feuillets ou des pages des registres mentionnés ne concerne que les parties des préambules étudiés dans le cadre de cet article.

[15] Il s’agit des fiefs situés à Cugy, Morrens, Bretigny-sur-Morrens, Bottens, Poliez-Pittet, Poliez-le-Grand, Boussens, Oulens-sous-Échallens, Assens, Les Chavannes-près-Échallens, Échallens, Éclépens, Villars-Sainte-Croix, Villars-le-Terroir, la grange du Buron (Villars-le-Terroir) et Vuarrens.

[16] Jean Besson procéda à l’affranchissement des taillables de Froideville en 1456 ainsi que d’une partie des habitants de Boulens en 1457 et 1461. Cf. Isabelle Bissegger-Garin, « Montheron », in Patrick Braun et Cécile Sommer-Ramer (éd.), Die Zisterzienser und Zisterzienserinnen, die reformierten Bernhardinerinnen, die Trappisten und Trappistinnen und die Wilhelmiten in der Schweiz, Berne, Franck Verlag, 1982 (Helvetia Sacra III/3/1), p. 336-337.

[17] Il s’agit des fiefs situés à Les Allamans (Rougemont), Le Vanel (Rougemont) et La Condémine (Rougemont).

[18]  Pierre-Yves Favez, « Rougemont », in Hans-Jörg Gilomen (éd.), Die Cluniazenser in der Schweiz, Bâle; Francfort-sur-le-Main, Verlag Helbing & Lichtenhahn, 1991 (Helvetia Sacra III/2), p. 614-616, 640-641.

[19] Signalons néanmoins que son contenu est reproduit de manière identique dans le prologue du registre ACV. Fi 245, rédigé en 1490 et rassemblant les reconnaissances des biens de l’église de Gingins. Bien que cette dernière fût placée dans le territoire de l’abbaye de Bonmont et que son abbé, Aymon de Divonne, fût lié à la famille noble de Gingins (branche collatérale des Divonne), elle ne figure pas parmi les églises soumises au patronat de l’abbaye à la fin du XVe siècle. Cf. Kathrin Utz-Tremp, « Bonmont », in Patrick Braun et Cécile Sommer-Ramer (éd.), Die Zisterzienser und Zisterzienserinnen, op. cit., p. 87-127.

[20] Germain Hausmann, « Bassins », in Hans-Jörg Gilomen (éd.), Die Cluniazenser in der Schweiz, op. cit., p. 462-463. Cette grosse rassemble les reconnaissances levées à Trélex, Begnins, Vich, Marsins (Vich), Volota (Le Vaud), Le Vaud, Luins, Bassins et Marchissy.

[21] La date de rédaction de ce préambule n’est pas indiquée, mais elle a été estimée à partir des dates des reconnaissances qui suivent le prologue.

[22] Il s’agit des fiefs localisés à Chéserex, Gingins, Duillier, La Rippe, Collex (Collex-Bossy, Genève), Saint-Jean de Gonville (Ain), Cessy (Ain), Vésenex (Ain), Chavannes-de-Bogis, Grange-de-Bogis (Bogis-Bossey), Tutegny (Ain), Céligny, Versoix, Divonne (Ain), Crassier et Chavannes-des-Bois.

[23] Il s’agit des fiefs de Cossonay, La Chaux, Allens (Cossonay), Sullens, Dizy, Chavannes-le-Veyron, Senarclens, Aclens, Vullierens, Lonay, Penthaz, Penthalaz, Lussery, Crissier, Perroy et Daillens.

[24] Le registre Fi 199 contient les reconnaissances levées à Burtigny, Begnins, Gland, Nyon, Gingins, Givrins, Genolier, Volota (Le Vaud), Le Vaud, Bassins, Luins, Trélex, Vich, Clarens (Vich) et Marchissy.

[25] Le registre Fi 41 rassemble les reconnaissances levées à Trélex, Gingins, Givrins, Vich, Begnins, Burtigny, Marchissy, Luins, Vaux-sur-Morges, Le Vaud et Bassins.

[26] Les reconnaissances de 1497-1499 furent levées à Romainmôtier, Croy, Bofflens, Arnex, Bretonnières, Premier, Vaulion, Envy, Juriens, La Praz et Mont-la-Ville.

[27] Il s’agit des fiefs localisés à Bannens, Chantegrue, Sainte-Colombre et Vauz.

[28] Alexandre Pahud, Le couvent de Romainmôtier du début de l’époque clunisienne à la fin du XIIe siècle : étude archivistique, diplomatique et historique, suivie de l’édition du chartrier, Lausanne, Société d’histoire de la Suisse romande, 2018 (MDR, t. 16, 4e série), p. 25-26. Pollens composa également un mémoire – datant probablement de 1497 et analysé par Jean-François Poudret – sur la condition des habitants de la Poté de Romainmôtier, auquel il ajouta un préambule détaillant l’histoire du monastère et de ses droits temporels, édité par Frédéric de Charrière. Cf. « Notice du Commissaire Aymonnet Pollens sur le Monastère de Romainmotier » in Frédéric de Charrière (éd.), Recherches sur le couvent de Romainmôtier et ses possessions, Lausanne, M. Ducloux, 1841 (MDR, t. 3, 1e partie), LXXIII, p. 807-810. Pour le mémoire de Pollens, cf. BCUL, Miscellanea, F 991, p. 60-73 ; Jean-François Poudret, « La condition personnelle des habitants de la Terre de Romainmôtier : remarques à propos d’un mémoire du commissaire Pollens », in Jean-Daniel Morerod (dir.), Romainmôtier : histoire de l’abbaye, Lausanne, Bibliothèque historique vaudoise, 2001 (Bibliothèque historique vaudoise, 120), p. 195-203.

[29] Le registre Fj 8 rassemble les reconnaissances des fiefs de Cuarnens, Chavannes-le-Veyron, Villars-Bozon (L’Isle), Pampigny, Cottens, Ballens, Mollens, Montricher, L’Isle, La Coudre (L’Isle), Mont-la-Ville, La Praz et Moiry. De son côté, le Fj 9 concerne les fiefs d’Orbe, Orny, Saint-Didier (Pompaples), Pompaples, Rances, Chavornay, Épendes, Suchy, Échallens, Polier-le-Grand, Bioley-Orjulaz, Oulens-sous-Échallens, Éclagnens, Penthéréaz, Villars-le-Terroir, Goumoëns-la-Ville et Bettens.

[30] Les confirmations des droits du Lac de Joux contenues dans le Fj 64 ont été éditées par Claire Martinet dans L’abbaye prémontrée du Lac de Joux : des origines au XIVe siècle, Lausanne, UNIL, Fac. des lettres, Sect. d’histoire, 1994 (CLHM, 12).

[31] Les reconnaissances contenues dans le Fj 64 ont été levées à L’Abbaye, Le Lieu, Les Charbonnières (Le Lieu), Vaulion, Juriens, Romainmôtier et La Praz.

[32] Il s’agit notamment d’abergements réalisés par Claude d’Estavayer en 1531 ou encore d’autres reconnaissances obtenues des habitants du Lieu et datant de la première moitié du XVe siècle.

[33] ACV, Ff 448, f. 1f.

[34] ACV, Fc 155, f. 0r-0va.

[35] ACV, Ff 155, f. 0r-0va.

[36] ACV, Ff 448, 1f.

[37] ACV, Ff 155, f. 0r-0va.

[38] Rappelons à ce titre un extrait du prologue d’une charte de franchise édictée par l’abbé de Marmoutier (Alsace) en 1144 : memorie et firmitatis gratia, quia labilis est hominum memoria et sine litteris and omnia facilis irrepit oblivio… Cf. Johann Daniel Schöpflin (éd.), Alsatia Aevi Merovingici, Carolingici, Saxonici, Salici, Suevici Diplomatica, Mannheim, 1772, t. 1, p.230, cité par Joseph Morsel, « À la recherche des préambules des chartes de franchises dans l’Empire » et François Menant, « Pourquoi les chartes de franchises italiennes n’ont-elles pas de préambule ? » in Monique Bourin, Pascual Martínez Sopena (éd.),  Pour une anthropologie du prélèvement seigneurial, op. cit., p. 292-293 et 268-269.

[39] Moins commun que les autres pièces du corpus, le préambule payernois trouve un écho dans le début du prologue des coutumes de Merville (Normandie), daté de 1307 : Quoniam transgressio divini precepti primo parenti et posteris omnibus natis suis ad malum pocius quam ad bonum induxerat pravitatem… Cf. Célestin Douais, « La coutume de Merville 1307-1359 », Nouvelle revue historique de droit français et étranger, 15 (1891), p. 578, cité par Mireille Mousnier, « Seigneurs en quête d’universitas dans la France méridionale » in Monique Bourin, Pascual Martínez Sopena (éd.), Pour une anthropologie du prélèvement seigneurial, op. cit., p. 226.

[40] Arch. Abbaye Saint-Maurice, REC 0/0/428, fol. 1r. Cf. Bernard Andenmatten, et al., Écrire et conserver, Saint-Maurice, Fondation des Archives historiques de l’Abbaye de Saint-Maurice ; Lausanne, Université de Lausanne, Fac. des Lettres, Section d’histoire, p. 58-59.

[41]ACV, Fg 364 ; Fi 199 ; Fi 244.

[42] ACV, Fi 243.

[43] Jean-Patrice Boudet, « Le modèle du roi sage aux XIIIe et XIVe siècles : Salomon, Alphonse X et Charles V », Revue historique, 110/3 (2008), p. 545-566. Sur l’importance de la figure de Salomon dans la culture intellectuelle médiévale, cf. également Jean-Patrice Boudet, et al. (dir.), Le roi Salomon au Moyen Âge : savoirs et représentations, Turnhout, Brepols, 2022.

[44] Ecc 1, 4, d’après la Vulgate. Cf. Biblia Sacra : iuxta vulgata versionem : editio minor, Stuttgart, Deutsche Bibelgesellschaft, 1984, p. 986.

[45] Eccl 1, 2, d’après la Vulgate : vanitas vanitatum dixit Ecclesiastes, vanitas vanitatum omnia vanitas. Cf. ibid., p. 986.

[46] Rm 15, 4, d’après la Vulgate : quaecumque enim scripta sunt ad nostram doctrinam scripta sunt, ut per patientiam et consolationem scripturarum spem habeamus. Cf. ibid., p. 1766.

[47] Jc 1, 18, d’après la Vulgate : voluntarie genuit nos verbo veritatis, ut simus initium aliquod creaturae eius. Cf. ibid., p. 1859.

[48] Rm 1, 20, d’après la Vulgate : invisibilia enim ipsius a creatura mundi, per ea quae facta sunt intellecta conspiciuntur… Cf. ibid., p. 1750.

[49] Cela concerne aussi bien les Pères de l’Église des IIIe-Ve siècles que les intellectuels des XIIIe-XVe siècles. Sur la centralité du rôle attribué à l’intellect humain dans l’accomplissement de la vie chrétienne par les penseurs et les mystiques du bas Moyen Âge, cf. en particulier Alain de Libera, La mystique rhénane : d’Albert le Grand à Maître Eckhart, Paris, Seuil, 1994.

[50] Joëlle Ducos, Violaine Giacomotto-Chiara (dir.), Lire Aristote au Moyen Âge et à la Renaissance : réception du traité Sur la génération et la corruption, Paris, Honoré Champion, 2011 (Colloques, congrès et conférences sur le Moyen Âge, 10).

[51] Jacques Elfassi et Bernard Ribémont, « La réception d’Isidore de Séville durant le Moyen Âge tardif (XIIe-XVe s.) », Cahiers de recherches médiévales, 16 (2008), p. 1-5.

[52] Isidore de Séville, Etymologies. Livre I, établi et trad. par Olga Spevak, Paris, Les Belles Lettres, 2020, p. 7

[53] Isidore de Séville, Etymologies. Livre XV, ibid., p. 15, 17 : Memphin ciuitatem Aegypti edificauit Epaphus Iovuis filius, cum in secunda Aegypto regnaret. Haec est urbs ubi charta nascitur, ubi etiam optimi mathematici fuerunt.

[54] De nouveaux terriers furent composés par exemple à Saint-Gingolph, dans le Chablais, en 1436. Cf. Nicolas Carrier, Les usages de la servitude, op. cit., p. 328.

[55] « Prononciation de François Ier, comte de Gruyère, entre le prieur de Rougemont, d’une part, et la communauté de ce lieu, d’autre part, au sujet de la mainmorte et d’autres points. 1456 (1457), janvier 3 », in Monuments de l’histoire du comté de Gruyère et d’autres fiefs de la maison souveraine de ce nom, éd. par J. J. Hisely et J. Gremaud, Lausanne, Bridel, 1867-1869, vol. 2 (MDR, 1e série, t. 23), n°226, p. 56-59. Cf. également Nicolas Carrier, ibid., p. 331-332.

[56] Danielle Anex-Cabanis, Le servage au Pays de Vaud, op. cit.,  p. 318-320.

[57] Ibid., p. 320.

[58] Ibid., p. 331, 355.

[59] Ibid., p. 369.

[60] BCUL, Miscellanea, F 991, p. 63.

[61] Jean-François Poudret, « La condition personnelle des habitants de la Terre de Romainmôtier » in Jean-Daniel Morerod (dir.), Romainmôtier, op. cit., p. 202-203.

[62] Vincent Corriol, « Désobéissance, fraude, contestation : luttes passives et formes dissimulées de la résistance dans la paysannerie médiévale » in Contester au Moyen Âge : de la désobéissance à la révolte, XLIXe Congrès de la SHMESP (Rennes 2018), Paris, Éditions de la Sorbonne, 2019, p. 315-329.

[63] Germain Hausmann, « Baulmes », in Hans-Jörg Gilomen (éd.), Die Cluniazenser in der Schweiz, op. cit., p. 473.

[64] Ibid., p. 486.

[65] Bernard Andenmatten, « Lac de Joux » in Brigitte Degler-Spengler (éd.), Die Prämonstratenser und Prämonstratenserinnen in der Schweiz, Bâle, Schwabe & Co, 2002 (Helvetia Sacra IV/3), p. 465, 490-491.

[66] Hans von Rütte, « Guerre des Paysans (1525) », trad. par Pierre-G. Martin in Dictionnaire historique de la Suisse, mis en ligne le 3.2.2016. URL : https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/016525/2016-02-03/

[67]Karine Crousaz, « Berne réforme bon gré mal gré » in Olivier Meuwly (dir.), Histoire vaudoise, Lausanne, BHV, Gollion, Infolio, 2015, p. 259.

[68] Fc 155 aussi aussi.

[69] Référence à Ecc 1, 2, d’après la Vulgate : vanitas vanitatum dixit Ecclesiastes, vanitas vanitatum omnia vanitas. Cf. Biblia Sacra, p. 986.

[70] Mot biffé : ibi.

[71] Ecc 1, 4.

[72] Citation du livre I (chap. 3, 1) des Étymologies d’Isidore de Séville. Cf. Isidore de Séville, Étymologies. Livre I : La grammaire, établi, trad. et comm. par Olga SPEVAK, p. 7. L’édition de Spevak employe le subjonctif loquantur, à la place de l’indicatif loquuntur utilisé ici.

[73] Fj 137 et et.

[74] Ecc 1, 4.

[75] Référence au deuxième livre du traité de physique d’Aristote De generatione et corruptione. Cf. Aristote, De la génération et la corruption, établi et trad. par Marwan RASHED, Paris, Les belles lettres, 2005.

[76] Référence au début de Rm 15, 4, d’après la Vulgate : quaecumque enim scripta sunt ad nostram doctrinam scripta sunt, ut per patientiam et consolationem scripturarum spem habeamus. Cf. Biblia Sacra, p. 1766.

[77] Ecc 1, 4.

[78] Ecc 1, 4.

[79] Référence à Ecc 1, 2, d’après la Vulgate : vanitas vanitatum dixit Ecclesiastes, vanitas vanitatum omnia vanitas. Cf. Biblia Sacra, p. 986.

[80] Citation de Jc 1, 18, d’après la Vulgate : voluntarie genuit nos verbo veritatis, ut simus initium aliquod creaturae eius. Cf. Biblia Sacra, p. 1859.

[81] Référence à Rom 1, 20, d’après la Vulgate : invisibilia enim ipsius a creatura mundi per ea quae facta sunt intellecta conspiciuntur sempiterna quoque eius virtus et divinitas. Cf. Biblia Sacra, p. 1750.

[82] Fj 64 vocunt. Il s’agit probablement d’une erreur de copie entre les étapes de finalisation du registre.

[83] Citation modifiée du livre I (chap. 3, 1) des Étymologies d’Isidore de Séville : Litterae autem sunt indices rerum, signa verborum, quibus tanta vis est, ut nobis dicta absentium sine voce loquantur. Cf. Isidore de Séville, Etymologies. Livre I, établi et trad. par Olga SPEVAK, op. cit., p. 7.

[84] Référence au livre XV (chap. 1, 31) des Étymologies d’Isidore de Séville : Memphin ciuitatem Aegypti edificauit Epaphus Iovuis filius, cum in secunda Aegypto regnaret. Haec est urbs ubi charta nascitur, ubi etiam optimi mathematici fuerunt. Cf. Isidore de Séville, Étymologies. Livre XV, établi et trad. par Olga SPEVAK, op. cit., p. 15, 17.

[85] Paraphe.

 

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Éditorial n°17

Après une période de transition, Circé. Histoire, savoirs, sociétés revient en cette année 2024 pour un dix-septième numéro. Nous nous félicitons de l’interdisciplinarité de ce numéro, comme des précédents, ayant à cœur d’ancrer notre revue dans le champ des sciences sociales. Dans cette livraison, les autrices et les auteurs mettent à l’honneur une diversité de thématiques qui fait la richesse de la revue Circé. En premier lieu, l’étude de Séverine Dupuis sur la franc-maçonnerie à Paris au XVIIIe siècle. Son travail articule la construction des sociabilités maçonniques au sein d’une société urbaine à une période d’effervescence socio-politique liée à l’activité des Lumières.

Ce numéro touche également à des objets beaucoup plus matériels. Le travail d’Aude Lazaro se penche sur la fortification des lieux de culte dans la vallée du Var. Le croisement de données archéologiques et documentaires sur un large panel permet de proposer des éléments statistiques sur les interactions entre castrum, castellum et ecclesia. S’agit-il de lieux de culte fortifiés ? De fortifications où sont installés des espaces cultuels ? Quelle est la place de l’habitat ? Ce travail s’inscrit directement dans le renouvellement historiographique en cours sur l’Église grégorienne, le rendant d’autant plus stimulant.

L’article d’Aude Lazaro n’est pas le seul à traiter des rapports de pouvoir au sein de l’Ecclesia. Ian Novotny s’intéresse justement à la domination seigneuriale des monastères dans le Pays de Vaud à la veille de la Réforme. La permanence scripturaire et son authentification par des professionnels de l’écrit tels que les notaires apparaissent comme les bases solides de cette domination. L’étude de Ian Novotny permet aussi de montrer que cette domination ne se fait pas sans interaction entre moines et paysans dans une période particulièrement tendue pour l’Ecclesia. La question de l’écrit et du poids de l’archive est aussi au cœur de l’article de Jean-Charles Daumy. En miroir de celui de Ian Novotny, Jean-Charles Daumy travaille sur des archives privées, celles des La Rochefoucault et plus particulièrement sur celles concernant leur comptabilité.

Nous remercions vivement les auteurs et autrices de cette livraison 2024 ainsi que les chercheurs et les chercheuses qui ont pris le temps de lire et relire ces contributions. Enfin, nous proposons régulièrement un appel à contribution pour ceux et celles qui souhaiteraient proposer et partager leurs travaux récents. Nous avons hâte de vous lire et de vous retrouver dans les pages de notre revue.

Le comité éditorial de Circé. Histoire, Savoirs, Sociétés

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Portrait d’Anne Lehoërff, historienne et archéologue spécialiste d’archéométallurgie

Anne Lehoërff est historienne et archéologue, spécialisée en archéométallurgie. Professeur des universités à CY Cergy Paris Université, elle occupe la chaire Inex « Archéologie et Patrimoine » depuis le 1er septembre 2021. Elle s’intéresse plus particulièrement à la Protohistoire européenne, à l’artisanat, aux échanges, à l’histoire de l’archéologie. Elle préside également le Conseil national de la recherche archéologique.

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Éditorial n°16

 

Pour ce seizième numéro et le premier de l’année 2022, Circé a eu le plaisir de s’entretenir avec une archéologue, Anne Lehoërff – une première pour notre revue très attachée à l’histoire écrite malgré sa volonté constante de s’ouvrir à l’ensemble des sciences sociales. Cette spécialiste en archéométallurgie se présente d’ailleurs avant tout comme une historienne, fidèle à la définition généreuse et englobante de l’histoire qu’elle développe dans nos pages. À son image, de nombreux auteurs de ce présent numéro ne craignent pas de franchir les barrières disciplinaires. C’est le cas Maxime Bray dont l’article allie presque naturellement histoire de l’art, histoire et droit, ou encore de Marie Davidoux qui voit dans la littérature un moyen d’aborder des problématiques historiographiques. Un signe encourageant à l’heure où l’interdisciplinarité est sur toutes les lèvres !

Anne Lehoërff nous dit encore que, pour mettre en œuvre l’ambitieuse science de l’homme qu’elle appelle de ses vœux, « [t]out doit être mobilisé, toutes les sources, tous les possibles. ». Ces mots définissent à merveille les différentes varia que ce numéro rassemble. Trois articles explorent ainsi des corpus pas ou peu connus afin de reprendre, à nouveaux frais, des questionnements plus traditionnels. Christine Petrazoller aborde le sujet très classique de la stasis grecque, en s’appuyant sur le corpus épigraphique de l’époque hellénistique, largement délaissée au profit de l’époque suivante, et en offre une synthèse utile. Si la notion d’authenticité en art fait déjà l’objet d’une dense historiographie pour l’époque moderne, Maxime Bray étend la chronologie établie en mettant en lumière un unicum : un rapport d’expertise daté de la fin du XVIIe siècle. Enfin, Marie Davidoux revient sur le si structurant développement de l’historiographie française au XIXe siècle en étudiant plusieurs romans, plus ou moins célèbres, qui mettent en scène la révolution de 1848.

Mais les jeunes chercheurs qui publient dans ce numéro ne renoncent pas pour autant à s’attaquer à des corpus bien plus établis. Nous pensons à Fantine Beauvieu qui se penche sur les films d’animation de Walt Disney, sans doute l’un des produits culturels à destination des enfants les plus populaires au monde, par le prisme inattendu du travail et de la crise de 2008. De son côté, Marie-Elisabeth Jacquet renouvelle l’étude des archives de la Bastille, exploitées par nuls autres qu’Arlette Fage et Michel Foucault, à la lumière du « tournant archivistique ».

(Re)découvertes documentaires, audaces de questionnements et des méthodes caractérisent bien ce numéro et, plus largement, une jeune recherche qui travaille avec énergie à enrichir le champ des savoirs du passé, et dont Circé se veut l’écho. Nous adressons donc tous nos remerciements aux contributeurs de ce beau programme, en particulier les auteurs et autrices de cette livraison, ainsi que les chercheurs qui ont pris le temps de relire leur travail. Enfin, afin de poursuivre sur cette ambitieuse lancée, nous publions un appel régulier à communication à destination de toutes celles et ceux qui souhaiteraient partager leurs résultats de mémoire de Master et de thèse et étoffer, peut-être bientôt, nos pages !

Le comité de rédaction de Circé. Histoire, Savoirs, Sociétés

 

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Expertises judiciaires en authenticité et en attribution de tableaux à la fin du XVIIe siècle. Réflexions autour de l’affaire Duplessis c. Houze

Maxime Bray

 


Résumé : Au Grand Siècle, le marché de l’art parisien est en plein essor et des experts interviennent afin de régler les litiges survenant en matière d’acquisition de tableaux. L’un des motifs de dispute puis d’intervention des experts concerne la qualité d’original ou de copie des œuvres échangées. Ces différends, encore largement méconnus, se développent principalement dans un cadre amiable, en marge des sources écrites. Cependant, un document inédit nous permet aujourd’hui d’intégrer précocement ces expertises en authenticité et en attribution à la sphère judiciaire française. Il s’agit d’un rapport rédigé le 29 mai 1700 par le peintre Charles-François Poerson à la suite de sa nomination par un juge afin d’authentifier et d’attribuer un petit tableau de genre représentant une scène villageoise. À partir de ce rapport, l’article souhaite entamer une réflexion plus vaste sur les sollicitations en justice de ce type d’expertise et leur réalisation dans la seconde moitié du XVIIe siècle.

Mots-clés : authenticité, expertise, histoire sociale de l’art, marché de l’art, Téniers.


Maxime Bray est doctorant contractuel au Centre André Chastel (Sorbonne Université), sous la direction de Christine Gouzi, professeur en histoire de l’art moderne, et la codirection de Laurent Pfister, professeur en histoire du droit. Après un Master d’histoire de l’art portant sur les marchés de peinture et de sculpture à Paris entre 1600 et 1750, sa thèse vise à mieux comprendre le cadre, les acteurs et les mutations de l’expertise « artistique » sous le règne personnel de Louis XIV (1661-1715). Il est aussi diplômé du Master 2 de droit du marché de l’art et du patrimoine artistiques de l’université Panthéon-Assas (Paris II).

maximebray18@gmail.com


Introduction

Le 18 mai 1700, la prévôté de l’Hôtel examine une requête présentée par Michel Duplessis à l’encontre d’Antoine Houze (Housse), négociant de tableaux[1]. La nature exacte des prétentions de cet aumônier de Louis XIV devant la juridiction de la Maison du Roi n’est pas connue mais, suivant le contexte, il fait peu de doute qu’il s’estime lésé des suites de l’acquisition d’une toile. Il obtient d’ailleurs « ordre que le tableau en question sera visitté incessament[2] ». Une dizaine de jours plus tard, le peintre expert Charles-François Poerson, nommé par le lieutenant général de la prévôté, se rend Saint-Martin-des-Champs, chez le chanoine, pour effectuer ladite visite. En la présence du maître des lieux, l’artiste académicien examine la toile litigieuse. La plume de son greffier en retient une minutieuse description :

Le tableau en question peint sur toille ayant trois pieds et demy de long sur deux pieds et demy de hault où est représenté un paysage où l’on découvre dans le demy loing une partye d’un vilage, plus loing un moulin en une hauteur et sur le devant une hostelerie à la fenestre de laquelle pend pour enseigne un Saint Anthoine et en bas près de ladite maison se voit une trouppe de paysans et paysanes à table, une servante sur la porte de l’hostelerie et plusieurs joueurs de boulle et fumeurs qui sont sur le devant du tableau avveq des pots, des bans, et instrumens de cuisine, à costé d’une cabane est un grand arbre auprès duquel sont représentez un paysan et une paysane.[3]

Il faut donc s’imaginer une scène de genre de 106 sur 76 cm représentant une fête au village ; l’une de ces plaisantes kermesses en plein air, thème cher à la peinture flamande du XVIIe siècle. Une description aussi soignée doit nécessairement désigner un tableau de premier ordre et non le tout-venant qui circulait en nombre sur la place parisienne. De fait, la conclusion du rapport d’expertise rattache la toile à la production d’une illustre famille de peintres : « après avoir soigneusement examiné ledit tableau, nous avons reconnu […] que ledit tableau est original non pas de David Téniers mais bien d’Abraham Téniers ». Elle en dévoile, au passage, la raison d’être : à la demande du juge, Charles-François Poerson déclare l’originalité du tableau avant de l’attribuer, dans un second temps, au frère de David II Téniers, le peintre anversois Abraham Téniers.

Ce document de nature processuelle est conservé aux Archives Nationales dans un fonds dédié aux procès-verbaux d’expertise des bâtiments couvrant les XVIIe et XVIIIe siècles (Z 1j). Au sein de cette sous-série et, à notre connaissance, au sein des archives judiciaires parisiennes, c’est un unicum. Le caractère exceptionnel de cette archive invite à se pencher plus largement sur la considération de l’authenticité et de l’attribution des peintures par la justice de la période moderne. En effet, pourquoi conservons-nous si peu de procès ou d’expertises judiciaires en ce domaine alors même que, nous le verrons, l’attribution des tableaux et leur statut d’authentique fait l’objet de tensions croissantes entre les acquéreurs et les marchands tout au long du Grand Siècle ? Pour répondre à cette question, l’historiographie déjà immense consacrée à la notion d’authenticité est d’une grande aide. Mais les historiens de l’art moderne se sont principalement penchés sur le sujet par le prisme des discours sur l’art provenant tour à tour de théoriciens, d’artistes ou d’amateurs[4]. En marge, certains travaux d’histoire sociale et économique de l’art se sont interrogés sur les attributions, en particulier par les priseurs et les experts, au sein des inventaires après décès[5]. Reste cependant cet autre domaine qui interroge la nature autographique ou authentique des tableaux : le domaine du droit et son application par les tribunaux. La datation précise de l’apparition d’un régime juridique propre aux œuvres d’art est délicate mais un jalon a récemment été posé par Laurent Pfister concernant la prise en main, par la justice, des questions d’authenticité : « il semble qu’il faille attendre le XIXe siècle pour que la justice prenne au sérieux l’expertise d’authenticité en matière d’œuvres et d’objets d’art[6] ». Il faut y voir le prolongement logique d’un phénomène qui parcourt l’ensemble du XVIIIe siècle : le « durcissement du régime autographique de la peinture[7] ».

Désormais, la mise à jour de ce procès-verbal de 1700 révèle qu’un problème d’authenticité et d’attribution pouvait déjà être porté devant un magistrat français au XVIIe siècle finissant. Pour comprendre la lente « judiciarisation » de ces différends, il faudra tout d’abord en envisager les moyens et lieux de résolution à Paris. Quelques exemples tirés des marchés de l’art italiens et flamands élargiront la réflexion et permettront, en outre, de souligner les spécificités de l’affaire portée devant la prévôté. Enfin, grâce à ce précieux rapport, on appréhendera très concrètement la façon dont les experts peintres pouvaient conduire une opération d’expertise en authenticité et en attribution au Grand Siècle.

Originaux et copies : la prévalence de résolutions extrajudiciaires

Si une expertise est commandée par le prévôt de l’Hôtel en 1700, c’est que le caractère original du tableau et son attribution à Abraham Téniers ou à David II Téniers constituait une qualité essentielle de l’œuvre aux yeux du plaignant, Michel Duplessis. Ces exigences, et l’appel à un expert pour les vérifier, n’ont rien de nouveau à l’époque[8]. Seulement, il apparaît que celles-ci s’exprimaient et se résolvaient plus régulièrement dans un cadre extrajudiciaire.

Se prémunir a priori

Charles-François Poerson utilise le terme d’original et non d’authentique[9]. La notion d’authenticité n’est employée que tardivement par les experts afin de désigner l’œuvre qui « est véritablement ce qu’on prétend qu’elle est[10] ». Les artistes et les théoriciens du XVIIe siècle définissent le tableau original par opposition à la copie. Ils usent de ce qualificatif pour flatter la qualité d’invention de l’artiste[11]. Dans le langage courant d’alors, l’original vaut toujours mieux que la copie et les amateurs sont sommés d’affuter leurs yeux à discriminer les œuvres selon cette distinction. Dans le même temps, plusieurs auteurs reconnaissent de multiples qualités aux copies[12] et la tradition encore vivace du « faux magistral[13] » fait de la capacité à produire des copies parfaites la marque des grands artistes. Seuls ces derniers parviendraient à faire mentir l’adage précité en réalisant des copies valant mieux que les originaux.

Dans ce monde paradoxal, comment devrait réagir l’acquéreur trompé qui achète erronément une copie pour un original ? Schématiquement, il peut se retrouver dans deux situations. Dans la première, il acquiert une excellente copie pour un original. Alors, divers topoï historiques narrent le ridicule qu’il y aurait à en réclamer le remboursement ; le collectionneur ne s’attachant alors bêtement qu’à un nom, élément extrinsèque de l’ouvrage[14]. Ainsi, lorsqu’un grand curieux comme Loménie de Brienne commet une erreur, il affirme qu’elle est intentionnelle. Dans ses Mémoires rédigés dans les années 1690, il admet avoir acheté une Vierge du Dominiquin qui s’avère être une copie mais se justifie immédiatement : « je la trouvois si belle et le prix si médiocre que je voulus bien, comme j’ay dit, estre trompé[15] ». Les apparences sont sauvées. Et quand le duc de Liancourt découvre que sa Vierge de Carrache est en réalité de Sébastien Bourdon : « il en fut ry, et Mr Lebrun en rit à son tour avec les autres[16] ». L’éventuelle déception du propriétaire abusé n’est pas prise au sérieux. Dans une seconde situation, le propriétaire se rend compte que la copie acquise est simple et servile, en un mot : médiocre. En ce cas, mieux vaut couvrir l’erreur d’un voile pudique. Une demande en remboursement pourrait causer tapage et nuire à sa réputation de connaisseur. Aussi, aucun contexte n’encourage un comportement procédurier de l’acquéreur lésé. Parallèlement, plusieurs ouvrages « responsabilisent » l’amateur en l’invitant à enrichir sa culture et son expérience artistiques afin d’éviter les « tres-mauvaises choses » et les « Coppies[17] ».

Du reste, la question du discernement entre copies et originaux est si subtile que les amateurs fortunés ne s’en remettent pas uniquement à leur œil. Les princes et cardinaux bénéficient d’un réseau d’agents et de savants conseillers (ambassadeurs, artistes, marchands, amateurs, etc.) qui, en plus de jouer un rôle structurant dans la constitution de leurs collections, peuvent être chargés de les prémunir contre l’acquisition de copies[18]. La correspondance de Mazarin témoigne de telles sollicitations d’agents diplomatiques (Antoine de Bordeaux) ou d’experts peintres (Antonio della Cornia) pour l’acquisition de ses toiles ; le prélat mettant spécifiquement l’accent sur la distinction entre les originaux et les copies[19]. Pour répondre aux inquiétudes et gagner la confiance de leur clientèle, les marchands élaborent des certificats d’authenticité[20]. Se mettent ainsi en place divers moyens propres au marché pour répondre à l’incertitude sur le statut des tableaux tandis que la justice ne paraît pas particulièrement plébiscitée.

« Avoir son argent d’un tableau copié ou vendu pour original » : les expertises a posteriori

La croissance prodigieuse du marché de l’art dans la seconde moitié du XVIIe siècle et son européanisation s’accompagne inévitablement d’une augmentation des conflits. Les tensions sont exacerbées par l’apparition de nouveaux acteurs : d’un côté, une clientèle bourgeoise, dotée d’un capital social moins élevé et non entourée d’agents[21], et de l’autre, une foule hétérogène de vendeurs d’images (maîtres peintres, marchands merciers, entrepreneurs étrangers, brocanteurs, etc.)[22]. Les tableaux circulent sur un marché secondaire et l’importante asymétrie d’information rend les acheteurs dépendants de la bonne foi des marchands et intermédiaires[23]. Cette nouvelle économie de l’art favorise les malversations marchandes et les ventes litigieuses de copies. La demande en expertise de tableaux pour obtenir réparation apparaît comme l’un des symptômes de ces profondes modifications. C’est en tout cas un phénomène très remarqué par Daniel Cronström, célèbre commentateur de la vie artistique parisienne, et dont il fait état dans l’une de ses lettres à Nicodème Tessin en 1696 :

Il faut vous dire d’ailleurs qu’il y a icy [à Paris] des experts qui jugent les différens qui surviennent en matières d’originaux ou coppies, entre acheteurs et vendeurs, et qu’on n’a pas plus de peine à avoir son argent d’un tableau coppié ou vendu pour original que d’un cheval batteur vendu pour droit ; ce sont des choses réglées.[24] [nous soulignons]

L’analogie forgée par l’agent culturel suédois est particulièrement significative et ne semble jamais avoir été remarquée. D’abord, le vocabulaire qu’il emploie est résolument juridique : les experts « jugent les différens » entre deux parties, « acheteurs et vendeurs ». Il dresse ensuite un parallèle entre le marché des tableaux et le marché des chevaux où la vente d’une copie correspond à la vente d’une bête boiteuse[25]. Il se réfère ici au maquignonnage, pratique courante sur le marché du cheval où les vendeurs déguisaient les défauts de « chevaux ruinés[26] » pour les vendre à meilleur prix. Cette association pourrait rester anecdotique si on ne la retrouvait pas sous de nombreuses autres plumes. On voit Loménie de Brienne, encore lui, accuser les « Jabach et les Perruchot, par les Forest et les Podestats, grands maquignons de tableaux, et qui ont bien vendu en les temps des copies pour des originaux[27] ». Ou encore Pierre Daret qui s’insurge dans son Abrégé de la vie de Raphaël contre « les droguistes ou maquignons de Tableaux & de Stampes qui en apportent des bales en France, pour tromper nos curieux […][28] ». Ces rapprochements confirment, s’il en était besoin, l’entrée du tableau dans un régime marchand où les copies sont de facto inférieures en qualité et en valeur économique. Ils signalent surtout un glissement progressif du marché de l’art : l’opprobre change de camp. Il est moins question de stigmatiser la méconnaissance des acheteurs que de démasquer les escroqueries marchandes.

À en suivre Daniel Cronström, ces expertises a posteriori s’exercent à la demande des parties et, on l’imagine, sous seing privé. Quelques exemples étrangers indiquent que la forme notariée pouvait également être pratiquée[29]. À Paris, les particuliers les plus introduits pouvaient sinon solliciter un expert « institutionnel » prestigieux : l’Académie royale de peinture et de sculpture[30]. Dans un cas comme dans les autres, la justice demeure soigneusement évitée[31]. Les expertises et arrangements amiables sont préférés pour des raisons évidentes de rapidité et de moindre coût. Pour autant, il faut bien que des ressorts juridiques existent afin de faire de ces litiges sur l’originalité des tableaux des « choses réglées ».

Ventes de tableaux et vices du consentement

D’après l’ouvrage collectif Œuvres d’art et objets de collection en droit français, « trois types de recours sont envisageables pour la victime d’une erreur sur l’authenticité d’une œuvre[32] » : l’erreur, le dol et la garantie des vices cachés. Ici, le droit moderne n’est pas fondamentalement différent du droit contemporain. L’analogie que Daniel Cronström propose avec le maquignonnage nous met sur la voie de l’erreur et du dol, à savoir des vices du consentement. Effectivement, l’acheteur commettant une erreur sur la qualité du tableau (en prenant une copie pour un original) se fait une idée fausse de la chose objet du contrat. Encore faut-il, selon les exigences du XVIIe siècle, que cette erreur porte sur la « substance de la chose vendûe[33] » pour vicier le contrat. Quant au dol, il s’agit d’une erreur provoquée volontairement par le vendeur qui, en usant de manœuvres déloyales, dissimule la réalité de la chose vendue. Ce vice ouvre plus largement la possibilité d’une annulation de la vente sous réserve de la « prudence du juge ». Jean Domat souligne néanmoins que la nature même de l’activité du vendeur est de vanter les mérites de sa marchandise. Aussi, le juriste précise les limites de la qualification du dol : le vendeur doit s’être explicitement engagé sur la qualité en cause et il ne doit pas s’agir d’une « finesse dont l’acheteur puisse se défendre & dont la vente ne dépende pas[34]. » Une plainte concernant la vente d’une copie pour un original serait donc recevable à condition, quelle que soit l’option retenue, de considérer l’originalité comme une qualité déterminante, voire substantielle, pour l’acheteur. Or, l’existence d’expertises a posteriori montre bien que sur le marché parisien, le caractère original ne constituait pas une simple « finesse » des tableaux. Un certain consensus devait exister sur ce point entre les acheteurs et les vendeurs. Autrement, nous aurions probablement des traces de contestation de ces expertises par ces derniers.

En élargissant notre point de vue, quelques litiges étrangers nous permettent d’affirmer avec certitude la recevabilité en justice d’une action en nullité (ou en dommages-intérêts) d’une vente de prétendus originaux dans la seconde moitié du XVIIe siècle. Dans une affaire anversoise des années 1660, un avocat fit valoir une disposition du droit romain visant expressément le dol pour annuler la vente frauduleuse d’une série de portraits d’apôtres de Van Dyck dont son client doutait de l’originalité[35]. Un procès bruxellois sur le terrain contractuel fut intenté à David II Téniers par des marchands l’accusant de les avoir trompés sur l’authenticité de toiles[36]. Enfin, mentionnons une affaire portée devant le Sénat génois où le plaignant, un riche bourgeois, était victime d’un peintre expert qui avait confirmé l’attribution de tableaux douteux dont il s’avérait être également le vendeur. La perte financière liée à la valeur commerciale des tableaux fut prise en considération et le litigé réglé, sur le terrain civil, en dommages-et-intérêts[37]. Tout en tenant compte de la diversité des contextes européens, cette rapide énumération de cas connus nous conduit à formuler deux remarques. Premièrement, on ne peut que souligner le faible nombre d’affaires légué par les archives judiciaires sur ces questions d’authenticité et d’attribution. Comme l’expliquent Alfonso Assini et Maurizia Migliorini, « la seule nouveauté de ce procès [génois] est qu’il s’agit, précisément, d’un procès : elle réside dans la revendication de la sanction juridique[38]. » Deuxièmement, l’analyse qualitative (attribution ou authentification) de tableaux litigieux par expertise apparaît comme un préalable nécessaire pour statuer sur l’éventuel vice de la vente et évaluer le préjudice subi.

Un rapport d’expertise en authenticité et en attribution au service de la justice : l’affaire parisienne

À Anvers comme à Gênes, les juges appliquent des catégories de droit privé au négoce de tableaux en marquant la distinction entre original et copie. Malheureusement, les pratiques judiciaires parisiennes sont moins connues. L’expertise judiciaire en authenticité et en attribution réalisée par Charles-François Poerson permet néanmoins d’en saisir quelques aspects.

Une procédure française singulière

Malheureusement, nous ne connaissons pas le motif de l’action de Michel Duplessis à l’encontre d’Antoine Houze. Peu de renseignements sont disponibles puisque contrairement aux procès susmentionnés où les magistrats s’appuient sur d’innombrables dépositions de peintres, de marchands et d’autres témoins, le prévôt de l’Hôtel parisien ne se fie qu’à un seul rapport d’expertise. Comment expliquer la spécificité de l’instruction du juge français ? D’abord, le statut très particulier du chanoine implique la compétence d’une juridiction d’exception. Ensuite, la nomination de l’expert spécialisé Charles-François Poerson correspond à une procédure nouvellement instituée par la couronne en 1690.

Le demandeur, Michel Duplessis, est aumônier de la chapelle curiale de Sainte-Barbe. Il exerce pleinement ses fonctions[39] à Paris depuis 1673 mais il était déjà coutumier de la ville. Nous savons par une lettre de l’évêque de Soissons datée de 1674 qu’il y résidait depuis trois ans[40]. Il ne démissionnera de sa prestigieuse position qu’en 1705[41]. La charge d’aumônier du roi octroie à Michel Duplessis un privilège de juridiction. Effectivement, les marchands suivant la cour et les membres de la chapellenie Sainte-Barbe qui leur était associée relèvent de la prévôté de l’Hôtel de Paris[42].

Du défendeur en revanche, on ne sait presque rien. Antoine Houze se fond parmi la quantité de négociants nordiques qui écoulent leurs marchandises à Paris autour de 1700. Erik Duverger a récemment fait sortir de l’oubli deux grandes figures du commerce de tableaux : Gilles van der Vennen et Bartholomeus Gourbeau, marchands demeurant à Bruxelles entre 1692 et 1694[43]. Ces marchands se fournissaient dans la région à Gand, Malines, Louvain ou Bruxelles et s’approvisionnaient notamment en Téniers et autres peintres de scènes de genre, en connaissant l’appétence des Parisiens pour ces sujets. Antoine Houze était-il coutumier de ce commerce international ? En 1698, les archives de la chambre des Comptes de Lille nous informent qu’un Antoine Houzé s’était chargé de la vente d’instruments de musique pour le service de Marie de Neubourg, femme de Charles II d’Espagne[44]. Un « sieur Housse, Marchand à Paris » faisait également affaire à Rouen en 1715[45].

Quoi qu’il en soit, la qualité de Duplessis est la raison pour laquelle ce marchand étranger est traduit devant le prévôt de l’Hôtel. Ce juge reconnaît son incompétence concernant l’établissement de l’authenticité et de l’attribution de la toile et fait appel, pour l’éclairer, à un unique expert. La procédure diffère donc du cadre traditionnel de la « reconnaissance » où le juge sollicite des témoignages de proches[46] ; une méthode au demeurant pratiquée pour l’authentification de toiles peintes dans les litiges abordés supra. Elle est ici remplacée par l’expertise technique d’un seul spécialiste. En nommant Poerson, le juge se conforme à l’édit de mai 1690 qui met en place un office de cinquante experts jurés pour la prise en charge de tous les procès-verbaux concernant les « toisez, prisées, estimations de tous ouvrages & receptions d’iceux, & generalement de tout ce qui concerne & dépend » du domaine des bâtiments, peintures et sculptures comprises[47]. Charles-François Poerson étant l’unique peintre titulaire de cet office autrement partagé entre architectes et entrepreneurs, il fut tout naturellement sélectionné pour cette mission d’expertise.

Il faut souligner une dernière caractéristique de l’affaire parisienne. Les cas précédemment mentionnés portent sur des échanges de grande valeur (à chaque fois, une dizaine de tableaux attribués à des grands maîtres). Or, la vente d’un tableau de Téniers – maître important certes, mais à la production massive et encore peu considérée par les élites parisiennes de la fin du XVIIe siècle – constituait une opération banale et certainement pas d’envergure pour Antoine Houze. Si les sommes en jeu du litige ne sont pas précisées par les documents, l’estimation du préjudice devait être relativement modeste. En effet, la sentence du juge évoque une exécution provisoire avec dépôt d’une caution judiciaire, procédure qui n’est ouverte au civil que dans la limite d’un dommage de 300 livres[48]. Un tel seuil maximum correspond tout à fait à la valeur des œuvres de David II Téniers vendues à Paris autour de 1700. Isabelle Knafou avance une moyenne entre 20 et 80 livres pour le XVIIe siècle sans remarquer une véritable différence de prix entre les tableaux considérés de Téniers et les copies[49]. Les toiles « téniesques » atteignent des prix sensiblement supérieurs aux tableautins de genre d’affiliation moins fameuse qui dépassent rarement les 10 livres[50]. La faiblesse de l’enjeu pécuniaire a probablement joué en faveur de la nomination d’un seul expert.

« Nous avons reconnu par… » : les critères d’authenticité et d’attribution d’une production « téniesque »

Au cours de sa longue carrière, Charles-François Poerson est appelé à plusieurs reprises, en France comme en Italie, pour des estimations, des rédactions d’inventaires après décès ou en tant qu’intermédiaire dans l’acquisition de prestigieuses collections[51]. Dans l’exercice de ces fonctions, il se révèle grand connaisseur. En l’espèce, la conclusion de son rapport d’expertise est dûment motivée :

Nous avons reconnu par la facilité des touches la force de l’expression et la fermeté du pinceau tant dans les figures que dans le paysage […].

Trois critères matériels et esthétiques sont mis en avant et ils renvoient tous à la dextérité d’exécution de l’artiste. Le savoir développé par Poerson rappelle les instructions développées par les théoriciens français comme Abraham Bosse, ici reprises par le père Léon de Saint-Jean :

les Sçavans remarquent, que les Originaus […] paroissent d’une maniere raisonnablemant, libremant & franchemant executée; […] les Coppies quoyques lechées & frottees marquent touijours un pinceau peu ferme & une main tramblante[52].

L’absence d’hésitation de la touche est le critère décisif de l’expert pour distinguer l’original. D’après les critères de l’époque, une exécution libre et assurée ne peut renvoyer qu’à un ouvrage d’invention ou d’après nature. Cette attention toute particulière de l’expert pourrait aussi provenir d’un lieu commun d’alors qui associe les Téniers à « une touche facile[53] ». Roger de Piles, qui faisait de la figure de Téniers un habile contrefacteur, avance qu’il « dessinait bien et la manière est ferme et d’un pinceau léger […][54] ». Pour autant, selon le théoricien, « le Caractère du Pinceau[55] » n’est que l’une des trois indications qui doivent guider l’expert dans son examen. Celui-ci doit également être attentif au « Goût du Dessins, [et à] celui du Coloris », deux aspects éludés par Charles-François Poerson. De plus, le peintre académicien se contente de reconnaître certains critères (facilité, expressivité, fermeté) sans les démontrer : il se contente d’expliciter la « grille d’analyse[56] » employée.

Si Poerson confirme qu’il est face à un original, c’est qu’il ne pouvait pas ignorer que les tableaux dans le goût de Téniers inondaient la capitale. Le maître signait très peu ses toiles et ses élèves (Van Hellemont, van Apshoven ou Abraham Willmens) abreuvaient le marché. De célèbres marchands parisiens, comme Jean-Michel Picart, se plaignaient de ne plus pouvoir vendre des originaux de Téniers tant les copies étaient partout colportées à prix minimes[57]. On retrouve d’ailleurs « d’innombrables Téniers[58] » dans les inventaires après décès de la première moitié du XVIIIe siècle. Dans le processus d’expertise de Poerson, il ne faut pas non plus négliger l’ample description de la toile présentée en introduction. Elle est un second moyen de relier le tableau à une authentique production « téniesque ». Chaque élément mis en avant par l’expert correspond à un détail des compositions des David père et fils ou d’Abraham : l’hôtelière sur le pas de la porte ; les joueurs de boule et les fumeurs ; le grand arbre qui marque verticalement la composition ; l’étendard à l’effigie d’un saint [Illustrations n°1 à 4]. Les historiens de l’art ont parfois pensé que les œuvres nordiques étaient trop récentes sur le marché parisien à la fin du XVIIe siècle pour qu’on puisse distinguer les Téniers des petits maîtres des Pays-Bas[59]. Poerson les fait mentir et l’on voit au contraire avec quel soin extrême il relève, un à un, tous les éléments symptomatiques des scènes de genre du maître anversois. Mais ces éléments sont si similaires entre David et Abraham, que l’on peut s’interroger sur la façon dont l’expert a tranché entre les deux frères.

La facilité de la touche distingue l’original certes mais il est complexe de l’ériger en facteur probant d’attribution. D’autant qu’à en croire Jean-Baptiste Descamps, spécialiste de la peinture flamande dans le milieu du XVIIIe siècle, ce caractère leste du pinceau ferait plutôt pencher pour David et non Abraham :

Il ne faut pas le confondre avec son frere Abraham Téniers, qui peignit dans le même goût, mais dont la touche étoit plus pesante, la couleur plus grise & qui avoit moins de génie que notre Artiste.[60]

Pour un lecteur contemporain, le rapport semble se focaliser sur la détermination de l’originalité de la toile à travers le caractère résolu du pinceau et son invention proprement « téniesque ». Pourtant, l’emploi du « non pas […] mais bien de » montre que l’attribution était un élément crucial du processus d’expertise. On peut même en déduire qu’elle devait faire partie des conditions écrites ou orales stipulées par Duplessis ou Houze. Quoiqu’il en soit, si le raisonnement attributionniste de Poerson nous échappe complètement, l’expertise parut suffisante au juge qui rendit son jugement peu de temps après.

La résolution de l’affaire

Michel Duplessis fit entériner ce « rapport de visite du tableau de Thesnier » sur la base duquel le lieutenant de la prévôté de Paris condamna Antoine Houze. Le négociant flamand tenta d’interjeter appel mais la sentence fut rendue exécutoire et l’appel débouté le 16 juin[61]. Deux tableaux vraisemblablement utilisés comme gages judiciaires[62] sont remis à Michel Duplessis et Antoine Houze doit payer les dépens. Un certain Charles du Boullan, maître peintre, se rend également « caution dudit sieur abbé » sans que l’on comprenne tout à fait son rôle.

Il est remarquable qu’à aucun moment le tableau ne reçoive de jugements négatifs. Comme l’impose le cadre judiciaire, l’expertise reste, tout du long, relativement neutre. Poerson fait montre d’une grande rigueur en ne « déclassant » pas le tableau. Il n’en fait pas une copie de David Téniers mais un original devant revenir à Abraham Téniers.

Conclusion

L’affaire Duplessis illustre parfaitement le besoin pour les amateurs du Grand Siècle de renouer avec la certitude du droit dans des échanges marchands dominés par l’incertitude sur le statut des tableaux. La replacer dans un contexte plus large permet de rappeler que l’évolution des pratiques du marché de l’art et de la perception des productions artistiques tient aussi à des considérations juridiques[63]. Seulement, il est remarquable que le terrain judiciaire soit si peu emprunté par les acheteurs lésés de la seconde moitié du XVIIe siècle. On a même pu remarquer une certaine constance de ce phénomène dans d’autres foyers européens. Il y a évidemment un comportement coutumier, propre aux mondes commerçants, de contournement des tribunaux. Ainsi de la plus grande controverse d’attribution du XVIIe siècle[64], l’affaire Uylenburgh, où l’autorité de la justice fut déniée par l’un des peintres intermédiaires considérant qu’il n’avait « rien à faire avec les magistrats[65] ».

À l’inverse, dans le cadre des commandes artistiques, hors du marché donc, la clientèle parisienne fait régulièrement appel à la justice et à ses experts estimateurs. Mais les opérations d’authentification et d’attribution ne ressemblent en rien aux opérations d’estimation d’un travail réalisé. Elles sont opaques et encore peu théorisées ce qui pourrait expliquer leur développement plus naturel dans le domaine extrajudiciaire. En ouvrant un espace de compromis et d’échange où tout est possible, l’expertise à l’amiable ou sous seing privé s’adapterait mieux à ces examens de tableaux difficilement formalisables[66]. Doit-on considérer que le régime de vérité, de confiance et de fiabilité propre à la justice s’accommodait mal des expertises judiciaires en authenticité et en attribution ? On peut toutefois affirmer que cela n’est plus entièrement le cas, en 1700, à Paris. Pour les magistrats parisiens, l’authenticité et l’attribution d’une toile devient un aspect technique, constatable à travers l’établissement d’un rapport d’expertise. Des éléments de réponses supplémentaires seraient à chercher du côté de la perception sociale et de la légitimité (acquise ou non) de ces procédés d’authentification et d’attribution à la fin du XVIIe et dans les premières années du XVIIIe siècle. Mais le manque de sources nous condamne, pour le moment, aux suppositions à partir de cas d’espèces.

Annexes

Rapport d’expertise de Charles-François Poerson (AN, Z 1j 450, 29 mai 1700) – Transcription de l’auteur

Payé 3# à l’expert

Payé 3# à la bourse

À Monsieur le lieutenant général civil et criminel de la prevosté de l’hostel et grande prevosté de France.

Aujourd’huy samedy vingt neuf du mois de may mil sept cent declaré nous Charles François Poerson peintre du Roy et professeur en son académie royalle de peinture et sculpture juré expert en titre d’office et bourgeois de Paris pour l’exécution de la sentence de vous Monsieur rendüe le vingt cinq du présent mois entre maître Michel Duplessis aumosnier du Roy chapelain de la chapelle curialle de Sainte Barbe de la suitte de la cour demandeur aux fins de la requeste precitté le 22e dudit présent mois à ce qu’attendu le départ fait par Parozel peintre de l’académie nommé par vostre sentence du 18e dudit présent mois pour la visitte du tableau dont est question en conséquence des ecdit et déclaration du Roy portant convocation de juréz experts pour les ouvrages de peinture qu’il soit ordonné que le tableau en question sera visitté incessamment par l’un desdits experts sans préjudice de ses dommages et interests et despens d’une part et le sieur Anthoine Housse flamand deffendeur d’autre. Par laquelle partye ouyes vous avez Monsieur attendu le départ fait par le sieur Parrousel pour n’estre pas expert juré, ordonné qu’il sera proceddé à la visitation par moy expert susdit et suivant l’assignation avez ordonné en conséquence le jourd’hier à la requeste dudit sieur Duplessis par exploit de François Pezé huissier audiancier en ladite prevosté de l’hostel sommes transporté aveq Monsieur Jacques Charles Le Brun l’un des greffiers créez pour recevoir le rapport des experts en et au dedans de la maison où demeure ledit sieur Duplessis situé dans Saint Martin des Champs ou estant en la presence dudit sieur Duplessis il nous a esté dit que ledit sieur Housse ne seroit comparu quoy que sommé à cet effet au domicile de son procureur ainsy qu’il m’est paru par acte ce jourd’huy [r°] par ledit Pezé huissier audiancier en ladite prevosté a moy representé, mais bien que le sieur Mois son associé seroit comparu et s’en seroit retrouvé en l’absence duquel sieur Housse nousdit expert avons veu et visitté le tableau en question au désir de ladite sentence de l’exécution de laquelle il s’agit et déclaré fait et dressé mon rapport receu par ledit Lebrun ainsi qu’il en suit.

Nous avons trouvé que le tableau en question peint sur toille ayant trois pieds et demy de long sur deux pieds et demy de hault où est représenté un paysage où l’on découvre dans le demy loing une partye d’un vilage plus loing un moulin en une hauteur et sur le devant une hostelerie a la fenestre de laquelle pend pour enseigne un Saint Anthoine et en bas près de ladite maison se voit une trouppe de paysans et paysans à table une servante sur la porte de l’hostelerie et plusieurs joueurs de boulle et fumeurs qui sont sur le devant du tableau avveq des pots, des bans, et instrumens de cuisine à costé d’une cabane est un grand arbre auprès duquel sont représentez un paysan et une paysane.

Après avoir soigneusement examiné ledit tableau, nous avons reconnu que ledit tableau non point de Daniel Téniers mais original d’Abraham Téniers [Apostille : par la facilité des touches la force de l’expression et la fermeté du pinceau tant dans les figures que dans le paysage] que ledit tableau est original non pas de David Téniers mais bien d’Abraham Téniers.

Ce que nous certiffions estre en foy de quoi nous avons signé ledit jour mois et an.

Poerson. Le Brun.

Recue trois livres pour mon preciput. Poerson.

Recu trois livres pour les experts le 26 aoust 1700. Musaniez.[v°]

[f° volant]

En fait des registres de ladite prevosté de l’hôtel du Roy et grande prevosté de France entre Messire Michel Duplessis aumônier du Roy Chapelain de la chapelle curialle de Sainte Barbe a la suitte de la cour demandeur aux fins de la requeste à nous présentée le vingt deux du présent mois à ce qu’attendu le départ fait par Parrozel peintre de l’accademie nommé par nostre sentence du dix huit dudit présent mois de may pour la visitte du tableau dont est question et en conséquence desdites déclaration du Roy portant convocation de jurés experts pour ledit ouvrages de peinture qu’il soit ordonné que le tableau en question sera visitté incessament par l’un desdits experts sans préjudice desdits dommages interests et dépens ledit sieur Duplessis comparant par maistre Michel Laurent son procureur d’une part et le sieur Housse flamand deffendeur comparant par maistre Guillaume Du Val son procureur dautre par [?] avis. Nous attendu le dépar fait par le sieur Parousel pour n’estre pas expert juré disons qu’il sera proceddé à la visitation par Person academitien expert juré et à cet effet assignation donnée à demain deux heures de rellevés en la maison de la partie de Laurent pour estre présent à la visite du tableau en question donné par nous Philippe Barbier conseiller du Roy lieutenant général civil et criminel de la prévosté de l’hôtel du Roy et grande prévosté de France a Paris le Roy […] le vingt cinq may mil sept cent.

L’an mil sept cent le vingt huitieme jour de may a la requeste de messire Michel Duplessis aumônier du Roy [r°] chappelain de la chapelle curialle de Sainte Barbe à la suitte de la cour pour lequel doimicille est eslu en la maison de maistre Michel Laurens procureur en la prévosté de l’hôtel du Roy seize rue du Four paroisse Saint Eustache j’ay François Pezé huissier audiancier de ladite prevosté de Saint Honoré soussigné requis sommé et interpellé le sieur Person peintre de l’académie et juré expert en son domicille rüe de Richelieu […] de se trouver demain vingt neuf du présent mois [Apostille : deux heures de rellevée] en la maison dudit sieur Duplessis seize dans le Saint Martin des champs pour et aux fins de la sentence rendüe en laditte prevosté de l’hôtel le vingt cinq dudit présent mois par laquelle ledit sieur Person est nommé d’office expert faire la visitte et son rapport du tableau mentionné en laditte sentence luy declarant qu’il les a payé de ces droits et sallaire et dont a été a luy ay laissé la presente coppie.

Pezé.

 

Illustration n°1 : David II Téniers, Fête au village avec un couple aristocratique, 1652, huile sur toile, Paris, musée du Louvre, © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Franck Raux.

Illustration n°2 : David II Téniers, Kermesse flamande, 1652, huile sur toile, Bruxelles, musées royaux des Beaux-arts de Belgique, © Royal Museums of Fine Arts of Belgium, Brussels / photo : Guy Cussac, Bruxelles.

Illustration n°3 : David II Téniers, Les joueurs de boules et fumeurs ; Fête de village, XVIIe siècle, huile sur toile, Paris, musée du Louvre, © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Jean-Pierre Lagiewski.

Illustration n°4 : Abraham Téniers, Fête campagnarde, huile sur bois, 1641, H. : 27 cm ; L. : 36 cm, Anvers, Koninklijk Museum voor Schine Kunsten, ©KMSKA.

 

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[1] AN, V3, 32, B, 18 mai 1700.

[2] Ibid., 25 mai 1700.

[3] AN, Z 1j 450, 29 mai 1700. Cf. Annexe n°1.

[4] Pour rappeler dans cette note quelques colloques et ouvrages sur le sujet : « Copies, répliques, faux », Revue de lArt, n°21, Paris, 1973 ; « Retaining the Original, Multiple Originals, Copies, and Reproductions », Studies in the History of Art, Washington, vol. 20, 1989 ; De main de maître : lartiste et le faux, Paris, Hazan et Musée du Louvre éditions, 2009 ; Anna Tummers et Koenraad Jonckheere (éd.), Art Market and Connoisseurship : A Closer Look at Painting by Rembrandt, Rubens and their Contemporaries, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2008. D’autres références importantes seront mentionnées infra.

[5] Il faut citer ici John-Michael Montias qui évoque, entre autres, l’attention croissante aux questions d’authenticité et d’originalité des œuvres au sein des inventaires après décès dans les années 1630-1640. Cf. John-Michael Montias, « Les marchands de tableaux aux Pays-Bas au XVIIe siècle », in Laurence Bertrand-Dorléac (dir.), Le Commerce de l’art de la Renaissance à nos jours, Besançon, Éditions la Manufacture, 1992, p. 70. Dans le contexte parisien, voir Emmanuel Coquery, Recherches sur les collections d’images des peintres parisiens dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, mémoire de D.E.A. inédit, sous la direction d’Antoine Schnapper, université Paris IV-Sorbonne, 1994.

[6] Laurent Pfister, « Quand la justice s’est saisie de l’expertise d’authenticité des œuvres d’art », in Gérard Sousi (dir.), Marché de l’art et droit. Originalité et diversité. Liber amicorum en l’honneur de François Duret-Robert, Lyon, Éditions du Cosmogone, 2021, p. 250-262.

[7] Charlotte Guichard, « Qu’est qu’une œuvre d’art originale ? », in Charlotte Guichard (dir.), De l’authenticité. Une histoire des valeurs de l’art (XVIe-XXe siècle), Paris, Publication de la Sorbonne, 2014, p. 125-144 et Charlotte Guichard, La griffe du peintre. La valeur de l’art (1730-1820), Paris, Éditions du Seuil, 2018.

[8] « The demand for authenticity in works of art is obvious from at least the early sixteenth century. ». Cf. Jeffrey Müller, « Measures of Authenticity : The Detection of Copies in the Early Literature on Connoisseurship », Studies in the History of Art, vol. 20, 1989, p. 141. Voir également : Thierry Lenain, Art forgery. The History of a Modern Obsession, Londres, Reaktion book, 2011.

[9] Ernst van de Wetering, « The question of authenticity : an anachronism ? (A summary) », in Görel Cavalli-Björkman (éd.), Rembrandt and his pupils. Papers given at a symposium in the Nationalmuseum Stockholm, Stockholm, Nationalmusei skriftserie, 1993, p. 9-13.

[10] François Duret-Robert, « L’authenticité des œuvres d’art dans la pratique du marché de l’art », in Pierre Gabus, Marc-André Renold et Jacques de Werra, L’expertise et l’authentification des œuvres d’art, Genêve, Centre du droit de l’art, 2007. Par ailleurs, chez Furetière ou dans le Dictionnaire de l’Académie française, le terme « authentique » renvoie très généralement à tout ce à quoi l’on peut ajouter foi ; ce qui fait autorité.

[11] « […] ce tableau est un original voilà une belle statuë, l’original est à rome, tirer sur l’original, tous les tableaux qu’il a sont des originaux, de bons originaux […] ». Cf. Le Dictionnaire de lAcadémie françoise dedié au Roy, Paris, 1694. Nous devons à Sophie Raux la remarque selon laquelle le terme « originalité » n’apparaît que dans l’édition de 1725 du Dictionnaire de Furetière. Et au rédacteur de préciser : « Ce mot ne se trouve point dans les Dictionnaires : c’est de Piles qui l’employe dans un Ouvrage qui regarde les Peintres & la Peinture […] ».

[12] Anna Tummers, The Fingerprint of an Old Master. On Connoisseurship of Dutch and Flemish Seventeenth-Century Paintings : Recent Debates and Seventeenth-Century Insights, Ph.D thesis, under the supervision of Eric Jan Sluijter, University of Amsterdam, 2009, p. 77-79. Dans le contexte napolitain, voir Gérard Labrot, « L’éloge de la copie », Annales, Histoire, Sciences Sociales, 59e année, n°1, janvier-février 2004, p. 7-35.

[13] Thierry Lenain, « Le faux magistral. Un topos de l’ancienne littérature artistique », Revue d’esthétique, n° 41, 2002, p.15-26.

[14] Citons deux très fameux exemples de ces réactions : le cardinal de Saint-Georges en fit les frais au sujet d’un faux antique de Michel-Ange et il en alla de même pour le prieur de la chartreuse de Parme, en 1653, lorsqu’il porta plainte contre Luca Giordano pour un faux Dürer. Le tribunal trancha en faveur du peintre « tant est grand son mérite » d’avoir copié le maître allemand. Cf. Ibid., p. 23-24 et Charlotte Guichard, « Qu’est ce qu’une œuvre originale », op. cit., p. 11-17.

[15] Louis Hourticq, « Un amateur de curiosités sous Louis XIV. Louis-Henri de Loménie, comte de Brienne, d’après un manuscrit inédit », Gazette des Beaux-Arts, I, 1905, p. 332.

[16] Ibid.

[17] Abraham Bosse, Sentimens sur la distinction des diverses manieres de peinture, dessein & graveure, & des originaux d’avec leurs copies…, Paris, chez l’auteur, 1649, p. 2.

[18] Jonathan Brown, King and connoisseurs. Collecting art in Seventeenth Century Europe, New Haven et Londres, Yale University Press, 1995.

[19] Gabriel-Jules Cosnac (Comte de), Les richesses du Palais Mazarin, Paris, H. Loones, 1884, p. 217-218 et Patrick Michel, Mazarin, prince des collectionneurs. Les collections et lameublement du cardinal Mazarin (1602-1661). Histoire et analyse, Paris, Éditions de la Réunion des Musées nationaux, 1999, p. 35-51.

[20] Jean Adhémar, « Les critiques d’art français du XVIIe siècle et le public », Storiografia della critica francese nel Seicento, Bari et Paris, Adriatica e Nizet, 1986, p. 247. L’auteur note une augmentation du nombre de certificats d’authenticité dans les années 1660.

[21] Les agents « culturels » sont essentiellement au service d’une clientèle aristocratique. Cf. Koenraad Jonckheere, « The “solliciteur-culturel” : some notes on Dutch Agents and the international trade in art and applied arts », De Zeventiende Eeuw, n°24(2), 2008, p. 162-180.

[22] Mickaël Szanto a pu insister sur la difficulté de saisir cette population de marchands de tableaux. Cf. Mickaël Szanto, Les tableaux et la place de Paris. Structures et dynamiques d’un marché (1598-1683), thèse de doctorat d’Histoire et Civilisation inédite, sous la direction de Laurence Fontaine, Fiesole, Institut Universitaire Européen, 2008, p. 54-73. Pour le marché nordique, Jaap van der Veen souligne l’émergene de « newfangled dealers ». Cf. Jaap van der Veen, « By his own hand. The valuation of autograph paintings in the 17th century », in Ernst van de Wetering (dir.), A Corpus of Rembrandt Paintings, Dordrecht, Springer, 2005, t. IV, p. 7.

[23] Patrizia Cavazzini relève une modification similaire des rapports entre l’offre et la demande dans le négoce romain. Cf. Patrizia Cavazzini, « Oltre la committenza : commerci d’arte a Roma nel Seicento », Paragone, anno LIX, Terza serie, n°82 (705), novembre 2008, p. 81.

[24] Carl Hernmarck et Roger-Armand Weigert, Les Relations artistiques entre la France et la Suède, 1693-1718. Nicodème Tessin le jeune et Daniel Cronström. Correspondance (extraits), Stockholm, Egnellska boktryck, 1964, p. 120.

[25] Louis Liger, La Connoissance parfaite des chevaux…, Paris, La Compagnie des Libraires, 1761, p. 70.

[26] Jacques Savary des Bruslons, Dictionnaire universel de commerce, Paris, chez la veuve Estienne, 1741, t. II., « maquignonage ».

[27] Louis Hourticq, « Un amateur de curiosité », op. cit., p. 327-328.

[28] Préface. Jean de Bombourg, Recherche curieuse de la vie de Raphael Sansio dUrbin…, Lyon, chez Antoine Besson, 1709. La première édition est publiée en 1675. On retrouve la phrase telle quelle chez Pierre Daret, Abrégé de la vie de Raphaël, 1651 republié en 1678 à Lyon.

[29] Par exemple, en 1675, le peintre marchand Matthijs Musson et un marchand rotterdamois expertisent un Déluge prétendument attribué à Brueghel et l’acte est déposé par devant notaire. Cf. Erik Duverger, Antwerpse kunstinventarissen uit de zeventiende eeuw, Brussel, Koninklijke Academie voor Wetenschappen, vol. 10, 1999, p. 84.

[30] Anatole de Montaiglon, Mémoire pour servir à l’histoire de l’Académie royale de peinture et de sculpture depuis 1648 jusqu’en 1664, Paris, P. Jannet, 1853, t. I, p. 364 ; t. II, p. 29 et p. 148 ; t. III, p. 291-292 et p. 314-315.

[31] Le cas des ventes aux enchères publiques dans les Provinces-Unies est un peu particulier puisque l’on pouvait se plaindre auprès du bourgmestre. Cf. Jaap van der Veen, A corpus of Rembrandt Paintings, op. cit., p. 7, n. 22.

[32] Françoise Chatelain et Pierre Tagourdeau, Œuvres d’art et objets de collection en droit français, Paris, LexisNexis, 2011, p. 164.

[33] Jean Domat, Les loix civiles dans le droit naturel, Paris, chez Pierre Auboüin, Pierre Emery et Charles Clouzier, 1697, 2nde éd., t. II, p. 152.

[34] « Les manieres de tromper étant infinies, il n’est pas possible de reduire en regle quel doit être le dol qui suffise pour annuler une convention […]. Ainsi dans un contract de vente, ce que dit vaguement un vendeur pour faire estimer la chose qu’il vend, quoyque souvent contre la vérité, & par consequent contre la justice, n’est pas considéré comme un dol qui puissent annuler la vente, si ce ne sont que des finesses dont lacheteur puisse se défendre, & dont la vente ne dépende pas. Mais si le vendeur declare une qualité de la chose qu’il vent, & qu’il engage par là l’acheteur […], ce sera un dol qui pourra suffire pour annuler la vente. Ainsi, dans tous les cas où il s’agit de sçavoir s’il y a du dol, il dépend de la prudence du Juge de le reconnoître, & de le reprimer, selon la qualité du fait, & les circonstances. » Cf. Ibid., t. I, p. 509.

[35] Louis Galesloot, « Un procès pour une vente de tableaux attribués à Antoine Van Dyck (1660-1662) », Annales de l’Académie d’archéologie de Belgique, Anvers, XXIV, 2e série, vol. IV, 1868, p. 561-606. L’avocat évoque la disposition suivante : « si l’acheteur a été amené à contracter par dol (dolo), alors le dol (dolus) à l’origine du contrat le rend nul et non avenu par lui-même, celui qui a été trompé le souhaitant » (« si emptor dolo ad contrahendum inductus sit, tunc dolus dans causam contractui reddit contractum ipso jure nullum, volente eo qui deceptus est »). On pourrait également traduire « dolus » par fraude.

[36] Louis Galesloot, « Quelques renseignements concernant la famille de Pierre-Paul Rubens et le décès de David Téniers », Annales de l’Acdémie d’Archéologie de Belgique, Anvers, Buschmann, 2e série, t. III, 1867, p. 360-363.

[37] Maurizia Migliorini et Alfonso Assini, Pittori in Tribunale. Un processo per copie e falsi alla fine del Seicento, Nuoro, Ilisso, 2000.

[38] « l’unica novità di questo processo è di essere, appunto, un processo : è nella pretesa della sanzione giuridica ». Cf. Ibid., p. 106.

[39] « […] célébrer la sainte Messe tous les Dimanches & Fêtes solmnelles de l’année, l’Eau-bénîte, Pain beni & autres fonctions ». Cf. Code des commensaux…, Paris, chez Prault père, 1720, p. 431-432.

[40] L’évêque se plaint de Duplessis, « absent depuis trois années » de Soissons, alors qu’il en est chanoine et doyen du chapitre collégial. Cf. Œuvres posthumes de maitre Louis d’Hericourt, avocat au parlement, Paris, chez Desain&Saillant, Durant et Cellot, 1759, t. IV, p. 86

[41] Je remercie ici Eléonore Alquier pour m’avoir confirmé par écrit certains des éléments ci-dessus mentionnés.

[42] Cf. Emma Delpeuch, « Les marchands et artisans suivant la cour », Revue historique de droit français et étranger, Quatrième série, vol. 52, n°3, juillet-septembre 1974, p. 379-413.

[43] Erik Duverger, Documents concernant le commerce dart de Francisco-Jacomo van der Berghe et Gillis van der Vennen de Gand avec la Hollande et la France pendant les premières décades du XVIIIe siècle, Wetteren, Universa, 2004.

[44] Y est affiché un compte de 627 livres 12 sols dus à Gérard Sonné et Antoine Houzé, « pour les violons, basses, haubois et leurs appartenances, pour les haubois qui passent en Espagne pour le service de la Reyne ». Cf. Archives du Nord, B 3227, 310 v° ; cité par Collection des inventaires sommaires des archives départementales antérieures à 1790, Imprimerie de L. Danel, 1888, t. VI, p. 331. Cf. également Annales du comité flamand de France, V. Didron, Paris, t. XIX, 1891, p. 224-225.

[45] Il est défendu au « sieur Housse, Marchand à Paris, & autres Marchands Forains » d’acheter dans les « Auberges desdites Courtières aucunes Marchandises dépendantes dudit Etat de Mercier & aux Courtieres d’en exposer en vente dans lesdites Auberges à peine de punition exemplaire » à Rouen en 1715. Cf. Statuts, ordonnances et reglemens de la Communautés des marchands merciers de place unis de la ville de Rouen, 18 juillet 1715.

[46] Procédure notamment pratiquée dans le cadre de l’expertise en authenticité des écritures. Cf. Anne Béroujon, « Comment la science vient aux experts. L’expertise d’écriture au XVIIe siècle à Lyon », Genèses, n°70, 2008, p. 16.

[47] Edit du roy de May 1690.

[48] Ordonnance civile de 1667. Titre XVII, article XIII : « Les Iugemens diffinitifs donnez és matieres sommaires seront executoires par provision en donnant caution, nonobstant oppositions ou appellations, & sans y prejudicier les condamnations ne seront, sçavoir […] aux Requestes de nostre Hostel : & du Palais, de trois cens livres, & au dessous […] ».

[49] Isabelle Knafou, Le goût pour les genres flamands et hollandais dans la France du XVIIe siècle, mémoire de maîtrise d’histoire de l’art inédit sous la direction d’Antoine Schnapper, université Paris IV-Sorbonne, 1996, p. 88. La moyenne dégagée par Isabelle Knafou augmentera considérablement au siècle suivant et les œuvres de David II Téniers atteigneront des sommets autour de 1750 comme la Noce de Village vendue à 6 000 livres à la vente Angran de Fonspertuis. Cf. Hans J. van Miegroet, « Recycling Netherlandish Paintings on the Paris Market in the Early Eighteenth-Century, in Sophie Raux, Collectionner dans les Flandres et la France du Nord au XVIIIe siècle, Villeneuve d’Ascq, Édition du Conseil scientifique de l’université Charles-de-Gaulle-Lille 3, 2005.

[50] Diana Widmaier, Jean-Michel Picart (1600-1682). Figure d’un marchand de tableau au Grand Siècle, mémoire de maîtrise d’histoire de l’art inédit sous la direction d’Antoine Schnapper, université Paris IV-Sorbonne, 2000, p. 82.

[51] On pense à la célèbre vente de la collection Odescalchi au Régent. Cf. René Ancel, « Les tableaux de la reine Christine de Suède. La vente au Régent d’Orléans », Mélanges d’archéologie et d’histoire, t. 25, 1905, p. 223-242.

[52] Père Léon de Saint-Jean, Le Portrait de la sagesse universelle…, Paris, chez Guillaume Bernard et Antoine Pas-De-Loup, 1655. Cité par Jacques Thuillier, « Textes du XVIIe siècle oubliés ou peu connus », XVIIe siècle, t. XXXV, 1, 1983, p. 136.

[53] Jean-Baptiste Pierre Le Brun, Catalogue de tableaux des trois écoles… formant le cabinet de M. le baron d’Holback…, Paris, Prault, 1789, p. 12. On retrouve de nombreuses références à la fermeté du pinceau de Téniers dans la littérature du XIXe siècle : « la netteté, la fermeté du pinceau de Téniers conviendrait mal à l’expression d’une joue tendre et d’une carnation transparante ». Cf. Jacques Nicolas Paillot de Montabert, Traité complet de la peinture, 1829, Paris, chez Bossange père, t. VIII, p. 191. Ou encore : « Tous cependant [les élèves de Téniers] se distinguent du maître par un coloris moins transparent et par une touche moins franche et moins spirituelle […]. Comme imitateurs sérieux de Teniers, je citerai les suivants qui furent ses élèves : Abraham Teniers, son frère (1619-1691), Michel Abshofen, De Hondt et Arnoul Van Maas. [nous soulignons] » Cf. Alphonse Wauters, « David Téniers et son fils, le troisième du nom », Annales de la société d’archéologie de Bruxelles, Bruxelles, E. Lyon-Claesen, t. XI, 1897.

[54] Roger de Piles, Abrégé de la vie des peintres…, Paris, chez Jacques Estienne, 1715, 2nde éd., p. 103.

[55] Ibid., p. 104.

[56] Nous reprenons un terme appliqué par Anne Béroujon aux expertises en écriture. Cf. Béroujon, « Comment la science vient aux experts… », op. cit., p. 8.

[57] Diana Widmaier, Jean-Michel Picart, op. cit., Annexes (lettre du 2 juin 1663 de Picart à Musson).

[58] Le comte de Flamarens avait, en 1710, cinquante tableaux de Téniers ou des copies. Cf. Mireille Rambaud, Documents du minutier central concernant l’histoire de l’art (1700- 1750), Paris, S.E.V.P.E.N., 1964, t. I, p. XLII.

[59] « il y a trop peu de temps qu’on regarde les œuvres étrangères non italiennes et la critique est trop rudimentaire encore pour qu’on puisse distinguer d’un Téniers, les petits maîtres des Pays-Bas qui lui ressemblent seulement par le goût des scènes de genre. » Cf. Pierre Marcel, La peinture française au début du XVIIIe siècle (1690-1721), Paris, Ancienne Maison Quantin, 1906, p. 70-71.

[60] Jean-Baptiste Descamps, La Vie des peintres flamands, allemands et hollandois, Paris, chez Charles-Antoine Jombert, 1754, t. II, p. 153.

[61] Sur la résolution de l’affaire : AN, V, 3, 32, B, 3, 8 et 16 juin 1700.

[62] Une pratique récurrente à la période moderne sur laquelle Nga Bellis-Phan a pu nous renseigner. Qu’elle en soit ici remerciée.

[63] Charlotte Guichard, La griffe du peintre…, op. cit., p. 17.

[64] Tummers et Jonckheere (éd.), Art Market and Connoisseurship…, op. cit., p. 54.

[65] « Fromantiou’s curt reply was that he had “no business with the magistrates” ». Cf. Friso Lammertse et Jaap van der Veen, Uylenburgh&Son. Art and commerce from Rembrandt to De Lairesse. 1625-1675, Zwolle, Waanders Publishers, 2006, p. 84.

[66] Guillaume Calafat, « Expertise et compétences. Procédures, contextes et situations de légitimation », Hypothèses, Editions de la Sorbonne, 2011/1, n°14, p. 104.

 

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