Tous les articles par Revue Circe

Patrimoine et matérialité

Thibault Le Hégarat

Résumé
Qu’est ce que la matérialité du patrimoine ? Que recouvre cette notion, quels critères composent la matérialité des œuvres ? Et, plus largement, pourquoi identifier la matérialité du patrimoine pour d’autres raisons que la classification des œuvres ? En plus de revenir sur cette première série de questions, l’article interpelle le lecteur sur la place de la matérialité dans la définition du patrimoine, et cherche à montrer sa position centrale même si souvent mise au second plan. Il faut arriver à distinguer dans l’œuvre ce qui tient de l’héritage, de sa dimension matérielle qui offre tout autant les raisons de sa valeur patrimoniale. Appuyée sur une bibliographie riche, et explorant les discours et représentations sur le patrimoine, cet article propose de replacer la matérialité du patrimoine au cœur de sa définition.

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Une histoire politique du punk-rock chinois

Nathanel Amar

Résumé
Apparu en Chine au moment du lancement des réformes économiques des années 1980, le rock s’est imposé durant cette décennie comme la musique de la contestation étudiante et de l’inspiration démocratique de toute une génération de jeunes chinois. La répression du mouvement démocratique en 1989 a également signifié un reflux de la musique rock contestataire, remplacé par une pop commerciale considérée comme inoffensive. Cet article examine comment le mouvement punk a réussi à s’implanter en Chine sur les vestiges du rock à partir des années 1990, tout en s’appropriant les nouvelles problématiques de la Chine contemporaine. A travers l’histoire du rock et du punk chinois, c’est également celle d’une Chine en mutation qu’il nous est donnée de voir, ainsi que des armes de la contre-culture.

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Une histoire sans historiens ? Les politiques culturelles du XIXe siècle français au regard des sciences sociales

Jean-Charles Geslot

Résumé
L’histoire des politiques culturelles au XIXe plus intéressés dans ce domaine par la période qui suit la création du ministère des Affaires  culturelles en 1959, et effrayés par le risque d’anachronisme que sous-tend une recherche sur une catégorie d’intervention publique inexistante à la période considérée. Les spécialistes d’autres disciplines (histoire de l’art, sociologie historique, science politique) semblent plus présents sur ce terrain, et ont développé une réflexion épistémologique poussée sur les potentialités d’une telle recherche, menée dans un cadre strict permettant d’éviter, outre le risque d’anachronisme, ceux de la téléologie ou du natalisme, inhérents à l’étude de la genèse des politiques publiques. Il s’agit d’évaluer l’apport des sciences sociales à ce champ de recherches et la possibilité de considérer comme scientifiquement valide la catégorie « politiques culturelles » pour le XIXe siècle.

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Editorial n°2

Selon Marc Ferro et Jean Planchais, pour le sens commun, l’histoire énonce « ce qui a eu lieu » ; elle est la connaissance du passé. Elle « s’arrête » au temps présent et devient l’actualité. Les faits d’aujourd’hui seraient l’apanage des journalistes, des sociologues. Mais d’autres définitions s’imposent. On observe déjà que pour Thucydide, « le père de l’histoire », l’analyse historique était bien le temps présent, ses origines et ce qui aidait à en rendre compte, à le comprendre. Ainsi, le passé n’était pas dissocié du temps présent […].

L’imbrication de notre passé et de notre réalité, de notre actualité, a parfaitement été comprise et appliquée par Christian Delporte, auquel le portrait de ce deuxième numéro est consacré. En effet celui-ci est un spécialiste notamment de l’histoire des médias, ou encore de l’histoire de la communication politique. Ainsi il n’est pas rare que les journalistes fassent appel à lui pour interpréter, donner des pistes de réflexion pour tenter d’expliquer des évènements relevant de l’histoire immédiate. L’historien d’aujourd’hui s’intéresse donc aussi à des thèmes très contemporains et touchant un public plus large qu’un simple cercle d’universitaires initiés. Vu Cong Minh le prouve dans sa contribution sur la prolifération des signes médiatiques dans les films de super-héros, ainsi que Nicolas Lahaye dans son enquête sur le film pornographique. Vous trouverez aussi dans notre nouvelle parution des articles se basant sur des sources plus traditionnelles, parfois rares ou inédites, comme celui de Coraline Rey sur les pratiques archivistiques de l’abbaye de Cîteaux du XIIe au début du XVIe siècle, ou bien encore la contribution de Sabrina Février sur la bibliothèque du pape Benoit XIII. Dans notre volonté d’interrogation, de renouvellement et de (re)découverte de l’historiographie, nous vous proposons également un article sur le concept de roi thaumaturge en Espagne par Roberto Quiros et Cristina Bravo Lozano, ainsi qu’un hommage à Alejo Venegas de Busto à l’occasion du 450eanniversaire de sa mort en 2012 par Marc Zuili. Enfin, à travers l’essai de Darouèche Hilali Bacar, vous pourrez vous plonger dans deux œuvres de littérature arabe contemporaine, œuvres centrées sur l’écriture autobiographique dans l’optique de fonder une mémoire collective.

Les articles que nous offrons à votre lecture illustrent l’essence même du travail de l’historien : l’enquête minutieuse, et parfois laborieuse, nécessaire à l’élaboration de thèses ou à l’extraction de faits oubliés, l’immersion du chercheur dans des sources de tous types, de toutes époques. Toutes ces démarches font de l’historien le fossoyeur d’un passé qui retrouve un présent, ou bien encore un mineur de fond qui va chercher les données au fond du sol et les ramène à la surface, selon Emmanuel Le Roy-Ladurie.

Le comité de rédaction tient à remercier l’ensemble de ces artisans de la mémoire, pour reprendre l’expression de Jacques Le Goff, auteurs et relecteurs qui contribuent à l’existence de Circé et à la vitalité de nos disciplines. Nous sommes aussi particulièrement reconnaissants envers Christian Delporte qui a bien voulu nous accorder du temps pour l’élaboration de son portrait. Enfin, nous vous témoignons notre gratitude, à vous lecteurs, qui nous permettez de partager et de diffuser l’actualité de la recherche en sciences humaines.

Le comité de rédaction