Marie-Noëlle Doutreix
Résumé
La recherche en épigénétique opère-t-elle un changement de paradigme au sein de la biologie moléculaire ? Dans les années 1960, se forme le paradigme de la génétique moléculaire composé de la règle « un gène-une enzyme » explicitée par George Beadle et Edward Tatum en 1941, du « dogme central » élaboré par Francis Crick en 1957, de la théorie informationnelle inspirée des travaux de Claude Shannon et Warren Weaver, et de la « thèse phénotypique ». En s’appuyant sur l’idée d’une consistance entre les définitions des concepts centraux d’un paradigme et le paradigme en question, nous soutiendrons la thèse suivante. Suite aux découvertes que le paradigme de la génétique moléculaire a permises, il est désormais contesté dans sa version forte, notamment par la remise en cause des définitions respectives du concept de gène et du concept d’information et par des arguments fournis par l’épigénétique. Nous utiliserons comme critère pour identifier un éventuel changement de paradigme le fait que l’épigénétique induise, ou non, un changement de définition important et réponde aux difficultés théoriques soulevées par la critique d’hypothèses centrales de la biologie moléculaire des années 1960.