Le site de la Ferme d’Ithe et l’agglomération antique de Diodurum (Le Tremblay-sur-Mauldre / Jouars-Pontchartrain, 78, Yvelines). Sources historiques, sources archéologiques et données architecturales pour un projet d’étude et de mise en valeur

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Olivier Blin

Résumé
À 30 kilomètres de Paris, la ferme d’Ithe est située sur le territoire de la commune du Tremblay-sur-Mauldre, dans les Yvelines en limite avec celle de Jouars-Pontchartrain. Ses vastes bâtiments sont abandonnés depuis les années soixante. Leur origine est une grange ayant appartenu, au moins depuis le milieu du xiie siècle, à l’abbaye Notre-Dame des Vaux-de-Cernay. Mais son histoire remonte aussi à l’Antiquité puisqu’elle est installée sur les vestiges de l’agglomération gallo-romaine de Diodurum en partie fouillée lors des travaux de construction de la RN12.

Olivier Blin, Architecte-Archéologue, Ingénieur de recherche à l’Inrap, UMR 7041 du CNRS


Un programme d’étude et de recherche se poursuit depuis une dizaine d’année, abordant à la fois les questions d’archéologie, d’histoire, d’architecture et de connaissance d’une grange cistercienne devenue ferme et occupée jusqu’aux années cinquante. Le site offre donc des perspectives scientifiques inédites, diachroniques, qui s’inscrivent dans un projet de protection et de mise en valeur du patrimoine.

I. Introduction

En 2002, les communes de Jouars-Pontchartrain, Neauphle-le-Château et Bazoches-sur-Guyonne, (78, Yvelines), ont fondé l’association intercommunale ApsaDiodurum (Association pour la Promotion du Site Archéologique de Diodurum). Neuf communes y sont aujourd’hui rattachées (Jouars-Pontchartrain, Neauphle-le-Château, Bazoches-sur-Guyonne, Neauphle-le-Vieux, Méré, Montfort l’Amaury, St Rémy l’Honoré, Le Tremblay sur Mauldre, Les Mesnuls). Cette création répondait aux conclusions d’un rapport d’étude portant sur un projet archéologique et architectural sur le site archéologique et historique de « La ferme d’Ithe » (Fig. 1), réalisé à la demande conjointe de la commune de Jouars-Pontchartrain et du Service Régional de l’Archéologie d’Ile-de-France[1]. Ce rapport inscrivait les découvertes effectuées durant l’opération de fouilles préventives réalisée de 1994 à 1998, préalablement aux travaux routiers de la RN12 (contournement de Jouars-Pontchartrain), sur une partie du site d’agglomération antique de Diodurum. Ce document proposait de mettre en perspective l’étude et la préservation des secteurs situés hors des emprises fouillées, en particulier à l’emplacement des ruines de la ferme d’Ithe. Cette ferme, à l’origine grange cistercienne, fut installée sur le site probablement dans la seconde moitié du xiie siècle. Le projet intègre l’étude du sous-sol et du patrimoine bâti, sa mise en valeur, la conservation et l’interprétation des collections archéologiques.

De 2004 à 2010, une première série de sondages et de fouilles archéologiques programmées[2] a été réalisée sur la parcelle correspondant aux ruines de la ferme (Fig. 2). Celles-ci avaient été dégagées de la végétation qui les emprisonnait durant l’année 2003. Ces opérations visaient la reconnaissance et l’identification de la sédimentation de ce secteur, où se trouve le carrefour de deux axes antiques, de la période gallo-romaine aux époques médiévales et modernes. Les premiers éléments d’une étude exhaustive du bâti ont également été mis en place durant cette période [3].

Enfin, en parallèle à l’opération archéologique, un chantier de restauration, mené en collaboration avec le Groupement Rempart Ile-de-France, a été engagé sur la chapelle située à l’extrémité sud de la ferme. Il s’agit d’un petit édifice du xviiie siècle, remanié au xixsiècle, implanté à peu près à l’emplacement de la chapelle cistercienne originelle (Fig. 3).

II. « Diodurum », vicus carnute

Le site du Diodurum, prospecté depuis le milieu du xxe siècle[4], est partiellement identifié dès 1975 par photographie aérienne[5]. Les données disponibles montrent qu’il occupe une surface d’environ 40 ha (Fig. 4). La fouille de sauvetage (1994-1998) a concerné 4 ha, soit près de 10 % de sa surface. La séquence chronologique reconnue, du début du Ier siècle av. J.-C. jusqu’aux Ve-VIe siècles, et la très bonne conservation des niveaux archéologiques associés à un contexte humide[6] en font un site d’exception.

L’agglomération se développe dans la vallée de La Mauldre, au carrefour de plusieurs voies. On retiendra surtout les deux plus importantes : la première, d’est en ouest, reliait Paris (Lutecia) à Dreux (Durocasses) ; la seconde, du sud vers le nord, permettait, depuis Orléans (Cenabum), de rejoindre la vallée de la Seine. Les éléments fournis par la photographie aérienne, montrent d’autres embranchements, en particulier vers le sud-ouest, sans doute vers Chartres (Autricum), par l’actuel village de Bazoches-sur-Guyonne[7], et vers le nord-est.

C’est un vicus attesté par un fragment d’inscription découvert en 1996 dont le mot vicani, nous est parvenu complet[8] (Fig.5); c’est actuellement le seul clairement identifié de la Civitas Carnutum. Son statut se conjugue à sa situation en limite de territoire, à la frontière avec les Parisii. Il est identifié à Diodurum, étape située d’après l’un des Itinéraires d’Antonin à 15 lieues de Paris (Lutecia) et à 22 de Dreux (Durocasses) sur l’une des routes menant à Rouen (Rotomagus). Le nom même de Jouars, église et hameau installés sur une petite éminence à environ 400 m à l’est du site, dériverait du toponyme antique, lui-même construit sur les racines gauloises divo (divin, sacré) et durum (bourgade, village, marché), devenu, par corruption au bas-latin avec retranchement de la lettre initiale, Iodurum puis Iotrum ou Jotrum[9]. Ces deux dernières formes se retrouvent d’ailleurs souvent mentionnées dans les cartulaires médiévaux mentionnant Jouars : Jorria en 1100 (Notre-Dame de Longpont, 207), Jotrensis en 1228 (Vaux de Cernay, i, 269), Jotro en 1286 (ibidem, i, 853), Joreium et Jotrum du xiiie siècle (Pouillé du diocèse de Chartres) au xve siècle (Vaux de Cernay, i, 213).

Les premières traces d’installations humaines découvertes sont datées de la fin du IIe et du début du Ier siècle av. J.-C. L’occupation antérieure à la Conquête semble couvrir déjà une grande partie de la vallée, puisque les sondages de diagnostic réalisés au nord du site ont aussi livré des fosses et du mobilier de cette époque[10], tandis que la fouille a révélé à l’ouest, des vestiges d’enclos et de parcellaires de type rural.

Pour la période gallo-romaine, plusieurs phases d’urbanisme sont attestées, depuis l’époque augustéenne jusqu’au iiie siècle de notre ère. Plusieurs édifices publics sont identifiés, dont au moins trois sanctuaires avec fana[11]. Les vestiges d’un théâtre ont également été mis au jour à l’est du site, ainsi que de vastes pièces appartenant à des horrea. Enfin, la découverte, lors de prospections, de fragments de tubulures en très grande quantité, aux abords de la Ferme d’Ithe, pourrait signaler la présence de thermes. En périphérie, le développement urbain est principalement linéaire, le long des axes routiers qui desservent l’agglomération. On trouve, dans ces secteurs, de nombreuses carrières d’extraction de limon, d’argile ou de marne, ayant ensuite servi de dépotoirs ainsi que différentes activités artisanales, illustrées surtout par des fours de potiers[12] et des fours à chaux. En arrière du bâti, des jardins voués à la culture ont été identifiés[13].

La très bonne conservation de niveaux de l’Antiquité Tardive montre une continuité d’occupation au moins jusqu’au milieu du Ve siècle[14]. Elle est étayée par la présence de couches de « terres noires », phénomène caractéristique en milieu urbain pour cette période[15].

Pour le vie siècle, les données existent, mais sont plus fragmentaires. Si un fossé palissadé a été découvert à l’est du site[16], ainsi que quelques fosses, vestiges d’occupations et de bâtiments dans les emprises fouillées, les découvertes les plus évocatrices proviennent des abords de la voie nord-sud. En effet, la découverte des restes d’un bâtiment à plan basilical, probable église, d’un édifice funéraire avec sarcophage[17], et les témoins d’une petite nécropole utilisée jusqu’à l’époque carolingienne[18], indiquent incontestablement une fréquentation permanente tardive de certains secteurs de l’agglomération. Il faut mentionner ici la nécropole de Vicq, située à 4,5 km au nord-ouest du vicus, principal indice d’une importante présence mérovingienne dans ce secteur[19]. D’ailleurs, certaines des cuves de sarcophages qui y ont été retrouvées utilisent des blocs de remploi dont certains proviennent sans conteste de l’agglomération.

L’érosion agricole a très certainement éliminé une bonne part des niveaux d’occupation plus récents, du début du haut Moyen-Âge. Une seule tranchée de récupération de l’époque carolingienne a été clairement mise en évidence, mais quelques fragments de céramique de cette période et plusieurs fibules confirment leur existence. Toutefois aucun document n’éclaire cette période, à la différence des fiefs alentour qui semblent apparaître au moment où Diodurum disparaît. C’est le cas, en particulier, à 1,5 km à l’ouest du site, de Chambord, Cambortum, mentionné dès le début du ixe siècle (Polyptyque d’Irminon, xxiv, 170, 179-180)[20], de Bazoches, mais aussi d’Ergal, à l’est de Jouars et, sans doute de la plupart des villages et hameaux aux alentours.

Plusieurs chercheurs ont tenté d’analyser et modéliser les transformations des terroirs entre la fin de l’Antiquité et le haut Moyen-Âge[21]. L’émergence des noyaux urbains médiévaux est un phénomène encore mal connu en Ile-de-France. Nombre d’agglomérations sont abandonnées entre la fin du iiie et la fin du ive siècle ap. J.C., même si l’archéologie montre aujourd’hui que pour certains sites, comme Diodurum, une occupation a pu perdurer bien au-delà. Dès l’époque carolingienne, on constate, le plus souvent, un déplacement des espaces d’habitat. Les flancs de colline sont alors préférés aux vallées. C’est probablement ce phénomène que l’on retrouve pour Diodurum, avec l’installation d’un ou plusieurs noyaux autour de l’ancienne ville, sans doute en grande partie déjà mise en carrière. L’héritage toponymique du site antique semble quant à lui s’être attaché à l’église médiévale (mentionnée dès la fin du xiie siècle) vouée à Saint-Martin et au hameau qui s’est développé autour, Jouars. Ce noyau, peu éloigné de l’ancienne agglomération, se trouve, le long de la voie qui la traverse et se dirige vers Paris.

Mais, parallèlement, un habitat sommaire s’est sans doute maintenu dans la vallée, recentré sur le carrefour routier, à l’emplacement de la future « grange », puis « Ferme d’Ithe » qui constitue certainement le terme de cette longue occupation.

Cette hypothèse trouve confirmation dans les fouilles effectuées au nord de la ferme, dans le cadre du programme de recherche. Une des rues de l’agglomération antique a été retrouvée. Son dernier radier est daté de la fin du IIIe siècle[22] (Fig. 6) mais plusieurs niveaux qui lui sont attachés datent des Ve-VIe siècles. La présence de mobilier médiéval piégé dans certaines des couches qui les surmontent indique que cette rue a perduré bien après la période antique. Cette situation avait déjà été notée pour certaines voiries lors de la fouille préventive de 1994-1998. Ce phénomène tient peut-être à une utilisation opportuniste, sous forme de simples cheminements, des axes plus anciens, mais cette continuité peut aussi indiquer que le site demeure encore fréquenté, même si la nature exacte de cette occupation n’est pas encore totalement identifiée.

III. La « Ferme d’Ithe »

La ferme d’Ithe (Fig. 7) qui donne son nom actuel au site et dont les ruines sont encore visibles au cœur de la vallée, est attestée au xiie siècle (Vaux-de-Cernay, i, 33). Elle appartient à l’abbaye cistercienne de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay, et consiste en une grange, « la Grange d’Ayte », et terrains en dépendant. Son fief s’étend sur environ 300 arpents (130 ha) du début du XIIIe au XVIe siècle. Elle fait partie des plus anciennes fondées par l’abbaye[23], ce que ne contredisent pas les fouilles archéologiques qui ont livré dans les niveaux médiévaux les plus anciens découverts, des témoins d’occupation datés pour les plus anciens de la fin du xiie siècle. Elle se trouve à une vingtaine de kilomètres de celle-ci. Elle se situe donc dans un périmètre classique pour une grange cistercienne, c’est-à-dire à moins d’un jour de marche du monastère dont elle dépend, comme le stipule le Chapitre Général de 1152. La première mention textuelle de son nom (sous la forme Aytam) date de 1162[24], dans un acte de confirmation des biens de l’abbaye par Louis VII. André de Paris, quatrième abbé, est à la tête des Vaux-de-Cemay à ce moment-là.

Ce toponyme, que l’on trouve sous des formes diverses durant toute la période médiévale, Aita en 1204 (ibidem, i, 148), Aytam à nouveau en 1228 (ibidem, i, 267), Ayta en en 1293 et 1310 (ibidem, ii, 42, et Cartulaire de Saint-Magloire, iii, 792), ne prend la forme IteIsteYtte puis celle qui deviendra définitive Ithe, qu’à partir du milieu du xviie siècle (Pontchartrain, 48-J, 570-2). Ce serait, selon certains historiographes, une dérivation du grec « Ithos » qui signifie « dressé », ou, ce qui semble plus probant, du celtique Attegia, signifiant « dépendance », « baraque »[25], et aussi « une hutte »[26], « un bourg, un relais, un domaine agricole le long d’une voie »[27]. D’autres lui préfèrent une origine germanique issue du matronyme attesté « chez Aita »[28].

En 1156[29], les moines possèdent déjà trois terres à Pontchartrain (Pontem Carnotensem), données par Ermentrude de Plaisir, sans toutefois en spécifier la superficie. On ne sait pas si ces terres incluent celles de la ferme d’Ithe, avec éventuellement des bâtiments. Si tel avait été le cas, on peut penser qu’il en aurait été fait mention, ce qui, en revanche, est bien le cas dans l’acte de 1162. Dans ce dernier, plusieurs terres y sont énumérées, sans mention de superficie, mais on remarque que celles antérieures à 1156 n’y apparaissent pas. On peut donc penser que la confirmation de 1162 n’est que l’inventaire des cessions faites à l’abbaye entre les deux actes, ce qui fournirait alors une fourchette chronologique pour l’entrée de la ferme dans ses possessions.

Les chartes du cartulaire de l’abbaye des Vaux-de-Cernay relatifs à la grange d’Ithe font rarement mention des bâtiments ou de leur aspect. En revanche, la grange ayant été affermée par les moines au début du xive siècle (entre 1310 et 1316, période d’accidents météorologiques qui semblent avoir particulièrement touché le domaine), les documents relatifs à la ferme d’Ithe ont été augmentés depuis cette date par les baux de location, mais aucun n’est antérieur au xvie siècle. Plusieurs comptes-rendus de travaux et visites fournissent également quelques informations importantes[30].

Enfin, en 1692, Louis Phélypeaux, seigneur de Pontchartrain, rachète le domaine et entreprend d’importants travaux dont rendent compte plusieurs documents. En 1696, il s’agit de travaux de maçonnerie et de couverture et de démolition partielle de la chapelle. En mars 1697, les travaux concernent les charpentes, qui sont consolidées. À la fin 1697, les murs sont crépis et recouverts de chaux. En mai 1698, le portail principal de la ferme est refait et la démolition de la chapelle est achevée. Un mur semble cependant conservé, puisqu’on en fait murer les fenêtres en janvier 1699, en même temps que sont réalisés des travaux de peinture dans les bâtiments d’habitation.

Les périodes antérieures au début du XVIe siècle, sont donc principalement connues par l’archéologie et les témoins des occupations mis au jour lors des campagnes programmées de 2006 à 2010, seules sources actuellement disponibles.

III.1. Le « bâtiment d’habitation » cistercien : première approche d’une architecture originale

Il s’agit de l’édifice qui ferme la cour de la ferme au sud et qui présente une orientation différente des autres bâtiments. Les documents anciens le décrivent comme « habitation »[31] et signalent en particulier la présence d’une « cuisine ». Une étude complète de ses vestiges a été faite entre 2006 et 2010 dans le cadre d’un travail de Masters de l’Université de Paris 1[32].

 Au moins deux grandes étapes de construction du bâtiment ont été mises en évidence : un bâtiment « primitif », pour lequel les fouilles archéologiques ont montré qu’il récupère des éléments d’édifices plus anciens, antérieurs donc au XIIe siècle, confortant dès lors l’hypothèse de constructions présentes sur le site avant cette date et dont quelques fragments sont sans conteste antiques, puis une restructuration avec extension, reconstruction partielle et réaménagement de ses espaces internes (Fig. 8).

Sous les remblais de destruction de l’édifice et les niveaux modernes correspondant aux occupations du bâtiment au cours des XVIIIe et XIXe siècles, sont apparus différents niveaux de sols médiévaux des XIVe-XVe siècles associés à ses différents états. Quelques céramiques datent des XIIe et XIIIe siècles, témoins sans doute des premiers temps du fonctionnement de la grange. Dans la partie orientale du bâtiment, ces sols se composent de recharges de limon d’assainissement et de couches d’occupation cendro-charbonneuses liées à une sole de cuisine en tuiles appuyée contre le mur nord de la pièce (Fig. 9). Cela confirme la fonction de cette partie de l’édifice comme le laisse supposer les documents d’archives. D’ailleurs, dans la pièce située immédiatement à son contact au sud, se trouve le four à pain, construit en brique, mentionné dans le bail de 1517 (cf. supra note 9) (Fig. 10). Au centre de la « cuisine » se trouve une base de colonne, dont une photographie ancienne montre qu’elle comportait un chapiteau de même facture que ceux du porche de l’église de l’abbaye des Vaux de Cernay. Louis Morize, en 1889, en a reproduit les dessins[33]. Comme le souligne Jérome Blachon,

« Le décor de feuilles plates et de feuilles en lancettes recourbées en volutes sous les angles du tailloir orné d’un cavet bordé par deux onglets et placé sous un bandeau est un motif courant dans l’abbaye. On le retrouve, dans des styles différents, mais toujours basés autour d’un modèle de feuilles et de trèfles, dans le cloître, le dortoir, la salle des convers, et le logis du prieur[34] » .

Du point de vue architectural, le premier état du bâtiment est illustré par son mur gouttereau sud qui présente encore, en face externe, les restes de plusieurs ouvertures monumentales en calcaire blanc avec linteaux monolithes en bâtière (Fig. 11a et b) inscrits dans une construction en meulière. Les vestiges de six ouvertures ont ainsi été relevés (Fig. 12). Elles présentaient, en face interne, des arrières voussures appareillées en arc surbaissé.

Les linteaux en bâtière se retrouvent assez souvent dans l’architecture religieuse, dès le XIe siècle[35]. De nombreux exemples ont été observés sur tout le territoire français, ainsi qu’en Espagne, en Allemagne et en Belgique. On leur accorde une origine alto-médiévale, à situer probablement au IXe siècle, et ils semblent connaître un certain essor au XIIe siècle dans le nord de la France où on les trouve aussi dans l’architecture civile[36].

Nous pouvons proposer de placer ceux de la ferme d’Ithe et l’état de construction qu’ils déterminent dans une fourchette de temps allant du XIIe au XIIIe siècle, sauf à imaginer qu’il s’agit d’un état de bâtiment antérieur à l’installation des cisterciens. L’analyse des vestiges du sous-sol, montre aussi que la façade est antérieure au XIVe siècle. Cette datation est donc évidemment à prendre avec précaution et reste à confirmer par une étude plus poussée ainsi que par les données des fouilles à venir et la poursuite de l’étude du bâti. Elle semble la plus plausible et s’inscrit dans la chronologie connue de la fondation de la grange. C’est une architecture originale pour laquelle toutefois les comparaisons manquent.

Quoi qu’il en soit, nous avons pu montrer que ces ouvertures avaient toutes la fonction de porte, puisqu’elles présentent chacune les vestiges de dispositifs de fermeture  : feuillures pour loger des vantaux ouvrant vers l’intérieur du bâtiment, encoches pour recevoir des barres de fermetures, restes d’éléments métalliques de fermetures[37].

Le second état correspond à l’extension vers l’est du bâtiment initial conjointement à une restructuration de ses espaces internes et la reconstruction de sa façade nord. Les murs sont alors liés au mortier de chaux, contrairement aux précédents encore montés à la terre ou au limon. C’est à cette séquence qu’il faut rattacher la base de colonne circulaire mentionnée précédemment, installée en lieu et place d’un pilier antérieur en meulière de plan carré. Les sols sont  exhaussés et l’ancienne sole de cuisine en tuile remblayée. Une nouvelle cheminée est alors installée dans le mur oriental de la pièce.

Les datations apportées par la fouille indiquent que cette étape se déroule durant le XVIe siècle, avec ponctuellement quelques apports du XVIIe siècle. Nous pourrions voir là en partie les traces des travaux déjà mentionnés, entrepris par le bailleur Jean Hervé, entre 1508 et 1517, en charge de la rénovation de la ferme et de ses différents bâtiments.

Toutefois, les résultats des études dendrochronologiques réalisées sur l’ensemble des bois retrouvés dans les bâtiments de la ferme[38] n’ont pas apporté d’informations pour ces deux séquences qui semblent, pour l’instant, propres au bâtiment d’habitation. En revanche elles indiquent deux autres phases de travaux pour le reste de l’ensemble bâti, l’une au xve siècle, l’autre au xviiie siècle. Ces dates correspondent aussi à deux étapes importantes de l’histoire de la ferme. En effet, celle-ci est affermée par les cisterciens dès les années 1450, avec le témoignage de travaux effectués aux bâtiments dès ce moment comme mentionné précédemment, et, au xviiie siècle lors du rachat du domaine par le comte de Pontchartrain, Louis de Phélypeaux.

D’une manière générale, l’étude archéologique et architecturale du bâtiment d’habitation de la grange d’Ithe a mis en lumière l’évolution du bâti depuis très certainement le XIIe siècle. Mise en regard des connaissances historiques que nous avons de l’identité des bâtisseurs, des commanditaires et des occupants de la ferme au fil du temps, elle permet d’appréhender les étapes qui ont présidé à ses transformations. En effet, si la ferme fait aujourd’hui partie de l’architecture vernaculaire, son état cistercien pose le problème des caractéristiques et du statut d’une architecture à vocation agricole (et non cultuelle, si l’on fait abstraction de la question de la chapelle, cf. infra) commandée par une autorité religieuse. Les granges et fermes cisterciennes ne bénéficient pas d’un programme de recherche archéologique et la ferme d’Ithe est une exception à cet égard. C’est ce qui fait son originalité, mais aussi pose de nombreuses questions auxquelles il est difficile d’apporter des réponses faute de comparaisons et d’études similaires. C’est un unicum dans le paysage de l’architecture médiévale religieuse.

Au-delà du bâtiment étudié, qui pose la question de son architecture, du soin apporté à sa construction, d’une certaine monumentalité et de la fonction de ses espaces, c’est celle, plus générale, de l’organisation et l’évolution d’une grange d’abbaye avec tous ses bâtiments qui se fait jour[39].

III.2. La question de la chapelle

À l’extrémité sud de la ferme, se trouve un petit édicule de quatre mètre de côté. Abandonné et en partie dépouillé, il conservait encore dans les années soixante sa charpente et couverture[40]. Il n’en subsistait pratiquement rien en 2003, lorsque l’association prit pied sur le site (Fig. 13). Lors de sa fouille, préalable aux travaux de restitution engagés dès 2005, deux états ont été mis en évidence, l’un de la fin du XVIIIe siècle, l’autre du milieu du XIXe siècle, correspondant très probablement à l’état connu par l’iconographie moderne.

Cet édifice correspond à une petite chapelle ou oratoire. D’anciens habitants de Jouars-Pontchartrain se souviennent de l’autel en bois qui s’y trouvait encore au milieu du XXe siècle, et les fragments d’un crucifix en bois et ivoire y ont été retrouvés lors des fouilles.

La pièce qui le jouxte au nord correspond à l’ancienne laiterie. L’étude archéologique du bâti a montré que son mur nord présente un appareillage et des modules de moellons différents des autres et surtout une petite fenêtre à ébrasement, de type lancette, murée. Il est possible qu’il s’agisse là du dernier témoin de la chapelle cistercienne, dont on sait qu’elle fut détruite en 1696 à l’exception d’un mur dont les fenêtres ne furent condamnées qu’en 1699. La construction du petit oratoire, qui se situerait alors pratiquement à son emplacement, pourrait en avoir maintenu la mémoire.

Cette chapelle existe déjà au XVe siècle et a pour titulature Sainte-Anne. En effet, le bail de 1508[41] stipule que le fermier doit faire couvrir de chaume la grange et les deux écuries, et de tuiles tous les autres bâtiments, y compris le four et la « chapelle Sainte-Anne ». Une clause stipule que chaque année, le jour de la Sainte-Anne (le 26 juillet), l’abbé ou le prieur, accompagné de quelques moines, devait se rendre à la ferme d’Ithe. À cette occasion, les moines y célèbrent un office et le bailleur doit réciter son bail, pour le confirmer.

On ne peut savoir si la chapelle existe dès l’origine de l’installation des convers cisterciens. Comme le souligne Jérome Blachon, « le vocable de Sainte-Anne est tardif, et l’interprétation rigoureuse de la règle de saint Benoît par les cisterciens leur interdisait de célébrer la messe, et donc d’avoir une chapelle, dans leur grange. Rappelons toutefois que les granges pouvaient posséder, jusqu’en 1180, un oratoire avec un autel »[42].

Quoi qu’il en soit, elle a donné son nom à la foire qui se tenait devant la ferme aux XVIe et XVIIe siècles (peut-être plus anciennement, mais aucun document ne permet de le certifier), si réputée que la Sainte devint la patronne du village de Jouars. Plusieurs rapports de police mentionnent en effet de nombreux marchands, des merciers, des toiliers, des boulangers, des chapeliers et des cabaretiers. Le prévôt rapporte que ces derniers vendent du vin, du cidre, et de la viande. La foire a une sphère d’influence assez large, puisque des marchands de Dreux, de Montfort et de Trappes sont présents.

Après le rachat de la ferme par les Phélypeaux, la tradition s’est conservée et c’est le curé de Jouars qui célébrait la messe au matin de la foire. Le nombre de marchands grandissant, ils ne pouvaient s’installer tous à proximité de la ferme. En 1705, elle est alors déplacée sur la place de l’église de Jouars et commence toujours par une messe donnée cette fois dans l’église. La date de sa disparition est inconnue ; la Révolution y a peut-être mis un terme ?

III.3. Les aménagements modernes

Au sud-est de la ferme se trouve une vaste mare (Fig. 14), ancien vivier cistercien alimenté à l’origine par une dérivation de la Mauldre située à environ sept cents mètres environ en amont. Agrandie au XVIIIe puis au XIXe siècle, elle est à ce moment mise en eau par pompage. Le bras que servait à l’alimenter est alors comblé. Elle servait jusqu’aux derniers temps de l’activité agricole de la ferme, au milieu du XXe siècle, d’abreuvoir pour le bétail.

Les observations menées sur la ferme ont également montré qu’un réseau hydraulique se développe aux abords et dans les bâtiments sous la forme de canalisations en pierre. Il est probable qu’une partie de ces aménagements date de la période cistercienne et servait déjà aux usages agricoles et domestiques du site.

Si, dès la fin du XVIIe siècle, Louis de Phelypeaux, engage de nombreux travaux sur les bâtiments de la ferme, les abords bénéficient également d’attentions particulières. On signalera la présence, du côté oriental, d’allées pavées reliant les portes des granges et étables aux terrains agricoles en franchissant, par un pont, le chenal d’évacuation des eaux de la mare (Fig. 15)[43]. L’axe ainsi formé, s’inscrit dans les tracés, connus par les plans et documents d’archives, qui se rattachent aux aménagements des jardins du château et de la « plaine de Jouars », dont on sait qu’ils sont l’œuvre de Le Nôtre qui crée à cette occasion la plus longue perspective qu’il ait réalisée, totalisant plus de dix kilomètres. On a peut-être là un indice de la matérialité de ce vaste projet qui ne fut jamais réalisé dans son ensemble.

Plus généralement, l’acquisition de la ferme d’Ithe permet à Louis Phélypeaux[44] d’entamer un vaste projet de remembrement de ses terres, ainsi qu’un programme d’exploitation basé sur le principe de la ferme générale. La ferme d’Ithe, avec le rachat de nombreuses terres entre 1692 et 1703, devient alors l’une des fermes les plus importantes possédées par le seigneur de Pontchartrain[45]. Plusieurs observations laissent penser que c’est très certainement comme « ferme modèle » qu’est transformée et aménagée la ferme d’Ithe dès cette époque, sans doute pour répondre aux nouveaux critères de production agricole, tant du point de vue de son organisation interne (fonction des différents bâtiments) que dans le soin apporté à leur hygiène (solutions technique et qualité architecturale)[46]. La gestion agricole est dorénavant guidée par un impératif de rentabilité.

Le XIXe siècle confortera cette situation par la technique : introduction du béton armé dès les années trente, électrification, machines agricoles, nouvelles constructions qui répondent alors à l’évolution rapide du monde rural.

 La ferme d’Ithe verra sa longue histoire s’achever après la seconde guerre mondiale. Durant l’été 1944, un incendie, dû à une batteuse, se déclare dans la grange qui ferme la cour au nord. Cette dernière est totalement détruite ainsi que la moitié de l’aile occidentale (étables et écuries). L’exploitation ne s’en remettra jamais et va lentement péricliter. Le bâtiment d’habitation est ensuite loué et sera occupé jusqu’au début des années soixante avant d’être définitivement abandonné. Les bâtiments, non entretenus, se dégradent progressivement puis servent aux récupérateurs de matériaux dès les années soixante-dix. Quelques dizaines d’années auront été suffisantes pour rendre à l’état de pans de murs ce site de près de deux mille ans d’histoire.

IV. Conclusion

Le site de la Ferme d’Ithe et de l’agglomération antique de Diodurum pose la question de la continuité et des modalités d’une occupation sur la très longue durée, de l’Antiquité jusqu’à nos jours, la ferme ayant été définitivement abandonnée dans la seconde moitié du XXe siècle. Tous les champs d’étude et de recherche diachroniques y sont mobilisés : histoire, archéologie, sources textuelles et iconographiques, architecture, paysage, mais aussi restauration et valorisation…

C’est sous ce double éclairage de pluri-disciplinarité et d’inter-disciplinarité qu’il prend tout son sens. C’est un jalon monographique indissociable du territoire dans lequel il s’inscrit. Son sauvetage, son étude, sa mise en valeur, permettront d’en faire un espace pédagogique et illustratif d’un patrimoine rare et porteur de sens, tant localement et régionalement qu’à plus grande échelle.

Fig. 1

Fig. 1 : carte de l’Ile-de-France et situation de la Ferme d’Ithe.

Fig. 2

Fig. 2 : plan de la ferme d’Ithe avec les différents sondages et zones de fouilles 2004-2010 (DAO : Olivier Blin).

Fig. 3

Fig. 3 : la chapelle des xviiie-xixe siècles à la fin des années cinquante (photo. Jean Christmann).

plan jouars def

Fig. 4 : le site antique de Diodurum,, d’après les fouilles et la photo-interprétation (Olivier Blin et Jean-Michel Morin, 1999).

Fig. 5

Fig. 5 : bloc sculpté comportant l’inscription VICANI et sans doute leur représentation (photo. Olivier Blin)

Fig. 6

Fig. 6 : vue générale de la fouille de la zone 7, avec sur la gauche au premier plan, le radier de la rue antique surmontée des couches d’occupation du haut Moyen-Âge et, au milieu, en diagonale, la tranchée de récupération et vestiges du mur médiéval probablement cistercien (photo. Olivier Blin).

Fig. 7

Fig. 7 : cartes postales de la fin du xixe siècle montrant divers aspects de la ferme.

Fig. 8

Fig. 8 : les deux états reconnus du bâtiment d’habitation cistercien (DAO : Olivier Blin).

Fig. 9

Fig. 9 : la sole de cuisine cistercienne (au premier plan) et la base de colonne du XVIe siècle (photo. Olivier Blin).

Fig. 10

Fig. 10 : photo de la façade du four à pain du début du xvie siècle (photo. Olivier Blin).

Fig. 11aFig. 11b

Fig. 11 a et b : ouvertures du premier état avec linteau en bâtière et ouverture double du même type noyée dans les bouchages et réaménagements du bâtiment au cours du temps (photos. Olivier Blin).

Fig. 12

Fig. 12 : restitution des ouvertures cisterciennes en façade du bâtiment d’habitation à partir des témoins conservés (relevés et DAO :Camille Vosgien).

Fig. 13

Fig. 13 : vue de la chapelle lors de son dégagement en 2004 (photo. Olivier Blin).

Fig. 14

Fig. 14 : la mare et la série de sondages réalisée en 2007 dans son comblement (photo. Olivier Blin).

Fig. 15

Fig. 15 : l’allée pavée à l’est de la ferme donnant accès aux terres de pâtures au xviiie siècle (photo. Olivier Blin).

 

SOURCES MANUSCRITES

  • Fonds de l’abbaye cistercienne de Notre-Dame des Vaux de Cernay, 45 H (Série H, archives écclésiastiques). Archives départementales des Yvelines (A.D.Y.).
  •  Fonds de Pontchartrain, 48 J (Série J, archives privées). Archives départementales des Yvelines (A.D.Y.).
  •  Fonds de Pontchartrain. 257 AP (Série AP, archives privées). Archives nationales (Arch. nat.).
  •  Titres de propriétés hors Paris de l’évêché de Paris, S 1125 (Série S, biens confisqués des établissements religieux). Archives nationales (Arch. nat.).

SOURCES PUBLIÉES

  • Otto HIRSCHFELD, Corpus Inscriptionum Latinarum, Inscriptiones Trium Galliarum et Germaniarum Latinae, Berlin, 1899.
  •  Itinéraires d’Antonin. Parthey et Pinder, Berlin, 1848.
  •  Jules MARION, Cartulaire du prieuré de Notre-Dame de Longpont, de l’ordre de Cluny, au diocèse de Paris, xie-xiie siècles, imprimerie Perrin et Marinet, Lyon, 1879, in 8°, 371 p.
  •  Lucien MERLETet Auguste MOUTIÉ, Cartulaire de l’abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay, de l’ordre de Citeaux au diocèse de Paris, composé d’après les chartes originales conservées aux archives de Seine-et-Oise, Paris, Plon, 1857-1858, 2 tomes en trois volumes in-4° et un atlas in-fol. (Société archéologique de Rambouillet)
  •  Anne TERROINE, Lucie FOSSIER et Yves de MONTENON, Chartes et documents de l’abbaye de Saint-Magloire, Paris, tomes II et III, 1966-1998, trois volumes in 8° (Documents, études et répertoires publiés par l’Institut de recherche et d’histoire des textes. XII : Chartriers des anciennes abbayes de la ville de Paris, I).
  • -Editions d’actes, de 1280 au début du XVe siècle, compris entre les cotes L 440 et L 451, sous la cote LL 39 et entre les cotes S 1066A et S 1097, S 1140 et S 1160.
  • -Tome I : Fin du Xe siècle-1280, Paris, 1998, CNRS éditions, in-8°, 633 p., 5 cartes et plans.
  • -Tome II : Actes de 1280 à 1330, Paris, 1966, XII-712 p.
  • -Tome III : Actes de 1330 au début du XVe siècle, Paris, 1976, LXX-914 p.

[1] Olivier BLIN, Jouars-Pontchartrain (78 Yvelines), le site d’agglomération antique de « la Ferme d’Ithe, (Diodurum) ». Projet patrimonial et archéologique, rapport d’étude. Ville de Jouars-Pontchartrain, Afan, Antenne Centre-Ile-de-France, SRA, Ile-de-France, Septembre 2000.

[2] Ce programme comprenait aussi le déboisement, débroussaillage et défrichage du site, le dégagement des bâtiments de leurs remblais de destruction, la mise en sécurité (clôture), la consolidation et protection des murs, ainsi que l’entretien général de l’ensemble. Le projet s’est également attaché à compléter la documentation archéologique, d’une part par la mise en place d’un programme de fouille dans le cadre de chantiers-écoles universitaires et le récolement et l’inventaire des collections privées ou publiques accessibles (prospecteurs, collections anciennes et privées). La publication de l’ensemble des données, incluant les fouilles préventives et les travaux programmés est en cours.

[3] Olivier BLIN, dir., avec la collaboration de François Boyer, Bruno Foucray (SRA Ile-de-France) Camille Vosgien, Annie Lefevre (Inrap), Sébastien Lepetz (CNRS) Véronique Pissot (Inrap), Pierre-Jean Trombetta (SRA Ile-de-France) Jean-Hervé Yvinec (Inrap), Synthese sur la campagne archéologique programmée (2006-2009), APSADiodurum, INRAP ; SRA Ile-de France, 2009 (2 Vol.), et Olivier BLIN, dir., avec la collaboration de Camille Vosgien et la participation de Florence Moret-Auger (Inrap), Annie Lefevre (Inrap), Véronique Pissot (Inrap), « Le Tremblay-sur-Mauldre (Jouars-Pontchartrain), “La Ferme d’Ithe” (78 – Yvelines). Campagne 2010, Synthèse historique, archéologique et architecturale du bâtiment d’habitation cistercien (bâtiment 1). Données archéologiques sur les zones 7 et 8 » APSADiodurum, INRAP ; SRA Ile-de France, 2010.

[4] Jean CHRISTMANN, « Un habitat antique entre Jouars et Ithe aux deux premiers siècles », Mémoires et Documents de la SHARY, t. LXXXIII, 1968-1970, p. 95-102, et aussi François ZUBER, « Prospection systématique dans le canton de Montfort-l’Amaury », in Mémoires de la Société Historique et Archéologique de Rambouillet et de l’Yveline, t. XXXIII, 1968-1970, p. 43-58.

[5] François ZUBER, « Diodurum, un bourg à vocation administrative et commerciale »in Les Yvelines de la préhistoire au Moyen-Age, catalogue d’exposition, 1986, p. 44-45.

[6] Olivier Blin, dir., et alii « Impact anthropique et gestion du milieu durant l’Antiquité. L’approche paléoenvironnementale pluridisciplinaire du site de « La Ferme d’Ithe » à Jouars-Pontchartrain (Yvelines) », in Les Nouvelles de l’Archéologie, n° 78, Paris, Errance, 4e trimestre 1999.

[7] Dont le nom viendrait du latin basilica, dont le sens premier serait « marché couvert, relais commercial le long d’une voie romaine » (Jean Marie RICOLFIS, Les noms de lieux de Paris et de l’Ile-de-France, Paris, Centre Régional de Documentation Pédagogique de Paris (CDRP), 1985, p.13), et qui désignerait également la limite de cités (Albert GRENIER, Manuel d’archéologie gallo-romaine, Paris, 1931-1960, p. 183), puis celle de territoires ecclésiastiques (ibidem, t. II ; p. 262).

[8] L’inscription se trouve sur un bloc sculpté ayant appartenu à un monument attaché à un sanctuaire et daté de la fin du ier siècle de notre ère (Olivier BLIN, « Le sanctuaire nord-ouest de l’agglomération antique de « La Ferme d’Ithe » à Jouars-Pontchartrain (Yvelines) », in Archéologie des sanctuaires en Gaule romaine, Actes du colloque du 27 mai 1999, Université Jean-Monnet, Saint-Etienne 2000. p. 104 et 113) et voir aussi Caroline BACON, Sculpture et épigraphie en Ile-de-France : le monument de Jouars-Pontchartrain (Yvelines), mémoire de maîtrise d’histoire de l’art et archéologie réalisé sous la direction de Jean-Charles BALTY, Paris IV, 2000).

[9] Caroline BACON, Sculpture et épigraphie en Ile-de-France : le monument de Jouars-Pontchartrain (Yvelines), mémoire de maîtrise d’histoire de l’art et archéologie réalisé sous la direction de Jean-Charles BALTY, Paris IV, 2000.

[10] Jean-Michel MORIN, Déviation de la R N 12. Diodurum, agglomération antique de Jouars Pontchartrain. Sondages de diagnostic, 17 oct. – 20 nov. 1989, Service archéologique départemental de Yvelines, 1989.

[11] Olivier BLIN, « Le sanctuaire nord-ouest de l’agglomération antique de « La Ferme d’Ithe » à Jouars-Pontchartrain (Yvelines) », in Archéologie des sanctuaires en Gaule romaine, Actes du colloque du 27 mai 1999, Université Jean-Monnet, Saint-Etienne 2000.

[12] Jean-Michel MORIN, « Un atelier de potier du milieu du premier siècle après J.-C. à Jouars-Pontchartrain (Yvelines) », Bulletin archéologique du Vexin français, n° 25, 1992, p. 113-122, et Jean-Michel MORIN, « La production d’un atelier du Haut-Empire découvert à Jouars-Pontchartrain (Yvelines) », in Trésors de terre, céramiques et potiers dans l’Ile-de-France gallo-romaine, Catalogue de l’exposition, Versailles, 1993, p. 128-131.

[13] Olivier BLIN, dir., et alii, « Impact anthropique et gestion du milieu durant l’Antiquité. L’approche paléoenvironnementale pluridisciplinaire du site de « La Ferme d’Ithe » à Jouars-Pontchartrain (Yvelines) », in Les Nouvelles de l’Archéologie, n° 78, Paris, Errance, 4e trimestre 1999.

[14] Olivier BLIN, dir., et alii, « Etude numismatique et stratigraphique d’un secteur d’habitat de l’agglomération secondaire antique de Jouars-Pontchartrain (Yvelines) ; les phases tardives du IIIe au milieu du IVe siècle », in Pierre OUZOULIAS, Paul VAN OSSEL (dir.), L’époque romaine tardive en Ile-de-France, document de travail n°5, Paris, mai 2001.

[15] Richard MACPHAIL, « The reworking of urban stratigraphy by human and natural processes », in Urban-rural connexions perspectives from environmental archeology, Symposium, Oxbow Monograph 47, 1999 p. 13-43.

[16] Mentionné dans Jean-Michel MORIN, Déviation de la R N 12. Diodurum, agglomération antique de Jouars Pontchartrain. Sondages de diagnostic, 17 oct. – 20 nov. 1989, Service archéologique départemental de Yvelines, 1989.

[17] Olivier BLIN, Patricia GUINCHARD, Véronique PISSOT, « Jouars-Pontchartrain (Yvelines). Edifice funéraire dans l’agglomération antique de « La Ferme d’Ithe » (Diodurum), in Les premiers monuments chrétiens de la France, 3. Ouest, Nord et Est (Atlas archéologiques de la France), Paris, Picard, 1998, p. 219-226.

[18] Des découvertes anciennes signalent d’autres sépultures à sarcophages dans ce même secteur.

[19] Edmond SERVAT, « La nécropole mérovingienne de Vicq », Connaître les Yvelines. Histoire et Archéologie, juillet-août, 1980, p. 3-14.

[20] Benjamin GUERARD, Le polyptique de l’abbé Irminon, Paris, 1844, 2 vol.

[21] Luc BOURGEOIS : Territoires, réseaux et habitats. L’occupation du sol dans l’ouest parisien du Véme au Xème siècle, thèse de doctorat d’archéologie, sous la direction de Jean Marie DENTZER, université de Paris I, 1995, 3 vol.

[22] Oliver BLIN, dir. avec la collaboration de Véronique Pissot (Inrap) et Pierre-Jean Trombetta (SRA Ile-de-France), Le Tremblay-sur-Mauldre / Jouars-Pontchartrain, “La Ferme d’Ithe” (78 – Yvelines). Sondages de reconnaissance archéologique, 15/07/2004 – 15/08/2004, APSADiodurum, SADY ; SRA Ile-de France, 2004, et Olivier BLIN, dir., avec la collaboration de Véronique Pissot (Inrap), Le Tremblay-sur-Mauldre (Jouars-Pontchartrain), “La Ferme d’Ithe” (78 – Yvelines). Campagne archéologique programmée, 18/07/2005 – 12/08/2005, APSADiodurum, SADY ; SRA Ile-de France, 2004.

[23] Le temporel de l’abbaye est constitué par une quinzaine de granges (Simone LEFEVRE : « Les granges de l’abbaye des Vaux-de-Cernay dans les Yvelines », Pays d’Yvelines, de Hurepoix et de Beauce, N°28, 1985, p. 25-30).

[24] Lucien MERLET, Auguste MOUTIÉ, Cartulaire de l’abbaye Notre-Dame des Vaux-de-Cernav, 1857-1858, vol. 1, texte n°xxiv, p. 31-36.

[25] Jean Christman, op.cit.

[26] Ernest NÈGRE, Toponymie générale de la France, étymologie de 3500 noms de lieux. Librairie DROZ, Genève, 1990.

[27] Raymond CHEVALIER, Les voies romaines. Coll. U; Paris, 1972.

[28] Guy Marie CLAISE, Dictionnaire de Seine-et-Oise. Ethymologie. Topographie. Archéologie. 1962. Multigraphié.

[29] Dans une confirmation des biens de l’abbaye par l’évêque diocésain Théobald, évêque de Paris (Lucien MERLETet Auguste MOUTIÉ, Cartulaire de l’abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay, 1857-1858, vol. 1, p. 18-19).

[30] Résumé d’une visite de la ferme en 1517 : Dix ans après la signature du bail de 1507, plusieurs religieux de l’abbaye, ainsi que les artisans qui ont travaillé à la rénovation de la ferme (deux maîtres charpentiers, un maître maçon et un maître couvreur), effectuent une visite, relatée dans un acte. Y sont décrites les réparations réalisées, qui sont celles demandées en 1507, augmentées de réparations supplémentaires, effectuées, semble-t-il, à l’initiative du seul preneur Jean Hervé. Nous apprenons que la grange, dont la couverture de chaume et les charpentes étaient en très mauvais état, a été couverte de tuiles et ses bois remplacés. Le mur de l’enclos a été enduit de chaux. Les étables ont été couvertes de tuiles et les bois ont été renouvelés. La bergerie a été construite, en pierre avec une couverture de tuiles, et elle est bien plus grande que prévue, puisqu’elle mesure neuf fermes sur « cinq ou six fermes de long ». Le logement du fermier et la chapelle ont été également couverts de tuiles. Le four a été reconstruit au bout de la maison du fermier et le colombier a été bâti en pierre, avec charpente et couverture. Le texte donne également des indices sur l’organisation des bâtiments : les étables se trouvent « entre la grange et la porte du lieu », et la bergerie est « de l’autre côté de la porte dudit lieu ». (A.D.Y. 48J 570 (2), liasse 16).

[31] Jérôme BLACHON, « Des cisterciens aux seigneurs laïques : histoire de la ferme d’Ithe, XIIe-XVIIIe siècles », in Paris et Ile-de-France, Mémoires publiés par la Fédération des Sociétés Historiques et Archéologiques de Paris et Ile de France, t.49, Paris, 1998.

[32] Camille VOSGIEN, La grange cistercienne de « La Ferme d’Ithe » (Jouars-Pontchartrain, 78) : économie de la construction du bâtiment d’habitation, Mémoire de Master 1 d’Archéologie Médiévale sous la direction de Florence JOURNOT, 2 vol., Paris 1, 2007, et Camille VOSGIEN, Archéologie du bâti de la grange cistercienne de la « Ferme d’Ithe » à Jouars-Pontchartrain (78) : le bâtiment d’habitation, Mémoire de Master 2 sous la direction de Florence JOURNOT, 2 vol., Université de Paris 1, 2010.

[33] Louis MORIZE, Etude archéologique sur l’abbaye de Notre Dame des Vaux-de-Cernay, de l’ordre de Cîteaux et de l’Etroite Observance, au diocèse de Paris, résumé historique et description du monastère, accompagné de 50 planches au trait. Précédé d’une introduction avec 9 planches par le comte A. de DION, Delis frères, Tours, 1889, planche VI.

[34] Jérôme BLACHON, « La Ferme d’Ithe » : Evolution et exploitation d’un terroir de l’Antiquité au début du XVIIIe siècle, Mémoire de Maîtrise d’Histoire médiévale, sous la direction de Monique BOURIN, Université de Paris I-Panthéon-Sorbonne, 1996.

[35] William FOLKESTAD et Joan NILSSON, « Les linteaux en bâtière romans d’Auvergne. Recherche sur la typologie et les origines », Cahiers de civilisation médiévale, vol. 38, n° 3, 1995, p. 227-237.

[36] On note leur présence dans le château de la Madeline à Chevreuse, daté du xiie siècle, plusieurs linteaux en bâtière sont aussi visibles au château de Brie-Comte Robert, qui seraient à placer dans la construction de la fin du xiie-début du xiiie siècle. À Provins, une maison comporte deux baies géminées couvertes par des linteaux en bâtière (Yves ESQUIEU et Jean-Marie PESEZ, Cent maisons médiévales en France (du XIIe au milieu du XVIe siècle). Un corpus et une esquisse, Editions du CNRS, Paris, 1998), datées du xiiie siècle.

[37] Olivier BLIN, dir., avec la collaboration de François Boyer, Bruno Foucray (SRA Ile-de-France) Camille Vosgien, Annie Lefevre (Inrap), Sébastien Lepetz (CNRS) Véronique Pissot (Inrap), Pierre-Jean Trombetta (SRA Ile-de France) Jean-Hervé Yvinec (Inrap), Synthese sur la campagne archéologique programmée (2006-2009), APSADiodurum, INRAP ; SRA Ile-de France, 2009 (2 Vol.), p. 49-50.

[38] Vincent Bernard et Yann le Digol, CNRS, Rennes II.

[39] À cet égard, il faut signaler la découverte au nord de la ferme d’une imposante fondation de mur dont l’orientation est similaire à celle du bâtiment d’habitation étudié. Sa largeur est d’1,10 m et il est constitué d’imposants blocs de calcaire (blocs antiques récupérés ?), de grès et de meulières. Un sol de limon s’y rattache et se trouve perforé par une fosse qui contenait de mobilier du xive siècle. Il faut donc le rattacher au moins à la phase primitive de la ferme, voire plus anciennement. Son dégagement n’ayant été que très partiel, il est impossible de conclure plus avant.

[40] Comme le montre l’un des plans du film « Paris brûle-t-il ? » de René Clément.

[41] Archives Départementales de Yvelines, côte 48J 570(2), liasse 13.

[42] Jérôme Blachon, 1996., op.cit. Après cette date en effet, le Chapitre Général interdit d’y célébrer la messe, et les oratoires ne doivent plus posséder d’objets du culte. Cette défense est renouvelée en 1204, et ils doivent même être détruits. Mais cet ordre ne fut pas appliqué scrupuleusement (Marcel PACAUT: Les moines blancs. Histoire de l’ordre de Cîteaux, Fayard, Paris, 1993, p. 258). Mais en 1255, le pape Alexandre II accorde, à la demande du Chapitre Général, le droit d’y célébrer des offices, pour les granges les plus éloignées de l’abbaye, à condition qu’aucun laïc n’y assiste (Marcel AUBERT : L’architecture cistercienne en France, éd. d’Art et d’Histoire, Paris, 1943, 2 t.). C’est peut-être ce qui s’est passé à la ferme d’Ithe.

[43] Les travaux touchent également le paysage. En 1693-1694, le cours de la rivière est régulé et déplacé vers l’ouest, après la ferme, acquérant ainsi son tracé actuel. Les berges du nouveau cours sont aménagées en août 1693 et elles sont plantées d’ormes en janvier 1694. Enfin, l’ancien lit est comblé en août de la même année (Archives Départementales des Yvelines, côtes 48J 263 à 48J 272).

[44] Acte passé entre Louis Phélypeaux et Armand-Louis Bonnin de Chalucet, abbé commendataire de l’abbaye des Vaux-de-Cernay le 12 août 1692. Louis Phélypeaux est née 29 mars 1643. En 1661, il est Conseiller au Parlement de Paris et Commissaire aux enquêtes du palais, puis il est le premier Président du parlement de Bretagne (1667), Intendant des finances (1687), Contrôleur général des finances (1689), Secrétaire d’Etat à la marine et à la Maison du roi en 1690, charge que conservent ses descendants jusqu’en 1749.

[45] Comme le montre l’analyse menée par Jérôme BLACHON, « La Ferme d’Ithe » : Evolution et exploitation d’un terroir de l’Antiquité au début du XVIIIe siècle, Mémoire de Maîtrise d’Histoire médiévale, sous la direction de Monique BOURIN, Université de Paris I-Panthéon-Sorbonne, 1996.

[46] C’est le frère Romain (1647-1735) qui, en plus d’avoir dirigé les aménagements du château et du parc, a également supervisé les réfections de la ferme (Marie-Huguette HADROT, Georges POISSON, « Le domaine de Pontchartrain », Paris et Ile-de-France, mémoires publiés par la Fédération des Sociétés Historiques et Archéologiques de Paris et de l’lle-de-France, 1978 (1979), LXXIX, in 8°, p. 227-266).

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