Friedrich Overbeck illustrateur : La passion de notre seigneur Jésus Christ publié par Léon Curmer (1843)

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Alexandre Page

Résumé
L’article vise à étudier la place prise progressivement par l’artiste allemand Friedrich Overbeck dans le paysage artistique français, et cela, particulièrement par le biais de sa collaboration avec l’éditeur Léon Curmer. Sans proposer une étude exhaustive, il s’agira surtout de comprendre les raisons pour lesquelles Overbeck devint attractif dans les années 1830-1840 en France dans le contexte d’un réel bouleversement de l’art religieux. Par ailleurs, au travers d’une étude de cas plus précise, celle de la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ, il s’agira de comprendre comment Curmer, éditeur de luxe par excellence et Overbeck, incarnation de l’ascétisme religieux purent converger et former un duo marquant jusque dans les années 1850.

Alexandre Page : Laboratoire CHEC (Université Blaise Pascal, Clermont-Ferrand). Né le 18 septembre 1989, doctorant de 2e année en Histoire de l’Art contemporaine sous la direction de Mme Catherine Cardinal, je mène une thèse sur le graveur et illustrateur Léopold Flameng. Mes travaux portent principalement sur les arts graphiques au XIXe siècle, sur les rapports texte-image mais aussi sur le peintre François Flameng. Je dresse actuellement le catalogue raisonné de l’artiste, dans la continuité de mon Master II. Parmi mes publications récentes : « Les gravures de Léopold Flameng pour le Sabot de Noël d’Aimé Giron », in Bulletin historique de la Société académique du Puy, vol. LXXXIX, 2013, p. 85-96.


Dans son article, Rome, lieu de rencontre : la réception de l’art nazaréen en France, Sabine Fastert rappelait de manière fort juste l’intérêt qu’avaient eu les Nazaréens pour les arts graphiques, d’une part, et d’autre part, l’importance que ces mêmes arts graphiques avaient eue dans la diffusion du mouvement nazaréen en France [1]. Si la suite de sa démonstration cherchait à relativiser cette affirmation à l’aune du poids considérable et sous-estimé de la peinture murale dans le mouvement, elle n’en reste pas moins une réalité. Dans sa thèse de doctorat, Jean-François Luneau soulignait toute la place qu’eurent en France les images pieuses publiées, entre autres, par la Société pour la propagation des bonnes gravures religieuses de Düsseldorf, laquelle s’adressait largement aux Nazaréens pour des compositions destinées à s’exporter à l’étranger [2]. Ce sont ainsi quantités d’images pieuses, qui circulèrent et portèrent, avec le soutien de personnalités d’influence comme le comte de Montalembert, non seulement le fait religieux, mais encore l’esthétique « primitiviste » si caractéristique de l’art nazaréen.Ce mouvement originellement allemand, mais qui eut des influences plus ou moins marquées chez des artistes français ou britanniques, à l’image du préraphaélite Ford Madox Brown, se structura à partir de 1808-1809 avec la fondation de la confrérie de Saint-Luc. Cette-dernière se posait autant comme une structure d’émulation créative que spirituelle, au sens religieux, et réunissait alors de jeunes artistes qui souhaitaient prendre le contrepied de l’enseignement académique. Parmi eux se trouvaient Johann Friedrich Overbeck, Franz Pforr, Philip Veit, et, plus tardivement, en 1811, celui qui joua un rôle majeur dans la réflexion théorique du mouvement, Peter von Cornélius. Il s’agissait pour eux de remettre au premier plan la religion dans l’œuvre, et non plus, comme cela leur semblait être le cas depuis la Renaissance qui les inspirait, de prendre le sujet religieux comme prétexte à une création artistique. Ils concrétisaient alors la pensée de Frédéric Schlegel, philosophe et théoricien du romantisme, qui depuis 1803, prônait un retour à un art primitif, qui, comme le rappelait Brigitte François-Sappey dans La musique dans l’Allemagne romantique [3], était le « seul juste et naïf » qui méritait de s’adresser à l’œil et à l’esprit. Puisant leurs modèles tant dans la Renaissance allemande qu’italienne, s’installant même à Rome pour en mieux saisir les œuvres de Giotto ou du Pérugin, ils constituèrent le pan essentiel du Hochromantik allemand [4], considéré comme la période d’apogée du romantisme outre-Rhin.

Il ne s’agira pas ici de considérer toutes les manières par lesquelles le courant nazaréen a été diffusé en France dans la première moitié du XIXe s., mais de s’attacher spécialement à un exemple, provenant de la relation entre un des leaders du mouvement, à savoir Friedrich Overbeck, et un éditeur français appelé à jouer un rôle très important : Curmer. Il sera bien entendu question de comprendre comment cet artiste allemand en est arrivé à collaborer avec un jeune éditeur, et de voir comment cette collaboration a débouché, en 1843, sur un ouvrage témoin : La Passion de Notre-Seigneur Jésus Christ. Un livre d’apparence mineure, mais qui révèle toute l’originalité du rapport improbable entre un éditeur de livres au luxe souvent frivole, et un peintre soucieux pour sa part d’une revivification de la spiritualité en art, et adepte à l’inverse d’une grande simplicité d’expression.

I- En finir avec Raphaël pour une renaissance de l’art religieux français

L’introduction du mouvement nazaréen en France commence dans les années 1830 mais trouvera pleinement son rythme dans les années 1840, et se place dans le contexte d’un conflit, souvent abordé de manière caricaturale mais désormais largement ancré dans la tradition, entre une tendance dite « classique » et l’émergence d’une tendance romantique. De manière traditionnelle, les Nazaréens sont rattachés à cette seconde tendance, et, dans un article du Journal des Beaux-Arts de 1866, l’auteur, anonyme, allait jusqu’à indiquer que les deux courants de l’art romantique se « montrèrent complètement développés dans leurs célèbres représentants, Overbeck et Cornélius. » [5] Tous deux appartenant à la mouvance nazaréenne, qu’initia même le premier. Néanmoins, Théophile Thoré, dans la Revue du progrès politique, social et littéraire, associait la démarche des Nazaréens allemands à celle d’Ingres, considéré comme l’idéal du classicisme, et l’opposait à la démarche du romantisme français avec fermeté :

« D’un coté, le génie métaphysique de l’Allemagne se rejeta avec un enthousiasme naïf au beau milieu de l’époque catholique, afin de restaurer toute une tradition perdue ; d’un autre coté, l’école française sous le nom de romantisme, brisa violemment avec toutes les traditions antérieures, païennes ou chrétiennes, et ne demanda plus sa pensée et sa forme qu’à sa spontanéité individuelle et aux fantaisies de son invention. […] En France, même, ces deux éléments coexistent, M. E. Delacroix et M. Decamps représentant la fantaisie, et M. Ingres tenant par quelques points au système allemand ; car M. Ingres est aussi, à sa façon, un résurrectionniste du passé ; mais il n’a pas été aussi loin en arrière que les Allemands, il s’est arrêté au XVIe siècle et à Raphaël, tandis que l’école allemande se relie directement par le Pérugin, au spiritualisme exalté des mystiques du XVe siècle. » [6]

Il ne s’agit pas ici de resituer – si tant est que cela soit possible – le mouvement nazaréen dans le débat, trop dichotomique sans doute du romantisme et du néo-classicisme, cependant la remarque de Thoré est tout à fait intéressante, dans le sens où elle soulève une autre problématique très forte dans le contexte des années 1830-1840 et qui se poursuivra largement au-delà de cette période : la position des artistes par rapport à Raphaël, et plus spécialement celle de Friedrich Overbeck. Il apparait en effet dans l’historiographie récente, une tendance consistant à mettre Overbeck dans la liste des héritiers tardifs de Raphaël. Une opposition existerait d’ailleurs entre le courant préraphaélite anglais et celui des Nazaréens, héritiers allemands du peintre des Loges vaticanes. Pourtant, dans la critique du XIXe siècle, Overbeck est davantage rattaché au Pérugin, ou alors au jeune Raphaël, lorsque celui-ci marchait encore fidèlement dans les pas de son maître. Fortoul ne disait rien de différent, allant même plus loin que Thoré dans ses propos, écrivant :

« C’est à Overbeck qu’il faut remonter, lorsqu’on cherche la raison de ce qui se fait ici. Qui l’eut dit, que ce serait un Allemand qui rouvrirait dans Rome la source des inspirations chrétiennes ? Depuis que Raphaël, désertant la divine simplicité de Pérugin, avait pris pour maître le génie grec, retrouvé sous les ruines de la ville des papes, le paganisme n’avait cessé d’y régner en souverain. » [7]

Ce positionnement par rapport à Raphaël est essentiel pour saisir l’importance de la pénétration du mouvement nazaréen en France, qui non seulement s’installa en tant qu’esthétique, mais fit des émules sous la désignation des « Nazaréens français » [8], dont l’un des plus célèbres fut Émile Signol. En effet, l’art religieux, et spécialement dans le domaine de l’estampe et de l’illustration est dominé dans les années 1830-1840 par une tendance « raphaélite », celle désignée de manière très vague par l’adjectif « saint-sulpicien ». Ce terme est anachronique dans le cadre de la période qui nous intéresse, n’ayant été inventé que tardivement par Léon Bloy, qui l’utilisa en 1897. Il désigne toutefois assez bien un malaise de la période qui ne fera que s’accentuer au cours du XIXe siècle : la perte du sens religieux dans l’imagerie chrétienne.

Juliette Rolland a très bien résumé ce problème de l’image religieuse dans son ouvrage Art catholique et politique : France XIXe-XXe siècle, en donnant une définition d’une phrase de l’image religieuse à cette période : « images à garder, à posséder plutôt qu’à regarder. » [9] Hors, dans La femme pauvre, Léon Bloy associe largement cette esthétique « sulpicienne », simple art de l’imagerie, à l’héritage de Raphaël [10].

Alors certes, toutes ces considérations sont postérieures à la période nous intéressant, cependant ce qui séduisit ses contemporains chez Overbeck, c’est justement cette capacité à saisir le sens profond du religieux, en retrouvant l’ascétisme, la gravité seyant à la peinture religieuse, et oubliés depuis l’époque reculée des Pérugin et des Francia, depuis le « péché originel » de Raphaël, qui aux yeux de nombreux critiques du temps dépouilla la peinture religieuse de son sens sous les artifices. D’une certaine manière, le succès de l’art nazaréen en France, concomitant de la redécouverte et de la réappréciation des icônes orthodoxes [11], est lié à un même phénomène de reconsidération de la peinture religieuse préraphaélite et primitive.

II- La maison Curmer et la place faite à Friedrich Overbeck : la genèse d’une maison et l’émergence d’une relation

La librairie Léon Curmer, ouverte en 1834, s’imposa rapidement comme une des « faiseuses » de livres de luxe les plus en vue. L’annonce, en tête d’une brochure de 1839, des nouvelles parutions de la librairie, pose d’ailleurs de manière assez explicite cette envie de raffinement et d’élégance, qui domina les ouvrages estampillés Curmer : reliure en cuir de Russie, soie, velours, veau, fermoirs, armoiries, garnitures de volumes en or, en ivoire, en nielle, émaux de toutes couleurs, dorures, fleurons en relief, sans omettre les gravures sur acier et les chromolithographies, qui assurèrent la plus grande célébrité à la maison Curmer.

Celle-ci publia des ouvrages de toutes natures, dont le plus célèbre sans nul doute, par son ampleur et son caractère encyclopédique exceptionnel, tint dans la série des Français peints par eux-mêmes, à laquelle contribuèrent une pléiade d’auteurs de première importance, et la quasi-totalité des illustrateurs et graveurs célèbres dans les années 1830-1840. Néanmoins, Curmer se spécialisa largement dans le domaine de la publication religieuse. Il éditait notamment une collection intitulée Bibliothèque religieuse à l’usage des Dames chrétiennes [12], des missels de très grand luxe qui se prêtaient fort bien aux trésors de raffinement de la maison, et des ouvrages de piété. Il est une référence en la matière et dans la revue La Mode, il est possible de lire :
« Et qui de nous n’a acheté, pour lui-même, ou pour ceux qu’il aime ses superbes Évangiles, sa magnifique imitation et ses beaux livres d’heures ? Jamais livres de piété n’avaient été revêtus de tant de luxe, enrichis de tant d’illustrations, que ceux imprimés, édités par Curmer. » [13]

Pour l’ornementation de ses ouvrages, Curmer eut non seulement recours de manière active aux technologies nouvelles de reproduction, parmi lesquelles la chromolithographie qui devint la marque de fabrique du libraire-éditeur, mais encore aux techniques « traditionnelles » de gravure, sur bois et sur acier. Il s’attacha alors les services des meilleurs dessinateurs en vue d’exécuter les illustrations de ses volumes, et propulsa notamment les carrières de nombreux maitres de l’illustration romantique, à l’image de Tony Johannot ou Charles Marville.

Toutefois, Curmer ne se contenta pas de faire appel à des artistes français, et ne manqua pas d’avoir recours, occasionnellement, à des artistes étrangers. C’est le cas pour L’Irlande au XIXe siècle, ouvrage en deux volumes orné de cent-vingt gravures sur acier, par, dit le sous-titre de la réclame, « les premiers artistes de Londres. » Pour son Livre d’heures d’Anne de Bretagne en 1861, Curmer eut recours aux services de Franz Kellerhoven, artiste allemand installé à Paris, mais Curmer aura surtout une importante association avec le leader des peintres nazaréens allemands : Friedrich Overbeck.

Ce-dernier commença à collaborer avec Curmer dès 1841 pour un paroissien complet latin-français, dont il réalisa les douze compositions originales. Overbeck est alors installé à Rome depuis 1810. L’artiste est relativement peu connu en France, et nous ignorons concrètement les modalités de la rencontre entre le libraire-éditeur et le peintre, bien qu’il soit fort probable que l’entremise du comte de Montalembert ait joué un rôle majeur. D’ailleurs, ce-dernier écrit dans Du vandalisme et du catholicisme dans l’art :

« Le Couronnement de la Sainte-Vierge est un sujet à peu près inconnu ; mais nous espérons que le public français en aura une idée satisfaisante lorsque M. Curmer aura publié le Livre d’Église pour lequel nous avons eu le bonheur d’obtenir des dessins d’Overbeck. » [14]

Cette phrase témoigne du rôle d’intermédiaire joué aux origines des rapports Curmer-Overbeck par l’un des principaux artisans du renouveau catholique en France dans la première moitié du XIXe siècle. Toutefois, il est impossible d’ignorer aussi l’intérêt réel de l’éditeur pour l’art d’Overbeck. D’ailleurs, leur collaboration professionnelle déborda largement vers une amitié durable, si l’on en croit les écrits de Louise Collet, laquelle écrivait en 1864 : « Le peintre allemand Overbeck réside à Rome depuis bientôt quarante ans. […] M. Curmer, en relation avec l’artiste allemand, dont il avait publié plusieurs dessins, me conduisit à son atelier, situé au premier étage d’un vieux Palais. » [15]À la suite de cette première collaboration, Curmer publia une série d’ouvrages religieux illustrés par Overbeck : Passion de Notre-Seigneur Jésus Christ en 1843 [16], Compassion de la très Sainte Vierge en 1844, ou encore, plus tardivement, Les fêtes de l’Église romaine en 1854. À ces collaborations, il convient encore d’ajouter que dès 1844, fut publié un large article de René Ménard consacré à l’histoire de la peinture à fresque en Allemagne. Outre le fait qu’il mit en valeur Overbeck et ses confrères nazaréens, cet article fut publié dans le volume III des Beaux-Arts : illustration des arts et de la littérature, collection publiée par Léon Curmer.

Ces échanges sur plus d’une décennie ouvrirent considérablement la réputation d’Overbeck en France, laquelle jusque-là se limitait à relativement peu de choses. Ainsi en 1844 le peintre allemand devint-il associé étranger de l’Académie des Beaux-Arts de Paris, et René Ménard dans un autre article de 1870 qu’il consacra à Overbeck, écrivait :

« Il composa en outre un très-grand nombre de dessins qui furent gravés et popularisèrent son nom dans toute l’Europe. La belle édition des Évangiles, publiée par l’éditeur Curmer en 1842, a particulièrement contribué à sa réputation en France, et en 1844 l’Institut de France lui ouvrit ses portes comme membre correspondant de l’Académie des Beaux-Arts. » [17]

Par ailleurs, la collaboration avec Curmer ouvrit à Overbeck les portes d’autres maisons d’éditions en France, notamment celles de Pagnerre-Perrotin en 1846 ou celles de Schulgen qui diffusaient en France les gravures des Nazaréens de la Société de Düsseldorf.

III- Une collaboration Curmer-Overbeck : La Passion de Notre Seigneur Jésus Christ ou la recherche d’un nécessaire équilibre

Le titre exact de cet ouvrage édité par Curmer est La Passion de Notre Seigneur Jésus Christ suivant la concorde des quatre Évangélistes, précédée d’un pèlerinage à Jérusalem (figure 1), puisqu’en effet une part importante du volume paru en 1843 est composée du récit d’un voyage en Terre Sainte d’Émile de la Bédollierre. Néanmoins, seule la seconde partie est illustrée des compositions d’Overbeck.

Comme c’est constamment le cas dans les publications Curmer, l’illustrateur n’est jamais seul, aussi l’ouvrage présente-t-il, outre les huit gravures sur acier d’après Overbeck et exécutées par Keller de Düsseldorf, en début de chaque chapitre, deux gravures hors-textes en regard de la page de faux-titre et en page de faux-titre par Varin, une importante illustration de gravures sur bois dans le texte en noir et en couleurs par Cavelier, et deux importantes planches hors-textes dessinées par Chenavard et gravées par Verdeil, et imprimées en trois couleurs.

La première partie de l’ouvrage, celle évoquant le voyage de la Bédollierre, dépouillée des planches d’Overbeck, reprend fortement une constante de l’esthétique romantique : l’interpénétration appuyée du texte et de l’image, via un envahissement de la page par la gravure, qui rogne de plus en plus sur le texte, réduit parfois à une portion inférieure, et l’absence de contours et de délimitations de ces mêmes gravures, permettant de fait une interaction plus grande et une unité plus appuyée de la typographie et de l’iconographie. Michel Mélot, grand spécialiste de l’illustration, l’expliquait fort bien, parlant pour le livre romantique d’une « esthétique luxuriante enfin, de l’illustration, qui déborde le texte, le pénètre, l’envahit et souvent même, aux yeux innocents, le voile. » [18]

Curmer était passé maitre en la matière, et de manière beaucoup plus sensible encore dans certains de ses chefs-d’œuvre, telle sa fameuse édition de Paul et Virginie publiée en 1838.

La seconde partie du volume est d’une nature fort différente, avec une interaction texte-image qui n’a rien à voir avec celle précédemment évoquée. Les têtes des chapitres sont strictement ornementales, composées de motifs floraux ou d’éléments d’orfèvrerie, et sont, tout comme les culs-de-lampes, qui conservent un caractère narratif, strictement délimitées et largement coupées du texte. Les gravures sur acier, par leur nature même sont détachées de la typographie, et seules des lettrines créent un semblant de liaisons texte-images – bien que dans ce-dernier cas, encore, le choix de la couleur rouge pour l’impression des lettrines entretienne une rupture supplémentaire à l’œil. Ce travail sur la couleur est d’ailleurs essentiel, tant il délimite et ordonne l’ouvrage. Outre le rouge, les têtes des chapitres et culs-de-lampes sont pour leur part imprimés en sépia, et les gravures sur acier d’Overbeck sont tirées sur un papier chamois en rupture avec la blancheur du papier d’impression du texte. Cette manière de composer le livre sera reprise d’ailleurs l’année suivante, en 1844, lors de la parution de la Compassion de la très Sainte Vierge chez Curmer, illustré par le duo Overbeck-Steinle. Il convient de s’interroger sur l’ordonnancement rigoureux et très simple de ce volume, qui rompt avec une tradition qu’avait très largement contribué à établir l’éditeur, et qui curieusement se répète significativement dans les collaborations entre Curmer et Overbeck. Il est fort probable qu’il s’agisse là d’un écho au travail du peintre allemand : rigueur et organisation. Ce-dernier en effet eut, en France tout du moins, une réputation de peintre ascète, anachorète, à la vie presque monacale, ce que son œuvre, essentiellement religieuse, traduisait. Dans les différents discours portant sur Overbeck ou son œuvre, il y a une constante dans la perception de la sobriété et de l’austérité dans les œuvres du peintre. Gabourd par exemple écrivait en 1865 :

« La force de volonté d’Overbeck, qui, étant alors jeune et pauvre, et ne trouvant de ressources qu’en lui-même, a conçu et réalisé le projet de rendre à la peinture son importance morale, et de lui faire revêtir en même temps des formes plus nobles, plus grandes, plus austères, tous ces mérites qui n’ont pu émaner que d’un homme d’élite […] rendront ce peintre digne du souvenir. » [19]

En 1859 Léon Lagrange parlait pour sa part de simplicité, de naïveté et de sincérité pour caractériser les œuvres de l’artiste, recevant son sujet « tel que le donnent les Livres saints » [20]. C’est ce qui fit en grande partie le succès d’Overbeck dans le cadre du débat entre l’esthétique « sulpicienne » de l’art religieux héritée d’une longue tradition depuis Raphaël, et l’esthétique « du bon sens et du bon droit », pour reprendre les propos du comte de Montalembert [21]. Les ouvrages de Curmer jouèrent, du moins dans un premier temps, un rôle essentiel dans ce débat, animé par Montalembert, et la Passion de Notre Seigneur Jésus Christ eut une place particulièrement prépondérante, représentant l’une des premières grandes pénétrations de l’art nazaréen d’Overbeck sur le sol français. Les huit compositions du peintre renvoient strictement aux qualificatifs employés par les critiques et les historiens d’art concernant son œuvre. Il s’agit de huit sujets religieux ainsi identifiables : le Christ portant sa croix, la Cène (figure 2), le Christ au jardin des oliviers, Jésus conduit chez Anne et Caïphe, Jésus au Golgotha, Jésus sur la croix, Jésus déposé au sépulcre et Jésus ressuscité. Toutes ces œuvres sont construites sur le même principe ayant le même format, les mêmes dimensions, toutes étant ceintes d’un cadre sur lequel courent des versets de la Bible ou des Évangiles en latin, et présentent un style singulier. Les compositions sont sobres, entièrement centrées sur le sujet principal. Il n’y a aucune volonté ornementale et décorative, Overbeck se limitant à l’essentiel de ses personnages et n’introduisant que des éléments significatifs tel la croix, l’hostie, le calice, une couronne d’épines. L’organisation même de ces illustrations témoigne d’un ordonnancement rigoureux, basé sur une simplicité mais une puissance rare des lignes directrices, qui culmine dans Jésus ressuscité (figure 3), sorte de bouquet final et sommital de la série. Il y a une perception évidente des maitres anciens chez Overbeck, qui apparait notamment dans ce Christ sur le Golgotha (figure 4) à la musculature impressionnante, rompant avec les images éthérées, naïves et si critiquées que Montalembert comme d’autres voyaient dans l’art religieux de leur temps. Pour autant, il ne s’agissait pas pour Montalembert d’une simple copie servile du passé pré-raphaélien, soulignant la manière dont Overbeck a adapté le sérieux et la majesté toute rigoureuse des maitres anciens aux innovations postérieures : « Il n’y a là aucunement copie des anciens maîtres, mais bien une originalité puissante et libre, qui a su mettre au service de l’idée catholique tous les perfectionnements modernes du dessin et de la perspective ignorés des anciens. » [22]

Avec une sobriété de moyens presque totale, Overbeck atteint le sens profond du religieux, au-delà d’une apparence, qui, aux yeux de Montalembert comme de Lagrange a trop longtemps perduré dans les conceptions de la peinture religieuse. D’ailleurs, Lagrange opposait la simplicité du peintre allemand aux excès de charme et d’imagination des Italiens, aux excès de netteté et d’intelligence des Français, et aux excès de fanatisme des Espagnols, cachant ou ignorant, sous leurs artifices respectifs, l’expression du texte religieux et l’expression simple et franche du spirituel. Sébastien Albin écrivait ainsi en 1836 que pour « le peintre saint [Overbeck], la peinture est pour ainsi dire une continuelle prière. » [23] Cette phrase peut même être prise au sens propre, si l’on considère les inscriptions sur les cadres de chacune des compositions dans le cas précis du volume qui nous intéresse.

Il est certain, de ce fait, que Curmer approche l’idée d’une « œuvre d’art totale » [24]. Si l’expression désigne un concept encore peu établi dans les années 1840 [25], néanmoins il est évident qu’il était déjà implicitement existant, surtout dans le cadre d’un livre ayant recours aux talents de multiples artistes. Le libraire-éditeur adapta les principes de rigueur, de simplicité, de sobriété, voir de sévérité de son illustrateur principal, à son ouvrage dans la finalité d’une harmonie visuelle, et, au-delà, d’une harmonie de sens. La rupture avec des ouvrages religieux antérieurs édités par Curmer est d’ailleurs sans appel. Les Évangiles, publiés en 1836 et illustrés notamment par Johannot, s’inscrivaient dans une dynamique radicalement différente. Toutes les pages étaient ornées de motifs enluminés qui n’hésitaient guère à envahir et à repousser le texte, les planches hors-textes étaient ceintes de cadres richement ornementés accumulant rinceaux et représentations d’anges et de saints.

Cette notion « d’œuvre d’art totale » est d’ailleurs renforcée ici par la place particulière des gravures d’Overbeck, lesquelles ont une nature d’illustration, mais ont un rapport au texte plus complexe. En effet, s’il est possible d’établir dans certains cas une relation entre des passages de l’ouvrage et les œuvres d’Overbeck, les secondes ne se contentent absolument pas de décrire visuellement un extrait déterminé. Certaines ne se rattachent au texte que par un rapport distant, notamment la gravure de tête Jésus portant sa croix (figure 5). Elles élargissent son sens, et l’exemple ci-avant cité ne se réfère nullement à un passage littéral du volume. Elle anticipe une conclusion qui n’est d’ailleurs pas celle du livre en lui-même, puisque celui-ci s’arrête sur la dernière visite du Christ à ses disciples, avant que celui-ci ne monte aux cieux et ne s’assoie à la droite de son père. Ce Jésus portant sa croix, par le regard qu’il adresse au spectateur, son geste de bénédiction, invite bien davantage le spectateur à se placer dans l’état de recevoir la spiritualité de l’ouvrage. Dans d’autres cas, par exemple Jésus sur le Golgotha, Overbeck s’est permis un raccourci audacieux, résumant en une seule scène, et peut-être pas des plus évocatrices, tout le chapitre de la Passion. L’ascension du Golgotha passée est évoquée par les femmes en arrière-plan, la scène du manteau de pourpre présente, est montrée au premier-plan, et la crucifixion, à venir, est anticipée par la présence de la croix et des clous en évidence. Pour atteindre ce synthétisme, Overbeck est même obligé de distordre le texte et de reconfigurer la narration originelle. L’exemple du manteau de pourpre est frappant. Celui-ci, que retire le Christ dans la gravure alors qu’il est déjà sur le Golgotha, était retiré, selon le texte, avant l’ascension du mont. Cependant, si Overbeck avait suivi de manière stricte cet ordre, il n’aurait pas pu en une seule œuvre structurer toute la Passion du Christ. Selon une autre interprétation il pourrait s’agir des vêtements du Christ, que se partagèrent les soldats comme une prise. Pourtant dans ce cas, le texte mentionne un partage après la crucifixion elle-même. Entretenant le doute, Overbeck introduit ainsi peut-être un quatrième temps de la Passion, qui se placerait après l’exécution elle-même. Par ailleurs, la scène est montrée d’une manière fort différente de ce que laisse entendre le chapitre. Il n’est en effet pas question chez Overbeck des deux voleurs crucifiés avec le Christ, ni de ce-dernier s’adressant aux femmes comme le texte en fait largement état. On touche là spécialement à la nature différente du médium iconographique utilisé avec intelligence par Overbeck. Limité par un format très étroit, il limite le nombre de personnages (il supprime ainsi un des soldats), et plutôt que de se soumettre stricto sensu à ce que décrit le texte en cherchant à sous-tendre une communication entre eux, ce que les moyens picturaux ne pouvaient que vainement exprimer, il reste sur une image silencieuse et spiritualisée. Il y a bien sur une accroche à laquelle Overbeck ne peut se soustraire, mais l’illustration n’est pas soumise au texte, elle est sont égale, apportant son propre contenu, envisagé selon ses propres moyens. C’est bien là le point de départ de la notion d’œuvre d’art totale, qui ne peut reposer que sur cette importance équivalente entre le texte et l’image dans le cadre d’un livre, et non sur le concept d’une illustration au service du texte. En allant plus loin encore, il est même possible de considérer que la totale compréhension du livre n’est saisissable que par le rapport des deux arts. Cette impression est d’autant plus sensible ici que les illustrations en elles-mêmes ne sont pas accompagnées d’une légende. Si elles possèdent bien une lettre, à savoir le nom du dessinateur, celui de l’inventeur et celui de l’imprimeur, elles n’arborent ni titre, ni, comme c’est souvent de mise pour des ouvrages de nature religieuse, les versets principaux explicités par l’image. Cela révèle assez que cette dernière n’est pas une extension du texte, qu’elle n’a pas simplement un but didactique, et qu’elle ne lui est pas soumise.
Malgré tout, il ne faut pas considérer l’ouvrage de Curmer comme un livre se revêtant entièrement d’un caractère ascétique, ou d’un dépouillement réel, ce qui doit nous amener à relativiser la notion d’œuvre d’art totale. Il faut par ailleurs être très prudent dès qu’il s’agit d’évoquer le contenant, c’est-à-dire la structure physique du livre, sa désignation en tant qu’objet. Il serait tentant en effet de considérer que la nature du contenu texte-image, rejaillissant sur tout le volume, déborde encore sur la structuration du livre et par extension sur le contenant même. L’idée d’œuvre d’art totale prendrait alors son sens le plus complet, à l’imitation de ce que cette notion donna dans les avant-gardes du XXe s. par exemple, via le livre d’artiste. Or il est impossible de proposer en la matière une quelconque généralisation. Si en effet Michel Caffort aurait pu trouver dans les trois anges des deux plats du volume, sur lequel s’est appuyée cette étude, un caractère éminemment nazaréen (grandes ailes découpées, adolescent(es), pieds nus [26]), si en effet la figure du Christ telle une icône invite à la prière à la conclusion du volume (cette figure apparaissant sur le plat inférieur) (figure 6), toutefois seul ce volume spécifique est concerné. Nos recherches nous ont en effet permis de retrouver, en bibliothèques notamment, des cartonnages d’éditeur aux formulations différentes, parfois beaucoup plus travaillés et décorés.

Le fait est qu’il ne s’agit pas ici d’un livre de bibliophile, et que le contenant obéissant aux règles commerciales d’un livre d’étrennes se doit de respecter de ce fait un certain nombre de modalités, à l’image par exemple de la tranche dorée. Il s’agit ici d’un livre de luxe malgré tout, et, l’élégance et le raffinement de l’ensemble ne font aucun doute. D’ailleurs, dans la Revue britannique, à propos de la précédente collaboration Curmer-Overbeck sur un paroissien romain, l’auteur anonyme d’un article évoquait « un chef-d’œuvre d’art et de goût », pénétré par « le besoin de bien-être et de confort » [27]. Tout en opposant d’ailleurs plus loin le caractère charnel des représentations de Raphaël, parlant de « beauté vivante », au caractère idéalisé des représentations d’Overbeck qu’il jugeait célestes et mélancoliques.
En fait, Curmer se retrouve dans une position ambigüe dans sa relation avec Overbeck, se devant de trouver un juste équilibre entre sa marque de fabrique, à savoir la richesse de ses ouvrages, souvent exubérante, baignée de l’esthétique romantique qui accorde dans le livre une place prépondérante au visuel et à la matérialité, et le style d’Overbeck, tout de simplicité, de sobriété et de spiritualité, pour une esthétique très différente, reposant sur une sorte de « sophrosyne » artistique. Curmer, s’il conserve ainsi un luxe qualitatif, se débarrasse néanmoins des superficialités décoratives et surtout abandonne des avatars de l’esthétique romantique comme la vignette. Cela dénote une réelle évolution chez l’éditeur qui se retrouvera plus tardivement dans la Compassion de la très Sainte Vierge, qui reprend en 1844 une conception similaire. Les Fêtes de l’église romaine de 1854 est d’ailleurs un ouvrage lui aussi pensé dans la même veine, avec une illustration très limitée, des planches gravées par Overbeck et Steinle d’un préraphaélisme affirmé, et le retrait même presque total dans ce dernier exemple de la couleur.

Deux éléments apparaissent finalement essentiels à retenir dans la relation Curmer-Overbeck, au travers de l’exemple de la Passion de Notre-Seigneur Jésus Christ. Le premier est cette conception singulière « d’œuvre d’art totale », qu’il convient de prendre avec circonspection, mais qui désigne assez bien dans ce cas précis la relation texte-image. Il n’y a pas de rapport de soumission, mais une harmonie basée sur l’égalité, à la fois de sens et d’importance. Il n’est pas possible ici de parler d’iconotexte [28], cette notion au concept quelque peu fluctuant, mais désignant un ouvrage dans lequel l’interdépendance texte-image est cruciale pour atteindre le sens sans pour autant qu’il y ait fusion ou dissolution de l’un dans l’autre. Ce n’est pas encore le cas ici. C’est une relation texte-image qui repose aussi sur un nouvel ordonnancement au sein de l’espace livre, très éloigné des concepts romantiques de la décennie antérieure et exploités par Curmer.

Le second élément essentiel tient dans l’engagement de Curmer dans le mouvement de piété de son temps. S’il est évident qu’une conception artistique et esthétique a orienté Curmer dans son rapprochement avec Overbeck, il ne faut pas omettre que ce dernier jouera par la suite, à partir des années 1850, un rôle essentiel dans la redécouverte des manuscrits enluminés médiévaux. Il reproduisit dans ses volumes, via la chromolithographie, les enluminures anciennes dans des volumes comme Le Livre d’heures de la reine Anne de Bretagne en 1861. Il alla même plus loin encore dans La Passion de Notre Seigneur Jésus Christ suivant la concorde des quatre Évangélistes, dans une édition différente de 1860, illustrée entre autre par Goltzius. Se tournant directement vers la Renaissance cette fois flamande avec Henri Goltzius, un artiste important du XVIe s., Curmer introduisit les gravures de ce-dernier dans son ouvrage via la photographie, sous une forme qui s’apparentait ainsi à des fac-simile.

Il y a donc très probablement déjà, en germe, dans la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ de 1843, une prise de position idéologique, visant à intégrer le débat entre « raphaélisme » et « préraphaélisme » qui traversait alors la question de l’art religieux. Le fait que Montalembert et Curmer aient été en contact n’est pas anodin, et il est certain que Curmer, au-delà d’un amour du beau livre, se mit au service d’une pensée et d’une conception du religieux dans la France à partir des années 1840. Il essaya – plus que réussit – à mêler les préoccupations nouvelles du public dont se faisait écho par exemple la Revue britannique, et l’idée croissante d’un nécessaire retour à une spiritualité jugée plus franche, plus « innocente », dépouillée des artifices, dépouillée de cette chair qui, depuis Raphaël, aux yeux de ses détracteurs, n’avait laissé place à aucun « peintre religieux », sauf peut-être Lesueur [29]. Il s’agit en effet beaucoup plus d’essais que de réussites, si l’on considère que Curmer ne se fit jamais foncièrement reconnaitre pour la profondeur spirituelle de ses ouvrages. Ses positions dans le débat religieux du temps n’émergèrent jamais dans la critique, Curmer étant perçu simplement comme un fanatique technicien, pensant asseoir une nouvelle ère industrielle du livre de luxe. Malgré un glissement marqué et logique, d’une esthétique romantique aux livres enluminés, en passant par la phase transitoire de ses collaborations nazaréennes qui témoigne d’une réelle réflexion théorique sur l’art religieux du temps, les positions de Curmer apparurent largement hermétiques à ses contemporains. Il est surement possible de le comprendre dans la rupture trop marquée encore entre le contenu texte-image, envisagée précisément comme porteur du sens religieux, et le contenant lui-même, le livre comme objet, comme matière, envisagé par Curmer, comme tout livre d’étrennes, c’est-à-dire un volume décoratif, ornemental, agréable à l’œil et faisant le plus bel effet dans une bibliothèque bourgeoise. En cela il convient précisément d’insister de nouveau sur le fait que la notion d’œuvre d’art totale, à une époque où elle n’est pas encore incarnée, doit être temporisée. L’œuvre pour Curmer restait bien le contenu, le contenant n’étant alors qu’un bel enrobage, comme le cadre doré et monumental d’une toile qui la mettant en valeur ne lui appartient pas.

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Figure 1. Amédée Varin, Page de faux-titre de La Passion de Notre Seigneur Jésus Christ. Cliché de l’auteur.

Figure 2. Johann Friedrich Overbeck, La Cène. Cliché de l’auteur.

Figure 3. Johann Friedrich Overbeck, Jésus ressuscité. Cliché de l’auteur.

Figure 4. Johann Friedrich Overbeck, Christ sur le Golgotha. Cliché de l’auteur.

Figure 5. Johann Friedrich Overbeck, Jésus portant sa croix. Cliché de l’auteur.

Figure 6. Plat inférieur. Cliché de l’auteur.

Notes

[1] Sabine FASTERT, « Rome, lieu de rencontre : la réception de l’art nazaréen en France », De Grünewald à Menzel : l’image de l’art allemand en France au XIXe s., Uwe Fleckner et Thomas Gaehtgens (dir.), Paris, Édition de la Maison des sciences de l’homme, 2003, pp. 373-404.

[2] Jean-François LUNEAU, Félix Gaudin : peintre-verrier et mosaïste (1851-1930), Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, 2006, p. 342-343.

[3] Brigitte FRANÇOIS-SAPPEY, La musique dans l’Allemagne romantique, Paris, Arthème Fayard, 2009, n. p.

[4] Celui-ci est situé entre 1805 et 1815.

[5] Anonyme, « Frédéric Overbeck », Journal des Beaux-Arts et de la littérature, n°12, 30 juin 1866, p. 89. Le premier courant défini par l’auteur est celui d’un art qu’il qualifie de doux, et de spirituel au sens religieux. Le second courant étant à ses yeux plus vigoureux et patriotique.

[6] Théophile THORÉ, « De l’École allemande et de M. Frédéric Overbeck », Revue du progrès politique, social et littéraire, vol. II, 1840, p. 348.

[7] Hippolyte FORTOUL, « Lettres sur Munich : la peinture », Revue de Paris, vol III, 1839, p. 222.

[8] Le terme est souvent contesté, mais est défendu par Michel Caffort. Il conviendra de voir à ce sujet Les Nazaréens français : théorie et pratique de la peinture religieuse au XIXe s., Rennes, PUR, 2009, 255 p.

[9] Juliette ROLLAND, Art catholique et politique : France XIe-XXe s., Paris, L’Harmattan, 2007, p. 130.

[10] « Raphael, au mépris de l’Évangile, qui n’en dit pas un seul mot, a tenu à faire planer ses trois personnages lumineux, obéissant à une peinturière tradition d’extase, infiniment déplacée dans la circonstance. L’ancêtre fameux de notre bondieuserie sulpicienne, qui feuilletait plus souvent les draps de sa boulangère que les pages du Livre saint, n’a pas compris qu’il était absolument indispensable que les Pieds de Jésus touchassent le sol pour que sa Transfiguration fut terrestre. […] Une œuvre d’art prétendu religieux qui n’inspire pas la prière est aussi monstrueuse qu’une belle femme qui n’allumerait personne. » Léon BLOY, La femme pauvre, Rennes, La Part Commune, 2004 [première édition 1897], p. 113

[11] Il est intéressant d’ailleurs de relever que le terme « icône » entre dans la langue française en 1838. Charlotte KRAUSS, La Russie et les Russes dans la fiction française du XIXe s. (1812-1917), Amsterdam, Rodopi, 2007, p. 11.

[12] Avec des titres comme Les Saintes de France, L’Éducation des filles par Fénelon, ou la Vie de Sainte Thérèse écrite par elle-même.

[13] Anonyme, « Revue des magasins », La Mode : revue des modes, n°12, 19 décembre 1840, p. 355.

[14] Charles FORBES, comte de Montalembert, Du vandalisme et du catholicisme dans l’art, Paris, Debécourt, 1839, p. 94.

[15] Louise COLET, L’Italie des Italiens, Paris, E. Dentu, 1864, p. 260.

[16] Les dates sont celles de la publication définitive. La plupart des ouvrages Curmer étaient publiés en livraisons, et ainsi par exemple, la Passion de Notre Seigneur Jésus Christ parue en dix livraisons de dix francs chacune entre 1842 et 1843.

[17] René MÉNARD, « Overbeck », Gazette des Beaux-Arts, vol. III, 1870, p. 208. Ménard se méprend dans l’ouvrage qu’il choisit, puisque les Évangiles illustrés par Overbeck ont été édités par Schulgen et non par Curmer. L’édition des Évangiles de ce-dernier ne comprenant pas de compositions d’Overbeck.

[18] Michel MÉLOT, L’Illustration, Paris, Skira, 1984, p. 129.

[19] Amédée GABOURD, Histoire contemporaine comprenant les principaux événements qui se sont accomplis depuis la révolution de 1830 jusqu’à nos jours et résumant durant la même période, le mouvement social, artistique et littéraire, Paris, Firmin-Didot, 1865, vol. V, p. 244-245.

[20] Léon LAGRANGE, « L’atelier d’Overbeck », Gazette des Beaux-Arts, vol. I, 1859, p. 324.

[21] Charles FORBES, comte de Montalembert, Œuvres de M. le Comte de Montalembert, vol. VI, Paris, Jacques Lecoffre et Cie, 1861 (texte original de 1837), p. 182.

[22] Ibidem, p. 183.

[23] Sébastien ALBIN, « Les artistes allemands à Rome », Revue des états du Nord, 1836, p. 483.

[24] Sur la question de l’œuvre d’art totale, nous ne saurons renvoyer à meilleure source que la thèse de Julian ZUGAZAGOITIA : L’œuvre d’art totale comme horizon de la modernité. Aspirations à l’œuvre d’art totale et tentatives dans la seconde moitié du XIXe s., sous la direction de Michel PODGORNY, Université Paris IV, 1999. Ce-dernier définissait la notion ainsi : « La réalisation d’une œuvre d’art totale supposerait la synthèse parfaite des arts ou l’approfondissement radical d’une forme d’art en particulier pour arriver à son dépassement dans la source commune et absolue de l’art. »

[25] Le terme apparait en 1827 sous la plume de l’auteur allemand Karl Trahndorff, mais ne fut véritablement popularisé qu’à partir de Richard Wagner, qui utilisa l’expression à la fin des années 1840.

[26] Caffort, p. 46.

[27] Anonyme, « Bulletin bibliographique de la revue britannique », Revue britannique, vol. XXII, 1839, p. I.

[28] Pour la notion d’iconotexte, nous renvoyons à l’ouvrage de référence Iconotextes, sous la direction d’Alain Montandon, Paris, Ophrys, 1990.

[29] « Il est donc permis d’espérer que nous verrons enfin s’élever une école de peinture chrétienne dans cette France, qui, depuis les enlumineurs de nos vieux missels, n’a pas compté un seul peintre religieux, sauf le seul Lesueur, venu du reste à une époque qui rend sa gloire doublement belle. » Montalembert, Du vandalisme…, p. 179.