Tassanee Alleau
Résumé : Le De historia stirpium de Leonhart Fuchs est surtout connu pour son apport innovant en histoire de la botanique à la Renaissance. Notre travail met en avant la pratique médicale de Fuchs dont l’approche s’oriente vers le rétablissement d’un corps sain et vertueux grâce aux propriétés et bienfaits des plantes. Mais que pouvaient bien apporter les plantes au corps du patient malade ? Le médecin-naturaliste choisit le règne végétal pour soigner plutôt que toute autre méthode thérapeutique. Nous nous interrogerons alors sur le rééquilibrage des humeurs du corps par les plantes comme moyen de maintenir le corps et l’âme vertueux en nous questionnant sur les intrications entre morale et religion dans le contexte de la Réforme dans le Saint Empire romain germanique.
Mots-clés : botanique, médecine, herbier, corps, Leonhart Fuchs.
Tassanee Alleau, née le 15/03/1991, est doctorante contractuelle en histoire au Centre d’études supérieures de la Renaissance et chargée de cours en histoire moderne à l’Université de Tours. Sa thèse, sous la direction de Pascal Brioist et Concetta Pennuto, porte sur la compréhension du végétal, sa matérialité et ses symbolismes à l’époque moderne, et plus particulièrement la partie souterraine des plantes, racines, tubercules et autres rhizomes, à travers des approches culturelles, matérielles et scientifiques. Elle est aussi diplômée de l’École d’Art et de Design de Tours (Ex-Beau-Arts TALM-Tours) et a co-écrit Sciences et société, France et Angleterre, 1680-1789 aux éditions Atlande (2020).
Introduction
À travers sa description des plantes issue d’une relecture critique des sources anciennes et contemporaines, Leonhart Fuchs (1501-1566) est reconnu par l’historiographie[1] comme un naturaliste majeur de la Renaissance. Il est connu pour sa contribution en histoire de la botanique et pour son traitement des textes et des illustrations peintes « sur le vif » dans sa compilation des plantes. Ses choix éditoriaux et sa méthode de travail prennent en compte les opportunités offertes par l’imprimerie grâce à l’innovation des caractères mobiles, autorisant l’illustration par des gravures très chères payées[2]. Dans cette étude, nous avons parcouru les sources en latin et en langues vernaculaires, en allemand et en français, publiées du temps de Leonhart Fuchs ou rééditées de nombreuses fois après sa mort et agrémentées d’ajouts et de commentaires par les éditeurs français. En apparence innovante, la pensée naturaliste de Fuchs s’inscrit en réalité dans la continuité du Moyen-Âge. La vision du monde qui découle de la lecture des herbaria du XVIe siècle est celle d’un univers médical constitué presque exclusivement d’éléments végétaux[3]. Les savoirs botaniques et leur application dans la vie quotidienne sont sans cesse bouleversés par de nouveaux apports et transferts de connaissances, même s’il reste ancré dans son rapport aux autorités anciennes[4]. Notre approche s’inscrit dans le champ de l’histoire culturelle et s’inspire plus particulièrement de l’histoire des sensibilités et des mentalités[5]. Elle emprunte également à l’histoire des sciences et se situe au croisement de l’histoire naturelle[6], de l’histoire de la médecine et des discours médicaux[7]. Dans cette perspective, la pratique médicale, thérapeutique et préventive de Leonhart Fuchs est imprégnée par les changements et renouvellements de son époque : la persistance d’un très grand nombre de savoirs anciens et médiévaux, de quelques croyances, tout comme l’émergence d’une pensée humaniste renaissante.
Si Leonhart Fuchs a choisi le règne végétal pour maintenir le corps dans ses vertus, ces conceptions savantes ne sont pas des cas isolés. Otto Brunfels, Hieronymus Bock et Valerius Cordus firent de même, reproduisant les traditions théophrastiennes et dioscoridiennes. Toutefois, soigner par les plantes n’allait pas de soi et d’autres disciplines médicales virent le jour au même moment. L’anatomie émergea avec André Vésale qui publia son De humani corporis fabrica en 1543. Puis, la chirurgie intéressa plus vivement les médecins et Ambroise Paré fit paraître ses Dix livres de la chirurgie en 1564. Il ne faut pas oublier non plus la parution de trésors de médecine domestique de Charles Estienne ou de Christofle Landré et d’ouvrages sur la médecine astrologique comme ceux de Richard Napier et de Nicholas Culpeper, parus plus tard au début du XVIIe siècle et qui remirent en question les savoirs médicaux transmis dans les facultés de médecine.
Dans cet article, nous cherchons à montrer que malgré les innovations botaniques apportées par Leonhart Fuchs dans la description des plantes, ce dernier resta campé à une approche médicale héritée de l’Antiquité, celle de Galien et du corpus hippocratique, reliant vertus du corps et vertus des plantes. Dans ces conditions, sa pensée rejoignait celle d’un fervent défenseur de la Réforme (s’opposant tout de même sur différents sujets à Luther et à Melanchthon dès 1543), suivant la théorie des humeurs qui s’accompagnait de valeurs morales chrétiennes en ce qui concerne le corps et la santé. Le présent travail a été guidé par l’hypothèse suivante : lire un herbarium et en extraire une liste de vertus et de vices pourrait possiblement permettre de brosser le portrait idéal de l’homme, de la femme et de l’enfant du début de la Renaissance. Mais cette démarche est périlleuse car il ne faut pas perdre de vue les inspirations premières de Leonhart Fuchs dès les débuts de sa carrière de médecin-naturaliste qui restèrent la médecine ancienne et les théories galéniques et hippocratiques. En effet, c’était l’équilibre des principes composant la complexion du corps, que l’on nommait alors les humeurs[8], qui permettait à un individu de se maintenir en bonne santé. Le médecin observait alors les manques et les surplus des éléments et de leurs qualités pour construire son pronostic et son diagnostic, puisque l’état de déséquilibre des humeurs était considéré comme un état de maladie. Leonhart Fuchs s’imposa comme un « vulgarisateur » car il traduisit ses travaux du latin à sa langue vernaculaire, l’allemand, et illustra graphiquement des ouvrages qui restaient jusqu’ici très peu accessibles. En rapportant les usages des plantes spécifiques et localisés, Fuchs donnait une image singulière de la société allemande du XVIe siècle. Nous allons donc revenir dans un premier temps sur l’étude des valeurs morales liées aux soins du corps. Puis nous verrons ce qu’est être médecin à Tübingen au XVIe siècle et le contexte dans lequel ces valeurs morales s’inscrivent. Enfin, par cet article, nous voulons proposer une catégorisation des plantes thérapeutiques par vertus selon la théorie scolastique chrétienne : les plantes pour la vertu intellectuelle, la vertu de tempérance, les vertus du corps féminin, la vertu de prudence et les plantes pour le salut de l’âme.
Valeurs morales chrétiennes, plantes et soins du corps
L’étude des valeurs morales liées aux soins du corps par les plantes et au regimen strict pour le bénéfice du corps est vaste et se rapporte à la fois aux traditions antiques comme à la culture chrétienne. Ce croisement n’est pas anodin. De fait, la pratique de la médecine par les plantes s’était propagée au Moyen Âge dans les jardins monastiques dont le modèle était appelé hortus conclusus, le jardin clos, ou petit jardin (hortulus) sous le haut patronage de Saint Fiacre, et issu « d’une vision du monde propre à l’univers médiéval où Dieu est le véritable centre[9] ». La symbolique biblique des plantes a fait l’objet d’un nombre limité d’analyses critiques de la part des historiens et historiennes en dépit de l’existence d’ouvrages colossaux[10] et de travaux sur le folklore religieux par des théologiens[11]. L’identification des plantes retrouvées dans la Bible associée à une rigueur scientifique, par l’étude de leur origine, de leur étymologie et de leur localisation géographique, n’est pas très récente et reste restreinte à des études voisinant avec celles de la théologie naturelle du XIXe siècle[12]. D’autres études historiques se focalisaient sur les évocations bibliques dans les réécritures de la Renaissance sous le paradigme de la philosophie naturelle occidentale[13]. D’autres encore ont cherché dans la Bible le possible rapport humain aux plantes dans des perspectives utilitaires (alimentation, usages socio-économiques)[14]. Et bien que l’étude biblique ne soit pas notre approche ici, elle y puise une résonance certaine car Leonhart Fuchs ne fait pas mystère de son inspiration religieuse[15] et nous cherchons dans cet article à montrer les intrications morales et religieuses qui parcourent l’œuvre de Fuchs. Ainsi dit-il :
« Je suis asseuré & scay certainement que plusieurs choses t’inciteront a la recepvoir franchement & de bon cueur, mais signamment ce qui sensuit, cest ascavoir que la presence, grâce, & bonté divine n’est plus évidemment donnée a cognoistre aux hommes en quelque chose que ce soit, que par la diversité des formes & natures des plantées quand nous considérons qu’elles ont esté produictes et creées de Dieu pour l’usage de l’homme. S’il y a doncques quelque chose qui recueille en nos cueurs, ou qui conferme nos espritz ceste opinion que Dieu ha quelque soing des hommes, certainement pour donner ayde aux hommes et les maintenir en santé, qu’il luy a pleust aorner la terre de tant de nobles et vertueuses plantes, par lesquelles les hommes peussent chasser toutes sortes de maladies[16]. »
Il montrait aussi que l’intérêt pour les plantes remontait à l’Antiquité chez les princes et les rois :
« […] Qui plus est Mythridates jadis roy de Bythinie, Attalus roy d’Asie, Salomon de Judée, Eaux d’Arabie, & Juba de Mauritanie, non seulement ont esté curieux de cognoistre les plantes, mais aussy plusieurs d’entre eulx en ont escript très diligemment, les aultres ont monstré la manière de mesler medicamens simples ensemble et d’en faire certaines compositions au grand avantage & profict des humains[17]. »
De la version originale en langue allemande à ses traductions diverses en français, les vertus divines des plantes étaient copieusement rapportées, renvoyant à une vision idéale du corps et de la santé :
« Car estans presques tous les arts inventez, si tost que l’homme fut creé de Dieu, a par aprés augmentez par l’industrie de plusieurs : les seules herbes, soubdain apres la creation des elemens, & lorsqu’il n’y avoit encores homme vivant, sortirent (suyvant le commandement de Dieu, qui fut en ceste sorte) des cavernes de la terre, garnies de leurs propres & divines vertus[18]. »
Leonhart Fuchs évoquait l’origine biblique de l’utilisation des plantes, remèdes et nourritures offerts par Dieu à Adam dans le Jardin d’Éden, puisque « seul [le] Souverain Seigneur Dieu ha creé, & produit de la terre les herbes & Plantes : desquelles tous les descendans & posterité d’Adam se pourroient ayder & soulager pour guarir les maladies[19] ». Il s’inscrivait dans l’élan des relectures scrupuleuses et minutieuses des Saintes Écritures et qui touche également les champs disciplinaires comme la médecine. Toujours dans son propos liminaire, Leonhart Fuchs décrivait les prolégomènes de sa pratique médicale alliée à une connaissance très fine des plantes, à la faveur d’un corps sain qui sonne ici comme un impératif sanitaire social. Il a écrit d’ailleurs tout un traité[20] sur la méthode médicale[21]. Sa vision était à la fois utilitaire et impliquait aussi une part non négligeable de remarques esthétiques et sensorielles. Il ajoutait même que les connaissances en botanique apportent « nécessité » :
« […] la nature des Plantes, ha esté tousjours plus louee, admiree, & reveree, partie par ce qu’ayant esgard à l’antiquité (que tousjours on ha autorisé et honoré grandement) elle estoit la plus ancienne partie aussi pour autant que la congnoissance d’elle apportoit un plaisir, utilité et necessité[22]. »
À la Renaissance, la botanique n’était pas encore une science à part entière, elle était simplement une discipline auxiliaire au service de la médecine. Considérant qu’il existait bien peu d’ouvrages sur le sujet permettant d’identifier correctement les plantes en Allemagne, à part ceux d’Otto Brunfels, de Jérôme Bock (Tragus) ou de Valerius Cordus, Leonhart Fuchs rédigea son herbarium, sélectionna des graveurs et dessinateurs très habiles et emprunta les descriptions des plantes aux sources anciennes et classiques. Dans son discours préliminaire, il témoignait de l’intérêt de son herbier, de sa vision vraisemblablement très corporatiste de la profession de médecin, car il souhaitait un monopole universitaire de l’exercice de cette discipline, et de ses principaux objectifs. Il précisait qu’il désirait qu’on ne commette plus d’erreur au sujet des plantes[23]. Il exhortait les médecins et apothicaires en ces termes : « doncques j’enhorte tant de foys les medecins et apothicaires de delaisser tel erreur, sinon qu’ilz ne prennent plus de plaisir à tuer, qu’à guérir[24]. » Il dénonce les manipulations et tromperies[25] : « À mon desir aussi que les Medecins de nostre siecle, usassent de plus de diligence à traicter ceste partie de Medecine, et ne l’abandonnassent entre les mains des Apothicaires et femmes de village[26]. » Le retour à la nature qu’a opéré Leonhart Fuchs n’était pas isolé. Martin Luther lui-même attachait une grande importance à la contemplation de la nature. Dans ses Sermons sur le premier livre de Moïse, il déclarait que le monde naturel a été construit pour le bénéfice et l’usage de l’homme[27]. Cette idée partagée par Fuchs est merveilleusement dépeinte lorsqu’il évoque les vers à soie et des tissus de soie qu’on peut en tirer :
« Car à la vérité nature en nulle autre chose n’est trouvée plus sage qu’en ce fait. Et ne semblera l’art avoir prins quelque chose d’eux, en quoy elle se monstre plus ingénieuse : si on veut considerer tant de mutations de nature, devant que ladicte toison soit achevee, & puisse estre artificielement reduicte à l’usage des humains[28]. »
Il revendiquait aussi un retour à la simplicité de la composition des remèdes et favorisait une pharmacopée locale, composée de plantes de jardin ou facilement récoltées à proximité de l’espace domestique. Fuchs s’opposait à toute « ostentation » du savoir et se positionne contre les médicaments composés dont la liste des ingrédients peut être trop longue, trop coûteuse, voire illisible car restée secrète[29]. Il préférait prescrire un même simple (une même plante) pour différentes « affections » ou pathologies :
« Les fraudes des hommes, & les circonventions & déceptions des entendements, ont inventé telles boutiques : esquelles la vie dun chacun est exposée à vendre : incontinent sont mises en crie force compositions, & mistions intrinquées, & inextricables. […] Pour un petit ulcere, fault aller chercher une medecine jusques à la mer rouge : combien que le plus povre du monde, ait à sa table les vrays remedes, ainsi dict Pline[30]. »
Leonhart Fuchs a bénéficié d’un contexte d’émulation intellectuelle en Allemagne, par la création de foyers humanistes et de carrefours d’échanges culturels et scientifiques dans des villes comme Wittenberg ou Tübingen, malgré les censures et les exils auxquels les protestants ont dû faire face. Si tout cela a assuré une grande postérité européenne à l’œuvre de Fuchs, tant dans la diffusion de la publication que dans les citations du texte et dans les plagiats des gravures, cela n’a pas été aussi facile pour tous les autres naturalistes. Otto Brunfels s’est par exemple retrouvé inscrit sur la liste de l’Index Librorum Prohibitorum de l’Italie catholique après 1554, ainsi que l’ont été Conrad Gessner ou encore Ulisse Aldrovandi, accusés d’hérésie en Italie[31]. Fuchs lui-même voit ses écrits censurés et son nom barré sur les frontispices imprimés[32].
L’art de confectionner des remèdes, d’en découvrir de nouveaux et de pouvoir supprimer les erreurs du passé pour éviter tout danger devint un enjeu nécessaire de santé publique dont se targuaient les médecins-naturalistes[33]. Cette ambition, Leonhart Fuchs l’érigeait en principe vertueux[34], forme d’éthique qui constituait les fondations de sa recherche. La plus importante vertu prise en compte pour cette étude était celle de la « force de l’âme », qui est l’une des vertus cardinales, morales et intellectuelles d’Aristote[35]. Cette vertu a été théorisée plus tard comme action de l’âme dirigée vers le bien dans la philosophie morale chrétienne de Saint Augustin ou de Saint Ambroise (vertus de la prudence, de la justice, de la force d’âme et de la tempérance). Elle passait aussi par la notion d’exactitude, que Leonhart Fuchs cherchait à la fois dans les livres et en observant lui-même les « créatures de Dieu » : les plantes. Cette force de l’âme est celle qui s’opposait à la corruption du corps par les passions de l’âme décrite par Giambattista della Porta dans La Physionomie humaine[36] : « Si donc il arrive changement de forme au Corps causé par quelqu’une des passions, de nécessité pareil changement arrive à l’Âme[37]. » Cette période était aussi l’occasion pour les « moralistes » d’écrire de nombreux ouvrages sur les comportements humains, bons ou mauvais, tels que Les Essais de Michel de Montaigne, Le Fléau des Démons et sorciers de Jean Bodin ou bien des traités de morale domestique[38]. Leonhart Fuchs déclarait lui-même dans son De historia stirpium que l’homme devait être « excellent tant en noblesse, comme en resplendeur de vertu ».
Ces transformations conceptuelles envahissaient aussi la sphère du quotidien, de la vie intime et infusent les comportements humains dans leur rapport à la nature et leurs représentations symboliques du végétal, majoritairement influencées par les conceptions théologiques et bibliques comme le rappelle John Lytton Musselman, citant les travaux, déjà très complets à ce sujet, des naturalistes Leonhard Rauwolf[39] (mort en 1596), Levinus Lemnius (1505-1568), Johann Amos Comenius (1592-1670) et John Gerard (1545-1611/12)[40]. Johann Amos Comenius, John Gerard, Levinus Lemnius, tout comme Leonhart Fuchs, ont tous tenté de conformer l’histoire naturelle à la théologie plutôt qu’à la description rationnelle et scientifique des plantes[41]. Toutefois, Leonhart Fuchs laisse une grande place aux sens et particulièrement à la vue, invitant le lecteur à se faire lui-même une idée du végétal délié des symboles bibliques.
Être médecin à Tübingen au XVIe siècle
Leonhart Fuchs naquit en Bavière en 1501 et enseigna une trentaine d’années à Tübingen depuis l’année 1535. Il obtint son diplôme après un doctorat de médecine en 1524 après avoir été l’élève et le disciple de Johannes Reuchlin, et suiveur des idées luthériennes. Fuchs participa au développement de l’humanisme allemand à travers les institutions universitaires et la publication d’ouvrages d’histoire naturelle ou de médecine. Il était moins philologue que théologien et naturaliste, théologie « au service de laquelle Luther [considérait] qu’il faut mettre les langues anciennes[42] ». C’est pourquoi il semble intéressant de considérer l’œuvre de Leonhart Fuchs par cette entrée des « vertus » morales afin de compléter le rôle qu’on lui a toujours attribué de relecteur critique des sources antiques et modernes. Pour envisager ce que c’était qu’être médecin à Tübingen, à la Renaissance[43], comme le fut Leonhart Fuchs, il faut prendre en compte les évènements difficiles qui jalonnèrent cette période.
Roselyne Rey écrivait que les pestes et épidémies successives du XVIe siècle avaient apporté un « cadre quotidien de vie des hommes en proie au malheur, confrontés à la peur et à l’expérience de la douleur[44] ». La maladie ne paraissait cependant plus inéluctable, en témoignaient les pharmacopées très précises de la Renaissance. Il ne faut tout de même pas minimiser la prééminence de la mort dans ce monde « renaissant ». Même si les remèdes issus du De historia stirpium commentarii insignes de Leonhart Fuchs permettaient de se prémunir contre les maux de ce siècle, le corps abîmé et malade semblait être le stéréotype de ces temps difficiles. Les temps de guerre amenaient avec eux le développement de nouvelles disciplines telles que la médecine de guerre. L’importation de la poudre à canon, les massacres à répétition, les supplices et les tortures que subissent les « Hérétiques », entraînaient un changement dans la nature des blessures et les aggravaient. La chirurgie des blessures dut faire face à la montée en puissance des armées et la production d’armes et d’armures augmentèrent massivement à la Renaissance[45]. La connaissance précise des organes du corps et de l’anatomie très fine que les autopsies rendaient désormais possibles se déployaient à travers des traités, d’Ambroise Paré à Félix Platter en passant par André Vésale. Fuchs fit le constat de cette nouveauté, liée en grande partie aux pratiques médicales militaires :
« Nous y avons pareillement adjouté les herbes à playes, celles principallement dont journellement usent la plus part des chirurgiens, mesmes qu’il est incertain par quel nom peculier les hont nommé les Grecz et Latins, si toutesfoys oncques elles eurent aucun nom[46]. »
C’est tout un ensemble d’images et de représentations anciennes et médiévales du corps qui s’effondraient pour renaître au prisme d’un regard plus critique, matérialiste et rationnel, plus empirique également. De même, les épidémies modifient les constructions culturelles et sociales. Parmi celles-ci, la vérole, morbus gallicus, ou la peste étaient très contagieuses. Les villes se vidaient à l’approche de ces épidémies[47] qui composaient le quotidien des médecins, quotidien jalonné de cadavres. Dans les villes, pestilence et décomposition des cadavres étaient les odeurs dominantes. Toute puanteur, toute crasse et toute pourriture devaient être ôtées du corps dans un geste purificateur et salvateur et cela passait aussi par l’utilisation de plantes dont les parfums venaient contrecarrer les pestilences :
« Les feuilles bouillies dans le vin sont bien essorées et lavées, et bonnes à toutes sortes de blessures et de dommages. Bouillies et délibérées, elles chassent les taches sur le visage, et guérissent allègrement le feu. […] Le jus des feuilles pénètre dans le nez, chasse la mauvaise odeur de celui-ci et retire le noir qui s’y trouve ».
Le bouillon dans lequel les graines sont bouillies doit être utilisé […] pour se laver avec. […] La farine de graines bouillies avec des graines de lin et couvertes, apaise les jours [règles ?] de la semaine et adoucit la mère. Mélangé à du miel, il chasse la [mosey ?] sur le visage et les rugosités. Les graines bouillies dans l’eau et [ ?] lavés avec elles en chassent la puanteur[48].
À l’inverse d’une société qui cherchait à comprendre l’irrationalité des fléaux que sont la maladie et la mort, Leonhart Fuchs cherchait à expliquer la mort d’une manière plus rationnelle, en tout cas plus concrète. Nous pouvons le constater en lisant ses traités médicaux et spécifiquement le Methodus seu ratio compendiaria cognoscendi veram solidamque medicinam (1542). Dans le chapitre XXII, « De rerum praeter naturam numero », sur la nature des choses, il établissait que sa méthode permettait de trouver ce qui modifiait l’état du corps (« rerum que corpus nostrum alterare possunt »), de nommer la cause (« causa ») qui amène la mort (« morbus »), et de déterminer les symptômes de la maladie, selon les préceptes hippocrato-galéniques. Il y développa un schéma structuré comme suit : « 1. Causa, qui morbum praecedit. / 2. Morbus, a quo primum vitiatur actio. / 3. Symptoma, qui morbum sequitur[49] ». Dans sa manière de lutter contre les maladies, Leonhart Fuchs structura un art médical (ars medica), plus technique et plus rationnel, entre ingenium sanitatis et ingenium curationis[50]. Toutefois les gestes et la pratique naissaient d’une considération globale du fonctionnement du corps et de l’esprit, et de leur lien avec la nature. Cette philosophie naturelle, nouvelle perception des objets naturels chez Leonhart Fuchs[51], prenait la forme de réflexions portant sur le corps humain comme partie intégrante de la nature et est rattachée aux théories antiques du corpus hippocratique ou galénique qu’il décrivait dans son préambule :
« Quant aux vertus des plantes que nous mettons par ordre, de Dioscoride, Galien, Aéce, Paul, Simeon, Pline, si par un consentement elles sont confirmees de tous, il les faut recevoir. Mais là ou il y aura discord entre eux, tu ensuivras Galien sur tous les autres, comme celuy qui ayant inventé les facultés des plantes, les ha par mesmes esprouvees, par une longue experience[52]. »
L’écriture du médecin-botaniste est habituée à la pratique académique et universitaire. Il n’a pas rompu avec sa culture scolastique du Moyen Âge, entre trivium et quadrivium. Son statut de professeur à la chaire de médecine à l’université de Tübingen, sous la protection d’Ulrich vi de Wurtemberg, le fit activement participer à la réforme protestante des enseignements de son université. Fuchs superposait à la lecture scrupuleuse de la Bible et des Évangiles et au respect de la materia medica antique, une lectura simplicium : un enseignement botanique, strictement tourné vers les plantes, mais dans un but utilitaire (médicinal)[53], centré sur les notions d’« utilité et nécessité[54] ». Leonhart Fuchs était un philologue « antiquarianist[55] », commentateur accoutumé à la glose dans son De medendi methodo libri quatuor; Hippocratis coi de medicamentis purgantibus libellus iam recens in lucem editus, publié à Paris par Conradum Neobarium en 1539 et son Methodus seu ratio compendiaria cognoscendi veram solidamque medicinam de 1542. La médecine de Leonhart Fuchs était néanmoins destinée à une élite privilégiée : les étudiants qui suivaient ses cours à la chaire de médecine, ses correspondants avec qui il échangeait parmi les autres savants et naturalistes[56] et ses patients qui étaient bien souvent issus d’une classe sociale élevée tel que le Margrave George de Brandebourg à Anspach ou Ulrich vi de Wurtemberg. Malgré cela, sa volonté de rendre accessible à un plus grand nombre et de faire traduire ses ouvrages en langue vernaculaire, ou « vulgaire » comme il le dit lui-même, démontre chez lui un désir de renouveler les savoirs.
Leonhart Fuchs pratiquait une médecine qu’on peut qualifier d’empirique, autour d’une étiologie complexe et d’une utilisation poussée des sens (goûter, toucher, observer, sentir la plante) mais qui reposait presque uniquement sur les autorités antiques. Il cultivait lui-même des plantes dans un jardin à Tübingen. Ces étapes formaient un temps de « compréhension », avant celui de la « maîtrise » qui a lieu quelques décennies plus tard par les processus de colonisation[57], le rapide développement des jardins botaniques et des cabinets de curiosités. À tout cela, il appliquait la thérapeutique humorale et accordait une importance fondamentale à la connaissance de la nature[58]. L’on pourrait dire alors que Leonhart Fuchs appartenait à la phase de « compréhension » du monde, car il pose les bases de la « botanique », soit l’étude des plantes, tout en s’appuyant sur une relecture des sources de l’Antiquité. Sa volonté était de proposer une liste exhaustive de plantes, projet qu’il ne réussit pas à terminer entièrement à sa mort. Il justifia sa méthode dans la préface de L’Histoire des plantes :
« […] combien c’est chose delactable et encores utile et necessaire, ou pour perpetuer la santé presente, ou pour r’appeller celle qui n’y est (chose que l’homme doit avoir la plus chere et la plus souhaitable entre toutes) de congnoistre en perfection soit par methode, soit par experience, les Plantes, et leurs vertus […][59]. »
Le salut de l’âme ?
Le De historia stirpium a l’allure d’un catalogue de conseils et de vertus qui s’égrènent tels des préceptes : « il faut », « il doit », martelait Leonhart Fuchs. Le naturaliste n’était cependant pas avare de qualificatifs pour juger qu’une chose était belle, bonne, de bon goût, de bonne odeur. Ses descriptions offraient un panorama visuel et aromatique de la plante qui rendaient la lecture de l’herbier étonnante à bien des égards :
« La Pensee est une herbe qui du commencement ha la fueille ronde, crenelee par les environs, & plus longues par succession de temps : la tigette triangulaire, cavee par le dedans, & un peu ridee, & noueuse par intervalles : d’où sortent longues queues de la cavité des aesles, esquelles par les sommets les fleurs resplandissent, selon la figure & espece des violettes purpurines, & hont lesdictes fleurs leur partie d’en haut purpurine, le milieu blanc, & le bas jaune, & sont divisees par certains rayons noirs. Tombans ces fleurs, la graine commence à s’enfler. Le lieu. La Pensee vient quelquefoys d’elle mesmes parmy les champs. On la plante toutesfoys és jardins, & y vient plus belle[60]. »
Nous avons analysé ici la plupart des plantes inscrites dans l’herbier que son auteur avait jugées nécessaires à l’homme et à la femme de la Renaissance (sauf mention contraire par Fuchs lui-même). Ce critère utilitaire n’est pas le seul qui puisse apporter une aide au malade : la beauté semblait, de fait, le critère le plus proche de ce qui est bon. Nous découvrons parfois dans l’herbier des promenades sensorielles, des paysages et des moments de poésie qui laissaient entrevoir le goût de Leonhart Fuchs pour la littérature, la philologie et la simple beauté des choses, toujours inspiré par les sources anciennes qu’il citait abondamment :
« Du Grateron. Chap. XIIII. Philantropos nom d’humanité, de doulceur, & courtoisie luy est imposé parce que, c’est une herbe doulce & gracieuse : & qui retient les robbes des passans, ainsi que les amys, & hostes hont de coustume de retenir par la robbe leurs amys se voulant departir l’un de l’autre : ou s’ilz ne peuvent les retenir, ilz les convoyent un peu loing. Laquelle appellation tres bien expriment les Allemans, quand ilz la nomment Bleb Kraut[61]. »
Le botaniste se laissait aller à recopier de longs passages sensibles des Anciens, comme celui de Galien racontant sa jeunesse perdue et sa vieillesse ennemie dans le chapitre sur la laitue[62]. Le vocabulaire pour décrire le végétal est anthropomorphique, centré sur le corps humain et délivre de surprenantes métaphores. Les parallèles sont flagrants et subtilement distillés au gré des notices descriptives. Dans le chapitre CXXIIII sur l’ache, on lit que celle-ci a la « chevelure comme celle de Rosmarin, pleine de fleurs, & ramassee en petis corymbes, ou en forme de raisins de Liarre[63] », sa « semence » est noire, « ferme, aspre et odoriferante ». La « guesde » ou pastel au chapitre CXXVI a des petites feuilles « en forme de langues, pendantes en bas, dedans lesquelles est contenue la greine ou semence[64] », et la mandragore est directement assimilée à un être anthropomorphe au chapitre CCII, puisque Pythagoras l’appelle « Anthropomorphon, pour raison de la forme humaine, que sa racine semble representer[65] ».
Les vertus ne se trouvaient dès lors plus uniquement dans tel ou tel objet végétal, mais au détour d’un chemin, en haut d’une montagne, sur le mur d’un jardin, à travers les champs, dans les marais et en bordure d’une forêt. Le corps vertueux et, au-delà de celui-ci, l’âme, trouvaient leur salut dans la contemplation du monde que Dieu avait créé.
« D’avantage le merveilleux plaisir qui secrètement prendre place en vostre esprit, par la contemplation de si grand nombre d’especes de Plantes, vous invitera à prendre la tuition & defense de la matiere des herbes & de la Medecine. Et y ha il chose plus esjouyssable & plus delectable, que ficher ses yeux sur les Plantes, que Dieu d’extreme bonté & grandeur, ha peinctes de tant de diversité de couleurs, ha attournees de fleurs de grace si singuliere, la couleur desquelles oncques ne peut estre representee par les peinctres, les ha ornees de tant de graines, & tant de fruict, dont on se sert grandement & en la cuisine, & en la Medecine ?[66] »
Ne pas écouter les superstitieux : la vertu intellectuelle
Pour Leonhart Fuchs, la « vraye médecine » devrait éliminer les superstitions et particulièrement celles qui relèvent d’autorités dont il appréciait peu le travail. La coloquinte était ici utilisée par beaucoup dans un but que le naturaliste trouvait incorrect. Il critiquait vivement les médecins qui se disaient « prédicateurs évangéliques[67] », s’opposant à Luther et à Melanchthon et quittant Wittenberg pour Ingolstadt. Il pensait alors que ces prédicateurs évangéliques abusaient le « peuple », par de fausses paroles et par un mauvais commerce des plantes :
« La Coloquinte, cependant, est remède très nocif [schadlich] pour l’estomac. Pour cette raison, les autorités devraient interdire les vagabonds (colporteurs ?), juifs et autres médecins, qui purgent le peuple avec cette médecine populaire et féroce qui fait perdre l’esprit. Mais personne ne doit [ ?] laisser les gens mourir. Et aussi de nombreux prédicateurs qui se disent évangéliques, oublient complètement et même leur vocation [première], à laquelle ils devraient répondre honnêtement et avec diligence obéir […] au Christ, mais qui jugent leur [devoir ?] de donner des conseils médicaux, […]. Si Dieu veut que vous donniez les ordres tout de suite, vous auriez vraiment tellement à faire que vous oublieriez la médecine spirituelle, laisseriez le corporel, et ne plairez pas à ceux à qui il s’agit de prescrire. Mais parce qu’ils ne se soucient pas beaucoup des saintes écritures, oui, ils ont une mauvaise compréhension et étudient leur sermon […] ; regardent ailleurs, et en attendant ils oublient quelle est leur profession et leur fonction […][68]. »
Dans cette citation, sa coloquinte est une courge (en hébreu qîqâyôn) dont la symbolique remonte à l’Antiquité et est présente dans le récit biblique lorsque Jonas s’assoit sous un arbre à coloquinte mais reproche à Dieu que celui-ci ne lui donne pas assez d’ombre[69]. Les traductions plus modernes ont ensuite nommé cet arbre « ricin », « lierre », mais les Protestants y voyaient plutôt une coloquinte ou une « courge[70] ». À travers ce passage, Fuchs critiquait l’usage de la coloquinte comme purgatif par des médecins sans scrupules, accusant même les prédicateurs soi-disant évangélistes d’être les colporteurs d’un tel usage et exhortant les théologiens à laisser aux vrais médecins le soin de prodiguer des conseils médicaux aux foules. Fuchs souhaitait ainsi distinguer religion et politique de l’exercice de la médecine et ce fut d’ailleurs cela qui marqua sa division avec Luther et Melanchthon.
D’autre part, les difficultés d’identification sont dues aux critères utilisés pour élaborer un rapprochement, une comparaison entre plusieurs plantes. Ces critères étaient très aléatoires. Chez Fuchs il était question de la forme de la plante pour définir des caractères morphologiques. Il s’agissait là des balbutiements de la science dite botanique. Leonhart Fuchs s’étonna de la différence de couleur, de la présence d’épines, ou de la différence de goût et d’odeur. Ce « squelette de description morphologique[71] » ne lui permettait pas vraiment d’apporter une réponse claire. Ce système autorisait tout de même au naturaliste de contredire les auctoritates ou de dénoncer les mensonges des médecins, en invoquant une argumentation plus ou moins fondée sur un modèle persuasif, c’est-à-dire en prenant des exemples qui interpelaient.
Ainsi donc, le premier conseil du médecin-naturaliste était, comme nous venons de le voir, d’adopter une attitude que l’on pourrait qualifier de vertu intellectuelle rationnelle. Il est possible de comprendre la raison pour laquelle Leonhart Fuchs luttait si ardemment contre les croyances païennes et profanes. D’une part, ses rôles de professeur et de médecin lui conférèrent un esprit critique raisonnant avec rigueur : ainsi toutes les choses qu’il écrivait procédaient d’une vérification par l’expérience et par la vérification des sources. D’autre part, sa position d’humaniste dans l’avènement de la Réforme et ses réflexions consciencieuses le firent agir comme un théologien faisant l’exégèse des écritures saintes en reniant toutes les fioritures et les inventions des catholiques ou des protestants trop zélés comme nous l’avons vu plus haut[72]. Nous pouvons voir dans l’exemple de la description de l’armoise, sa critique d’une certaine interprétation des Évangiles :
« De l’Armoise, ou herbe S. Ian. Chap. XIII. Les Noms […] Les Allemans la nomment en leur langue la ceinture sainct Jean : nom imposé de quelques vieilles, & moynes supersticieux : car ilz en font non seulement des chapeaux mais aussi des ceintures : qu’ils jettent dans les feux, que lon fait en tous quarrefours des villes, le jour de la saint Ian. Je ne say à quel propos, ny à quel effect. Il pourroit estre qu’ilz ayent songé que sainct Jean estoit ceint au desert de ceste dicte herbe[73]. »
L’absinthe (ou armoise) était assez souvent citée dans la Bible[74] comme symbole de l’amertume, du poison ou de la malédiction. Elle était parfois confondue ou traduite différemment d’une région à une autre par aloé ou aluine. Les erreurs d’identifications remontaient à Dioscoride et à des croyances superstitieuses des Allemands relatées par Fuchs, qui s’attachait à reconnaître la plante par sa couleur et par l’aspect matériel de celle-ci (par la forme et les variations de la tige notamment).
D’autres cas dans l’herbier amenèrent Fuchs à identifier des plantes comme vertueuses contre des maladies perçues comme d’origine surnaturelle : le mal des ardents, mal de terre ou le feu Saint-Antoine, les épilepsies, le mal caduc, les convulsions inexpliquées, les paralysies inexpliquées, les songes agités. L’ergotisme, dit feu sacré, sacer ignis ou feu Saint-Antoine, – qu’on sait aujourd’hui être causé par un empoisonnement dû à l’ergot de seigle ou céréales équivalentes –, est une maladie qui effraie au XVIe siècle. Elle est souvent traitée par des remèdes à base de végétaux impliquant une sorte de rituel magique. Pareillement, on trouve à « l’espargoutte » des vertus magiques selon Pline :
« Les magiciens, pour en user contre fièvres tierces, commandent l’arracher avec la main gauche et ce faisant dire pour qui on la cueille et n’y regarder point. Puis mettre la fueille souz la langue du malade, à fin qu’il avalle soudain avec dix dragmes d’eau[75]. »
Le rapport à la pensée magique[76] est ambigu même si dans la plupart des cas, le médecin-botaniste allemand la rejetait. Dans certains cas, il ne commentait pas. Ainsi Fuchs expliquait que la racine de l’angélique était particulièrement bonne contre tout : « soustiennent qu’elle [l’angélique] ha puissance contre ensorcelemens, ou enchantemens, si on la porte avec soy[77] ». Dans d’autres cas, comme pour le polytrichon d’Apulée, Fuchs critiquait les modernes qui « par une folle superstition, luy attribuent et ottroyent beaucoup de choses ridicules et incroyables[78] ». Des plantes étaient nommées à partir de croyances ou en référence à des épisodes mythologiques : le millepertuis surnommé « chasse dyables » par les superstitieux, l’herbe « saincte Barbe », la « morsure du diable », les herbes auxquelles on a donné des noms de saints comme Saint Jacques ou Saint Jean.
Fuchs considérait que les remèdes végétaux trouvés chez Hippocrate, Arétée de Cappadoce ou Galien étaient les plus profitables pour guérir l’épilepsie, maladie faite de crises convulsives spectaculaires qui paraissent issues de causes surnaturelles. C’est au XVIe siècle qu’une « étape importante dans la construction d’un savoir scientifique sur l’épilepsie et dans les progrès de la sémiologie médicale[79] » a été franchie. Cette pathologie était habituellement perçue comme une maladie de l’esprit causée par des démons. La « filipende », la seconde sorte de bétoine, la bétoine, la violette de Mars, le Grand muguet, les herbes de Saint-Jean et la couleuvrée noire sont des exemples de plantes que Fuchs et les Anciens utilisaient pour guérir de l’épilepsie, ou en tout cas, pour chasser le mal. Les plantes calmantes comme l’opium ou la jusquiame pouvaient calmer les crises. L’épilepsie prenait une connotation magique, c’est-à-dire indéterminée, irrationnelle. On l’appelait en effet « mal sacré », « mal comitial », « mal caduc » ou « haut mal ».
Nous avons pu voir ici que Leonhart Fuchs luttait constamment contre les superstitions et les erreurs des Anciens ou des « Modernes ». Sa vision exégétique de la botanique fit table rase des conceptions qu’il jugeait archaïques pour ne garder que ce qu’il pouvait vérifier par lui-même ou alors ce qui ne lui semblait pas relever d’un jugement incorrect, trop hâtif et irrationnel.
Purifier, nettoyer et remédier à l’appétit sexuel : la vertu de tempérance
Les usages des plantes dans l’herbier de Fuchs ne constituaient pas des cas médicaux ordinaires. Ils ne suivaient pas le genre épistémique des « case histories[80] ». Pourtant, quelquefois il s’agissait bien d’« observationes » botaniques appliquées à une littérature médicale. La plupart du temps, nous ne pouvons pas savoir exactement ce qui provenait de ses propres observations ou ce qui venait de choses qu’il tenait pour vraies sans les avoir vérifiées. Parfois, Leonhart Fuchs s’interrogeait, corrigeait, émettait des doutes, donnait quelques précisions personnelles, certainement parce qu’il en faisait l’expérience dans sa pratique. Par exemple lorsqu’il dit « « Si lon lave la teste, de lexive en laquelle ait cuict ladicte herbe elle fortifie le cerveau, & renforce la memoire. Son suc meslé avec une drogue nommee Pompholix, est profitable pour les yeux esblouis ou qui berluent[81] », la question se posait : avait-il véritablement éprouvé la lessive d’Asarum pour nettoyer la tête et le visage ? Cette observation, si elle paraît banale, possède l’avantage de présenter un cas concret de l’utilisation d’une plante, usage qu’il a pu constater lui-même ou recueillir d’un témoignage. Cette utilisation est rapportée dans la rubrique « Appendix » où Leonhart Fuchs faisait état de propriétés ou de vertus des plantes et de leur application sur le corps, par voie interne ou externe, sans citer de sources, même si celles-ci sont sous-entendues. Les nombreuses rubriques-appendices et les remarques personnelles de Fuchs montraient que sa pensée médicale s’est construite sur une accumulation d’expériences, d’exempla servant de modèles ou de précédents médicaux. Tous s’inscrivaient dans un contexte que nous avons commencé à dépeindre précédemment, et dans un cadre culturel et social qui engendra les mœurs d’une partie de la société du XVIe siècle, ici dans le Saint-Empire romain germanique.
Revenons à nos vertus corporelles, à notre corps sain et vif dont tous les médecins du XVIe siècle se font les grands dispensateurs. La peste (le fléau, pestis), existe sous deux formes (bubonique ou pulmonaire). C’est seulement au XVIe siècle que Jérôme Fracastor contesta le fait que la maladie se transmettait par voies aériennes et proposa une contagion par contact d’homme à homme ou d’animal à homme, même si cette pensée persistait dans certains milieux. Les initiatives pour endiguer la peste étaient l’isolement des villes et villages atteints. Cet isolement modifia les habitudes de toute une société qui vivait dans la promiscuité, dans les espaces restreints et insalubres des villes ou entourés d’une cour et de serviteurs pour les élites les plus fortunées. L’apparition soudaine des traces de maladie visibles sur le visage et le corps faisait très peur, qu’il s’agisse des pustules des pestiférés, des croûtes des lépreux, des gangréneux, ou des brûlures des malades de l’ergotisme. La notion de « pureté » commença à influencer la manière de vivre des individus de la Renaissance. Les usages alimentaires changèrent également. Leonhart Fuchs rapporta au sujet du « saffran sauvage » ou « saffran bastard », appelé « chardon beneict » (chardon béni) qu’« Ilz disent celuy n’estre attainct de la peste qui en prend ou au manger, ou au boire. Mesmement le vulgaire s’est persuadé qu’elle aide grandement à ceux, qui en sont attaincts[82] ». On apprend donc qu’on utilisait une partie de cette plante, l’épine, que l’on trouvait dans les montagnes et dans les champs pour lutter contre la peste. Leonhart Fuchs concevait qu’il faille écouter les autorités anciennes à ce sujet, tel Galien, car elles avaient vécu de nombreuses épidémies de peste. Par conséquent, il conseillait le « pied de veau » ou « vit de prestre », dit arum en latin, que l’on trouvait dans les bois et les lieux ombrageux, froids et humides. La plante était profitable en temps de peste selon Pline qui citait Hippocrate : « Hipocrates y mettoit aussi la racine. Lon dit qu’elle est fort bonne à en user en viandes, du temps de peste[83]. »
Par ailleurs, lors des épisodes de peste, c’est l’olfaction qui est primordiale parmi les sens du médecin. Sens et vertus morales étaient intrinsèquement liés. C’est en effet souvent le mauvais air qui était vu comme la cause des pestes. L’odorat était un des sens dont la valeur venait renforcer l’idée que la vue ou l’ouïe, pour leur part, procédaient d’une conception médiévale sur le péché car ils étaient les deux sens qui engendraient tromperie et manipulation. Ce sens tenait une place particulière dans l’herbier de Fuchs. Il avait de très grandes vertus comme le montrent les propriétés d’une fleur telle qu’une des sortes d’angélique/benjoin dans la traduction française :
« On n’ha pas encore peu savoir si ceste herbe ha hesté congnue des Anciens, & si elle ha esté congnue, de quel nom elle ha esté appelée. […] Mais les modernes l’appellent tous d’un accord, Angelique, & Racine du sainct Esprit : à raison de l’odeur tressouefue, & gracieuse que rend sa racine : ou bien de la vertu insigne qu’elle ha contre les venins[84]. »
L’angélique pousse dans les jardins et fleurit en juillet et en août. Leonhart Fuchs se basait sur la description qu’il avait trouvée dans les « herbiers modernes ». Selon les « modernes », la plante « ouvre, subtilie, elle resoult, & digere[85] », elle était efficace contre les venins et contre les infections et « & air contagieux de la peste[86] ». Une fois encore cela confirmait que c’était bien l’« air » qui était mis en cause dans la propagation et la contagion de la maladie à cette époque. Fuchs poursuivait en décrivant la qualité de l’angélique qui écartait « toute maladie pestifere » du corps « si seulement (comme ilz afferment) on la tient en la bouche[87] ». Par cette tournure de phrase « ilz afferment », nous voyons que Fuchs se déchargeait de toute responsabilité vis-à-vis de cette explication quelque peu irrationnelle sans pour autant l’exclure complètement en la censurant. S’ensuivaient des conseils d’utilisation selon les saisons (l’hiver avec du vin, l’été avec de l’eau de rose, un parfum encore une fois très subtil et délicat) et des indications contre toute contagion, en chassant le venin par les urines et les sueurs. L’édition française de Guillaume Rouille en 1558 ajoutait dans les « annotations » que l’angélique sauvage est « désiré(e) » donc très demandée par ses habitants. Se garder des mauvaises odeurs et du mauvais air était une des conditions qui permet le fonctionnement vertueux du corps humain par la médecine prophylactique.
D’autres plantes viennent appuyer cet argument. La bétoine, ou « seconde sorte de Betoine » décrite au chapitre 134 de l’herbier de Leonhart Fuchs est une plante déjà décrite auparavant par Paul d’Égine, Pline et Dioscoride. Dans une partie intitulée « selon quelque autheur incertain », Fuchs dit que le suc ou le jus de la bétoine étaient bons pour empêcher la corruption de l’air et l’infection de la peste. On trouve aussi, le persil d’âne et la pimprenelle (sanguisorbe) et enfin la croisée, dont les vertus étaient décrites par les modernes comme grandement utiles contre la peste et contre le mauvais air (« mauvais aër »)[88].
Au sein du groupe des maladies qui instaurent un climat de suspicion, des préconisations médicales strictes et la dénonciation de vices, nous nous sommes penchés sur la syphilis, ou morbus gallicus, très présente dans l’herbier. C’était une maladie vénérienne appelée « vérole », propagée par l’acte sexuel et une maladie « mythifiée[89] », dont le nom syphilis est tiré d’une fable mythologique, puisqu’elle est souvent l’objet ou le sujet d’écrits qui recourent à des « mythes fondateurs, issus de la Bible ou de la mythologie antique[90] ». Le poème de Fracastor sur la syphilis[91] décrit la maladie mais aussi les moyens de contagion et les moyens d’y remédier. Certaines parties du poème décrivent les moyens thérapeutiques mis en œuvre pour soulager les douleurs, combattre les semences infectieuses, éviter leur dispersion et ont valeur de consilium. Fracastor énonce les règles d’hygiène, les « régimes », les cures et remèdes végétaux, animaux et minéraux alors en usage[92].
Chez Leonhart Fuchs, les précautions ou cautelae employées pour empêcher la maladie et les moyens prophylactiques mis en œuvre étaient en fait toute une gamme de remèdes uniquement à base de plantes, pour une pharmacopée constituée de médicaments simples ou composés. Au cœur de ce dispositif descriptif, notons des recommandations d’hygiène quotidienne pour le patient sous la forme de prescription de durée, dosage ou moyens d’application, de consommation ou encore sous forme d’interdit des pratiques honteuses. Comme chez Fracastor, pour évacuer une maladie faites de « mauvaises humeurs » ou de virus, Fuchs avait recours à des végétaux : « émétiques, sudorifiques, purgatifs et diurétiques[93] ». Les publications des différentes éditions du Syphilis sive morbus gallicus de Fracastor précédaient la parution du De historia stirpium, pour autant il est difficile de dire si Fuchs en avait lu quelques passages dans des éditions telles que celle de Bâle en 1536 chez l’éditeur Johann Bebel[94]. Dans le Livre II de son poème, Fracastor établissait quelques remèdes. Comme la syphilis était induite par l’acte vénérien, toutes les plantes qui poussaient à « paillardise » ou aux « jeux de l’amour » comme le dit Fuchs, étaient à retirer de l’alimentation. C’était là une précaution permettant de prévenir la maladie. Ainsi on ne devait consommer ni artichaut, ni concombre, ni bulbes aphrodisiaques[95]. Et chez Fuchs, on trouvait le lis d’étang, les pastenades ou les carottes, dont les formes étaient suggestives et fortement symboliques. Fuchs donnait l’alerte au sujet des dangers du vin qui faisait tourner la tête, notamment l’absinthe. Il faisait mention de la syphilis dans son New Kreüterbuch et ses diverses traductions à travers la « buglosse sauvage » dite « echium vulgare », ou « echion » en latin, et « herbe aux vipères » par Dioscoride. Celle-ci était décrite en des termes accusateurs pour un mal qu’on surnomme à cette époque « le mal français » :
« Des langues de chien. Chap. CLV. La racine est desséchée et réduite en poudre, bue dans du vin rouge, […]. On peut aussi utiliser cette racine pour toutes sortes de dégâts et blessures, mais particulièrement pour les mauvais chancres de la bouche, et la maladie française[96]. »
Les herbiers des éditions publiées en France (1549 puis 1558) ne mentionnent pas littéralement la syphilis, ou se gardent bien de traduire ce passage. En tout cas, une des autres vertus dont devaient faire preuve les hommes et les femmes du XVIe siècle concernait bien l’absence d’excès de luxure : c’était la vertu de tempérance.
De plus, la version française de 1558 de l’herbier de Fuchs recensait dans un index des pathologies au cours desquelles apparaissaient des chancres. Les chancres sont des ulcérations isolées de la peau ou des muqueuses constituant le stade initial de plusieurs maladies contagieuses, le plus souvent vénériennes[97], ou bien provoquées par des parasites ou bactéries comme la gale. Dans ce terme de « chancre » Fuchs ne voyait pas forcément un signe de maladies vénériennes, cependant il donnait de nombreux traitements contre ces chancres, ce qui nous laisse à penser que les maladies vénériennes et les maladies causées par des parasites étaient très courantes. La « joubarbe », par exemple, traite les symptômes de type « feuz qui sont chancreux : semblablement aux inflammations qui proviennent de quelque defluxion[98] ». L’anis était une plante qui selon Pline, mise dans les narines et frottée avec de l’eau, guérissait les chancres et les ordures qui viennent dans le nez[99]. Le rapport entre les chancres et le nez est connu par la médecine d’aujourd’hui. En effet, les syphilides papuleuses, papules lenticulaires de 3 à 10 mm de diamètres, fleurissent parfois au niveau des sillons naso-géniens du visage, et les manifestations cutanéo-muqueuses telles que les gommes peuvent s’ulcérer au niveau du nez et provoquer la destruction des os propres du nez. Le suc du pied de veau ou arum guérissait, toujours selon Pline, toutes sortes d’ulcères, phagédénisme[100], carcinomes, ou polypes. L’ortie de Dioscoride en était un bon remède :
« Les fueilles de l’une, & l’autre appliquees avec du sel en forme de cataplasme guerissent morsures de chiens, la chair morte, les ulceres malings, & coulans, membres desmis, les durillons gros, & enflez, chancres, apostemes derriere les aureilles, abcès de glandules[101]. »
Toujours dans le chapitre XXXVII de l’ortie, mais cette fois selon Pline, celle-ci appliquée avec du sel guérissait les ulcères chancreux et boueux. Le savinier, ou sabina en latin, aurait eu la même qualité que l’ortie sur les « ulceres corrosifs et ambulatifs[102] ». Le porion ou oignon sauvage était profitable une fois appliqué sur les « parties chancreuses & mortifiees des podagres appliquez avec miel, voire de soy seulz […][103] ». Toutes ces plantes composaient une pharmacopée complète contre toute une catégorie de plaies, ulcérations, lésions, tumeurs, abcès, qui étaient inflammés, infectés et qui suppuraient. Le corps devait en être totalement dépourvu pour paraître en bonne santé. Prévenir les maladies passait par l’hygiène notamment par les bains, ainsi la lavande était utilisée pour se laver : « par ce qu’elle est desiree pour les bains et lavoirs des hommes : et que meslee avec l’eau elle rend toutes choses nettes par la bonté de son odeur. C’est nostre lavende[104] ». L’origan et l’herbe à foulon étaient également utilisées dans ce même domaine. Pour prévenir d’une maladie ou d’un mal, on portait parfois la plante en collier, en bracelet, accrochée aux vêtements, comme le « chardon Nostre Dame », le « satyrium royal » ou l’armoise. Enfin, on purifiait l’air des maisons pour prévenir de toute contagion, avec du romarin brûlé, de la quintefeuille ou de la verveine.
Du côté des hommes, le soin de leur corps devait passer par une attention particulière envers ce que Leonhart Fuchs appelait leur membre viril. Bien souvent, ces derniers étaient qualifiés de « parties honteuses » qu’il fallait cacher car elles révélaient un comportement sexuel réprouvé. Les maladies qui atteignaient le membre viril étaient très certainement liées aux maladies sexuellement transmissibles. Dans les descriptions qui suivaient, les atteintes étaient même ulcéreuses comme avec le troène au chapitre CLXXXIII : « Les modernes disent que le jus de Troesne guérit ulceres de bouche & du membre viril[105] ». D’autres exemples encore venaient illustrer cette obsession du membre viril :
« De la courge, ou courle Chap. CXXXIX. Nous avons apprins des gens fort experimentez, que ladicte cendre peut purger tous ulceres de la verge ou membre viril, encores qu’ilz fussent desjà convertis en pourritures, & les mener à cicatrice. On donne telle vertu à la semence sechee de la courge, qu’estant mise en poudre, & semee, ou respandue sur les ulceres cavez & creux, elle les remplit & meine à cicatrice[106].
Du pied de Veau ou vit de Prestre Chap. XXII. Le vulgaire, par ce qu’il produict comme un pestul presque semblable à un membre viril sortant hors, l’appelle vit de Prestre. Ce qu’aussi les Allemans font, qui en leur langue l’appellent vit de Prestre[107]. »
La médecine de Fuchs était composée implicitement de préconisations d’hygiène corporelle, de styles de vie ou de régimes[108] adaptés à chacun, et dont la tradition antique permettait d’instaurer un code diététique pour l’alimentation, avec exercices physiques quotidiens. Également, ses préconisations tenaient compte de savoirs « vulgaires » dont on n’a peu de traces dans les imprimés de l’époque moderne et que l’on pourrait qualifier de « savoirs précaires » tels que Martin Mulsow les définissait, c’est-à-dire, des savoirs qu’on ne définit plus comme une opinion vraie justifiée, et des savoirs précaires car incertains, épineux, délicats, problématiques ou révocables[109]. Pour Leonhart Fuchs, le « vulgaire » signifiait ici « usage populaire des Allemands » et constituait donc un savoir non pas vérifié par la médecine ou la science, mais par la population.
L’herbier faisait l’inventaire des problèmes de santé et d’hygiène auxquels devaient faire face les Allemands du XVIe siècle[110]. Fuchs mentionnait les problèmes d’haleine, ou de puanteur de bouche que l’iris résolvait par exemple, les problèmes respiratoires, les toux, contre lesquels on utilisait l’avoine, le pas d’âne, la guimauve ; les problèmes d’appétit, les problèmes de vermines, notamment les « artres et tignes », les « dartres » les poux, les puces, les vers, les rats, etc. Il passait en revue les solutions pour l’hygiène des oreilles et de l’« ouye », pour l’hygiène de la bouche. Il traitait de la fatigue, de l’hygiène du visage, de la « face » dans la traduction française, des rides, des taches, des imperfections, des croûtes, des poireaux, des cheveux et des poils de visage, ou encore de l’hygiène du nez, du membre viril, et celle des maux de dents et des gencives qu’il apaisait avec le « soulfy ». Le flux de sang était régulé par les herbes à plaies, ou chez les femmes, par la sanguisorbe. Il décrivait aussi des maladies des humeurs déréglées, déséquilibre de la cholère, du flegme et de la pituite. Il abordait les problèmes de luxure avec l’angélique qui éteignait les appétits charnels, tout comme des problèmes au sujet de l’esprit contre les trous de mémoire ou le manque de sommeil, soignés par l’euphraise, le saffran bastard, le cabaret, le romarin. Les plantes qui provoquaient des rêveries, cauchemars ou sommeil étaient nombreuses : la mandragore, le pavot cultivé (opium), l’aneth, le coquelicot, le poireau, la fève, etc. Fuchs envisageait les vertus morales lorsqu’il décrivait les propriétés de quelques plantes qui empêchaient des attitudes désordonnées, des crises d’hystérie, des excitations et autres emportements. L’aneth calmait les sanglots, le romarin par son odeur apaisait et les drogues comme l’opium amenait le patient vers un état de léthargie. La « bourrache » menait, elle, à la liesse et à la gaieté. D’autres comme la menthe et la roquette provoquaient les appétits charnels, la « cheruy » (siser) provoquait l’appétit tout court.
Cet utilitarisme, ou pragmatisme face à l’utilisation des plantes pour corriger la sexualité de chacun et de chacune que l’on retrouve chez Leonhart Fuchs, découle d’un « refoulement des pulsions », théorisé par Norbert Elias dans La Civilisation des mœurs (1939). Il n’y avait pas, pour l’homme et la femme du XVIe siècle, de possibilité de penser l’acte sexuel en dehors de la sphère intime ni même en dehors de l’objectif procréatif, en tout cas pas sans l’accord tacite des parents ou des tuteurs en vue d’un mariage. Cependant, Norbert Elias semble exagérer cette transition des mœurs car cet argument n’est pas neuf puisque cette injonction à la sexualité saine et « procréatrice » existait déjà dans le corpus hippocratique, et même dans la Bible. On consommait diversement persil, ortie, oignon, panais, graines de moutarde, artichauts, pour éveiller le corps aux plaisirs charnels. Nous étions là entre rituels païens et religion chrétienne scrupuleuse de la Bible qui conseille les plaisirs charnels incarnés par la forme mythique du couple d’Adam et Eve dans le Jardin d’Eden (cf. la Genèse), puisque « Lorsque Dieu a créé l’homme, la femme et les animaux, Il a mis en eux cette impulsion uniquement pour qu’ils croissent et multiplient[111] ». Pour les naturalistes du XVIe siècle, rappeler cette forme mythique du couple biblique était essentiel car : « le couple, légitime et procréateur, fait la loi[112] ». Cette image participait d’un pouvoir moral et religieux qui contrôlait le corps physique[113].
Les vertus du corps féminin matriciel
Leonhart Fuchs encourageait l’acte sexuel comme acte générateur. En cela, le médecin allemand était prodigue en recommandations lorsqu’il s’agissait des femmes dont il parlait plus volontiers de la « matrice » que du reste du corps. Certes, il ne faisait que perpétuer la vision traditionnelle antique et médiévale mais il ne cherchait aucunement à dévier de cette conception archaïque de la femme[114]. Parmi ces très nombreux exemples, on peut citer des plantes qui servaient à guérir la matrice de ses « vices » par des vapeurs parfumées ou encore des plantes qui amélioraient la fertilité des femmes : « D’Ameos, ou Poivrette Chap. XXI. L’on dit que les femmes qui la flairent en l’acte venerien, en conçoivent plus facilement[115] » :
« Du Seu Suzeau, ou Suyer Chap. XX. La racine cuicte en vin & mangee avec les viandes, donne secours aux hydropiques. En mesme sorte prinse en breuvage est bonne contre les morsures des viperes, elle ramolist & ouvre le conduit de la matrice & parfumee en siège, guerit les vices & maux qui sont à l’entour de ladicte matrice[116]. »
Fuchs parle d’ailleurs de l’hystérie, de la fertilité comme de l’infertilité. La stérilité est un problème que certaines plantes corrigent. Il arrive que parfois, les constats des uns viennent contredire les autres. C’est le cas du persil des jardins. Selon Pline :
« Et que soyent hommes ou femmes qui en mangent, ilz deviennent steriles. Et que les enfans qui testent le laict d’une femme accouchee qui aura mangé du Persil, tomberont en Epilepsie. Et que toutefois l’enfant masle sera moins subject à prendre le mal[117]. »
Nous voyons là un exemple donné à la valeur du masculin et à un enfant mâle. Sur la même page, Fuchs remarque que selon Syméon Sethi, « le Persil rend les femmes plus promptes au jeu d’amours[118] ». La femme est fréquemment vue au prisme de sa sexualité et de son utilité au sein d’un foyer, notamment pour l’enfantement. Chaque vertu des plantes se focalise sur la fonction génératrice de la femme : être belle (nettoyer son visage, prendre soin de son teint, de ses cheveux, etc.), être bien portante pour être fertile, être sexuellement active, s’opposant ainsi à l’idéal de virginité[119]. C’est « l’inquiétude du salut, la revalorisation du mariage […] » qui explique « la multiplication, à partir du XVIe siècle, des traités qui abordent le thème de la sexualité dans le cadre du mariage[120] », traités qui viennent consolider des normes toujours influencées par la morale chrétienne, où la chrétienne n’a le choix qu’entre deux solutions : virginité ou mariage.
Il existe néanmoins d’autres usages que des plantes pour favoriser la fertilité. Les vertus des plantes chez les femmes[121] avaient souvent un lien avec le « flux des femmes », flux menstruel ou « blödigkeyt » en allemand et une plante sur deux avait vertu de faire apparaître les règles quand d’autres avaient pour effet de diminuer les « fleurs des femmes ». Certaines plantes avaient même une connotation féminine comme la « violette des Matrones » que cueillaient les femmes pour leurs maladies de femmes. Dans les plantes ayant vertu pour les femmes on trouve pêle-mêle : le laurier alexandrin, la carotte, le « petit genest », la pivoine, l’herbe aux aulx, l’armoise, le plantain, le trèfle des prés, le bouillon blanc qui nettoie les visages de leurs imperfections, la sanguisorbe pour les règles, la « saulge sauvage » et le persil de roc, la limoine, le « soulfy », etc. D’autres plantes étaient recommandées aux femmes dans des cas extrêmes, pour leur vertu purgative, ou bien les femmes étaient mises en garde à cause des vertus abortives[122] de quelques plantes, comme la gentiane, le cresson, la menthe aquatique, la berle, le passe-velours, la camomille qui tire l’enfant mort de la femme, la rue, le sénevé sauvage, le pain de pourceau et l’ellébore noir bâtard. On trouve de nombreux autres usages salutaires des plantes destinés aux femmes : pour que le lait soit abondant, pour les « maladies secrètes et intérieures des femmes » comme le disaient Fuchs ou Dioscoride, pour les fleurs des femmes (flux menstruel), pour la santé des « mamelles » et de la poitrine, pour le flux blanc des femmes, pour les problèmes de matrices ou amarry, on utilise rue et fenouil. Les conseils de médication féminine prenaient quelques fois la forme d’une amulette ou d’un talisman que la plante représentait symboliquement. Le botaniste allemand retranscrivait ce que Pline donnait pour vertu à l’aurone :
« L’on dit qu’un rameau de ladicte herbe mis soubz le chevet, engendre enuye de habiter avec les femmes, et que c’est un souverain remede contre tous les enchantemens et fascinations qui empeschent d’avoir affaire aux femmes[123]. »
Même Leonhart Fuchs n’échappait pas au cliché superstitieux de la théorie des signatures[124] lorsqu’il s’agissait de médecine des femmes, il racontait avec assurance :
« Les vertus. Il est assés apert par les choses que nous avons dit, que les deux Sanguisorbes, hont une efficace singuliere pour restreindre & supprimer les flux de sang, tellement qu’aucuns asseurent pour tout certain, que si on les porte seulement à la main, elles arrestent le sang de quelque part qu’il sorte. Asseurement c’est une chose congnue par expérience, qu’on ne sauroit trouver meilleur remede pour guérir le flux des femmes, que ces herbes[125]. »
La pratique de Leonhart Fuchs pâtit d’un manque de connaissances sur le corps des femmes dont il a probablement appris le fonctionnement à travers Maladies des femmes du corpus hippocratique. De ce fait, « la démarche analogique s’impose comme une nécessité[126] », à la fois dans les comparaisons aux organes mâles mais aussi dans la conception du végétal et de son usage concernant les femmes, « représentations mentales, nourries de traditions savantes et de préjugés populaires […][127] ».
Protéger l’enfant, contre poisons, poils et agitation : la vertu de prudence
Bien que peu valorisé dans les écrits des médecins du XVIe siècle, l’enfant a connu un regain d’intérêt dans les études historiques contemporaines[128]. L’historienne Danielle Jacquart fait remarquer qu’à la Renaissance, il y a eu un désintérêt pour l’enfance, au profit du monde des adultes[129]. Nous n’avons pas inventorié le nombre de fois où le mot « enfans » apparaît chez Fuchs mais nous pouvons dire que ces derniers ne sont pas marginalisés dans l’ensemble du De historia stirpium. Pour les enfants nous trouvons la pivoine, la rose (contre le « haut mal », l’épilepsie), la tortelle, le laurier alexandrin, l’armoise, le plantain, la pensée, etc. L’herbier n’évoquait que rarement la puberté mais on note que l’arrivée des poils chez les enfants était quelque peu honteuse et qu’il fallait la retarder. L’« herbe à laict » faisait, pour cela, tomber les poils, tout comme le suc du figuier. La racine de jacinthe leur « engarde de sortir le poil au menton, & parties honteuses[130] ». Cette habitude n’était-elle pas tributaire des sources de l’Antiquité ? Une autre indication nous est donnée, sur leur loisir et occupation, dont le bleuet avec lequel ils faisaient de l’encre pour peindre dans les livres les lettres de l’alphabet. Il était souvent question des enfants morts dans le ventre de leur mère, du fait de la forte mortalité infantile. L’hygiène de l’enfant paraissait aussi essentielle que celle de l’adulte :
« Du Cerisier & des Cerises. Chap. CLXII. Addition. Il y en ha qui enseignent que la gomme qui distille du Cerisier, est medicinale contre la toux inveteree, & que la prenant avec du vin, elle adoucist les aspretés du gosier, & qu’elle chasse toutes fascheries, & fait revenir l’appetit. Outre plus qu’elle rend la peau & le cuir de plus belle & vive couleur, & qu’elle esclaircist la veüe, & qu’elle guérit les rongnes & dartres des petits enfans[131]. »
L’enfant n’était pas exempt des dangers liés à une méconnaissance des plantes qui l’entouraient. Il est en effet plus à même de mourir par empoisonnement et son petit corps n’était pas capable de tolérer une dose de poison aussi minime fusse-t-elle. Sur la morelle au chapitre CCLXV de la traduction française, Leonhart Fuchs s’inquiétait de la quantité de morelle qui s’avérait dangereuse pour l’homme et il se remémorait un cas dont il avait entendu parler :
« Mais quant à nous, nous n’avons grand soucy, en quelle manière elle secourt aux pourceaux, ains plus tost nous considerons quelle puissance est ce qu’elle ha sur l’homme : veu qu’il est manifeste, qu’il y ha aucunes choses qui servent de viande aux bestes, qui sont poison à l’homme. Et ha l’on congnu par experience, qu’il y ha eu deux enfans qui sont morts soudain, aprés avoir mangé des grains de ceste Morelle[132]. »
La vertu dont il est question ici est la vertu de la prudence. La protection de l’enfant est mise en avant contre tous les poisons et les venins, on lui donnait à avaler le suc des grains de phaséoles épineux par exemple. Les fréquentes occurrences des termes « enfans morts » laissent penser que le décès précoce de l’enfant est toujours la hantise de la société de la Renaissance mais semble aussi être une expression banalisée par ses nombreuses apparitions, ce qui rappelle la phrase de Montaigne dans les Essais, II, « J’ai perdu deux ou trois enfans en nourrice, non sans regrets ni sans fascherie[133] ». Les nombreuses études démographiques sur cette période ont montré que les cimetières accueillaient bien plus d’enfants et de jeunes que d’adultes en proportion[134]. Le garder en vie malgré la mortalité avant, pendant et après l’accouchement demeurait un impératif pour garantir une descendance. Leonhart Fuchs eut lui-même de très nombreux enfants. Si l’enfant était souvent cité comme destinataire de certains remèdes, il ne paraissait pas avoir une importance signifiante aux yeux de Leonhart Fuchs, en tout cas, il ne remplissait pas de fonction particulière au sein de la société. Ce dernier détaillait le physique des enfants en retranscrivant les préconisations de Pline, Galien ou Dioscoride pour leur blondir les cheveux, les faire sentir bon avec l’iris ou la flambe, leur noircir les yeux avec des noisettes pilées ou leur assurer un beau teint, leur jeter les vers hors du ventre avec l’armoise, les empêcher d’avoir mal avec le plantain, leur panser leurs blessures avec le « pied de lyon » (chapitre CCXXXIIII) et le laurier alexandrin, au chapitre LXXXVII porté en collier leur évite un trop plein d’humidité dans le corps. Comme nous l’avons vu précédemment, l’enfant mâle paraissait valorisé par rapport à l’enfant femelle. Cette pensée ancienne résistait dans les descriptions que Fuchs recopiait. Par exemple, pour la mercuriale, dans sa retranscription des sources anciennes, il laissait un choix cornélien aux parents au chapitre CLXXXI : l’espèce mâle faisait naître des enfants mâles quand l’espèce femelle faisait naître des filles.
Conclusion
Ces constatations, Leonhart Fuchs les faisait au sein d’un monde savant dont les connaissances qui, comme le dit très bien l’historienne Ann Blair, se fondaient sur la pratique traditionnelle de la philosophie naturelle, la compilation et l’explication des faits provenant largement des savoirs livresques et de principes religieux, mais en y incorporant l’expérience sensorielle ou intellectuelle[135]. En les vulgarisant par l’image et par l’usage des langues vernaculaires, de l’allemand au français, les savoirs se sont peu à peu immiscés dans la culture non savante ou non spécialiste, se mélangeant aux savoirs profanes. Inversement, comme nous l’avons vu, Leonhart Fuchs cite souvent des savoirs « vulgaires » ou les usages populaires des Allemands, qui constituent peu à peu un savoir académique et scientifique que l’on retrouve dans les traités de botanique ou de médecine. Cette réflexion sur l’entrée des savoirs vernaculaires dans la constitution des savoirs dits « scientifiques » mérite une plus ample étude puisqu’en cherchant à comprendre la nature par les plantes, Fuchs entend reconnaître la nature divine mais aussi la nature utilitaire par lesquelles un individu peut gouverner, diriger et soigner son corps. Ainsi les vertus des plantes trouvent leur écho naturel dans le corps humain, tant au niveau symbolique que dans l’application d’une praxis médicale fermement ancrée dans les croyances religieuses et les valeurs morales de la Renaissance.
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* Je souhaite remercier chaleureusement mes deux directeurs de mémoire de Master 1 et de Master 2, Pascal Brioist et Concetta Pennuto, qui m’ont donné beaucoup de conseils avisés pour la poursuite de mes recherches en doctorat. Merci aussi à Madame Marie-Élisabeth Boutroue pour ses recommandations de lectures. Cet article est issu, en partie, du mémoire de : Tassanee Alleau, Master 1, De historia stirpium de Leonhart Fuchs : la médecine et l’usage des plantes dans la société allemande du XVIe siècle, Mémoire de Master 1, sous la direction de Concetta Pennuto et Pascal Brioist, Centre d’études supérieures de la Renaissance, 2016.
[1] Lire les herbiers comme ceux de Philippe Glardon ou de Dina Bacalexi.
[2] Sachiko Kusukawa, Picturing the Book of Nature: Image, Text, and Argument in Sixteenth-Century Human Anatomy and Medical Botany, Chicago – London, University of Chicago Press, 2011, p. 2: « The fact that Fuchs envisaged their knowledge to be presented in printed books affected the way they set up their arguments and even their methods of study. ».
[3] À ce sujet, lire la thèse d’Ariane Rabatel, Du végétatif au végétal, l’essor de l’intérêt pour la plante à la fin du Moyen Âge, Thèse de doctorat, École pratique des hautes études, EPHE PARIS, 2016.
[4] Qu’ils s’agissent de Dioscoride, de Théophraste, de Galien ou encore de Pline l’Ancien.
[5] Comme celle de Georges Vigarello, de Daniel Roche et de Michel de Certeau. Lire aussi Florence Hulak, « En avons-nous fini avec l’histoire des mentalités ? », Philonsorbonne, 2 ; 2008, p. 89-109.
[6] Philippe Glardon, « L’histoire naturelle du XVIe siècle : historiographie, méthodologie et perspectives », Gesnerus 63, (2006), 280–298.
[7] Comme par exemple l’ouvrage de Ralf D., Hofheinz, Melanchthon und die Medizin im Spiegel seiner akademischen Reden, Springer-Verlag, 2016.
[8] Il existe quatre humeurs principales : le sang, la bile noire, la bile jaune et le phlegme ainsi que quatre éléments vitaux : l’air, le feu, l’eau et la terre, et par conséquent quatre qualités : sec, chaud, froid, humide, coexistant à divers degrés dans le corps.
[9] Bernard Beck, « Jardin monastique, jardin mystique. Ordonnance et signification des jardins monastiques médiévaux », in Revue d’histoire de la pharmacie, 88ᵉ année, n°327, 2000. pp. 377-394. DOI : https://doi.org/10.3406/pharm.2000.5121.
[10] Johannes Henricus Ursinus, Arborevum Biblicum Inquo Arbores et Frutices Possim in Sacris Litteris Occurrentes, Notis Philologicis, Philosophicis, Theologicis Exponuntur et Illustrantur, Christophorus Gerhardus, 1663.
[11] Eleanor Anthon King, Bible Plants for American Gardens, Courier Corporation, 1975.
[12] John Smith, Bible Plants: Their History, with a Review of the Opinions of Various Writers Regarding Their Identification, Hardwicke abd Bogue, 1878.
[13] Andrew D. Berns, The Bible and Natural Philosophy in Renaissance Italy: Jewish and Christian Physicians in Search of Truth, Cambridge University Press, 2015.
[14] Harold N. Moldenke, ‘The Economic Plants of the Bible’, Economic Botany, 8.2 (1954), p. 152–63, https://doi.org/10.1007/BF02984732.
[15] Leonhart Fuchs, New Kreüterbuch, 1543, Michel Insengrin, Bâle, exemplaire de la bibliothèque de l’Etat de Bavière, numérisé sur Google Books, préface de Leonhart Fuchs, p. 2.
[16] Fuchs, Leonhart, Commentaires tres excellens de l’hystoire des plantes, Chez Jacques Gazeau, 1549, p. 2 (épître dédicatoire).
[17] Fuchs, 1549, ibid.
[18] Fuchs, 1558a.
[19] Leonhart Fuchs, Methodus seu ratio compendiaria perveniendi ad veram solidamque medicinam …, Guillard, 1541, p. 1. « Deum optimum max. herbas ac plantas, ut iis subinde ad propulsandos morbos uteretur ab Adam propagata sobolos, è terra condidisse diserte tradit ? ».
[20] Leonhart Fuchs, Methodus seu ratio compendiaria perveniendi ad veram solidamque medicinam …, Guillard, 1541.
[21] Leonhart Fuchs, Methodus seu ratio compendiaria cognoscendi veram solidámque medicinam, ad Hippocratis & Galeni scripta rectè intelligenda mirè utilis, tot nunc in locis aucta, & emendata, ut quasi de novo, postremùm tamen edita esse videatur, Leonharto Fuchsio… autore. Accesserunt huic de usitata hujus temporis componendorum miscendorúmque medicamentorum ratione libri tres multo quam antea unquam auctiores & castigatiores, eodem Leonharto Fuchsio autore, Paris, chez Jacques Ier Du Puis, 1550.
[22] Fuchs, 1558a.
[23] En effet, les médecins se trouvaient parfois en concurrence avec des catégories de professions médicales que Leonhart Fuchs voyait comme des « charlatans » et qu’il définissait très vaguement avec des termes tels que « femmes des villages » par exemple. Il visait probablement des corps de métiers non-détenteurs d’un diplôme sanctionnant une formation universitaire.
[24] Fuchs, 1558a, chap. CCXCVII.
[25] Pérez, 2015, p. 101–108.
[26] Fuchs, 1558a.
[27] David Hawkes, Richard G. Newhauser, The Book of Nature and Humanity in the Middle Ages and the Renaissance, ASMAR 29, Brepols, 2013, p. 22–23.
[28] « Du Meurier, Chap. CXCIX », Fuchs, 1558a, p. 363.
[29] Cf. « Le gouvernement idéal de l’âme et du corps par les plantes dans les herbiers des médecins-naturalistes de la Réforme au XVIe siècle (Leonhart Fuchs et William Turner) », lors de la table ronde collective « Le gouvernement idéal à la Renaissance, de soi au collectif », Lab du Jeune Chercheur, Rendez-vous de l’Histoire, Gouverner, Blois, 11 Octobre 2020.
[30] Methode, ou brieue introduction, pour paruenir à la congnoissance de la vraye & solide medecine, de Leonhart Fuchs, traduit par Iean de Tournes, 1552, Bibliothèque municipale de Lyon, p. 29.
[31] Peter O. Grell, Medecine and the Reformation, New York, Routledge, Taylor & Francis Group, 1993, p. 118–133.
[32] On peut trouver des exemples dans l’article de Hannah Marcus, “Censoring Leonhart Fuchs: Examples from the New York Academy of Medicine”, History of medicine and Public Health, Févier 2015, https://nyamcenterforhistory.org/2015/02/20/censoring-leonhart-fuchs-examples-from-the-new-york-academy-of-medicine/ consulté le 10/11/2021.
[33] Pascal Brioist, Hervé Drévillon, Pierre Serna, Croiser le fer : violence et culture de l’épée dans la France moderne (XVIe-XVIIIe siècle), Éditions Champ Vallon, 2002/5, p. 52–80.
[34] Cf. Préface dans Fuchs, 1543.
[35] Voir Matthew Klemm, « Les complexions vertueuses : la physiologie des vertus dans l’anthropologie médicale de Pietro d’Abano », Médiévales, 63, automne 2012.
[36] Lire le premier chapitre « La prose du monde » de Michel Foucault dans Les mots et les choses, Gallimard, 1966.
[37] Giambattista Della Porta, Rault (Sieur.), La Physionomie humaine, J. & D. Berthelin, 1655.
[38] Luce Guillerm, Le Miroir des femmes: Moralistes et polémistes au XVIe siècle, Presses universitaires de Lille, 1983.
[39] La pensée de Leonhard Rauwolf, imprégnée par la tradition aristotélicienne et par les enseignements de l’université de Montpellier, mettait toujours en parallèle le monde naturel et la Bible dans une approche qu’on pourrait appeler de « philosophie pieuse et chrétienne ».
[40] John Lytton Musselman, A Dictionary of Bible Plants, Cambridge University Press, 2011, p. 3-5.
[41] Ibid.
[42] Diana Bacalexi, « Trois traducteurs de Galien », in Véronique Boudon-Millot et Guy Copolet, Lire les médecins grecs à la Renaissance, Paris, Bibliothèque interuniversitaire de Médecine, De Boccard édition, 2004, p.251-253.
[43] Voir Russell, 1981, p. 123–130 ; Pérouse, p. 9–22 et Argod-Dutard, p. 65–82, in Viallon-Schoneveld, 2002.
[44] Roseline REY, Histoire de la douleur, Paris, Éditions La Découverte, 1993, p. 61–62.
[45] Brioist, Drévillon, Serna, 2002.
[46] Fuchs, 1558a.
[47] René REMOND, Histoire générale de l’enseignement et de l’éducation en France, Tome 2, De Gutenberg aux Lumières, Nouvelle Librairie de France, Paris, 1981, p. 221.
[48] Fuchs, 1543, chapitre CCCCLVIII. Voir aussi « Du Senegré. Chap. CCVIII. La décoction de la graine du Senegré emonde la puanteur des aisselles, la farine oste soubdainement la crasse, les lentilles, & autres ordures de la teste, appliquee avec vin & Nitrum. » in Fuchs 1558, 546–547. « Die bletter in wein gesotten, seind gut übergelegt unnd darmit gewäschen, zu allerley wunden unnd schäden. Dergleichen gesotten unnd übergelegt, vertreiben sie die mäler under dem angesicht, unnd heylen den brand krefftiglich. […] Der safft von den blettern inn die nasen gethon, vertreibt den bösen gestanck derselbigen, unnd reyniget die geschwär darinn.
Die brüe darinn der samen gesotten ist, soll man brauchen zu dem zwang, unnd den hindern damit wäschen. […] Das meel von dem samen mit Leinsamen gesotten unnd übergelegt, stillt den weetagen und schmertzen der mutter. Mit schwebel und hönig vermengt und angestrichen, vertreibt es die masen under dem angesicht, und die rauden. Der samen in wasser gesotten, unnd die üechsen darmit gewäschen, vertreibt den gestanck darunder. »
[49] Fuchs ,1542.
[50] Danielle Jacquart, La science médicale occidentale entre deux renaissances (xvie s.-xve s.), Aldershot, 1997, xiv, p. 120.
[51] Alexandre KOYRE, Études d’histoire de la pensée scientifique, Saint-Amand, Éditions Gallimard, 1973, p. 40.
[52] Fuchs, 1558a.
[53] Emile Callot, La Renaissance des sciences de la vie au XVIe siècle, Paris, Presses Universitaires de France, 1951, p. 45.
[54] Fuchs, 1558a.
[55] Cf. Siraisi, Nancy G., « History and antiquarianism in Renaissance culture », in History, Medecine, and the Traditions of Renaissance Learning, The University of Michigan Press, United States of America, 2007, p. 8–11.
[56] Fichtner, 1968.
[57] À ce sujet, lire les travaux de Samir Boumediene, La colonisation du savoir : Une histoire des plantes médicinales du ‘Nouveau monde’ (1492-1750), Vaulx-en-Velin, Éditions des Mondes à faire, 2016.
[58] Pauline Koetschet, « Médecine de l’âme, médecine du corps », Bulletin d’Etudes Orientales, Institut Français du Proche-Orient, 2008, 57, p. 155–167.
[59] Fuchs, 1558a.
[60] Fuchs, 1558a, p. 549, « De la pensée ou herbe de la Trinité », Chap. CCCX.
[61] Fuchs, 1558a, p. 36.
[62] Fuchs, 1558a, chap. CXIIII, p. 210.
[63] Fuchs, 1558a, p. 228.
[64] Fuchs, 1558a, p. 230.
[65] Fuchs, 1558a, p. 369–372.
[66] Fuchs, 1558b.
[67] Luther se désignait lui-même comme un « prédicateur et évangéliste », « soit le ministère de la Parole divine, soigneusement distingué de toute charge politique […] [Luther, 1525a, WA 18 327] », selon Alain Caillé, in Histoire raisonnée de la philosophie morale et politique, La Découverte, 2012. Mais Leonhart Fuchs décide de quitter en 1543 Wittenberg, foyer de la Réforme de Melanchthon et de Luther, avec qui il a d’irréconciliables différents théologiques, comme expliqué dans Annette Winkelmann, J. Helm, Jürgen Helm (éditeurs), Religious Confessions and the Sciences in the Sixteenth Century, Brill, 2001, p. 53.
[68] Fuchs, 1543, Von Coloquint, Chapitre CXXXIX. « Coloquint ist aber dem magen über die massen schedlich. Derhalben billich von der Obrigkeit sollten gestrafft werden die landstreicher, Juden, unn andere küe arzt, welche die leut mit diser hefftigen artznei der massen purgieren, das ihr viel den geist auffgeben. Aber niemandts ist der ihm sölchs verderben unnd sterben vieler menschen zuhertzen laß gon. Ja auch viel Prediger, die sich Evangelisch nennen, vergessen gantz unnd gar ihres beruffs, dem sie trewlich unnd vleissig sollten außwarten unnd nachkommen, laut ihrer eigen, ja Christi, leer, unn richten ihren jarmarckt auff, geben mehr artznei auß, dann etwan zween rechtgeschaffne ärtzt und Doctores. Wolt Gott das sie jhr befohlen ampt recht außrichtetend, so würden sie warlich sovil zu schaffen haben, das sie vor der geystlichen unnd seel arznei, wol würden der leiblichen vergessen, unn dieselben denen bevelhen, welchen sie außzurichten zusteet. Aber dieweil sie nit viel lust zu der Heiligen schrifft, ja derselbigen einen geringen verstand haben, unnd ihre predig an der wand herab studieren; gaffen sie anderß wohin, unnd vergessen dieweil was ihr beruff unnd ampt ist, welches rechtgeschaffnen Theologis und Predigern nit zusteet […] ».
[69] Dans la Bible, se référer à Jonas 4.6 ; Jonas 4.7 ; Jonas 4.9 ; Jonas 4.10)
[70] Lire Élias Joseph Bickerman. « Les deux erreurs du Prophète Jonas ». In: Revue d’histoire et de philosophie religieuses, 45e année, n°2,1965, p. 232-264; DOI : https://doi.org/10.3406/rhpr.1965.3806
[71] Boutroue, 2002, p. 47–64.
[72] « C’est naturellement pour Luther que l’enjeu était le plus important à ce moment de son itinéraire. La Sola scriptura, même si l’expression n’est pas de lui, devait marquer chez lui et chez les principaux adeptes de sa Réforme la mise à distance de la double référence des humanistes aux Ecritures et aux Pères de l’Eglise. L’oubli désormais des Pères, parce que non exempts aux yeux de Luther d’errances doctrinales, conférait à l’Ecriture un statut de privilège qui lui apportait une autorité exclusive et définitive, ce qui devait inclure la garantie de son intégrité et donc de son exactitude matérielle, tant du point de vue du texte que du point de vue de la traduction. » in Pierre Gibert, L’invention critique de la Bible, XVe-XVIIIe siècle, Gallimard, 2010 , p. 60.
[73] Fuchs, 1543, Von Beyfuβ, Chapitre XIII. Voir aussi Fuchs, 1558a, p. 33 : « Nach anzeygung Dioscoridis, so seind diß krauts Artemisia genent dreierley geschlecht. Das erst würdt in sonderheyt geheyssen Beyfuß, Bucke, S. Johans gürtel, welchen namen es auß einem aberglauben der Teütschen überkomen hat. Dann sich ettlich damit an S. Johans des Teüffers tag gegürtet haben, unnd darnach in das S. Johans fewr geworffen, mit zuthun ettlicher sprüch und reymen. Es würdt auch genent Sonnenwend gürtel, auß gleicher ursach, das man zu gedachter zeit, da die Sonne sich vor zeiten gewendt, sich damit gegürtet hat. Es heyssen auch diß geschlecht ettliche grossen Reinfarn. Und seind dises krauts auch zweyerley ardt, eins mit einem gantz braunroten stengel, und blumen, derhalben es genent würt Rotbucken, oder Rotbeyfuß ».
[74] Lire les Lamentations 3.16, Deutéronome 29.18, Amos 5.7, Amos 6.12, Lamentations 3.19, Apocalypse 8 .11, Jérémie 9.15 et 23.15, Esdras 5.9, selon https://www.levangile.com/Dictionnaire-Biblique/Definition-Westphal-645-Absinthe.htm, consulté le 21/09/2021.
[75] Fuchs, 1558a, chapitre CCXXII.
[76] Dans la pensée magique, deux entités (telles que des plantes) peuvent avoir des propriétés semblables par analogies visuelles, par transfert de propriété, par un phénomène d’inversion. L’entité dans la pensée magique a un pouvoir opérant conférant à la propriété de l’entité l’exécution de la pensée.
[77] « So man diß kraut im mund halt, leschetes auß die überige begir zur unreynigkeit. Diß kraut bey sich getragen, sol gut für allerley zauberey sein ». Fuchs, 1543, Von Angelick, Chapitre XLIII. Et voir aussi Fuchs 1558a, chapitre XLIII.
[78] Fuchs, 1558a, chapitre CCXLI. Voir aussi « Man treibt sonst viel abentheur mit disem Widerthon, das lassen wir als narrenwerck und Teufels gespenßt faren » dans Fuchs 1543, Von goldtfarbem Widerthon, chapitre CCXLI.
[79] Jacqueline Vons, « Une approche pluridisciplinaire de l’épilepsie au XVIe siècle », dans « Épilepsies et Renaissance », Épilepsies, Revue de la Ligue française et de Ligues francophones contre l’épilepsie, 2008, Vol. 20.
[80] Gianna Pomata « Sharing Cases : The Observationes in Early Modern Medicine », Early Science and Medicine, A Journal for the Study of Science, Technology and Medicine in the Pre-modern Period, Leiden, Brill, 2010. Volume XV, n°3.
[81] Fuchs, 1549, cap. III, traduit en français dans Fuchs, 1558a. « Lixivium in quo Asarum decoctum est, si eo caput lavetur, cerebrum roborat, & memoriam. Succus etiam eius cum Pompholyge, caligantibus oculis confert. »
[82] Fuchs, 1558a, chapitre XLII.
[83] Fuchs, 1558a, chapitre XLII. Voir aussi « Beide bletter unn wurtzel auff die pestilentz blater gelegt, benemen das gifft der selbigen, und heilen sie. Die wurtzel gepulvert unn mit rosen öl vermegt, macht das angesicht sauber », dans Fuchs 1543, Von Aron, Chapitre XXII.
[84] Fuchs, 1558a, chapitre XLIII.
[85] Fuchs, 1558a, chapitre XLIII.
[86] Fuchs ,1558a, chapitre XLIII.
[87] Fuchs, 1558a, chapitre XLIII.
[88] Fuchs, 1558a, chapitre CLX.
[89] Bayle, 2019, p.5.
[90] Bayle, 2019, p.93.
[91] Fracastor, Jacqueline Vons, Concetta Pennuto, Danielle Gourevitch, Jérôme Fracastor, La syphilis ou Le mal français, Syphilis sive Morbus Gallicus, Paris, Les Belles Lettres, 2011, p. 40.
[92] Vons, 2011, LXVII-LXVIII.
[93] Vons, 2011, LXX.
[94] Pennuto in Vons, 2011, XCIV.
[95] Vons, 2011, Livre II, 40.
[96] « Von Hundßzungen. Cap. clv. Die wurtzel gedörrt unnd zu pulver gestossen in rotem wein getruncken heylet die roten rhur. Man mag auch dise wurtzel zu allerley schäden unnd wunden brauchen, in sonderheyt aber zu den bösen geschwären des munds, unnd Frantzosen. », Fuchs, 1543, chapitre CLV : ici, le mot « Frantzosen » qualifie le terme de syphilis.
[97] Selon la définition médicale du dictionnaire en ligne Larousse disponible sur le site de Larousse, consulté le 29/04/2016.
[98] Fuchs, 1558a, chapitre X.
[99] Fuchs, 1558a, chapitre XIX.
[100] Le terme de « phagedenes » est utilisé dans Fuchs 1558a, chapitre XXII, rubrique « selon Pline ».
[101] Fuchs, 1558a, chapitre XXXVII, rubrique « les vertus selon Dioscoride ».
[102] Fuchs, 1558a, chapitre LIV, rubrique « selon Pline ».
[103] Fuchs, 1558a, chapitre LX, rubrique « la vertu selon Dioscoride ».
[104] Fuchs, 1558a, chap. CCCXLII.
[105] Fuchs, 1558a, p. 336.
[106] Fuchs, 1558a, p. 259.
[107] Fuchs, 1558a, p. 51.
[108] « Régime est à prendre au sens étymologique de règle de vie. La médecine ancienne se subdivisait en trois branches : régime (diaita), « pharmaceutique », chirurgie. La médecine par le régime s’adressait à l’homme en bonne santé et qui souhaitait le rester (homo sanus), comme aux personnes fragiles (imbecilli) et aux malades (aegri). », in Fracastor, Jacqueline Vons, Concetta Pennuto, Danielle Gourevitch, Jérôme Fracastor, La syphilis ou Le mal français, Syphilis sive Morbus Gallicus, Paris, Les Belles Lettres, 2011.
[109] Martin Mulsow, Savoirs précaires, pour une autre histoire des idées à l’époque moderne, Editions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 2018, p. 4-6.
[110] Voir à ce propos la table des maladies et des remèdes dans Fuchs, 1558a.
[111] Citation de la Genèse, I, 22 dans Agasse, Jean-Michel, « Désir, plaisir et pratiques sexuelles sous le regard d’un médecin de la Renaissance », Seizième Siècle, N°7, 2011. p. 85-97.
[112] Michel Foucault, Histoire de la sexualité, I La volonté de savoir, Gallimard, Paris, 1976, p.10.
[113] Ce paragraphe est issu de la communication donnée lors des Rendez-vous de l’histoire de Blois 2020 : « Le gouvernement idéal de l’âme et du corps par les plantes dans les herbiers des médecins-naturalistes de la Réforme au XVIe siècle (Leonhart Fuchs et William Turner) », lors de la table ronde collective « Le gouvernement idéal à la Renaissance, de soi au collectif », Lab du Jeune Chercheur, Rendez-vous de l’Histoire, Gouverner, Blois, 11 Octobre 2020.
[114] Dina Bacalexi, « Responsabilités féminines : sages-femmes, nourrices et mères chez quelques médecins de l’Antiquité et de la Renaissance », Gesnerus, 62, (2005), p. 5–32.
[115] Fuchs 1558a, chapitre XXXVII, rubrique « les vertus selon Dioscoride », p. 50.
[116] Fuchs 1558a, chapitre XXXVII, rubrique « les vertus selon Dioscoride », p. 48.
[117] Fuchs 1558a, « Du Persil de jardin », Chap. CCLXXXIIII, p. 506.
[118] Fuchs 1558a, « Du Persil de jardin », Chap. CCLXXXIIII, p. 506.
[119] Lire Estela BONNAFFOUX, « « Réveiller la Vénus endormie » : le plaisir sexuel et ses limites dans le discours médical de la première moitié du XVe siècle », Questes, 37, 2018, p. 51–68.
[120] Maurice Daumas, « La sexualité dans les traités sur le mariage en France, XVIe-XVIIe siècles », Revue d’Histoire moderne & contemporaine, 2004/1, n°51-1, p. 7-35.
[121] Voir sur le comportement sexuel des femmes allemandes, Nivre 2004.
[122] Sur la contraception et l’avortement lire Jacques Gélis, L’arbre et le fruit, la naissance dans l’Occident moderne, XVIe-XIXe siècle, Fayard, 1984, p. 383-387.
[123] Fuchs, 1558a, p. 8, chapitre II.
[124] De la même façon que la pensée magique, la théorie des signatures ou des signes attribue à une plante une propriété/une efficacité selon des critères analogues (Similia similibus curantur, ce qui se ressemble soigne ce qui lui est semblable) ou contraires basés sur l’apparence, l’aspect et la forme de la plante.
[125] Fuchs, 1558a, « Sanguisorbe », chap. CCCV, p. 540. Malgré tout, la sanguisorbe aurait des propriétés hémostatiques par la production de puissants tanins dans ses rhizomes et racines comme le montre cette étude https://www.mdpi.com/1420-3049/17/7/7629/htm.
[126] Evelyne Berriot-Salvadore, Un corps, un destin, la femme dans la médecine de la Renaissance, Paris, Honoré Champion éditeur, 1993, p. 14.
[127] Ces citations s’appliquant aux chirurgiens et aux anatomistes sont parfaitement applicables aux médecins-naturalistes. Lire Evelyne Berriot-Salvadore, op. cit., p. 15.
[128] Paul Ariès, L’Enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime, Paris, Plon, 1960.
[129] Danielle Jacquart, « L’alimentation du jeune enfant au XVIe siècle », dans Pratiques et discours alimentaires à la Renaissance, Actes de colloque de Tours de mars 1979, Paris, Maisonneuve et Larose, 1982, p. 57–68.
[130] Fuchs, 1558a, p. 571.
[131] Fuchs, 1558b, p. 299.
[132] Fuchs, 1558a, p. 471.
[133] Cf. Les Essais, II, p. 8, comme cité dans Philippe Ariès, L’enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime, Paris, Seuil, 1975.
[134] Philippe Ariès, L’homme devant la mort, Paris, Seuil, 1977.
[135] Ann Blair, The Theater of Nature: Jean Bodin and Renaissance Science, Princeton University Press, 2017, p. 3.