Pratiques archivistiques et mises en registre à Cîteaux : des originaux au « monument » de Jean de Cirey (XIIe-début XVIe siècle)

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Coraline Rey

Résumé
L’objectif de cet article est de donner un premier aperçu des pratiques archivistiques de l’abbaye de Cîteaux, de comprendre les processus qui ont mené à la réalisation et à l’organisation des productions scripturaires (actes originaux, cartulaires, inventaires), de la fin du XIIe siècle au début du XVIe siècle. Dans cette étude, une attention particulière a été portée au « monument » laissé par Jean de Cirey, abbé de 1476 à 1501 : il a mené un classement des actes du chartrier dans son intégralité ainsi qu’une vaste entreprise de cartularisation, assurant la préservation et la pérennité des chartes.

UMR ARTeHIS, Université de Bourgogne. Courriel : coraline.rey@live.fr. Née le 28 Janvier 1986.
Doctorante en histoire médiévale à l’UMR ARTeHIS, Université de Bourgogne : Archives et bibliothèque à Cîteaux. De l’original au « recueil » : scripturalité et visualité dans une entreprise d’écritures au Moyen Âge (XIIe siècle- début du XVIe siècle), sous la direction de Daniel Russo et de Eliana Magnani.
Publications : « Processus de cartularisation et pratiques archivistiques à Cîteaux : des originaux au « monument » de Jean de Cirey. Le dossier de la seigneurie de Villars (XIIe-début XVIe siècle) », in Productions, remplois, mises en registre : la pratique sociale de l’écrit à travers la documentation médiévale bourguignonne, actes du colloque d’Auxerre [à paraître].


Invenientes autem antiquum ordinem sub quadam titulorum ascriptione laudabiliter pro primis principiis inditum a ducentum annis et ultra in subscentis cartis minime fuisse observatum easque absque titulo et superscriptione confuse permixtas videntes doluimus vehementer et maxime reperientes majorem partem sigillorum confractam.

Cette description de l’abbé Jean de Cirey, à la fin du XVe siècle évoque le triste état de conservation des chartes de Cîteaux : classement non exhaustif et non systématique, chartes éparpillées dans l’abbaye, sceaux brisés [1]. Mais à travers elle, nous pouvons cerner les usages et les pratiques archivistiques de l’abbaye de Cîteaux durant le Moyen Âge [2]. Plutôt que de parler d’archivistique, qui est une science apparue au XVIIIe siècle et dont le mot n’est entré que récemment au dictionnaire [3], les termes « pratiques » ou « principes archivistiques » ont été préférés car ils font état de pratiques existant au Moyen Âge, mais non théorisés au sein d’une science.

Afin de comprendre les processus qui ont mené à la réalisation et à l’organisation des productions scripturaires cisterciennes, de la fin du XIIe siècle au début du XVIe siècle, un dossier documentaire composé d’originaux et de registres manuscrits concernant la localité de Villars, possession côte-d’orienne de l’abbaye de Cîteaux depuis la fin du XIIe siècle [4], a été réuni. Ce dossier forme un exemple représentatif du chartrier cistercien et servira de fil conducteur dans cet article. Aujourd’hui, ce dossier a été complété par des originaux et des registres concernant d’autres possessions cisterciennes de Côte-d’Or.

Compulser les archives des dépôts départementaux de Côte-d’Or et de Saône-et-Loire, notamment la série 11 H des Archives départementales de Côte-d’Or [5], dans laquelle la majorité des archives de l’abbaye sont aujourd’hui conservées, a permis de rassembler des documents de différentes natures : actes originaux et copies, cartulaires des XIIIe, XIVe et XVe siècles, inventaires des XVIe et XVIIIe siècles, mais encore terriers, registres d’amodiation, comptes, plans et cadastres [6].

Deux cartulaires de la fin du XVe siècle rassemblent des actes concernant Villars : le « cartulaire de Villars-ès-Barres », petit cartulaire (225 x 155 mm) de la fin du XVe siècle, conservé aux Archives départementales de Saône-et-Loire sous la cote H 81/12 [7] ; et le cartulaire 190 des Archives départementales de Côte-d’Or [8], sixième volume des cartulaires dits « de Jean de Cirey ». À eux deux, ces recueils font état de la copie de 62 actes. 53 d’entre eux sont aujourd’hui conservés aux Archives départementales de Côte-d’Or [9]. Les aléas de la conservation n’ont pas permis de retrouver tous les actes originaux, soit parce qu’ils ont été perdus (l’inventaire du XVIIIe siècle mentionnant ces actes [10], nous pouvons aisément penser qu’ils ont été perdus au XIXe ou XXe siècle), soit parce qu’ils ont été éparpillés dans des liasses non compulsées [11].

L’une des premières difficultés à surmonter dans l’étude des cartulaires du XIIIe siècle [12] et du XIVe siècle [13] a été de comprendre leur datation, biaisée par une erreur de classification des archivistes du XIXe siècle [14] : dans l’ordre chronologique, du plus ancien au plus récent, se trouvent le cartulaire 166, le cartulaire 169, le cartulaire 168, enfin le cartulaire 172 [15]. La deuxième difficulté a été de comprendre leur constitution : sous les reliures datant de l’Ancien Régime ou des XIXe-XXe siècles, il n’est pas aisé de savoir si ces cartulaires sont complets ou s’ils ont gardé leur composition d’origine. À titre d’exemple, le cartulaire 169 se compose en réalité de deux registres : des notices d’actes datant de la fin du XIIe siècle et le cartulaire du XIIIe siècle à proprement parler. Ce dernier est très incomplet : une table générale donne la composition du cartulaire, qui se divise en 31 chapitres topographiques : mis à part les chapitres concernant les biens situés dans les diocèses de Langres, Autun et Chalon, chaque chapitre correspond à une grange cistercienne, par exemple Crépey, Tontenant, ou encore Détain. Aujourd’hui ce registre ne possède plus que 11 chapitres, dont certains sont eux aussi incomplets.

Des inventaires réalisés à l’époque moderne ont permis d’une part de se rendre compte des aléas de la conservation des archives, d’autre part de voir en quoi les principes d’archivage médiévaux ont perduré [16]. Des terriers [17] et des registres d’amodiation [18] sont venus compléter ces sources diplomatiques et ont permis de comprendre le contexte socio-économique de l’époque. L’arpentage des possessions cisterciennes, réalisé en 1723 par les frères Gambu et Étienne Prinstet [19], a de plus donné des repères géographiques.

Dans cette étude, une attention particulière a été portée au « monument » laissé par Jean de Cirey, abbé de 1476 à 1501 : il a mené un classement des actes du chartrier dans son intégralité ainsi qu’une vaste entreprise de cartularisation, assurant la préservation et la pérennité des chartes. Jean de Cirey, abbé réformateur de la fin du XVe siècle, a été longtemps considéré comme l’un des meilleurs abbés de Cîteaux : ses successeurs reconnaissent son grand mérite ainsi que l’ampleur de l’œuvre qu’il a léguée, tant liturgique qu’administrative ou encore archivistique [20]. Si cet abbé a été le sujet de quelques articles et d’un mémoire, ce fut plutôt pour la réforme de l’Ordre qu’il a menée que pour le classement du chartrier qu’il a entrepris [21]. L’abbatiat de Jean de Cirey apparaît comme un moment de fortes transformations [22]. Il a notamment lutté contre la commende, a réformé l’Ordre cistercien, a fait partie de la réunion de prélats organisée à Tours par Charles VIII pour proposer une réforme des religieux. L’année suivant son élection à la dignité abbatiale, il a débuté le classement des actes du chartrier, comme l’atteste une lettre laissée en guise de préface au cartulaire 185 [23] et datée de 1477 [24]. Dans cette lettre, il expose l’état pitoyable du chartrier à son arrivée et explique son projet : analyser, trier, répertorier les actes, puis les compiler dans un cartulaire général. Ce cartulaire, composé de neuf volumes, est conservé aux Archives départementales de Côte-d’Or [25].

Le but de ces recherches étant de révéler les projets, les principes et les techniques archivistiques existant à Cîteaux au Moyen Âge, et de mettre en valeur l’entreprise de Jean de Cirey, nous emprunterons un cheminement chronologique, propre à révéler les évolutions culturelles et les adaptations de l’archivage aux évolutions sociétales. La première partie de cet article expose les principes de gestion archivistique mis en place à l’abbaye du XIIe au XIVe siècle ; la seconde concerne l’entreprise de Jean de Cirey à proprement parler. Ainsi la documentation antérieure et postérieure à cette entreprise archivistique et scripturaire est-elle étudiée, tour à tour, en tant que source ou résultat d’un processus.

I. Cartulaires et mentions dorsales, une continuité dans la gestion des archives (XIIe-XVIe siècle) ?

À Cîteaux, les originaux sont les témoins des classements successifs du chartrier. Ainsi des traces matérielles de ces classements sont-elles visibles au dos des chartes : cotes, numéro d’ordre ou analyses, autant de moyen d’identification des transactions contenus dans ces actes. Ces notes, apposées au verso des actes du XIIe au XVIIIe siècle [26], sont parfois difficiles à identifier car elles sont effacées ou grattées.

La cote [27] la plus ancienne que nous pouvons observer au dos des actes du corpus est un chiffre romain, un V rouge dans le cas des actes concernant la localité de Villars [28] (Fig. 1). Cette cote, inscrite vers 1235-1240, est contemporaine de la réalisation du cartulaire 169. Ce dernier possède encore une table générale ainsi que des tables particulières à chaque chapitre. Ces tables attestent que ce registre était divisé en chapitres topographiques, correspondant aux granges, qui sont les découpages spatio-économiques du domaine cistercien. Par exemple, les actes concernant la localité de Villars, et portant le V rouge sur leur verso, ont été transcrits dans le cinquième chapitre, intitulé Incipiunt capitula tituli quinti continentis cartas de Tentenens [29] et de Vilers et de omnibus pertinentiis suis. Dans chaque chapitre de ce cartulaire, les copies d’actes ont reçu un numéro d’ordre, un chiffre romain écrit à l’encre noire, qui a été reporté au verso des originaux. Ces cotes et ces numéros d’ordre sont une mise en place d’un système pratique de renvois entre les cartulaires et les actes originaux : les cartulaires permettent d’une part d’avoir sous les yeux des actes classés en un registre aisément manipulable, d’autre part ils permettent d’éviter la manipulation et donc la détérioration des actes originaux.

Dans la suite du XIIIe siècle, la mention dorsale indiquant ce Titulus a évolué : le chiffre romain rouge s’est transformé en chiffre romain noir lors de la rédaction d’un nouveau cartulaire, le cartulaire 168, vers 1260. Les scribes ont conservé le classement effectué vers 1235-1240, auquel ils ont ajouté les actes rédigés entre 1235-1240 et 1260, qui ont reçu sur leur verso la cote sous forme de chiffres romains noirs. Par exemple, les actes concernant la grange de Tontenant ont reçu un V noir, ainsi qu’un numéro d’ordre. Au cours du XIVe siècle, cette cote s’est transformée en TT, abréviation de Titulus, inscrite dans un ou deux cadres et suivi d’un chiffre romain, correspondant toujours au numéro du chapitre. Parfois les cotes les plus anciennes sont remployées et se trouvent ainsi encadrées (Fig. 2). Si la graphie de ces cotes évolue, le classement reste topographique. La collation de tous les actes du chartrier permettront de conforter l’hypothèse selon laquelle ces cotes seraient la preuve d’une continuité dans la gestion archivistique, bien que nous ne sachions pas, notamment à cause des aléas de la conservation, si les classements des actes étaient systématiques et réguliers. Bien que l’apposition de ces cotes soit contemporaine de la réalisation d’un cartulaire, dans l’état actuel des recherches, nous ne pouvons conjecturer de l’existence d’un projet unique à la base de ces entreprises scripturaires.

Les cartulaires ne sont pas les seules mises en registre que les moines cisterciens ont réalisées. Jean de Cirey, dans la préface à son cartulaire général, explique qu’il a comparé les chartes avec un inventaire réalisé en 1400 : comparantes easdem cartas cuidam inventario cartarum circa annum Domini millesimum quatercentesimum facto [30]. Cet inventaire aujourd’hui disparu pourrait être en partie recomposé grâce aux notes dorsales. Les chartes concernant la localité de Villars ont été copiées dans le cinquième chapitre de cet inventaire, en témoigne la cote TTV évoquée précédemment : dans l’état actuel de mes recherches, les actes les plus récents ayant reçu la cote en TT (suivi du numéro de chapitre) sont datés de 1397. Nous savons en outre que les mentions des actes dans cet inventaire portaient un numéro d’ordre, reporté au dos des chartes sous la forme lra, l’abréviation de littera, suivi d’un chiffre romain. Néanmoins, nous ignorons si l’inventaire de 1400 se contentait de donner une analyse des actes, et à quoi ressemblait cette analyse (sommaire, détaillée), ou s’il révélait aussi le classement matériel des actes au sein du chartrier.

Ainsi les principes archivistiques étaient-ils fixés lorsque Jean de Cirey accéda à la dignité abbatiale en 1476.

II. L’entreprise archivistique et scripturaire de Jean de Cirey et sa postérité

La réorganisation du chartrier que Jean de Cirey a entrepris à la fin du Moyen Âge commence à être bien connue grâce à sa lettre laissée en guise de préface au cartulaire 185. L’abbé y explique son projet. Il a commencé son œuvre en compulsant la totalité des archives de l’abbaye. Grâce à lui, nous savons que le chartrier, à Cîteaux, n’existait pas matériellement : les chartes étaient rangées à différents endroits de l’abbaye. L’abbé, avant de commencer le classement des actes et toute entreprise scripturaire, s’est donc évertué à les regrouper : cartas ipsas in latebris et abditis absque ordine reconditas eduximus [31] ; licet cum vigilantia possibili eas ex omnibus locis Cistercium, aliquid licet congregavimus [32].

Dans sa lettre liminaire, Jean de Cirey explique qu’il fait copier tous les actes du chartrier dans des cartulaires : in duodecin registris pergamineis magnis cum expensis conscribere [33]. Son projet se veut exhaustif, ses cartulaires, soignés et fidèles aux textes originaux, et son classement, systématique. Son but premier, indique-t-il, était d’éviter la manipulation des originaux : Ne totiens ad ipsa originalia recurrere sit necesse [34]. Selon cette lettre, l’abbé a fait copier les actes dans douze registres. Or, le cartulaire général est composé actuellement de neuf volumes, et il n’existe pas, aux Archives départementales de Côte-d’Or, d’autres manuscrits répondant à ces critères [35].

Les actes du corpus concernant Villars ont été transcrits dans deux cartulaires : le cartulaire 190, sixième volume des « cartulaires de Jean de Cirey », au chapitre intitulé Villers, Morrey [36], Meulley [37], Izeurre ; et dans le cartulaire H 81/12, cartulaire particulier, appelé « cartulaire de Villars-ès-Barres » [38]. Des analyses codicologiques [39] ont permis de comprendre la constitution de ces registres, et de dégager des caractéristiques propres à la confection des cartulaires cisterciens en cette fin de Moyen Âge. Ainsi le cartulaire 190 est-il similaire aux cartulaires 185 à 193 dans sa confection (le cartulaire général de Jean de Cirey en 9 volumes) : registres de parchemin de 320/325 x 240/250 mm, copie des actes selon un ordre topographique, rubricage des actes, table des matières en tête d’ouvrage, couvrure de cuir brun estampée à froid. L’étude de la reliure des « cartulaires de Jean de Cirey » a par ailleurs révélé des similitudes avec les reliures des manuscrits de la bibliothèque cistercienne. En effet, Jean de Cirey ne s’est pas seulement occupé du chartrier de l’abbaye, mais aussi des ouvrages formant la bibliothèque. Il a inventorié la totalité des livres dans un catalogue, s’est assuré de leur restauration et de leur conservation en les faisant relier : per duos annos continuos labore duorum et sepius trium ligatorum eosdem libros aptari, ligari et cooperiri cum magnis sumptibus et impensis fecimus [40]. Trop longtemps étudiées séparément, les archives et les bibliothèques monastiques forment pourtant une unité et sont soumises aux mêmes logiques sociétales : préciosité des entreprises scripturaires (notion de trésor) [41], importance de la sauvegarde d’une mémoire des institutions [42], intérêt pour la conception d’une « communauté textuelle [43]. » Les cartulaires 190 et H 81/12 reprennent le classement par localité, révélateur de la conception cistercienne de l’espace et de l’économie. Mais cette conception a évolué durant le Moyen Âge, passant d’un classement par grange à un classement par paroisse ou par finage. Désormais les actes ne sont plus copiés dans le TTV (Titulus quintus), mais dans le chapitre intitulé Villars. Sur leur verso, Jean de Cirey, qui a fait gratter les anciens numéros d’ordre, leur a substitué une mention de lieu (Villrs, abréviation pour Villars) ainsi qu’une analyse (Fig. 3). Cette dernière n’apparaît pas systématiquement au verso des actes originaux lorsqu’une analyse plus ancienne est encore lisible. Sans doute une analyse antérieure pouvait-elle correspondre aux critères des scribes de la fin du Moyen Âge. Néanmoins, ces critères ne semblent pas normalisés : tantôt apparaît un nom de personne, un toponyme, la nature de la transaction, ces trois critères pouvant être assemblés indifféremment.

Bien que Jean de Cirey prétende à l’exhaustivité et à la fidélité, une entreprise d’une telle ampleur ne pouvait guère être à l’abri des inattentions ou des actualisations orthographiques : par exemple, sur l’acte du mois d’août 1224 est écrit Ego Andreas Oscariensis decanus, tandis que le scribe du cartulaire 190 a transcrit Ego Andreas Oschariensis decanus.

Après les réalisations archivistiques médiévales, qui sont restées semblables tout au long de la période, l’observation des entreprises réalisées sous l’Ancien Régime s’avère nécessaire, d’autant plus que Jean de Cirey prétendait offrir son œuvre à la postérité : Vos et quemlibet vestrum […] usque ad aliam salubriorem disposicionem alicujus successorum nostrorum affectuosius in Domino Jhesu hortamur et monemus [44]. Deux inventaires du chartrier ont été réalisés, l’un en 1630, l’autre vers 1742. Le premier de ces inventaires reprend le classement topographique des actes. Cependant, les actes ont reçu un nouveau numéro d’ordre, qui ne correspond ni à un classement chronologique, ni thématique [45].Le second est une refonte complète de l’organisation du chartrier : l’archiviste Jean-Baptiste Lemort a lui aussi entrepris un classement d’une grande ampleur dans la seconde moitié du XVIIIe siècle [46]. Il a trié et analysé l’ensemble des actes, depuis la fondation de l’abbaye, juqu’au XVIIIe siècle. Les analyses, ainsi que les nouvelles cotes qu’il a apposées au verso des documents, ont été repris dans un inventaire papier, dont sept volumes sont aujourd’hui conservés aux Archives départementales de Côte-d’Or (Fig. 4) [47]. Cette refonte du classement correspondait alors aux critères et aux principes de l’archivistique et de la diplomatique naissantes au XVIIIe siècle, qui consistaient à dégager les principes de l’élaboration des fonds et à en donner des instruments de recherche. Cependant, le classement topographique, cher aux moines de Cîteaux au Moyen Âge, a parfois laissé sa place à un classement thématique. Jean-Baptiste Lemort a par exemple créé des liasses de justice : ainsi au sein de la « layette Z » trouvons-nous le « 2e cartable » intitulé « Droits de justice et de pêche » pour différents lieux (Villars, Esbarres, Tontenant, Orsans « et autres ») [48].

Observer les archives cisterciennes sur une période chronologiquement vaste a permis de faire la lumière sur les usages et les transformations que la documentation a pu subir, sa mise en registre ainsi que les critères de sa transmission. Les principes de l’archivage à l’abbaye de Cîteaux ont été posés dès le XIIIe siècle : classement des actes originaux par localité ; mise en registre des actes reflétant ce classement, système de renvois entre les cartulaires et les chartes, sous forme de notes dorsales, permettant de faciliter les recherches. Jean de Cirey s’est inspiré de ces pratiques archivistiques et a su les adapter aux évolutions socio-culturelles : conception de l’espace et de l’économie cistercienne, rubriques et analyses systématiques pour faciliter les recherches et éviter la manipulation des originaux déjà fragilisés, mais qui gardent leur statut de preuve. En observant les inventaires de l’époque moderne, nous nous apercevons que les pratiques archivistiques des siècles précédents n’ont plus été poursuivies. Une étude comparative systématique de l’ensemble des archives de Cîteaux encore conservées ainsi que des manuscrits qui composaient la bibliothèque permettra sans doute d’affirmer certaines hypothèses et de définir plus précisément les pratiques archivistiques et bibliothéconomiques monastiques, de prendre en compte tous les aspects liés à la matérialité et à l’archéologie du document : processus de cartularisation et d’inventorisation ; classement, restauration et conservation des manuscrits ; rapports entre textuel et visuel ; caractérisation de pratiques et de modèles culturels.

ANNEXE : le cartulaire 190, notice codicologique.

Le cartulaire 190 est un manuscrit de 316 feuillets en parchemin, dont le corps d’ouvrage mesure 320/325 x 240/250 mm (Fig. 5). Il est divisé en douze chapitres topographiques regroupant des localités situées au sud-est de l’abbaye de Cîteaux : Izeure ; Bessey [49] ; Broin [50] ; Bonnencontre [51] ; Auvillars [52] et Glanon [53] ; Echigey [54] et Potangey [55] ; Aubigny [56] ; Aiserey [57] et Maigny [58] ; Longecourt [59] ; Brazey-en-Plaine [60] ; Montot [61], Veroilles [62], Villars, Morey, Meuilley et Losne [63] ; Saint-Jean-de-Losne, Saint-Usage [64] et Bruyère [65].

I. Support et encre

De prime abord, on peut penser que le parchemin a été assez bien travaillé et il n’est parfois plus possible de distinguer de traces de pilosité. Seuls restent un aspect légèrement pelucheux, qui correspondrait au côté poil, et un aspect plus ou moins glacé, qui correspondrait au côté chair. Cependant, le parchemin est nuancé, de blanchâtre à jaunâtre. Il est plus ou moins transparent, selon le degré de préparation de la page et sa qualité : on devine l’écriture au verso des feuillets, mais le parchemin reste assez robuste et souple.

Sur plusieurs feuillets, des déchirures ou des trous sont apparus, sans doute au cours de la préparation de la peau, lorsque le parchemin devenait trop fin pour résister aux tensions exercées lors de sa fabrication. C’est donc la qualité de la matière première qui est directement mise en cause. En effet, les feuillets de ce cartulaire ne présentent pas tous la même qualité. Les trous et déchirures n’ont que très peu été réparés. En règle générale, les anomalies dues à la fragilité de la peau ne sont réparées que si cela s’avère nécessaire, c’est-à-dire que si une des ces anomalies se trouve dans la surface écrite de la page, entravant ainsi l’écriture ou la lecture de l’acte. Le cartulaire 190, sur 316 feuillets, présente une vingtaine de petits « accidents » de ce genre, et seuls deux ont été réparés, aux feuillets 217 et 233. Cette réparation d’origine consiste en une couture en surjet exécutée au moyen de fils (de chanvre probablement).

Au moins deux encres ont été utilisées, l’une de couleur brune, et l’autre plutôt noire. Leur aspect dépend de la qualité de préparation du parchemin, ou encore du côté sur lequel elles sont apposées : le côté poil absorbe plus les encres et leur donne un aspect mat. Lorsque le parchemin a été plus soigneusement préparé et qu’il présente une apparence glacée, les encres sont plus brillantes.

II. Organisation du volume

Les feuillets de ce manuscrit ont été foliotés conjointement à la réalisation du cartulaire, avec des chiffres romains, dans un système vicésimal. La foliotation a été marquée au recto des feuillets, dans l’angle supérieur externe. On note cependant une anomalie : entre le feuillet 103 et le feuillet 104, le scribe a oublié de folioter un feuillet. La foliotation va donc de 1 à 315 [66].

Les marques de cahier forment un autre système de repérage interne. Elles apparaissent irrégulièrement, et sont de deux types : des signatures de bifeuillets et des réclames. La plupart de ces marques ne sont plus visibles aujourd’hui, car elles ont été coupées ou cachées, sans doute au moment de la reliure. Nous trouvons des réclames de fin de cahier aux feuillets 103 bis v., 199 v., 223 v., 247 v., 259 v., 283 v., 295 v. Elles sont situées dans l’angle inférieur interne du feuillet, tout contre la reliure.

Quant aux signatures de bifeuillets, elles ne sont visibles que sur les feuillets 203 r., 204 r., 205 r., 212 r., 213 r., 216 r., et 217 r. Cette signature est composée d’un seul élément : un chiffre arabe, placé dans la marge de queue.

Le cartulaire 190 est composé de vingt-neuf cahiers. L’observation des types de cahier a été rendue possible grâce à la détérioration de la reliure qui laisse apparaître les coutures. Des unités codicologiques ont pu être mises en lumière : chaque chapitre topographique débute forcément sur un nouveau cahier. Ce volume, déjà homogène par son contenu, est plutôt homogène aussi dans sa confection, et ne comprend que des sénions et des binions. Les cahiers devaient tous posséder à l’origine, des marques de cahier facilitant leur assemblage.

III. La préparation de la page avant l’écriture et l’écriture

Les feuillets, de 240/250 x 320/325 mm, ont reçu un système de réglure de 41 rectrices dans un cadre. Les mesures suivantes ont été relevées pour les marges : plus ou moins 35 mm pour la marge de tête, plus ou moins 70 mm pour la marge de queue, plus ou moins 35 mm pour la marge de fond de cahier, et 45 à 60 mm pour la marge de gouttière. 5 à 7 mm d’intervalle séparent les rectrices. Afin de réaliser le tracé des rectrices et du cadre, des piqûres, constituées d’une seule série de petits trous allongés ou triangulaires, parfois disparues dans la reliure, ont été faites. L’écriture est soignée, d’un module mesurant environ 3 mm de hauteur. Il est assez difficile de distinguer s’il y a eu plusieurs mains car tous les feuillets ont été écrits sur un modèle commun d’écriture (seuls les ajouts sont facilement identifiables, comme aux feuillets 253 v. à 254 v.). Les abréviations sont aussi inscrites d’après des modèles communs, et facilement développables. La plupart des actes n’ont pas reçu de lettrine, seulement une lettre d’attente. Les autres volumes du cartulaire général « de Jean de Cirey », qui sont constitués sur le même modèle, ont reçu leurs lettrines. Les actes sont presque tous précédés d’une rubrique qui rappelle les analyses portées au dos des actes originaux et datant de l’abbatiat de Jean de Cirey. Les feuillets ne présentent que peu de mentions marginales, signes d’une utilisation et d’une manipulation ultérieure du manuscrit : seulement trois notes marginales ont été relevées dans ce cartulaire, aux feuillets 77 r., 93 r. et 94 r.

IV. La reliure

Les vingt-neuf cahiers du cartulaire 190 ont été assemblés et cousus à l’aide d’un fil de couture (chaînette) qui traverse les cahiers. Le dos des cahiers est alors lié à quatre nerfs doubles de corde, fixés aux ais et passant sur le mors. Cette technique de couture laisse apparaître les nerfs au dos du manuscrit. Le mauvais état de la couvrure, nous a permis de tirer quelques observations instructives. Les trous de passage du fil de couture étant toujours utilisés, nous pouvons en conclure que cette reliure est la reliure d’origine du manuscrit. De plus, étant donné que l’aspect du dos découle directement de la couture, nous pouvons en conclure que le dos a été collé : la couvrure a été collée sur toute la surface du dos, sur et entre les nerfs. Avant de poser la couvrure, des gardes sont placées au début et à la fin de l’ensemble des cahiers afin de protéger le texte et les feuillets extrêmes des frottements contre la reliure. Dans le cartulaire 190, les gardes sont des feuillets de parchemin vierge de toute écriture. En tête de volume, les gardes sont formées de quatre gardes volantes, et d’un talon de feuillet collé à l’ais, formant ainsi une contre-garde. En fin d’ouvrage, on dénombre deux talons de feuillet qui précèdent une garde volante et la contre-garde. Le collage des deux contre-gardes a été effectué après la pose de la couvrure. L’emploi de tranchefiles semble être la seule technique utilisée pour consolider les extrémités du dos. Ces coutures de renforcement unissent seulement les cahiers entre eux. Elles ont été exécutées sur un nerf supplémentaire, simple, le septain. Le corps d’ouvrage ainsi constitué est fixé sur des ais plats de bois de 6 mm d’épaisseur (pour un corps d’ouvrage de 70 mm d’épaisseur). Les chants, ou tranches des ais, sont droits et souvent usés. On dénote la présence de chasses en tête, en gouttière et en queue. Les attaches aux ais passent sur le mors, c’est-à-dire la liaison entre les plats et le dos, et pénètre dans le premier canal foré sur le plat. La couvrure, ultime moyen de renforcer l’assemblage du corps d’ouvrage avec les ais, est en cuir brun détérioré. C’est une peau tannée, et si l’on examine les remplis, nous nous apercevons que la couvrure n’a que très peu perdu sa couleur d’origine. Les remplis ont été coupés en diagonale et collés à l’ais, puis recouverts d’une contre-garde, comme il a été signalé ci-dessus. L’ornementation de la reliure reste sobre. La technique utilisée est l’estampage à froid : les fers et les filets, préalablement chauffés, étaient poussés sur le cuir de la couvrure, à la surface de laquelle ils laissaient une empreinte en creux, souvent brunie. Les filets forment des encadrements et des losanges sur les deux plats du manuscrit, ornés de fers à rosace. La couvrure du premier plat étant détériorée, seules sept rosaces sont encore visibles. Quant à la couvrure du second plat, assez bien conservée, elle nous permet d’observer neuf rosaces. Bien que rien ne nous indique si l’ornementation des deux plats était identique, nous pouvons conjecturer que le premier plat possédait plus de rosaces qu’il n’en reste aujourd’hui. D’autres éléments, destinés à faciliter l’usage du cartulaire et à en assurer le rangement tout en le protégeant et en autorisant son authentification rapide font partie intégrante du manuscrit. Certains de ces éléments permettent une identification rapide du manuscrit : sur le second plat, un titre, composé de toponymes, a été inscrit. Il reprend les titres des chapitres topographiques de ce volume. Il nous révèle une précieuse information sur l’introduction du livre en bibliothèque : le cartulaire était conservé sur le premier plat. En outre, une étiquette clouée sur le second plat, portant comme cote E3, et sans doute placée à la fin de l’Ancien Régime, nous rappelle que le cartulaire devait toujours être conservé à plat. Les autres étiquettes placées sur le premier plat (cote 11 H 75) et sur le dos sont toutes des indications portées par les archivistes du XIXe et du XXe siècle, et indiquent que le volume était alors conservé debout. Les restes du fermoir permettent de confirmer l’hypothèse selon laquelle le manuscrit était conservé à plat. En effet, le tenon du fermoir se trouve sur le second plat, ce qui permet de faciliter l’ouverture du volume. Quant au fermoir, qui part du premier plat, il n’en reste que la patte, de cuir blanc. Le but avoué de la réalisation de ces registres est d’éviter la manipulation des originaux. Jean de Cirey est resté fidèle à ce projet puisqu’il a fait poser des éléments annexes facilitant la manipulation du manuscrit. Ainsi des onglets, petits rectangles de parchemin, ont-ils été placés dans la gouttière, indiquant le premier feuillet de chaque chapitre. La table des chapitres, écrite sur la garde volante du premier ais, est aussi un indice de la manipulation de l’ouvrage. Il est intéressant de noter que les huit autres volumes composant les « cartulaires de Jean de Cirey » ont été façonnés sur le même modèle, aussi bien pour la préparation des matériaux avant l’écriture, pour leur homogénéité que pour leur reliure.

Fig1

Fig. 1 : page 5, paragraphe 1. Legende : Fig. 1. Cote V (cinq) rouge. Verso de l’acte de 1204, ADCO, 11 H 549.

Fig2

Fig. 2 : page 5, paragraphe 2. Légende : Fig. 2. Cote du XIIIe siècle, remployée à la fin du XIVe siècle. Verso de l’acte d’août 1254, ADCO, 11 H 549.

Fig3

Fig. 3 : page 7, paragraphe 2. Légende : Fig. 3. Cote et analyse de Jean de Cirey, fin du XVe siècle. Verso de l’acte de avril 1246, ADCO, 11 H 549.

Fig4

Fig. 4 : page 8, paragraphe 3. Légende : Fig. 4. Inventaire des actes de l’abbaye par Jean-Baptiste Lemort, XVIIIe siècle. ADCO, 11 H 52, inventaire 207.

Fig5

Fig. 5 : page 10, paragraphe 1. Légende : Fig. 5. Cartulaire 190. ADCO, 11 H 75.

Crédit photographique : Coraline Rey.

Notes

[1] ADCO, 11 H 70, cartulaire 185, f. 1.

[2] Cet article est une version remaniée d’une première publication parue sous le titre « Processus de cartularisation et pratiques archivistiques à Cîteaux. Des originaux au « monument » de Jean de Cirey. Le dossier documentaire de Villars (xiie –début xvie siècle) », Productions, remplois, mises en registre : la pratique sociale de l’écrit à travers la documentation médiévale bourguignonne, actes du colloque d’Auxerre, septembre 2009 [à paraître]. Cet article est issu de recherches effectuées dans le cadre d’un Master 2 et actuellement poursuivies dans un doctorat sur la culture de l’écrit et du visuel à l’abbaye de Cîteaux au Moyen Âge. Coraline Rey, L’entreprise archivistique de Jean de Cirey, abbé de Cîteaux (1476-1501). Le dossier documentaire de la seigneurie de Villars en Côte-d’Or, Mémoire de Master 2 sous la direction d’Eliana Magnani et Marie-José Gasse-Grandjean, Université de Bourgogne, 2009. Coraline Rey, « L’entreprise archivistique de Jean de Cirey, abbé de Cîteaux (1476-1501). Le dossier documentaire de la seigneurie de Villars en Côte-d’Or », B.U.C.É.M.A., 14 | 2010, p. 347-351 [En ligne : http://cem.revues.org/index11638.html, consulté le 06/06/2012]. Ce travail, en plus de caractériser la gestion archivistique de l’abbaye de Cîteaux, a permis d’éditer 62 actes, dont 61 inédits, datant de 1182 à 1495. Cette édition représente un échantillon significatif des actes que les Cisterciens transcrivaient dans leurs cartulaires. Ces chartes, dont la transcription a été faite d’après les originaux encore conservés, ou à défaut d’après le cartulaire 190 jugé plus fidèle, ont été mises en ligne dans le cadre du projet CBMA, Chartae Burgundiae Medii Aevi [http://www.artehis-cnrs.fr/-BDD-CBMA-, consulté le 06/06/2012]. Ainsi les historiens pourront-ils se rendre compte de la nature et de la masse des documents cisterciens non exploités : les éditions d’actes de l’abbaye de Cîteaux existantes se focalisent sur les premiers siècles de l’histoire de l’abbaye : Jean Marilier, Chartes et documents concernant l’abbaye de Cîteaux (1098-1182), Bibliotheca cisterciensis, Rome, 1961. Ces dernières années, les recherches diplomatiques et archivistiques sur des abbayes cisterciennes ont connu un nouvel essor. Néanmoins, la fin du Moyen Âge reste peu étudié : Martine Garrigues, Le premier cartulaire de l’abbaye cistercienne de Pontigny, xiie-xiiiee siècles, Paris, 1981 ; Marlène Hélias-Baron, Recherches sur la diplomatique cistercienne au xiie siècle : La Ferté, Pontigny, Clairvaux, Morimond, thèse sous la direction de Michel Parisse, Université Panthéon-Sorbonne, Paris, 2005 ; Dominique Stutzmann, Écrire à Fontenay : esprit cistercien et pratiques de l’écrit en Bourgogne, xiie-xiiie siècles, thèse sous la direction de Michel Parisse, Université Panthéon-Sorbonne, Paris, 2009.

[3] C’est avec la naissance de la diplomatique qu’apparaissent les premiers textes normatifs ou théoriques sur la fonction de l’archiviste ou sur la nature des documents, même s’il existait déjà au Moyen Âge des principes et des techniques d’archivage qui sont « le fruit et le reflet de l’activité des hommes » (Jean Favier (dir.), La pratique archivistique française, Archives nationales, Paris, 1993, p. 12). Quant au mot « archivistique », il n’est entré au Dictionnaire de l’Académie française qu’en 1989.

[4] Villars, hameau du village d’Esbarres, canton de Saint-Jean-de-Losne, Côte-d’Or. Les moines blancs ont possédé des terres à Villars depuis la donation qu’Agnès, dame de Lucenay, leur a fait de ses possessions de Villars, en 1182 (Archives départementales de Côte-d’Or [ADCO], 11 H 549). Ce texte a été édité par Jean Marilier, Chartes et documents…, p. 196, et par Coraline Rey, L’entreprise archivistique de Jean de Cirey…, p. 140.

[5] Jean Richard, Françoise Vignier, Patrick Arabeyre, Inventaire des archives ecclésiastiques, série H, Dijon, 1950-1999.

[6] Le fonds de l’abbaye de Cîteaux aux ADCO est fort de 1181 liasses et registres, datant du xiie au xviiie siècle. À ce jour (06/06/2012), 89 cotes ont pu être consultées.

[7] Archives départementales de Saône-et-Loire [ADSL], H 81/12.

[8] ADCO, 11 H 75, cartulaire 190. Henri Stein, Bibliographie générale des cartulaires français ou relatifs à l’histoire de France, Manuel de bibliographie historique, IV, Librairies des Archives Nationales et de la Société de l’École des Chartes, Paris, 1907, n° 962. La notice codicologique de ce cartulaire se trouve en annexe.

[9] ADCO, 11 H 349, 11 H 549, 11 H 550, 11 H 551 et 11 H 693. Les actes de Villars ont été dispersés dans diverses liasses, ne portant pas automatiquement la mention de Villars dans leur analyse. Ainsi la liasse 11 H 693 regroupe les actes relatifs au village d’Izeure (canton de Genlis, arrondissement de Dijon, Côte-d’Or).

[10] ADCO, 11 H 52, inventaire 207.

[11] À titre d’exemple, des actes originaux de l’abbaye de Cîteaux ont été retrouvés dans le fonds de l’abbaye cistercienne du Miroir (canton Louhans, Saône-et-Loire) aux ADSL ; ils sont conservés sous les cotes H 81/11, H 81/48, H 81/49, H 82/15, H 84/7, H 85/15, H 85/16, H 85/17, H 85/18, H 87/1. Le temporel de cette dernière ayant été rattaché à la maison-mère en 1610, on peut penser qu’il y a eu une fusion des chartriers.

[12] ADCO, 11 H 64, cartulaire 166 dit cartulare antiquum. ADCO, 11 H 63, cartulaire 169 ou cartularium vetus (Henri Stein, Cartulaires français…, n° 961). ADCO, 11 H 66, cartulaire 168 (Henri Stein, Cartulaires français…, n° 958).

[13] ADCO, 11 H 69, cartulaire 172.

[14] Au xixe siècle, les Archives départementales devaient faire l’inventaire des cartulaires, des inventaires et des terriers qu’elles possédaient. L’archiviste de la Côte-d’Or, Joseph Garnier, a commencé cet inventorisation et a ainsi créé un fonds factice des cartulaires et un fonds factice des inventaires (l’inventaire des terriers n’a jamais été réalisé) : un tableau statistique des archives antérieures à 1790 a été dressé en 1844 (ADCO, 22 T6 b 1). Les ADCO conservent aujourd’hui de ce fonds factice la cotation des cartulaires et des inventaires, bien qu’ils aient été réintégrés à leurs fonds d’origine.

[15] En ce qui concerne la datation de ces cartulaires, voir les notices écrites par Jean Marilier, Chartes et documents…., p. 7-10 ; et Jean Richard, Inventaire des archives ecclésiastiques…, p. 4.

[16] ADCO, 11 H 47, inventaire 110, 1630 ; 11 H 52, inventaire 207, circa 1742 (pour les inventaires mentionnant des actes concernant Villars).

[17] ADCO, 11 H 542, 11 H 543, 11 H 544 et 11 H 547 (pour les terriers concernant la seigneurie de Villars).

[18] ADCO, 11 H 142 et 11 H 145 (pour les registres d’amodiation de la seigneurie de Villars).

[19] Patrick Arabeyre, Maurice Bathelier, Atlas de Cîteaux, le domaine de l’abbaye au xviiie siècle, Éditions de l’Armançon, Dijon, 1998.

[20] Dom Cotheret, bibliothécaire de l’abbaye au xviiie siècle, lui a consacré trente-trois pages dans son ouvrage Mémoire pour servir à l’histoire de Cîteaux (Bibliothèque municipale de Dijon, ms 2475 [MIC 612]), autant que pour le premier siècle du Novum monasterium (1098 à 1198). La Gallia christiana a désigné Jean de Cirey comme bonus abbas (t. IV, col. 1005-1007, Paris, 1876, 2e édition).

[21] Joseph Marie Canivez, « Cîteaux (abbaye) », in Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques, Paris, t. XII, 1953, col. 852-874 ; William J. Telesca, « The problem of the commendatory monasteries and the order of Cîteaux during the abbacy of Jean de Cirey, 1475-1501 », in Cîteaux, Commentarii cistercienses, t. XXII, 1971, p. 154-177 ; Gallia Christiana… ; Christelle Vanlauwe-El Harfi, Jean de Cirey, abbé de Cîteaux, 1476-1501, DEA sous la direction de Vincent Tabbagh, Dijon, 1994.

[22] Pendant longtemps la fin du Moyen Âge a été vue comme une période de décadence pour le monachisme. Jean-Marie Le Gall met un terme à cette idée persistante dans sa synthèse sur les moines, de la fin du xve siècle au début du xvie siècle : Les moines au temps des réformes, France (1480-1560), Paris, 2001.

[23] ADCO, 11 H 70, cartulaire 185. Henri Stein, Cartulaires français…., n° 962.

[24] Ce texte a été édité par Jean Marilier, Chartes et documents…, p. 20-22 ; et par Coraline Rey, L’entreprise archivistique de Jean de Cirey…, p. 233-234.

[25] ADCO, 11 H 70 à 78, cartulaires 185 à 193, appelés « cartulaires de Jean de Cirey ». Henri Stein, Cartulaires français…, n° 962. Les volumes de ce cartulaire général, tout comme les cartulaires du xiiie siècle, sont en cours de numérisation et disponibles sur la plate-forme documentaire du projet CBMA [http://www.artehis-cnrs.fr/cartulai…, consulté le 06/06/2012].

[26] On compte parfois jusqu’à dix notes dorsales, dont les plus récentes ont été apposées pendant la période révolutionnaire, en 1793, époque à laquelle un inventaire du chartrier a été réalisé. De cet inventaire, seuls quelques feuillets sont encore conservés, dans les inventaires 207 (11 H 52), 210 (11 H 55) et 193 (11 H 57) des ADCO. Un relevé systématique de toutes ces notes permettra de les identifier dans leur intégralité et sans doute de reconstituer une chronologie des entreprises scripturaires, pas seulement pour le Moyen Âge, mais aussi pour la période moderne.

[27] Considérant la définition d’une cote en tant que « moyen de repérer », selon la définition du Dictionnaire de l’Académie française : « Chacune des indications alphabétiques et numériques qui permettent de classer les pièces d’un dossier, d’un inventaire, les livres d’une bibliothèque, etc. », 9e édition (en cours de rédaction).

[28] Les actes concernant la localité d’Izeure portent un VI rouge, ceux de la localité d’Aubaine portent un XII rouge.

[29] Tontenant, hameau de Pagny-le-Château, canton de Seurre, Côte-d’Or.

[30] ADCO, 11 H 70, cartulaire 185, feuillet 1 recto, l. 35-36.

[31] ADCO, 11 H 70, cartulaire 185, feuillet 1 recto, l. 13.

[32] ADCO, 11 H 70, cartulaire 185, feuillet 1 recto, l. 37-38.

[33] ADCO, 11 H 70, cartulaire 185, feuillet 1 verso, l. 11-12.

[34] ADCO, 11 H 70, cartulaire 185, feuillet 1 verso, l. 13-14.

[35] Les cartulaires particuliers réalisés à la fin du xve siècle sont tous de plus petits formats, en général 225 x 155 mm, et sur papier pour la plupart.

[36] Morey, canton de Gevrey-Chambertin, Côte-d’Or.

[37] Meuilley, canton de Nuits-Saint-Georges, Côte-d’Or.

[38] ADSL, cartulaire H 81/12. Les cartulaires particuliers de la fin du xve siècle ne sont pas évoqués dans la lettre de Jean de Cirey. Une vérification est en cours dans les comptes de l’abbaye pour voir si l’on retrouve une trace de ces cartulaires ou du matériel employé dans la fabrication de ces cartulaires. Par exemple, dans les comptes du boursier de Cîteaux (ADCO, 11 H 1166), on trouve une rubrique intitulée « pro factura cartularii et terrariorum ».

[39] En annexe se trouve la notice codicologique du cartulaire 190, représentatif des techniques employées à l’abbaye de Cîteaux à la fin du Moyen Âge pour la réalisation de cartulaires.

[40] Jean de Cirey, « Inventarium librorum monasterii Cistercii, Cabilonensis diocesis, factum per nos fratrem Johannem, abbatem ejusdem loci, anno Domini millesimo CCCC octuagesimo, postquam per duos annos continuos, labore duorum et sepius trium ligatorum, eosdem libros aptari, ligari et cooperiri cum magnis sumptibus et impensis fecimus », Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France (éd.), V, Dijon, Paris, 1889, p. 339-452, [BM Dijon, MIC 529], BM Dijon, Manuscrit 610 [MIC 213]. Ce catalogue et la bibliothèque ont été étudié par Marie-Françoise Damongeot, « La bibliothèque de l’abbaye au Moyen Âge », in Pour une histoire monumentale de l’abbaye de Cîteaux, 1098-1998, Commentarii cistercienses, Association bourguignonne des sociétés savantes, 1998, p. 240.

[41] Michele Tomasi, « Des trésors au Moyen Âge : enjeux et pratiques entre réalités et imaginaire », Perspective : actualités de la recherche en histoire de l’art. La Revue de l’INHA, 2009-1 (Antiquité et Moyen Âge), p. 137-141. Yann Potin, « L’État et son trésor », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 133, juin 2000, p. 48-52.

[42] Patrick J. Geary, Phantoms of Remembrance : Memory and Oblivion at the End of the first Millenium, Princeton University Press, 1994 ; Otto Gerhard Oexle, Memoria als Kultur, Göttingen, 1995 ; Sébastien Barret, La mémoire et l’écrit : l’abbaye de Cluny et ses archives (xe-xviiie siècles), Münster, 2004.

[43] Brian Stock, The Implications of Literacy : Written Language and Models of Interpretation in the Eleventh and Twelfth Centuries, Princeton University Press, 1983.

[44] ADCO, 11 H 70, cartulaire 185, feuillet 1 verso, l. 24-27.

[45] Si l’on excepte le classement topographique, la logique de cet ordonnancement reste encore à trouver.

[46] Cet archiviste, qui se qualifie lui-même d’« archiviste de Dijon » s’est aussi occupé de la réorganisation du fonds de la commune de Dijon, de la commune de Louhans, ou encore de celui de l’abbaye Notre-Dame du Miroir. Si les dates des classements de ces fonds sont à peu près connues (à quelques années près), je n’ai pas encore trouvé de documents indiquant la date à laquelle Jean-Baptiste Lemort a réorganisé le chartrier de Cîteaux.

[47] ADCO, 11 H 49, inventaire 148 ; 11 H 50, inventaire 149 ; 11 H 51, inventaire 150 ; 11 H 52, inventaire 207 ; 11 H 53, inventaire 208 ; 11 H 54, inventaire 209 ; 11 H 55, inventaire 210.

[48] ADCO, 11 H 52, inventaire 207, p. 255.

[49] Bessey-lez-Cîteaux, canton de Genlis, arrondissement de Dijon, Côte-d’Or.

[50] Broin, canton de Seurre, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[51] Bonnencontre, canton de Seurre, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[52] Auvillars-sur-Saône, canton de Seurre, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[53] Glanon, canton de Seurre, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[54] Echigey, canton de Genlis, arrondissement de Dijon, Côte-d’Or.

[55] Potangey, hameau, commune d’Aiserey, canton de Genlis, arrondissement de Dijon, Côte-d’Or.

[56] Aubigny-en-Plaine, canton de Saint-Jean-de-Losne, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[57] Aiserey, canton de Genlis, arrondissement de Dijon, Côte-d’Or.

[58] Magny-lez-Aubigny, canton de Saint-Jean-de-Losne, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[59] Longecourt-en-Plaine, canton de Genlis, arrondissement de Dijon, Côte-d’Or.

[60] Brazey-en-Plaine, canton de Saint-Jean-de-Losne, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[61] Montot, canton de Saint-Jean-de-Losne, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[62] Ce lieu n’est pas identifié.

[63] Losne, canton de Saint-Jean-de-Losne, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[64] Saint-Usage, canton de Saint-Jean-de-Losne, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[65] La Bruyère, canton de Seurre, arrondissement de Beaune, Côte-d’Or.

[66] Ce feuillet non folioté a été appelé feuillet 103 bis : Coraline REY, L’entreprise archivistique de Jean de Cirey…