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Henry David Thoreau : un anthropologue entre ethnocentrisme et transcendantalisme

Isabelle Gourgues

Résumé

Henry David Thoreau, auteur transcendantaliste du XIXe siècle, est principalement connu pour avoir écrit Walden et l’essai Civil Disobedience, ces deux œuvres le présentant comme un précurseur de l’écologie et comme un auteur politiquement engagé. Si ces deux facettes de Thoreau méritent toute la lumière qu’elles ont reçues jusqu’à présent, certains aspects du travail de l’auteur n’ont que rarement été abordés. A travers l’étude de l’intégralité de l’œuvre de Thoreau et notamment des Indian Notebooks, manuscrits non publiés en France, cet article se propose d’examiner le travail d’anthropologue et d’ethnologue réalisé par l’auteur qui était fasciné par les cultures amérindiennes. Le regard posé par Thoreau sur les cultures des Indiens d’Amérique était-il innovant pour cette époque ou teinté d’ethnocentrisme comme cela était souvent le cas au XIXe siècle ?

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Doctorante en langues et littératures anglaises et anglo-saxonnes à l’Université de Versailles Saint-Quentin, Isabelle Gourgues travaille actuellement sur une thèse intitulée «une approche pluridisciplinaire des Indian Notebooks de Henry David Thoreau ».

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Les derniers mots prononcés par Thoreau ont été « moose » et « indian ». De nombreux auteurs, qu’ils aient été des contemporains de Thoreau ou des auteurs plus modernes, ont constaté que le mode de vie et de pensée de Thoreau se rapprochait de celui des Indiens d’Amérique. Ainsi, Nathaniel Hawthorne décrivit l’auteur de la manière suivante : «  wild, irregular, Indian-like sort of fellow. »[1] Une grande partie de la vie de Thoreau a été centrée sur les Indiens et leurs cultures.

La plupart des œuvres de Thoreau comporte toujours au moins un paragraphe consacré aux Indiens d’Amérique. Il arrive même que tout un chapitre leur soit consacré comme c’est le cas dans Les forêts du Maine (The Maine Woods). Au-delà de ces œuvres, le journal de Thoreau renferme de nombreuses entrées sur les Indiens et c’est aussi dans le Journal que l’on trouve les premières mentions des Indian Books aussi connu sous le nom d’Indian Notebooks[2].

Présentation et finalité des Indian Notebooks

Il convient de présenter brièvement les Indian Notebooks de Thoreau car ils sont très peu connus et étudiés en France. Les Indian Notebooks sont des notes de recherches sur les Indiens d’Amérique constituées de 2 800 pages d’annotations manuscrites réparties en 11 volumes qui se trouvent actuellement à la Pierpont Morgan Library à New York. Pour le moment, seuls les deux premiers volumes ont été publiés par Paul Maher Jr.[3]. Thoreau a commencé ses recherches sur les Indiens d’Amérique vers 1847 et les a poursuivis jusqu’à sa mort en 1862. Il a consulté plus de 200 ouvrages axés sur les Amérindiens tels que les écrits de la période coloniale (Les Relations des Jésuites, les écrits de Samuel de Champlain ou encore la General Historie of Virginia écrite par John Smith), ou encore des écrits du XIXe siècle tels que Historical and Statistical Information respecting the History, Condition, and Prospects of the Indian Tribes of the United States (1851-1857) de Schoolcraft mais aussi des textes de Thomas Jefferson ou de Charles Darwin.

Selon Richard Fleck, qui a publié des extraits des Indian Notebooks, ces 11 volumes constituent la source la plus importante de connaissances sur les Amérindiens au XIXe siècle.[4]

Les Indian Notebooks sont composés d’extraits d’ouvrages concernant les Indiens. Parfois ces extraits sont des citations exactes de la source originale dont ils proviennent mais la majeure partie des extraits du premier volume des Indian Notebooks sont en fait des paraphrases de la source originale. Thoreau contracte parfois plusieurs paragraphes de la source originale en un seul.[5] Il arrive aussi que l’auteur ne relève qu’une suite de mots qui peuvent être considérés comme des mots-clés.[6] Enfin, les Indian Notebooks contiennent également un essai inachevé sur les cultures amérindiennes écrit vers 1852-53.

Une histoire revisitée des Indiens d’Amérique ?

Il est très difficile de déterminer le but final de ces carnets de notes. Il est possible, mais pas certain, que Thoreau ait fait des recherches sur les Indiens d’Amérique afin d’écrire un livre qui revisiterait leur histoire. Albert Keiser pense que Thoreau souhaitait écrire un ouvrage élaboré sur les Indiens d’Amérique : « Thoreau had intended to write an elaborate work on the American Indians, and for more than ten years he busied himself collecting the material from all the available sources. »[7]

Robert Sayre est plus réservé sur la possibilité que ces recherches aient été menées dans la perspective d’écrire un livre sur les Indiens. Il avance que si l’auteur transcendantaliste a considéré la possibilité d’écrire un livre sur les Indiens ce n’est pas avant la fin de l’année 1852.[8]

Pour Richard Fleck, comme pour Thierry Gillyboeuf[9], plutôt que d’écrire l’histoire des Amérindiens, Thoreau entendait peut-être réécrire l’histoire des Américains à travers le prisme de la culture indienne. Cette idée est suggérée dans Henry Thoreau and John Muir among the Indians:

« I believe that an important part of Thoreau’s purpose in writing his 2,800 handwritten pages of the Indian books was to write a book or series of essays on North American Indians which would correct the myopic view of nineteenth-century Euro-American historians by giving them for the first time a North American’s appreciation of his own continent which was and is rich in mythology. »[10]

Selon Fleck, si Thoreau avait écrit un ouvrage sur les Indiens, cela aurait pu permettre de modifier la vision que les historiens euro-américains du XIXe siècle avaient des Indiens et ainsi d’offrir un point de vue différent sur l’histoire de l’Amérique.

S’il est très difficile de trouver des indices qui valideraient définitivement l’hypothèse d’un livre sur l’histoire des Indiens, nous pouvons cependant étudier quelques éléments contenus dans les écrits de Thoreau. Si l’auteur a bel et bien voulu écrire une histoire des Indiens d’Amérique, ce pourrait être pour qu’il subsiste une trace de leur présence sur le continent américain. En effet, Thoreau déplore dans un passage de son Journal que les Indiens n’aient pas reçu plus d’attention de la part des historiens du XIXe siècle qui pensaient que les Indiens ne méritaient pas que l’on se souvienne d’eux :

Some have spoken slightingly of the Indians, as a race possessing so little skill and wit, so low in the scale of humanity, and so brutish that they hardly deserved to be remembered,- using only the terms « miserable, » « wretched, » « pitiful, » and the like. In writing their histories of this country they have so hastily disposed of this refuse of humanity (as they might have called it) which littered and defiled the shore and the interior. But even the indigenous animals are inexhaustibly interesting to us. How much more, then, the indigenous man of America! If wild men, so much more like ourselves than they are unlike, have inhabited these shores before us, we wish to know particularly what manner of men they were, how they lived here, their relation to nature, their arts and their customs, their fancies and superstitions . They paddled over these waters, they wandered in these woods, and they had their fancies and beliefs connected with the sea and the forest, which concern us quite as much as the fables of Oriental nations do. It frequently happens that the historian, though he professes more humanity than the trapper, mountain man, or gold-digger, who shoots one as a wild beast, really exhibits and practices a similar inhumanity to him, wielding a pen instead of a rifle.[11]

Dans cet extrait, Thoreau montre qu’il est impératif de se souvenir des Indiens car leur histoire est intrinsèquement liée à celle du continent américain et par conséquent aux Euro-Américains. Pour Thoreau, les Indiens représentaient le passé du continent américain auquel les Euro-Américains ne pouvaient pas avoir accès. Ceci peut nous faire penser que l’auteur transcendantaliste était effectivement intéressé par l’écriture d’une histoire des Indiens afin de reconstituer l’histoire de l’Amérique.

Thoreau aurait vraisemblablement aimé savoir ce qu’il s’était passé avant l’arrivée des colons car il y fait régulièrement référence dans ses écrits. Cette idée se retrouve par exemple dans l’essai inachevé présent dans les Indian Notebooks : « What kind of facts—what kind of events are those which transpired in America before it was known to the inhabitants of the old world? »[12]

Finalement, nous ne pouvons que formuler des hypothèses quant au but final du travail de Thoreau sur les Indiens car il n’existe pas assez de preuves concrètes pour affirmer qu’une théorie est plus plausible qu’une autre.

Un ouvrage anthropologique sur les Indiens d’Amérique ?

Une des hypothèses sur la finalité des Indian Notebooks, à laquelle cet article n’a pas encore prêté attention, est celle qui remet en question la possibilité d’un livre sur l’histoire des Indiens au profit d’un ouvrage d’ordre plus anthropologique qu’historique.

A la fin du premier volume des Indian Notebooks publié pas Maher Jr. on trouve une liste de sujets que Thoreau a recopié de l’œuvre de Schoolcraft et à côté de laquelle il a inscrit ses propres sujets. Thoreau a souhaité organiser les Indian Notebooks de la manière thématique suivante : Voyages / Physique / Musique / Jeu / Demeures / Fêtes / Nourriture / Charité / Coutumes funéraires / Tradition & histoire / Morale / Coutumes de mariage / Artisanat / Éducation / Habits / Peinture / Argent / Noms / Gouvernement / Traitement des prisonniers / Marins / Connaissance des bois / Chasse / Nourriture / Pêches / Superstitions & Religions / Médecine / Guerre / Langage / Reliques indiennes / Arts dérivés des Indiens.[13] A la lumière de la classification thématique susmentionnée, on constate que ces thèmes couvrent une bonne partie des aspects culturels propres aux populations amérindiennes et peuvent nous faire penser que, dans l’hypothèse où Thoreau aurait décidé de tirer un livre de ses Indian Notebooks, cela aurait pu être un livre d’anthropologie culturelle.

En effet, on constate, dans de nombreux extraits cités par l’auteur, qu’il avait tendance à relever les faits culturels plus que les faits historiques. Par exemple, à partir du livre de Convers Francis, Life of John Eliot : The Apostle to the Indians, Thoreau note qu’« Autrefois [les Indiens] pratiquaient la polygamie » (« Formerly practiced polygamy »[14]) alors que le texte original mentionne que « les Indiens avaient appris grâce à leur nouvelle religion à renoncer à la polygamie » (« The natives had learned from their new religion to renounce polygamy. »[15]) Le texte original a pour but de montrer que les Indiens ont été changés par le Christianisme mais Thoreau ne retient que leurs coutumes avant qu’ils n’aient été convertis. Ceci peut être vu comme une volonté de la part de l’auteur transcendantaliste de débarrasser le texte original du point de vue des colons, qui souhaitaient montrer les bienfaits de la conversion religieuse, afin de faire ressortir les coutumes des Indiens avant l’acculturation européenne. En somme, on peut dire que Thoreau fait ressortir le fait culturel anthropologique et déconstruit le point de vue ethnocentrique de ce récit. Mais l’œuvre de l’auteur transcendantaliste n’est pas exempt de toute forme d’ethnocentrisme.

Aspects anthropologique et ethnologique des Indian Notebooks

Peu d’auteurs ont étudié les Indian Notebooks ainsi que l’aspect anthropologique et ethnologique du travail de Thoreau. Cependant, parmi les auteurs ayant consacré une étude entière à ce sujet, nous pouvons citer Joshua D. Bellin, Richard Fleck, Albert Keiser, Robert Sayre et Lawrence Willson. Ces auteurs ont des points de vue affirmés sur le sujet mais parfois divergents.

Une des premières études consacrées à ce sujet fut un article écrit par Albert Keiser et publié en 1928. Keiser pensait que Thoreau n’était pas véritablement un anthropologue : « it does not specifically indicate the fact that everywhere Thoreau looked at the Red Man from the standpoint of the anthropologist, the naturalist, and the literary man. »[16] Cependant, il considérait que Thoreau était un « observateur et juge impartial » (« Affinities said to exist between the Indian and other languages are looked upon as doubtful by such an unprejudiced observer and judge as Thoreau. »[17])

Dans un article publié une trentaine d’années plus tard, Lawrence Willson a montré que Thoreau n’était pas un anthropologue aguerri («  he was not a trained anthropologist »[18]) mais un étudiant en anthropologie. Dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres domaines scientifiques qui intéressèrent Thoreau, Willson note qu’il n’était pas un expert mais qu’il possédait des connaissances qui faisaient de lui plus qu’un amateur éclairé.[19]

En 2007, Fleck écrit que si Thoreau avait écrit un live sur les Indiens, le traitement que ces derniers ont reçu au XIXe siècle aurait probablement été différent: « But, had he lived to write his poetic and scholarly Indian book, our deplorable treatment of the red man during the nineteenth century may have been modified. »[20]

Joshua David Bellin, qui a publié en 2008 un article intitulé « In the Company of Savagists: Thoreau’s Indian Books and Antebellum Ethnology », défend une thèse tout à fait différente à propos des Indian Notebooks et du travail d’anthropologue de Thoreau : « they [the Indian Books] reveal Thoreau to have been unable or unwilling to liberate himself from the dominant mid-century complex of beliefs concerning American Indians, their relationship to Euro-American civilization, and their ultimate fate. »[21] En prenant le contre-pied de Keiser, de Sayre et de Fleck, l’auteur veut montrer que le travail de Thoreau sur les Indiens d’Amérique était biaisé par les idéaux anthropologiques développés au XIXe siècle.

 Alors que les écrits de Thoreau abondent de réflexions anthropologiquement intéressantes, notamment sur les mythes, la religion ou encore la linguistique, nous nous focaliserons dans cet article sur la manière dont ont été traité les concepts antagonistes de « civilisation » et de « primitivisme » dans l’œuvre de l’auteur transcendantaliste. Ces notions peuvent nous aider à déterminer quel anthropologue et ethnologue Thoreau était (ou aurait souhaité être) car elles représentaient le cœur de l’anthropologie au XIXe siècle. Nous nous attacherons à relever la présence d’ethnocentrisme dans le travail de Thoreau, notamment à travers la notion de déterminisme racial. Puis, nous verrons que le travail de Thoreau sur les Indiens d’Amérique était plus complexe car le côté transcendantaliste de l’auteur prenait parfois le pas sur l’impartialité nécessaire à son travail anthropologique.

Ethnocentrisme et déterminisme racial

Le déterminisme racial est un des concepts les plus présents dans l’anthropologie américaine au XIXe siècle. Henry Rowe Schoolcraft comme Samuel George Morton ont avancé des arguments prônant la différence entre les races et la supériorité des hommes blancs sur d’autres peuples. Par exemple, en 1857, dans le 6ème volume des Historical and Statistical Information, Schoolcraft met en parallèle le mode de vie indien avec celui des Euro-Américains en expliquant que l’homme n’a pas été créé pour être sauvage mais pour être civilisé et que les Indiens – les sauvages – représentaient un déclin en comparaison avec les hommes dits « civilisés » : « Man was created, not a savage, a hunter, or a warrior, but a horticulturist and a raiser of grain, and a keeper of cattle – a smith, a musician – a worshipper, not of the sun, moon, and stars, but of God. The savage condition is a declension from this high type. »[22]

Les écrits de ces auteurs ont été cités de nombreuses fois par Thoreau dans les Indian Notebooks et la présence du concept de déterminisme racial dans les carnets de notes de Thoreau mettrait à mal son éventuel statut de précurseur de l’anthropologie moderne.

Selon Bellin, le travail anthropologique de Thoreau était principalement biaisé et peu innovant car l’auteur transcendantaliste considérait les Indiens comme une race différente et inférieure aux hommes blancs dits « civilisés » : « [the Indian Books] are marked by the interlocking set of biases characteristic of antebellum ethnology, with its conviction that the Indians were a separate and unequal race. »[23]

Effectivement, on trouve dans l’œuvre de Thoreau des exemples avalisant le point de vue de Bellin. Dans son Journal, Thoreau a décrit les Indiens comme des « hommes sauvages » (« Indians are wild men. »[24]) Cela montre que l’auteur transcendantaliste considérait les Indiens comme des hommes sauvages et faisait une distinction entre primitif et civilisé. Il convient de préciser que cette distinction était courante au XIXe siècle et que l’étude des Indiens n’était que rarement envisagée autrement qu’à travers l’opposition des notions de civilisation et de sauvagerie. La distinction faite par Thoreau dans cet exemple n’est donc pas nécessairement représentative d’une conviction profonde de l’auteur et pourrait être considérée comme une idée exprimée à l’aide de termes courants pour l’époque.

Cependant, dans l’exemple qui suit, il est incontestable que certains arguments de Thoreau n’étaient pas seulement exprimés grâce à des termes dix-neuvièmistes, mais profondément influencés par le concept du déterminisme racial. Thoreau considérait que la différence raciale entre les Indiens et les Euro-Américains était indéniable comme le montre le passage suivant tiré de l’essai inachevé présent dans les Indian Notebooks : « What a vast difference between a savage & a civilized people. At first it appears but a slight difference in degree—and the savage excelling in many physical qualities—we underrate the comparative general superiority of the civilized man. »[25] En 1858, Thoreau a aussi développé la même idée dans son Journal : « Who can doubt this essential and innate difference between man and man, when he considers a whole race, like the Indian, inevitably and resignedly passing away in spite of our efforts to Christianize and educate them? »[26] Dans le passage issu des Indian Notebooks, malgré les qualités que Thoreau attribue aux Indiens, il défend néanmoins la supériorité des hommes civilisés. Dans l’extrait tiré du Journal, la différence raciale entre les Indiens et les hommes civilisés tient, selon l’auteur transcendantaliste, au fait que les Indiens sont en « voie d’extinction ». Cette évocation de l’Indien comme une race quasi-éteinte était commune au XIXe siècle et était une vision subordonnée aux postulats introduits par l’ethnologie évolutionniste qui a notamment été développée dans l’œuvre de Lewis Henry Morgan ou encore dans celle de Schoolcraft. Selon l’ethnologie évolutionniste, les sociétés humaines suivaient différents stades d’évolution (sauvagerie, barbarie, civilisation), chaque nouveau stade supplantant fatalement le précédent. Thoreau semble donc adhérer à cette vision de l’Indien qui, représentant une civilisation sauvage, était condamné, voir destiné, à être supplanté par la civilisation.

En prenant en compte la présence de concepts développés par l’ethnologie évolutionniste dans l’œuvre de l’auteur transcendantaliste, il apparaît comme évident que Thoreau s’inscrivait bien dans les courants de pensées anthropologiques prépondérants du XIXe siècle.

Primitivisme et transcendantalisme

Pourtant, la manière dont Thoreau percevait les concepts de race, de civilisation et de primitivisme est intrigante. D’une part l’auteur semble n’avoir aucun doute sur la différence raciale entre Indiens et hommes blancs. Cependant, il défend aussi les valeurs des sociétés primitives (ce qui n’est pas incompatible avec le déterminisme racial mais qui est paradoxal, voire même contradictoire, avec l’idée que les Indiens étaient inférieurs aux hommes blancs).

Un exemple qui illustre bien ce paradoxe se trouve dans son Journal : « [The Indians] seem to me a distinct and equally respectable people, born to wander and to hunt, and not to be inoculated with the twilight civilization of the white man. »[27] Si, en qualifiant les Indiens de peuple distinct, il créait une division raciale entre les blancs et les Indiens, on remarque aussi qu’il les qualifiait de « peuple également respectable », ce qui pourrait nous amener à penser que Thoreau plaçait les sociétés indiennes sur un pied d’égalité avec celle des Euro-Américains. De plus, l’auteur considérait les Indiens comme un peuple qui n’était pas fait pour être civilisé ce qui est, par exemple, à contre-courant de ce que défendait Schoolcraft. En effet, l’anthropologue collectait des informations sur les Indiens pour le compte de l’État américain qui se servait de ces données pour établir ses politiques indiennes (Indian policies). Il paraît donc évident qu’il partageait les mêmes convictions et les mêmes buts que l’État américain en ce qui concernait les Indiens, à savoir, les Indiens devaient être civilisés ou leurs sociétés disparaîtraient.

Bien que Thoreau ait cité Schoolcraft de nombreuses fois dans les Indian Notebooks, il ne partageait pas toujours les mêmes opinions que lui, notamment parce qu’il voyait principalement les Indiens comme des hommes primitifs et non comme des sauvages.

Comme l’explique Roy Harvey Pearce dans Savagism and Civilization, l’anthropologie prend un tournant au début des années 1850, principalement grâce aux publications de Lewis Henry Morgan (League of the Ho-Dé-No-Sau-Nee, or Iroquois), la vision anthropologique des Indiens passant de la sauvagerie au primitivisme. La différence fondamentale entre les anthropologues qui considéraient les Indiens comme des sauvages et ceux qui les considéraient comme des hommes primitifs, est que le primitiviste voit la culture amérindienne en tant que remède aux travers de la civilisation Euro-Américaine tandis que le « sauvagiste » prône la supériorité de la civilisation et des hommes civilisés. Si les travaux du primitiviste sont considérés comme une étude plus moderne de l’Indien, le primitiviste continue à appréhender la culture indienne comme une forme antérieure de civilisation[28] et considère généralement l’Indien comme un bon sauvage.

Dans Henry Thoreau and John Muir Among the Indians, Richard Fleck qualifie Thoreau de « primitivist »[29]. En effet, l’auteur transcendantaliste portait un vif intérêt à la manière de vivre et aux valeurs morales des peuples indiens notamment parce qu’il considérait que les Indiens n’étaient pas « domptés et broyés par la société » (« tamed and broken by society. »[30] ). Thoreau éprouvait un certain dégoût pour ce que la société américaine était devenue et c’est dans cet état d’esprit qu’il s’est tourné vers les cultures des Indiens d’Amérique.

Comme Thoreau l’exprime dans son essai Walking, il pense que « C’est dans l’aspect sauvage que réside la sauvegarde du monde. » (« in Wildness is the preservation of the world. »[31]) Thoreau considérait probablement l’aspect primitif des Indiens comme une préservation de ce que fut l’homme avant de devenir civilisé. L’auteur transcendantaliste percevait cette préservation comme un aspect positif. L’état de nature préservé dans lequel semblait se trouver les Indiens leur conférait les qualités dont les hommes civilisés avaient été dépossédés par le processus de civilisation. François Hartog écrit d’ailleurs à ce sujet qu’« un fruit sauvage est un fruit naturel. Tout ce qui relève de la domestication et de la culture est aussitôt marqué négativement comme un artifice, abâtardissement, produit de notre goût corrompu. »[32] Thoreau était donc attaché au concept du Bon Sauvage car il représentait à ses yeux une forme d’idéal : l’Indien était un homme « naturel » dans le sens où la civilisation ne l’avait pas corrompu. Pour François Specq, Thoreau portait de l’intérêt au côté primitif des Indiens dans le but de trouver « un modèle d’harmonie et de complétude. »[33]

Le point de vue de Henry Rowe Schoolcraft est donc assez différent de celui de Thoreau, Pearce considérant que Schoolcraft développait principalement l’idée que ce qui liait les Indiens à la sauvagerie et les empêchait de devenir civilisé était justement l’aspect sauvage de leur vie (« what holds the Indians to savagism is the wildness of their life. »[34]) Tandis que dans l’œuvre de Thoreau, on constate que l’aspect primitif de la vie des Indiens est érigé en modèle contre les travers de la civilisation.

Ce passage extrait de The Maine Woods et décrivant les prescriptions de Thoreau concernant la manière dont un homme devrait mener sa vie, montre aussi que le transcendantaliste élevait en modèle un mode de vie plus « primitif » : « Thus a man shall lead his life away here on the edge of the wilderness, on Indian Millinocket stream, in a new world, far in the dark of a continent, and have a flute to play at evening here, while his strains echo to the stars, amid the howling of wolves ; shall live, as it were, in the primitive age of the world, a primitive man. »[35]

Effectivement, Thoreau peut être considéré comme un primitiviste défendant les us et coutumes amérindiens et condamnant la société euro-américaine. Dans son Journal, Thoreau utilise la figure du jardinier comme métaphore de la civilisation et compare les rapports que celui-ci entretient avec la nature qu’il qualifie de « vulgaires et idiots » alors qu’il qualifie les rapports des Indiens avec la nature de « nobles et loyaux. »[36]

En 1859, dans un autre passage du Journal, Thoreau montre qu’il ne considère pas les Indiens comme des sauvages en les qualifiant de « soi-disant sauvage » : « It is the spirit of humanity, that which animates both so-called savages and civilized nations, working through a man, and not the man expressing himself, that interests us most. The thought of a so-called savage tribe is generally far more just than that of a single civilized man. »[37] Cette citation mérite toute notre attention car d’une part Thoreau dit que la pensée des Indiens est généralement plus juste que celle de l’homme civilisé et d’autre part l’auteur transcendantaliste affirme que pour lui il n’y a pas de distinction profonde entre les Indiens et les hommes dits « civilisés » car ils sont tous deux animés par le même « esprit de l’humanité », autrement dit par la même âme. Dans ce passage, Thoreau dépasse le caractère racial de la distinction entre homme civilisé et homme primitif.

Transcender les préjugés raciaux de son époque n’est que la première étape du grand projet de Thoreau, à travers laquelle il en vient à considérer les êtres humains dans leur ensemble et en viendra, à terme, à transcender l’homme et l’individualité de celui-ci pour ne plus prendre uniquement en compte l’âme humaine mais l’âme du monde.

L’auteur transcendantaliste semble aussi vouloir montrer que les sociétés primitives ne sont finalement qu’une autre forme de civilisation comme il le dit dans son Journal : « What we call wildness is a civilization other than our own. »[38] Cette réflexion est assez similaire à celle que Montaigne avait faite dans Des Cannibales : « Or je trouve, pour revenir à mon propos, qu’il n’y a rien de barbare et de sauvage en cette nation, à ce qu’on m’en a rapporté, sinon que chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage. »[39]

Thoreau cherchait peut-être à flouter les distinctions entre civilisé et sauvage en mélangeant des aspects de la culture indienne avec des aspects de la culture euro-américaine comme l’a très justement dit Pearce : « So [the transcendentalists] looked hard at the Indian, not to find noble savages, but to establish the possibility of noble civilized men. »[40]

Il y a donc dans les écrits de Thoreau deux points de vue qui paraissent contradictoires mais qui coexistent. Peut-être que Thoreau était tiraillé entre les idéaux anthropologiques prônant le déterminisme racial qu’il lisait dans un nombre considérable d’ouvrages consultés pour remplir les Indian Notebooks et ses valeurs transcendantalistes qui le poussèrent justement à transcender la notion de race.

En étudiant les concepts de civilisation et de primitivisme dans l’œuvre de Thoreau, on se rend compte que l’auteur a tenté de remettre en question la distinction faite entre homme sauvage et homme civilisé comme le montre cet extrait de son Journal : « Why is [it] that we look upon the Indian as the man of the woods? There are races half civilized, and barbarous even, that dwell in towns, but the Indians we associate in our minds with the wilderness. »[41] Thoreau se demande ici pourquoi ce sont les Indiens qui sont qualifiés d’hommes des bois et sont associés à la nature sauvage alors qu’il existe, selon l’auteur, des habitants des villes qui ne sont qu’« à moitié civilisés » et voir même « barbares » mais que l’on considère généralement comme étant civilisés. Finalement, l’auteur transcendantaliste montre que les hommes civilisés sont aussi des sauvages et qu’ils ne valent pas mieux que les Indiens.

Le travail d’anthropologue de Thoreau n’est pas fondamentalement novateur et moderne au regard de la présence du concept de déterminisme racial dans ses écrits. Il est indéniable que Thoreau pensait, tout du moins à une certaine période de sa vie, qu’il existait bien une différence raciale entre les Indiens et les blancs, et que la société de l’homme civilisé était supérieure à celle des Indiens. Cela s’explique en partie par l’influence d’ouvrages tels que ceux de Schoolcraft sur l’auteur transcendantaliste et par le fait qu’il est presque impossible de «  transcender son époque et sa culture »[42] comme le rappelle François Specq. Cependant, si Schoolcraft a beaucoup influencé Thoreau, il existe d’autres ouvrages tels que les Relations des Jésuites qui se trouvent autant (si ce n’est pas plus[43]) cités dans les Indian Notebooks et ces autres écrits ont forcément eu un impact sur son approche des cultures amérindiennes.

Le travail anthropologique de Thoreau se distingue de celui d’autres anthropologues du XIXe siècle. Il reconnaît que les Indiens sont animés par la même âme que les hommes blancs et il va même jusqu’à dire que les pensées des tribus indiennes sont supérieures à celles des Euro-Américains.

Finalement, c’est son approche humaine et transcendantaliste des Indiens qui l’amène à les envisager comme des êtres humains à part entière et non plus comme des sauvages. C’est en cela qu’il était précurseur, peut-être pas précurseur de l’anthropologie moderne, mais précurseur d’une vision plus humaine et plus transcendantale des Indiens d’Amérique.


[1]   Nathaniel HAWTHORNE, ed. Joel Myerson, The selected letters of Nathaniel Hawthorne, Ohio State University Press, 2002, p 107.

[2]   Les Indian Notebooks sont connus sous plusieurs noms : Thoreau les appelait Indian Books mais cette dénomination est problématique car elle induit que ce sont véritablement des livres terminés or, ces réflexions sur les Indiens étant encore à l’état de notes, il paraît plus judicieux de les appeler Indian Notebooks. Robert Sayre a avancé que le terme Indian Books était probablement une contraction de Indian [Commonplace] Books ou Indian [fact] Books. Paul Maher Jr. a choisi de les nommer Extracts Relating to the Indians en se référant à la manière dont la Pierpont Morgan Library les a nommés (chaque volume est cependant appelé Notebook suivi du numéro du volume). Nous les appellerons ici Indian Notebooks pour qu’il soit clair que ce sont des notes de recherches et nous ne traduirons pas ce nom par Carnets Indiens car cela pourrait créer une confusion avec le livre de Herman Hesse.

[3]    Henry David THOREAU, ed. Paul Maher Jr., Extracts Relating to the Indians : Notebook One, Upstart Crow Publishing, 2008.

[4]    Richard FLECK, The Indians of Thoreau: Selections from the Indian Notebooks, The Walden Woods Project, 2007, pp 6-7.

[5]    Henry David THOREAU, Extracts Relating to the Indians: Notebook One, p 21.

[6]    Ibidem, p 58.

[7] Albert KEISER, « Thoreau’s Manuscripts on the Indians », The Journal of English and Germanic Philology, volume 27, N°2, 1928, p 184. Traduction de l’auteur : « Thoreau avait l’intention d’écrire un ouvrage élaboré sur les Indiens d’Amérique et durant plus de dix ans, il s’est occupé de collecter des informations dans toutes les sources disponibles. »

[8]    Robert SAYRE, Thoreau and the American Indians, Princeton, Princeton University Press, 1977, p 118.

[9]    Thierry GILLYBOEUF, Henry David Thoreau : le célibataire de la nature, Paris, Fayard, 2012.

[10]  Richard FLECK, Henry Thoreau and John Muir among the Indians, Handem Archon Books, 1985, p 19. Traduction de l’auteur : « En écrivant à la main ses 2 800 pages des Indian books, je crois qu’une partie importante du but de Thoreau était d’écrire un livre ou une série d’essais sur les Indiens d’Amérique du Nord qui aurait corrigé la vision myope des historiens américains du XIXe siècle en leur donnant pour la première fois une appréciation nord-américaine de son propre continent qui était et est toujours riche en mythologie. »

[11]  Henry David THOREAU, ed Bradford TORREY, Journal, Vol 11, Boston, Houghton Mifflin, 1906, pp 437-38. Traduction de l’auteur : « Certains ont fait des remarques désobligeantes sur les Indiens, les considérant comme une race possédant si peu de compétence et d’esprit, comme étant si bas sur l’échelle de l’humanité et si brutaux qu’ils ne méritaient pas que l’on se souvienne d’eux – les qualifiant seulement de “misérable”, “minable”, “pitoyable” et autres adjectifs similaires. En écrivant leurs histoires de ce pays ils se sont hâtés de rejeter l’humanité (comme ils auraient pu l’appeler) qui jonchait et profanait la côte et l’intérieur des terres. Mais même les animaux indigènes sont pour nous une source inépuisable d’intérêt. Ô combien plus intéressant est alors l’homme indigène américain ! Si les hommes sauvages, bien plus semblables à nous-même qu’ils ne sont dissemblables, ont habité ces côtes avant nous, nous souhaitons savoir spécifiquement quel genre d’homme ils étaient, comment ils vécurent ici, leur rapport avec la nature, leurs arts et leurs coutumes, leurs idées fantasques et leurs superstitions. Ils ont pagayé sur ces courants, ils ont parcouru ces bois, et leurs idées fantasques et leurs croyances sont connectées à la mer et la forêt, ce qui nous concerne autant que les contes orientaux. Il arrive fréquemment que l’historien, bien qu’il prétende à plus d’humanité que le trappeur, l’homme des montagnes ou le chercheur d’or qui tirent sur lui comme sur une bête sauvage, manifeste réellement et pratique une inhumanité similaire envers lui, brandissant un stylo à la place d’un fusil. »

[12]  Richard FLECK, The Indians of Thoreau, p 17. Traduction de l’auteur : « Quel genre de faits, quel genre d’évènements sont ceux qui se sont passés en Amérique avant que le continent soit connu des habitants du vieux monde ? »

[13]  Henry David THOREAU, Extracts Relating to the Indians: Notebook One, p 120.

[14]  Ibidem, p 22.

[15]  Convers FRANCIS et Jared SPARKS, Life of John Eliot: The Apostle to the Indians, Boston, 1836, p 100.

[16]    Albert KEISER, « Thoreau’s Manuscripts on the Indians », p 192. Traduction de l’auteur : « Cela n’indique pas spécifiquement le fait que Thoreau regardait le peau-rouge du point de vue de l’anthropologue, du naturaliste et de l’homme littéraire. »

[17]  Ibidem, p 187. Traduction de l’auteur : « Certains disaient qu’il existait des similitudes entre la langue indienne et d’autres langages et cette affirmation était considérée comme douteuse par l’observateur et juge si impartiale qu’était Thoreau. »

[18]   Lawrence WILLSON, « Thoreau: Student of Anthropology », American Anthropologist, New Series, volume 61, N°2, 1959, p 287.

[19]  Ibidem, p 279.

[20]  Richard FLECK, The Indians of Thoreau, p 12. Traduction de l’auteur : « Cependant, s’il avait vécu plus longtemps pour écrire un livre indien poétique et rigoureux, le traitement déplorable que nous avons fait subir à l’Indien au XIXe siècle aurait pu être modifié. »

[21]   Joshua David BELLIN, « In the Company of Savagists: Thoreau’s Indian Books and Antebellum Ethnology », The Concord Saunterer: A Journal of Thoreau Studies, New Series, volume 16, 2008, p 2. Traduction de l’auteur : « [Les Indian Books] révèlent que Thoreau n’a pas voulu ou a été incapable de se libérer des croyances dominantes du milieu du XIXe siècle concernant les Indiens d’Amérique, les relations qu’ils entretenaient avec la civilisation euro-américaine et leur ultime destin. »

[22]   Henry Rowe SCHOOLCRAFT, Historical and statistical information : respecting the history, condition and prospects of the Indian tribes of the United States, volume 6, Philadelphie, Lippincott & Co, 1857, p 27. Traduction de l’auteur : « L’homme n’a pas été créé pour être un sauvage, un chasseur ou un guerrier, mais pour être un horticulteur, un agriculteur et un éleveur de bétail – un forgeron, un musicien – un adorateur de Dieu et non du soleil, de la lune et des étoiles. La condition de sauvage est un déclin par rapport à ce type d’être humain élevé. »

[23]  Joshua David BELLIN, « In the Company of Savagists », p 2. Traduction de l’auteur : « [Les Indian Books] sont marqués par l’entrelacement d’idées biaisées, caractéristiques de l’ethnologie antérieure à la Guerre de Sécession, qui avait la conviction que les Indiens étaient une race inférieure et à part. »

[24]  Henry David THOREAU, Journal, volume 7, p 153.

[25]  Richard FLECK, The Indians of Thoreau, p 16. Traduction de l’auteur : « Quel immense différence entre un peuple sauvage et un peuple civilisé. Au premier abord la différence est peu flagrante – et le sauvage ayant de nombreuses qualités physiques – nous sous-estimons en comparaison la supériorité générale de l’homme civilisé. »

[26]  Henry David THOREAU Journal, volume 10, p 251. Traduction de l’auteur : « Qui peut douter de la différence essentielle et innée entre un homme et un autre, lorsqu’il considère une race toute entière, comme celle des Indiens, qui s’éteint de manière inévitable et résignée en dépit de nos efforts pour les convertir au Christianisme et pour les éduquer? »

[27]  Henry David THOREAU, Journal, volume. 1, p 445. Traduction de l’auteur : « [Les Indiens] me semblent être un peuple distinct et également respectable, né pour errer et chasser et non pour être civilisé par l’homme blanc. »

[28]   Roy Harvey PEARCE, Savagism and Civilization : a Study of the Indian and the American Mind, Baltimore, The Johns Hopkins Press, 1967, p 130.

[29]  Richard FLECK, Henry Thoreau and John Muir, p 26.

[30]  Henry David THOREAU, Journal, volume 2, p 448.

[31]  Henry David THOREAU, « Walking » in Civil Disobedience and Other Essays, Dover Thrift Editions, 1993, p 61.

[32]  François HARTOG, Anciens, modernes, sauvages, Paris, Galaade Éditions, 2005, p 40.

[33]  Henry David THOREAU, Les forêts du Maine, traduit par F. SPECQ, Paris, Editions Rue d’Ulm, 2004, p 473.

[34]  Roy Harvey PEARCE, Savagism and Civilization, p 121. Traduction de l’auteur : « c’est l’aspect sauvage de leur vie qui retient les Indiens dans un état de sauvagerie. »

[35]  Henry David THOREAU, The Maine Woods, Digireads Publishing, 2006, p 37. Traduction de l’auteur : « Ainsi un homme doit mener sa vie ici, au seuil de la nature sauvage, sur le courant du Millinocket indien, dans un nouveau monde, enfoncé dans les profondeurs obscures d’un continent, et doit avoir une flûte pour jouer le soir, tandis que sa mélodie fait écho aux étoiles, parmi les hurlements des loups ; il doit vivre, comme il vivait, à l’âge primitif du monde, en homme primitif. »

[36]  Henry David THOREAU, Journal, volume 1, p 473.

[37]  Henry David THOREAU, Journal, Vol 11, p 438. Traduction de l’auteur : « C’est l’esprit de l’humanité, qui anime à la fois les soi-disant sauvages et les nations civilisées, agissant à travers l’homme, et non l’homme qui s’exprime, qui nous intéresse le plus. La pensée d’une soi-disant tribu de sauvage est généralement bien plus juste que celle d’un seul homme civilisé. »

[38]  Ibidem, p 450.

[39]    Michel de Montaigne, Œuvres Complètes, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1962, p 203.

[40]  Roy Harvey PEARCE, Savagism and Civilization, p 150. Traduction de l’auteur : « Donc, [les transcendantalistes] étudiaient l’Indien avec insistance, pas pour trouver des bons sauvages, mais pour établir la possibilité de bons hommes civilisés. »

[41]  Henry David THOREAU, Journal, volume 5, p 457.

[42]  Henry David THOREAU, Les forêts du Maine, traduit par F. SPECQ, p 449.

[43]  Albert KEISER, « Thoreau’s Manuscripts on the Indians », p 189/90 ; Les citations de Schoolcraft remplissent 212 pages des Indian Notebooks et les citations provenant des Relations des Jésuites occupent 330 pages des Indian Notebooks.